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FABLES

DE

M. LE BRUN,

LIVRE TROISIE'ME.

FABLE PREMIERE.

L'AIGL E.

A

Monfieur le Comte d'▲.......

T

OI, qui fuis pas à pas la raison qui

ΟΙ,

t'éclaire;

Et qui de courtifan devenu folitaire,

Etablis ton séjour dans nos champs fortunez; Loin du trouble & du bruit, revois tes Dieux

Pénates

Dés ton enfance abandonnez.

Que tes oreilles délicates

A mes vers daignent le prêter:
Tu peux à loifir méditer

Le fens mystérieux que ma Fable envelope:
Jadis l'ingénieux Efope

De ces fages leçons fit voir l'utilité.

Sur ce ton la morale avec grace s'explique;
Ce badinage allégorique

N'avilit point la vérité.

L'Aigle las, ennuyé de porter le tonnerre
Dont le maître abfolu des Cieux

Epouvante & punit les crimes de la terre ;
Quitta cet emploi glorieux;

Et préférant à cet honneur fuprême
Que briguoit Ganiméde même,

Son repos, & fa liberté ;.

Il voulut, des grandeurs fagement dégoûté, Effaier de l'indépendance.

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Il prend l'effor, & vient habiter les forêts.

Dans ces paifibles lieux où regne l'innocence,

D'un bonheur fans mélange il goûta les attraits.

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Que dans cette retraite il porta peu

d'envie,

Aux biens chimériques de ceux

Qui devant la fortune, efclaves faftueux,
Fléchiffent les genoux pendant toute leur vie,
Contens, en apparence, en effet, malheureux!
Là, comme dans un port à l'abri des orages,
Il ne craignoit plus les naufrages

Dont l'immortalité n'exempte pas les Dieux.
Il avoit vû Neptune errant dans la Phrygie;
Apollon obligé de fuir en Theffalie;
Vulcain précipité des Cieux.

Inftruit par leur difgrace,il apprit à contraindre Ses mouvemens ambitieux;

Et que le plus haut rang n'eft pas le moins à craindre.

Vous, qui de vieillir prés des Grands

Vous êtes fait une habitude,

Joüiffez fur vos derniers ans

Des charmes de la folitude.
Defcendez du rang où le fort
Vous a fait monter; fans attendre
Qu'un coup imprévu de la mort

Vous en faffe bientôt defcendre.

Croyez-moi, la fortune & l'amour n'ont qu'un

tems;

A des retours fâcheux leurs faveurs font fu

jetes:

L'une haït les vieux Courtifans;
L'autre fuit les vieilles coquetes.

M

FABLE II

SOCRATE, & XANTIPPE.

RATE, Philofophe eftimé dans la

SOCRATE

Grece

Par fa fcience & fa fageffe,

Eut pour femme Xantippe: hélas, qu'il en

fouffrit!

Femme, non, je n'ai

pas bien dit,

Je me trompois ; Lecteur, je vous en fais ex

cufe,

Pardonnez-moi, le plus jufte s'abuse. Xantippe étoit un diable en femme travefti, Pis encor. Que de fois déplorant fa mifere,

Elle eût

Du choix que l'hymen lui fit faire
Le Bonhomme s'eft repenti!

par

fes travers, & par fon infolence

De tout autre que lui lafsé la patience.
A fon acariatre humeur

11 n'oppofoit avec conftance.

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