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trente-fept. Quand bien même nous n'aurions pas une expedition plus autentique de cette Chartre, nous ne laifferions pas d'être en droit de la citer avec quelque confiance, mais nous l'avons en original. C'eft la premiere piece d'un Livre imprimé en mil fix cens foixante & quatre, intitulé: Recueil de plufieurs Pieces curieufes pour l'Hiftoire de Bourgogne, par Monfieur Perard Doyen de la Chambre des Comptes de Dijon ; & l'Auteur nous affure qu'il a fait la copie de la Chartre de Clovis qu'il nous donne fur l'original même de cette Chartre confervée dans les Archives, dont la garde eft confiée à la Compagnie, de laquelle il fe trouvoit alors le Doyen. Voici les endroits effentiels de cette piece.

» Clovis Roi des Francs & Perfonnage illuftre: Qu'il foit no»toire à tous les Evêques, &c. Que le faint Homme Jean si >> connu par fes bonnes œuvres, étant venu la premiere année » que nous avons fait profeffion du Chriftianifme (4) & que » les Gaulois ont reconnu notre autorité, mettre fous notre protection fon Monaftere fitué dans le lieu dit Tornatrinfe, » afin qu'il fût déformais fous notre fauvegarde & fous celle des » Rois nos Succeffeurs, nous croyons devoir pour meriter de plus en plus les faveurs céleftes, lui octroyer fa demande. Clovis dit enfuite, qu'il a fait expédier les prefentes Lettres fi gnées de sa main, afin qu'il fût notoire à tous prefens & à venir qu'il a octroyé au faint Homme Jean fa demande, qu'il lui a donné encore differens droits & franchises, & qu'il entend que le Monaftére de Reomay demeure toujours fous la protection & fauvegarde des Rois fes Succeffeurs. La date de la Chartre eft: » Donné à Reims le vingt-neuviéme Decembre en la cinquiéme indiction. On y lit enfuite. » Moi, Anachalus,

>>

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(a) Clodoveus Rex Francorum vir illustris, fervus Dei...... Quapropter notum fu omnibus Epifcopis, Abbatibus & illuftribus viris, magnificis Ducibus, Comitibus, Domefticis, Grafionibus, Centenariis, &c. Quia Dominus Joannes clarus virtutibus locellum fuum in Dago Tornatrinfe fub regula beati Macarii ad habitationem Monachorum conftructum qui Reomaus vocatur, primo noftræ fufceptæ Chriftianitatis & fubjugationis Gallorum anno, noftræ Celfitudini tradidit ac commendavit ut fub noftra emunitate & Mundiburdio noftrorumque fuccefforum Regum femper maneat. Propterea & nos & ipfum Patronum norum peculiariter, &c,,..., Ideoque has

litteras manu noftra firmatas ipfi noftro Pa-
trono Domino Joanni dedimus, id omnino
vos rogamus atque decernimus, ut nec nos
noftrique fucceflores Reges neque vos ve-
ftrique minores....... Sed fub noftra Re-
gumque noftrorum fuccefforum tuitione &
Mundiburdio prædictum Monafterium pro-
pter meritum tanti patroni, permaneat &
quiefcat..... Et ut hoc præceptum firmius
habeatur manas noftræ fignaculo fubter il-
lud decrevimus roborare, &c. Datum fub
die
quarta Kalendas Januarii, indictione
quinta. Actum Remis civitate in Dei no-
mine feliciter. Ego Anachalus obtuli, anno
magni Clodovei decimo fexto.
Recueil de Perard, pag. 1.

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j'ai

Petav. Rat.

lib. 7. cap. 3.

J'ai remis cette Chartre la feizième année du regne du Grand » Clovis. «En voilà fuffifamment pour montrer que la premiere année du Chriftianifme de Clovis, & la feizième année de fon regne, fe rencontrerent. Or cette année eft la même que l'année quatre cens quatre-vingt-dix fept. Clovis eft mort en cinq cens onze, la trentiéme année de fon regne, comme le dit Gré- temp. Part. 1. goire de Tours, à la fin du fecond Livre de fon Hiftoire. Ainfi Clovis a dû commencer fon regne en quatre cens quatre-vingtun, & fuppofé qu'il l'ait commencé le premier Janvier de cette année-là, car nous n'avons aucune notion ni du jour ni du mois. qu'il parvint à la Couronne, la feizième année de fon regne, se rencontrera parfaitement avec l'année de Jefus-Chrift, quatrecens quatre-vingt-dix-fept. Ainfi cette année & celle de la date de la Chartre, quadrent très-bien. Ce calcul eft encore confirmé par une circonftance décifive, & qui fe trouve dans notre Chartre. Il y eft dit que l'année où l'on fe trouvoit quand elle fut expediée, étoit la cinquième de l'indiction courante, & l'on peut voir dans le Gloffaire Latin de Monfieur du Cange, que l'année quatre cens quatre-vingt-dix-fept, a été réellement la cinquiéme année d'une indiction. On fçait de quel poids doit être une pareille preuve dans le cas dont il eft ici queftion. Enfin, j'ajouterai que plufieurs Manufcrits de Gregoire de Tours (a) portent, que ce fut l'année quinziéme de fon regne que Clovis cut contre les Allemands la guerre dans laquelle fe donna la bataille de Tolbiac, & par confequent que ce fut à la fin de cette année-là, que fe fit la cérémonie du Baptême de ce Prince. L'Auteur des Geftes dit encore dans tous les Manufcrits, que la bataille de Tolbiac (b) & la converfion de Clovis font deux évenemens qui appartiennent à la quinzième année du regne de ce Prince; c'est-à-dire, à l'année de Jefus-Chrift quatre cens quatre-vingt-feize. Or puifque la quinzième année de Clovis quadre avec l'année quatre cens quatre-vingt-feize, comme nous l'avons vû, il s'enfuit que fa feizième année quadre avec l'année quatre cens quatre-vingt-dix-fept de Jesus-Christ.

Dès qu'il eft conftaté que la feíziéme année de Clovis revient à l'année quatre cens quatre-vingt-dix-fept de l'Ere Chrétienne, il eft clair que ce fut dans cette derniere année que les Armori

(a) Actum anno decimo quinto regni tionem nominis Jefu Chrifti, victoriam fui. meruit obtinere. Acta funt hæc, anno de cimo quinto Chlodovecho regnante.

Edit. Ruinart, pag. 82.

(b) Narravitque ei qualiter per invocaTome II.

Geft. Franc. cap. 15.

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Cangii Gl.

Lat. tom. pr.

pag. 211.

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ques & les Troupes Romaines qui gardoient la Loire fe foumi rent à Clovis. En effet la Chartre affocie la date du Baptême de Clovis, ainfi que la date de ces deux autres évenemens, avec la feizième année du regne de Clovis, en énonçant que la fupplication du S. Homme Jean, laquelle donnoit lieu à l'expedition de cet acte, avoit été faite l'année premiere d'après le Baptême de Clovis, & d'après la foumiffion des Gaulois. Suivant la narration de Procope, la capitulation des Troupes Romaines avec Clovis, a dû fuivre de près la réduction des Armoriques à l'obéiffance de ce Prince.

Il eft vrai qu'on pourroit faire fur ce point-là une difficulté en difant; felon la date appofée à la Chartre, elle eft du vingt-neuviéme Decembre de l'année quatre cens quatre-vingt-dix-fept. Or ce jour-là l'on ne devoit plus compter la premiere, mais la feconde année d'après le Baptême de Clovis, puifque Clovis reçut ce Sacrement le vingt-cinquiéme Decembre de l'année quatre cens quatre-vingt-feize. On pourroit faire plufieurs réponfes à cette difficulté, mais je me contenterai d'en alleguer une. C'eft qu'il y a fi peu de tems entre le vingt-cinquième & le vingt-neuvième de Decembre, qu'il fe peut très-bien faire que faint Jean de Reomay eût mis fon Monaftére fous la protection du Roi des Francs quelques jours avant Noël, & que cependant l'acte qu'il demandoit ne lui ait été expedié que le premier jour ouvrable après Noël; c'est-à-dire, le vingt - neuviéme De

cembre.

En attribuant ce que dit notre Chartre de la foumiffion des Gaulois, à la foumiffion des Armoriques, & des Troupes Romaines, deux évenemens affez importans pour en faire une efpece d'époque, puifque Procope dit formellement que ce fut au premier que les Francs eurent la principale obligation de leur agrandiffement, notre Chartre n'eft plus expofée à aucune contradiction, elle n'eft plus fujette aux loupçons qui tombent fur les actes anciens qu'on ne fçauroit expliquer que par des interprétations ou forcées ou purement arbitraires. Auffi toutes les contradictions que la Chartre dont il s'agit peut avoir reçûës venoient-elles de ce que ce Diplome avoit été mal expliqué, parce qu'on avoit fuppofé que la phrafe, la foumission des Gaulois, fût rélative à des évenemens qui certainement ne font point arrivés la premiere année après le Baptême de Clovis, ni par confequent la feizième année après fon avenement à la Couronne des Saliens.

En effet, les Notes dont le Pere Rouyer, qui autant que je puis le fçavoir, eft le premier Editeur de cette Chartre, a bien voulu l'accompagner, fe trouvent plus propres à faire douter de fon autenticité qu'à la prouver, parce que cet Auteur faute d'avoir connu à quels événemens de la vie de Clovis, il falloit appliquer la phrafe la premiere année d'après la foumiffion des Gaulois, en fait une application qui n'eft point foutenable d'autant qu'elle eft contredite par la Chronologie. Or une Chartre mal expliquée paffe aifément pour une Chartre fauffe.

Le Pere Rouyer donc, après avoir allegué que dans plufieurs Auteurs les Gaulois dits abfolument, fignifient les Gaulois de celles des Provinces des Gaules qui portoient le nom de Lyonnoises, ajoute:

"

» Je ne doute point que la foumission des Gaulois (a) que la » Chartre place dans la même année que le Baptême de Clovis, ne doive s'entendre de ce qui arriva immédiatement après la » converfion de ce Prince, lorfqu'il défit Gondebaud & qu'il » le contraignit à fe rendre fon Tributaire. Clovis qui n'étoit » maître auparavant que d'une partie de la Gaule Lyonnoife, » la fubjugua en entier alors, & il s'empara même de la Ville "de Lyon. Comme il eft aifé de convaincre de fauffeté une telle fuppofition par les Faftes feuls de Marius Aventicenfis, où l'on voit clairement que ce ne fut qu'en l'année cinq cens, c'est-àdire, trois ou quatre ans après le Baptême de Clovis, que ce Prince fit la guerre à Gondebaud, il a dû réfulter d'une pareille explication, plufieurs foupçons contre l'acte mal expliqué. L'autenticité de la Chartre en question aura donc queftion aura donc paru fufpecte à plufieurs Sçavans, parce qu'elle contenoit, fuivant cette interprétation, des faits qui ne pouvoient être conciliés avec les faits certains de notre Histoire. Comme on vient de le voir; ce fut la quatrième année & non la premiere année d'après fon Baptême que Clovis fit la guerre à Gondebaud. Je ne fçais point fi quelques-uns de ces Sçavans ont mis leurs doutes par écrit, ou s'ils fe font contentés de les expliquer de vive voix. Ce que je

(a) Quomodo annus primus Chriftianitatis Clodovei conveniat cum anno primo fubjugationis Gallorum...... Igitur cum jam frequens ufus effet vocis Gallorum pro iis peculiariter qui Lugdunenfes Provincias incolerent, non dubito quin primus hic annus fubjugationis Gallorum qui in Clodovei privilegio componitur cum primo Chriftia

nitatis ejus anno, intelligendus fit de eo quo
ftatim à Baptifmo Gundobaldum Burgun-
die Regem bello vicit & fecit vectigalem.
Cum enim antea partem Lugdunenfis Gal-
liæ teneret in ditione fua Clodoveus, hac
demum victoria eam totam cum civitate ip-
fa Lugdunenfi fubjugavit.

Hift. Monaft. Reoma. pag. 508.

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fçais, c'est que leurs doutes ont donné lieu à Monfieur Pérard de dire dans une note qu'il a fait imprimer immédiatement après notre Chartre: Quelques perfonnes dont j'eftime la cenfure, ont eu de la peine à confentir à la verité de cette Chartre fur des conjectures d'Hiftoire affez plausibles. Mais outre qu'elle fe trouve originale dans la Chambre des Comptes de Dijon, en la maniere qu'elle eft ici rapportée, c'est qu'il y a titre pour juftifier qu'on s'en eft fervi il y a plus de trois cens ans,& qu'elle a été reconnue en Justice. Cet Auteur cite enfuite quelques occafions où la Chartre de Clovis a été reconnue pour autentique dans les Tribunaux, & il rapporte encore une Chartre de Clotaire (a) premier, où il est énoncé qu'il confirme le contenu dans celle de fon pere Clovis. Notre explication eft propre à diffiper toutes ces difficultés. En admettant cette explication très-plaufible par elle-même, les faits que la Chartre contient fervent autant que le lieu même où cet inftrument fe trouve dépofé & que les autres preuves d'autenticité qu'il porte avec lui, à montrer qu'il eft une piece dont la verité eft inconteftable.

Je ne vois qu'une difficulté qu'on puiffe faire déformais avec quelque fondement fur ce fujet-là. C'eft que le lieu où l'Abbaye du Moustiers-Saint-Jean eft bâtie, n'a point été fous la domina tion de Clovis. Ce lieu eft dans la Cité ou Diocèfe de Langres, & le Diocèfe de Langres appartenoit aux Bourguignons fix ans après la mort de Clovis, puifque Grégoire Evêque de Langres foufcrivit au Concile tenu à Epaone en cinq cens dix-fept, fous la protection & par les foins de leur Roi Sigifmond.

Il est vrai que tant que Clovis a vécu, le Diocéfe de Langres a toujours été fous la domination des Bourguignons; mais l'Abbaye du Mouftiers-Saint-Jean qui eft bâtie à l'extrêmité SeptenPréface Hif- trionale de ce Diocèfe, comme l'observe le Pere Daniel, pou

tor.

voit bien être fur le territoire de Clovis. Quoique les Bourguignons tinffent la Ville Capitale de la Cité de Langres & la plus grande partie du Plat-Pays de cette Cité, il pouvoit bien fe faire que les Francs en euffent occupé quelque Canton après le défastre de Syagrius. Nous l'avons obfervé déja, dans des revolutions pareilles à celle qui arriva pour lors, les bornes légales des Provinces & des autres Diftricts, ne font pas toujours refpetécs Elles ne font pas toujours celles qui limitent les acquifitions des Conquerans. Ils les étendent jufques aux Fleuves, aux

:

(a) Chlotarius Rex Francorum vir illuftris...... Igitur notum fit omnibus quo.

niam ficut divæ memoriæ genitor nofter. Clodoveus, &c. Recueil de Perard, pag. 3.7m

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