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Teul folide & vrai bonheur de l'homme. Elle fournit des
armes à la Religion, fait admirer la fageffe du Créateur
dans fes ouvrages, excite dans un cœur chrétien les plus
vifs tranfports de refpect, de reconoiffance & d'amour, pour
cette Majefté bienfaifante, qui fe fait fentir de toutes parts,
& dont les perfections infinies font peintes jufque dans les
plus foibles productions de la nature. Si les fyftèmes & les
hypothèses mêmes de physique ocafionoient des fentimens fi
purs; ne feroit-il pas jufte de fe réconcilier avec les uns &
les autres ? Quand les systèmes ne
ne meneroient pas fi direc-
tement à Dieu : ne fufiroit-il pas qu'ils lui fuffent raportés par
amour, pour être irrépréhensibles : puifqu'on ne fauroit rien
Lui raporter de mauvais

:

Mais fans infifter fur la fin des fyftèmes ; à ne les confidé rer, que du côté des moyens les plus propres à faciliter l'aquifition des fciences : n'a-t-on pas réduit avec grand fuccès les animaux, les végétaux, les minéraux en claffes, genres, fou-genres, espèces? Quoiqu'on n'ait pas encore ateint à cette précifion, capable de fixer la fingularité & la bifarerie de certains êtres, qui fe refusent opiniatrément aux affociations, auxquelles on voudroit les agréger les fyftèmes plus ingé nieux les uns que les autres, inventés pour tout affujétir à des dénombremens fcientifiques, ne laifsent pas d'avoir leur mérite. Leur utilité fe manifefte, à proportion qu'ils aplaniffent plus de dificultés, qu'ils fervent à mettre plus d'ordre & d'enchaînement dans nos idées. Si fous ce coup d'œil, on peut réduire en système certaines portions des ouvrages du Créateur; on peut à plus forte raifon y foumettre ceux des créatures, les divifer, les fubdivifer, en décrire les ufa-ges, les goûts, les modes, conformément au génie des divers fiècles & des diférentes nations. Ce que l'on peut en général, par raport aux fciences & aux arts, on le peut en particulier par raport à celui d'écrire. Il n'en eft point, qui ait porté plus loin la variété, qui ait plus fouvent changé. de forme, qui ait éprouvé plus de viciffitudes. Quelques travaux que de très-habiles gens aient entrepris en ce genre; tout refte encore à faire du côté de la méthode. Ce font des matériaux épars, qu'il faut raffembler, pour en conftruire an édifice, où règne l'ordre, la fymmétrie & l'unité.

II. PARTIE
SECT III

II. PARTIE.
SECT. III.

Parmi les diftributions diverses, dont il eft fufceptible nous donnons la préférence à celle, dont l'enfemble réunit plus de fimplicité & de nobleffe avec plus de comodités. On aime mieux tâcher de mettre les claffes des écritures dans un bel ordre, que de les ramener à des idées trop fyftémati ques. Rien de plus fimple, rien de moins afecté, que la diftribution de nos écritures. Les marbres & les bronzes d'une part, les manufcrits de l'autre, enfin les actes & les diplomes les divifent en autant de claffes. Ce font comme les trois regnes de la nature, où fe trouve renfermé tout ce qui végète, tout ce qui vit, & tout ce qui refpire. Ces grands objets fixent tout d'un coup les idées, fe laiflent faifir fans éfort, gravent dans la mémoire des traces profondes & prefqu'inéfaçables.

La diftribution des écritures en majufcules, minufcules & curfives n'a rien de fi faillant. D'ailleurs chacune d'entr'elles fe réproduit fouvent fur les marbres & les bronzes, dans les manuscrits, dans les diplomes. On les voit toutes concourir plus d'une fois dans la même pièce, dans la même page. A s'en tenir à cette diftribution; le paffage feroit fréquent des marbres aux manufcrits, & des diplomes aux bronzes. De-là naitroit la confufion & le défordre dans les idées au lieu qu'en fuivant notre méthode, tout eft à sa place, tout favo rife les opérations de la mémoire. Nous commençons donc les écritures lapidaires & métalliques, nous continuons par celles des manufcrits, nous finiffons par celles des chartes. Leurs mêlanges enfantent des fubdivifions, comme leurs diférences produifent des genres & des espèces.

par

Que tout y foit réglé fur la nature des chofes ; fans que jamais il s'y gliffe rien d'arbitraire: on ne doit pas l'exiger en rigueur, nous n'ofons pas même l'efpérer. Il eft affez di ficile de réduire en méthode des ufages, où le caprice des nations & des particuliers eut tant de part; fans laiffer rien échaper, qui s'en reffente. Les productions de la nature, toutes formées & difpofées qu'elles font par une fageffe fuprème, n'ont pu jufqu'à ce jour être expofées fyftématiquement, fans mêlange de vues & de divifions arbitraires. Si c'est un défaut dans la description des êtres créés, & ordonés avec tant de poids & de mefure; il est affurément fort léger, s'il

SECT. III.

n'est pas nul, dans un fystème de modes, de manières & de raports, auxquels le hafard plutôt qu'aucun deffein pré- II. PARTIE. médité semble avoir donné naissance. Mais quand même ce feroit un vrai défaut, il est peutêtre néceffaire, il eft au moins racheté par des avantages bien réels. Quand ce défaut devroit être mis uniquement fur notre compte; tout le fuccès poffible, du côté de la précision, fut-il ordinairement le prix d'un premier coup d'effai? Combien moins le pouroitil être dans une matière fi vafte & fi dificile ? Le grand objet est de la traiter avec méthode. L'a-t-on trouvée cette mé'thode ? Quelque imparfaite qu'elle foit fupofée, on a touché au but. D'autres moins ocupés pouront la porter au degré de perfection, dont elle eft fufceptible.

Quoiqu'il en foit : les caractères diftinctifs les plus frapans n'étant pas toujours les plus généraux; leur difcernement a dû nous donner beaucoup d'exercice, & n'a pu être le réfultat, que d'une longue fuite de combinaisons.

Mais quel fera le fruit des détails, où nous nous engageons fur les lettres, fur les écritures & tant d'autres objets ? Ce fera de favoir aprécier les antiques, de juger fainement de l'age des anciennes infcriptions, des manufcrits & des chartes fans dates, de rendre homage au vrai, dès qu'il fe préfente, de réprouver le faux avec conoiffance de cause, de banir les critiques téméraires & fuperficielles, de faper le pyrrhonisme hiftorique par les fondemens, de former des antiquaires. Quoique toutes les parties de notre ouvrage coucourent à ces fins; il n'en eft aucune qui puiffe en fournir des moyens plus fùrs & plus multipliés, que la fection préfente; s'il eft poffible d'y traiter tout ce qu'elle anonce dans le titre. Le détail de la forme des lettres, les diverfes fortes d'écritures, les abréviations plus ou moins nombreuses, felon la diverfité des fiècles & la nature des ouvrages, l'état des chifres anciens, l'introduction des nouveaux, la figure des points, leur omiffion, leur ufage plus ou moins étendu, la diftinction des mots, les corrections faites en divers tems aux manufcrits & une infinité d'autres obfervations n'auroient pu manquer de répandre de grandes lumières fur un fujet auffi intéreffant & prefque tout neuf; s'il eût été manié par des hommes, dont la force du génie, la multiplicité des

II. PARTIE.
SECT. III.

talens & la variété des conoiffances euffent eu quelque pro-
portion avec fon étendue & fa profondeur. Mais s'il ne nous
eft pas donné de réuffir fur tant de matières réunies ; du
moins eft-il de notre devoir de viser fans ceffe à ce but. Une
entreprise d'ailleurs auffi vafte que la nôtre, envifagée dans sa
totalité, ne permet pas de franchir les bornes étroites, où
chacune de fes parties doivent être refferrées. Nous ne laisse-
rons cependant pas de nous étendre affez, pour ceux,
,
qui
n'exigent pas toujours, que tout foit épuisé.

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Origine immédiate des lettres latines: additions anciennes & nouvelles à l'alphabet primitif, réelles ou fupofées : lettres transportées de Grèce en Italie : fyfteme de M. le Préfident Bouhier fur leur nombre & fur l'ancien état de l'alphabet: lettres de l'empereur Claude: partage des favans fur celles du Roi Chilperic I: nouveaux éclairciffemens fur la fi gure, l'ufage, & la valeur de ces caractères.

S

I les lettres latines doivent leur naiffance aux caractères orientaux; elles l'ont fucceffivement donnée à ceux de prefque tous les Peuples d'Europe. François, Allemans, Po Îonois, Espagnols, Anglois, Danois, Suédois, Italiens, nous n'employons point de lettres diférentes. Nos écritures communes & nationales reconoiffent toutes le même principe, toutes anoncent le même génie, toutes portent la même forme & la même figure. Parmi les Européens, chez qui les lettres latines font en usage; ceux-ci n'en ont jamais eu d'autres : ceux-là les ont adoptées, au préjudice de celles, qui leur étoient propres : tous y font revenus plus d'une fois, après s'en être écartés en diverfes manières. Ce ne font point feulement nos capitales, que nous tenons des Romains; nous ne leur fommes pas moins redevables de nos écritures minufcules & curfives, fous quelques formes & dénominations

qu'elles

SECT. III.
CHAP. L.

qu'elles foient connues. Après des aveux fi précis, les fages Italiens peuvent-ils envier à Charlemagne l'honneur de leur II. PARTIE. avoir rendu leur belle écriture, qu'ils avoient comme nous, & peutêtre plus que nous perdue en la défigurant? Il ne doit point leur paroitre honteux de tenir quelque chofe des François ; fi nous ne devons pas rougir d'avoir tant reçu d'eux.

ARTICLE PREMIER.

Lettres Latines aportées de Grèce en Italie: leur nombre chez les Grecs & les Latins additions anciennes faites

1.

A

à leur alphabet primitif.

NE confidérer, que les raports généraux des caractères Origine des letPhéniciens, Etrufques, Latins, & le commerce des tres Latines: elles Sidoniens & des Tyriens dans la Méditerranée; rien n'em- ont paffé de Grèce pêche de croire, qu'ils ont eux-mêmes porté la conoiffance en Italic. de leurs lettres en Italie. Mais les (1) premières colonies

(1) Fondé fur les témoignages des anciens, M. Gori dans les Prolégomènes de fon Museum Etrufcum p. L. établit comme un fait conftant, que les premiers, qui ocupèrent l'Italie, Aufones ou Aurunces, Pélafges, Arcadiens, Oenotriens & Tyrthéniens, étoient fortis de la Grèce. Surquoi il renvoie à une Differtation (a) de Théodore Rick, qu'on fait avoir pris un parti fort diférent de celui de (6) Cluvier, au fujet des premiers habitans de l'Italic. Notre habile Antiquaire reproche à Tacite d'avoir fait communiquer aux Etrufques par Démarate Pufage des lettres, dont ils étoient en poffeffion, long-tems avant la naissance de ce Corinthien, plus de trois fiècles avant le fiége de Troie. On pouroit peutêtre bien en rabatre au moins deux, fans craindre d'être convaincu d'erreur chronologique par ce Lavant homme.

&

D. J. Martin dans fon Hiftoire des Gaules & des Gaulois 1. 1. p. 172. & dans fa première Diff. hiftorique p. 7. révendique aux Gaules les Aufones, Aurunces ou Arvernes ; ainfi que les plus anciens habitans d'Italie, Aborigènes, Ombriens, Teutons, Sicules. Selon lui ces colonies Tome II.

(a) De primis Italia colonis cap.

7.

(b) Italia antiq.

lib.

3.

(c) Differt. I.

(d) Ibid. p. 18.

Gauloifes ont fait ufage de caractères (c)
Grecs, antérieurement au tems que ces
mémes caractères ont été portés dans la
Grèce. Voilà, continue-t-il, une de ces
vérités établies fur des principes, qu'on ne
peut rejeter fans fe brouiller avec toute l'An-
tiquité. Les Gaulois ayant pour maxime (d)
fondamentale de ne rien écrire; on a
a ignoré
jufqu'à César, non feulement, s'ils avoient histor. p. 19.
des caractères, mais encore posé qu'ils euf-
fent des caractères, quelle en étoit la ferme.
La conciliation de ces deux vérités ne fe & 19.
fera peutêtre pas fentir à tous les favans
auffi vivement, qu'à leur auteur. Peutêtre
même fe trouvera-t-il des efprits, qui
auront peine à concevoir, comment des
lettres pouvoient être Grèques, avant d'ê-
tre connues des Grecs ; comment elles fe
confervoient au milieu d'un peuple, qui
avoit pour maxime de ne rien écrire : &
fupofé qu'il en fit quelque ufage; com-
ment & la forme & l'existence même des
caractères Gaulois, quoique plus anciens
que Cadmus, quoique répandus en Italie
par les colonies Gauloifes avant l'arivée
des Pélafges, ont été ignorées de cette
multitude de peuples d'Europe, d'Afie &
d'Afrique, avec qui les Gaulois avoient

B

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