ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

du confentement de Godefroi leur nouvel abbé, al-
lerent à Rome, & porterent leur plainte au pape Ur-
bain II. dans le concile dés l'année
1099. difant que
par la retraite de Robert la religion étoit renversée
dans leur monaftere, & qu'ils étoient devenus odieux
aux feigneurs & à leurs autres voifins. Le pape cédant
à leur importunité & au confeil des évêques, écrivit à
l'archevêque de Lion de tirer s'il étoit poffible, Ro-
bert de fa folitude pour le renvoïer à son monaftere,
finon de faire en forte que les habitans de la nouvelle
folitude demeuraffent en repos, & que ceux qui étoient
dans le monaftere vêcuffent régulierement. L'arche-
vêque de Lion aïant reçû cette lettre du
pape &
étant follicité par l'abbé Godefroi & par les moi-
nes de Molefne, affembla quatre évêques, Norgold
d'Auftun, Gautier de Challon, Bertrand de Mascon,
Pons de Bellai, tous fes fuffragans avec trois abbez,
Pierre de Tournus, Jarenton de Dijon & Gofferan
d'Aifnai, & Pierre camerier du pape; & par leur con-
feil il écrivit ainfi à Robert évêque de Langres.

AN. 1099.

Nous avons refolu de rendre Robert à l'église de Molefne, à condition qu'avant que d'y retourner, il ira à Chalon pour remettre à l'évêque le bâton paftoral qu'il a reçû lorfqu'il a promis obéïffance, fuivant la coûtume des abbez ; & il déchargera les moines du nouveau monaftere de l'obéïffance qu'ils lui ont promise en qualité d'abbé, comme l'évêque l'en quittera à fon égard. Nous avons auffi permis à tous ceux des moines du nouveau monaftere, qui voudront le fuivre, de retourner avec lui à Molefne; à condition que deformais ils ne s'attireront ni fe recevront les uns les autres, finon en tant que faint Benoist permet de recevoir les moines d'un monaftere Tome XIII. Q999

AN. 1099.

C. 17,

LXV.

connu. Nous vous renvoïons enfuite Robert, pour le rétablir abbé de Molefne; à la charge que s'il quitte encore cette églife par legereté, on ne lui donnera point de fucceffeur du vivant de Godefroi. Quant à la chapelle de l'abbé Robert, & tout le refte qu'il a emporté de Molesne, nous voulons que tout demeure aux freres du nouveau monaftere, horfmis un breviaire qu'ils garderont jufques à la faint Jean pour le tranfcrire. C'est la premiere fois que j'ai remar qué ce mot de Breviaire, pour signifier un livre ecclesiastique.

Ce jugement de l'archevêque de Lion fut executé, & aprés que l'abbé Robert fut retourné à Molefne, les moines de Cifteaux s'affemblerent & élurent pour leur abbé Alberic, homme inftruit des lettres divines & humaines, qui avoit été prieur à Molesne & l'étoit encore à Cifteaux; & qui avoit beaucoup travaillé pour ce nouvel établissement, jusques à fouffrir des affronts, des coups & la prifon. Il gouverna l'abbaïe de Cifteaux neuf ans & demi.

Geoffroi, abbé de Vendôme, étant à Rome, fit son Find'UrbainII. poffible pour juftifier Ives de Chartres auprés du pape Geoffr.u.p.18. Urbain. En revenant il fejourna cinq jours à Lion chez l'archevêque Hugues, où il apprit que le nouvel archevêque de Sens Daïmbert, avoit fait fa paix avec ce prélat, & lui avoit promis toute obéiffance comme à fon primat, fans qu'Ives de Chartres eut été compris dans cette paix. Il avoit même défavoüé les lettres écrites par Ives en fon nom. Geofroi aïant appris cela, travailla comme ami particulier d'Ives de Chartres, à le reconcilier avec l'archevêque de Lion & fon clergé qui lui étoient fort opposez. C'eft ce qui paroît par la lettre qu'il en écrivit à Ives.

Bertold. an.

Depuis le concile de Rome de l'an 1099. nous ne AN. 1099. trouvons plus rien du pape Urbain II. finon qu'il mourut à Rome le vingt-neuviéme de Juillet de la même année, aprés avoir tenu le faint fiege onze ans, quatre mois & dix-huit jours. Guibert abbé de No- Gefta.Diper.FI, gent, qui vivoit alors, dit qu'il se fit à son tombeau plufieurs miracles.

1009.

liv. 2. init.

[ocr errors]

LXVI.

Prife de Jeru

falem.

Sup. liv. LXIV.".$8.

c. 19.

Quinze jours avant la mort du pape Urbain, les croifez avoient pris Jerufalem, ce qui s'étoit ainfi paffé. Aprés la prise d'Antioche, ils firent encore quelques conqueftes & les ambaffadeurs qu'ils avoient envoïez en Egipte au calife Fatimit, revinrent avec Guill. Tyr.VII. des ambaffadeurs de ce prince. Il avoit recherché l'alliance des Francs, pour lui aider à chasser de la Syrie, les Turcs fes ennemis, qui reconnoiffoient le calife de Bagdad; mais profitant des victoires des Francs, il reprit Jerufalem fur les Turcs qui l'avoient ôtée à fon pere trente-huit ans auparavant; & déclara aux Francs, que les chofes aïant changé de face, il prétendoit garder cette ville; mais qu'il permettoit aux Francs d'y venir vifiter les faints en toute fûreté, pourvû qu'ils n'y entraffent pas plus de deux ou trois cens à la fois & fans armes.

Les feigneurs Francs prirent cette réponse pour une dérifion, & répondirent au calife d'Egipte, qu'il ne leur feroit pas la loi, & qu'ils iroient en corps d'armée à Jerufalem. Ils y marcherent en effet & arrive- Guill. VIII.c rent devant la ville le feptiéme de Juin 1099. Ilsn'a- " voient plus de gens de fervice que vingt mil hommes de pied & quinze cens chevaux, & on tenoit que dans la ville il y avoit quarante mille hommes bien armez, avec toutes fortes de munitions, & les affiégez avoient comblé les fontaines & les citernes, jufQqqq ij

AN. 1999. ques à cinq ou fix mille à l'entour. Toutefois le fiege ne dura que cinq femaines, & les croifez firent de tels efforts, qu'ils prirent Jerufalem le vendredi quinziéme de Juillet, à trois heures aprés midi; ce qui fut remarqué comme étant le jour & l'heure de la mort de Jesus-Christ.

¡17.18. &c.

Le duc Godefroi entra le premier dans la ville avec fon frere Eustache, paffant fur la muraille par une tour de bois qu'on en avoit approchée. Ensuite le comte de Touloufe, qui étoit à une autre attaque, & enfin toute l'armée. On fit main-baffe fur les infidelles, dont la ville étoit pleine, & le maffacre fut horri ble. On tua non-feulement ce qui fe trouva dans les ruës, mais ceux qui s'étoient réfugiez dans la mosquée bâtie à la place du Temple, où l'on en tua environ dix mille, & autant dans le refte de la ville. Tout nageoit dans le sang, & les vainqueurs fatiguez du carnage, en avoient horreur eux-mêmes. Aprés qu'on eut donné les ordres les plus preffans pour la fûreté de la ville, ils quitterent leurs armes & leurs habits pleins de fang, en prirent de plus propres, laverent leurs mains & marcherent nuds pieds, en gemiffant & répandant des larmes pour vifiter les faints lieux, particulierement l'église du faint fepulchre. Ils y furent reçûs par le clergé & le peuple de la ville, c'est-àdire, le peu de Chrétiens du païs qui y étoient ref

tez;

& qui rendant graces à Dieu de leur délivrance, vinrent au devant des feigneurs Francs, avec les croix & les reliques, & les conduifirent dans l'églife, chantant des hymnes & des cantiques fpirituels.

C'étoit un fpectacle merveilleux, de voir avec quelle devotion les croisez visitoient & baifoient les vestiges des souffrances du Sauveur, Ce n'étoit que lar

AN. 1099.

mes & cris de joïe; ce n'étoit qu'actions de grace de
voir leur pelerinage fi heureusement accompli, &
gouter le fruit de leurs travaux : les plus fpirituels fe
reprefentoient la felicité de Jerufalem celefte, par
le plaifir qu'il reffentoient de voir la terreftre. Les
uns confeffoient leurs pechez, avec vœu de n'y plus
retourner. Les autres répandoient de grandes libera-
litez fur les pauvres, vieux & infirmes, s'eftimant
trop riches d'avoir vû cet heureux jour. D'autres vifi-
toient les lieux faints à genoux nuds : chacun s'effor-
çoit de rencherir sur la pieté des autres. Les évêques
& les prêtres offroient le faint facrifice dans les égli-
fes, priant pour le peuple, & rendant graces à Dieu
d'un si grand bienfait. On ordonna de celebrer à
fi
perpetuité le jour de cette reduction, par une fête
folemnelle. Les Chrétiens du païs aïant reconnu
Pierre l'Ermite qu'ils avoient vû à Jerufalem quatre
ou cinq ans auparavant, fe mettoient à
genoux de-
vant lui, & ne favoient comment lui témoigner leur
reconnoiffance de la liberté qu'il leur avoit procurée.
Le patriarche étoit allé dans l'île de Chipre, chercher
des aumônes pour païer les impofitions dont les in-
fidelles accabloient fon peuple, & empêcher ainfi la
destruction des églifes. Il ne favoit rien de ce qui fe
paffoit à Jerusalem.

c. 23.

LXVII

Huit jours aprés la conquête, les feigneurs s'af- Godefroide B. femblerent, pour choisir un d'entre eux qui fut roi roi. de la ville & du païs. Comme ils étoient enfermez Lib XI c. I. pour déliberer, quelques-uns du clergé demanderent à entrer & leur dirent: Le fpirituel doit aller devant le temporel : c'eft pourquoi nous croïons que l'on doit élir un patriarche avant que d'élire un roi : autrement nous déclarons nul tout ce que

Qqqq iij

« ÀÌÀü°è¼Ó »