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matiere fubtile, & fur le mouvement interne. C'eft poartant ce qu'il faut connoître, pour rendre raifon de la plupart des opérations de la nature. Je laiffe à la Mécanique la confidération de la matiere épaiffe & du mouvement vifible. Un Philofophe doit fuivre la nature jufques dans fes retraites les plus cachées & dans fes mouvemens les plus fecrets: mais qu'il eft difficile de ne la point perdre de vûë. Ceux qui fe font apliqués le plus à cette étude, favent combien elle eft profonde. Plus ils pénétrent, plus ils découvrent de labirintes & de détours. Leur curiofité refte fans fuccès. Tout leur travail n'aboutit qu'à l'admiration. Il faut qu'ils fe contentent d'adorer la Sageffe Divine; & ils font contraints d'avoüer que les fecrets de la Nature, ainfi que ceux de Dieu, font impénétrables à l'homme.

Ariftote, qui a porté le raifonnement fi loin, ne nous a pas donné de grands éclairciffemens fur les vérités physiques. Au lieu de compofer fa Philofophie fur des obfervations d'après la nature, il a inventé de lon chef un corps de Phyfique, auquel il a tâ. ché enfuite d'accommoder les différens phénomenes. Ses argumens. convenoient bien dans la Logique mais ils étoient déplacés, & ils l'ont égaré en cet endroit, où les obfervations devoient plutôt le conduire. S'il en fait quelques-unes, elles ne tiennent pour l'ordinaire rien de la Philofophie; & elles font presque connues de tout le monde. Ses quatre élémens n'ont rien de fubtil, & laiffent l'entendement au même point où il étoit. Ses trois principes ne l'élevent guere davantage. Ce Philofophe a expli

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* La matiere, la forme, & la privation.

qué le premier, d'une maniere qu'on ne peut l'entendre; & le dernier n'eft pas un principe, à moins qu'on ne veüille reconnoî. tre pour un principe ce qui fupofe l'abfence & l'inéxistence d'un autre. Il nous dit d'abord que toute connoiffance nous doit venir par les fens; & après il quitte ce moïen, & a recours au miniftere de la raison. Mais fa Philosophie est assez décriée préfentement: elle n'a pas befoin qu'on la rabaiffe davantage.

Il eft inutile que je rapporte ici les opinions des autres anciens Philofophes. Les Modernes en ont relevé plufieurs. Elles ont été réfutées, & font tombées pour la feconde fois. Celle de Thales & de la fecte Ionique qui admettoit l'eau comme le principe de toutes choses, a été rappellée de nos jours; & l'on a tâché d'expliquer le déluge par ce principe. Copernic &

fes fectateurs ont embraffé l'opinion de Fytagore & de la fecte Halique, qui plaçoient le Soleil au centre du Monde, & qui prétendoient la Terre mobile. La Tranf migration des ames même, qui eft un des plus étranges fentimens de Pytagore, a trouvé depuis peu parmi nous un défenseura, qui l'a foutenue dans un fens modifié, & conforme peut être à celui de ce Philofophe. L'ame du monde, La préexiftence des ames b, & les autres opinions de Platon, ont eu un fort parti. Plufieurs autres opinions qu'on a renouvellées de notre temps, n'ont guere que la grace de la nouveauté. Sans cela elles plairoient moins: mais il feroit aifé de faire voir qu'elles viennent des anciens Philofophes. Comme il n'y a rien de fi abfurde

a M. Bultrode.

b Cette opinion eft expliquée dans un livre Anglois, intitulé: Lux Orinalis, or an Esquiry, &c. imprimé à Londres en 1662.

qu'ils n'aïent dit, de même ils n'ont rien dit de fi extravagant, qu'on ne l'air adopté.

De toutes les opinions anciennes, celle de Démocrite & d'Epicure Fondateurs de la Philofophie des atômes ou corpufcules, s'est rétablie avec le plus de fuccès: mauvais préfage pour la Réligion, que ceux qui ont expliqué la formation du monde par les regles de la Mécanique, aïent été fuivis fi généralement. C'est de Mr Descartes que je veux parler. J'aurois tort, il eft vrai, de l'accufer d'Athéïfme, puifqu'il fuppofe que Dieu a imprimé le premier mouvement à la matiere, après l'avoir créée : mais il est blamable d'abardonner enfuite la vafte machine de l'Univers aux loix de la Mécanique, & de croire que tous les corps aïent pû fe produire, fans que le premierMoteur y concourût de nouveau. Cette

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