ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

d'une époque plus diftinctement ni plus affirmativement, que Gregoire de Tours établit & fixe celle de l'époque tirée de la mort de Saint Martin; & cela, foit dans l'Hiftoire Eccléfiaftique des Francs, foit dans l'Hiftoire des Miracles de notre Saint.

Gregoire de Tours dit dans l'Hiftoire Eccléfiaftique des Francs.» (4) La feconde année du regne d'Arcadius & d'Ho» norius, mourut Saint Martin Evêque de Tours à l'âge de qua» tre-vingt-un an, & après vingt-fix ans d'Epifcopat. Il déceda » dans le lieu de Candes qui eft de fon Diocèfe, fous le Con» fulat d'Atticus & de Cæfarius, & ce fut un Dimanche fur » le minuit.« Nous avons déja obfervé que ce Confulat tomboit en l'année trois cens quatre-vingt-dix-fept de Jefus-Chrift, & l'on pouvoit dire que cette même année Arcadius & Honorius étoient encore dans la feconde année de leur regne, en comptant par années révoluës, puifque leur Pere Théodofe le Grand n'étoit mort que le dix-feptiéme Janvier trois cens quatre-vingt-quinze, & qu'ainfi la troifiéme année de leur regne ne devoit être révoluë que le dix-feptiéme Janvier de l'année trois cens quatre-vingt-dix-huit. On ne fçauroit donc établir une date plus diftinctement & plus pofitivement que Gregoire de Tours établit dans fon Hiftoire la date de la mort de Saint Martin.

Le Pere de nos Annales dit encore dans fon premier Livre des Miracles de notre Saint. » L'Apôtre des Gaules après vingt-cinq " ans, quatre (b) mois & dix jours d'Epifcopat, mourut étant »âgé de quatre-vingt-un an, fous le Confulat d'Atticus & de » Cæfarius. Ce fut très-certainement un Dimanche vers le ma» tin qu'expira le ferviteur de Dieu. Nous en avons, ainfi qu'on » va le voir dans le Chapitre fuivant, des preuves pofitives. En effet, dans ce Chapitre fuivant, Gregoire de Tours raconte la vifion que Sévérinus Evêque de Cologne eut le même jour que mourut Saint Martin, & il écrit. » Un Dimanche >> que Sévérinus faifoit ses stations, il entendit à l'heure même

(4) Arcadii vero & Honorii fecundo Imperiil anno Sanctus Martinus Turonorum Epifcopus plenus virtutibus & fanctitate, præbens infirmis multa beneficia, octogefimo & primo ætatis fuæ anno, Epifcopatus autem vigefimo fexto, apud Condatenfem Diœcefis fuæ vicum excedens à fæculo, feliciter migravit ad Chriftum. Tranfiit autem media nocte quæ Dominica habebatur Attico Cæfarioque Confulibus.

Greg. Tur. Hift. lib. 1. cap. 43.

(b) Per quinquennia quinque, bis infuper geminis menfibus cum decem diebus octogefimo primo ætatis fuæ anno, Cæfario & Attico Confulibus, nocte media quievit in pace. Ejus tranfitum in die Dominica fuiffe manifeftum eft, idque in fequenti certis indiciis comprobabimus.

Gr. Tur. de Mir. S. Mar. bift. lib. 1. cap. tertio.

» que Saint Martin expiroit, un choeur célefte qui chantoit » dans les airs. Sévérinus s'étant mis en priere, il apprit par velation, que les chants qu'il entendoit étoient ceux des Puiffances Célestes qui venoient recevoir l'ame de Saint Martin. (4)

Notre Hiftorien dit encore en parlant de la naiffance de Saint Martin qu'il vint au monde la onzième année de l'Empire de Constantin (6), laquelle tombe en l'année trois cens feize de Jefus-Chrift. Or en ajoutant à cette année les quatre-vingt-un an que S. Martin a vécu fuivant Gregoire de Tours, on trouvera que ce Saint doit être mort en trois cens quatre-vingt-dix-sept.

Enfin une hymne qui fe chante le dixiéme Novembre veille du jour de la fête de Saint Martin dans l'Eglife bâtie fur fon tombeau, dit: » Le Saint (c) qui venoit de rétablir la paix parmi »les Eccléfiaftiques de Candes, y mourut le jour du Seigneur » fur le minuit. «Tout le monde fçait que dans le ftyle de la Religion Chrétienne, le jour du Seigneur veut dire le Dimanche.

Il eft donc hors de doute que Saint Martin eft mort un Dimanche. Quant à l'année de cette mort, comment eft-il poffible que notre Hiftorien s'y foit trompé, lui qui étoit Evêque de Tours, & qui par conféquent avoit à fa difpofition les Diptiques de fon Eglife & je ne fçais combien de Chartres datées par Confulat, & dans lesquelles il devoit fouvent être fait mention de l'année de la mort de Saint Martin le plus illuftre de fes Prédeceffeurs. On obfervera encore qu'il n'y avoit pas deux cens ans que l'Apôtre des Gaules étoit mort lorfque Gregoire de Tours écrivoit, & la tradition foutenue par les Fêtes anniverfaires qui furent inftituées en l'honneur de notre Saint foixante ans après la mort, devoit avoir confervé dans la Touraine la Gr. Tur. Hi- mémoire de l'année où il étoit décedé. Suppofé que Gregoire de ftor. 2. cap. Tours fe fût trompé fur la date de la mort de Saint Martin, en écrivant celui de fes deux Ouvrages que nous avons cités lequel fut publié le premier, fes propres Diocéfains fe feroient foulevés contre l'erreur ; ils lui auroient indiqué des monumens, ils lui auroient allegué des faits capables de l'éclairer. Notre Auteur

14.

(a) Beatus Severinus Colonienfis Epifcopus, dum die Dominica loca fancta ex confuetudine per fanctos hymnos cum fuis Clericis circumiret, ille hora qua Beatus obiit, audivit Chorum canentium in fublimi..... Ego tibi quid fit narrabo. Domnus meus Martinus migravit ex hoc mundo, & nunc Angeli canendo eum deferunt in

cælum. Ibidem capite quarto.

(b) Hujus Conftantini Imperii anno undecimo.... Martinus apud Sabarram Pannonico civitatem nafcitur.

Hift. lib. 1. cap. 34. Gr. Tur. (c) Herili nocte media migravit pace reddita, &c,

auroit corrigé fa faute, & il fe feroit bien gardé d'y retomber dans celui de fes deux Ouvrages, qui fut publié le dernier.

Il faut dire cependant, ou qu'il n'y a pas de faute dans Gregoire de Tours, ou qu'il y a fait deux fois & en differens tems une faute groffiere, en donnant la date de la mort du plus illustre de fes Prédeceffeurs. La faute feroit de telle nature, qu'elle. ne pourroit être imputée qu'à lui? Comment la rejetter fur les Copistes ? C'est de la négligence qu'on leur reproche ordinairement, & non pas de la mauvaise foi. Or l'inattention peut bien faire mettre quelquefois un chiffre numéral pour un autre chiffre numéral, mais elle ne fçauroit faire écrire en deux endroits differens, le nom de deux Confuls pour celui de deux autres Confuls, ni marquer avec précision, le rapport de la date de l'évenement principal, avec la date des années du regne d'Arcadius & d'Honorius.

Plufieurs Sçavans néanmoins fe font infcrits en faux contre cette date. Monfieur Gervaïfe Prévôt de l'Eglife de Saint Martin de Tours prétend que ce Saint eft mort, non pas en quatre cens quatre-vingt-dix-fept, mais dès l'année quatre cens quatrevingt-feize. Il écrit dans fa Vie de Saint Martin. » La premiere Pag. 370. » année du regne d'Arcadius & d'Honorius ayant commencé

[ocr errors]

» le feiziéme Janvier de l'année trois cens quatre-vingt-quinze, jour de la mort de Théodofe le Grand, leur perc, la feconde » a dû auffi commencer au feiziéme Janvier de l'année trois » cens quatre-vingt-feize, & Saint Martin décedé en Novem»bre a dû être mort cette même année? Il n'eft pas poffible néanmoins de tranfporter à l'année trois cens quatre-vingt-feize le Confulat d'Atticus & de Cæfarius, qui fuivant le rapport que toutes les Tables des Fastes Confulaires qui nous font restées, ont avec l'Ere Chrétienne, ne furent Confuls qu'en l'an de grace trois cens quatre-vingt-dix-fept.

Auffi n'eft-il pas néceffaire de faire une pareille tranfpofition, pour trouver que Saint Martin eft mort la feconde année du regne d'Arcadius & d'Honorius. Il fuffit de fuppofer que Gregoire de Tours a compté les années du regne de ces Princes par années révolues, & non point par années courantes. C'est ainfi qu'il calcule les années de l'Epifcopat de Saint Martin dans le paffage qui vient d'être cité. Alors on trouvera, comme nous l'avons déja dit, que Saint Martin fera mort dans le mois de De Mir. lib. Novembre de l'année trois cens quatre-vingt-dix-fept. Il fera I. cap. 3. mort quand ces Princes, qui ne monterent fur le Throne que le

Tome II.

feiziéme Janvier de l'année trois cens quatre-vingt-quinze, com ptoient encore la deuxième année de leur regne en calculant par années révolues.

Le Pere Pétau, dont le nom feul prévient en faveur du fentitiment qu'il veut établir, fait deux objections contre la date dont il eft ici queftion, & la premiere paroît d'autant plus folide, qu'elle émane de l'Aftronomie. Il eft (a) certain, dit ce fçavant homme, que Saint Martin eft mort un Dimanche, & que ce Dimanche étoit un onzième jour de Novembre, puifque c'est l'onzième jour de Novembre que l'Eglife de Tours & les autres Eglifes célebrent la fête de Saint Martin absolument dite, ou le jour de fa mort. Or en l'année de Jesus-Christ trois cens quatre-vingt-dix-fept, l'onzième jour de Novembre n'échéoit pas en Dimanche, mais en Mercredi. L'Apôtre des Gaules étant donc mort certainement un Dimanche, il faut qu'il foit mort en une autre année qu'en trois cens quatre-vingt-dixfept. Ainfi Saint Martin doit être mort en l'année quatre cens, la nuit du Samedi au Dimanche, qui cette année-là étoit un onziéme de Novembre, ou bien il doit être mort en quatre censun, la nuit du Dimanche au Lundi, qui cette année-là étoit l'onzième jour de Novembre. Le Texte de Gregoire de Tours · laiffe la liberté d'opter entre ces deux nuits-là.

La feconde des objections qui fe trouvent dans les Ouvrages du Pere Pétau, cft que Sévere Sulpice qui a vécu long-tems fous la direction de S. Martin, a écrit que ce Saint avoit furvécu (b) seize ans au Concile tenu à Tréves fous l'Empire du Tyran Maximus, pour Juger Ithacius fur la conduite qu'il avoit tenue dans l'affaire des Prifcillianiftes. Or comme ce Concile fut afsemblé fous le Confulat d'Evodius qui remplit cette dignité en l'année trois cens quatre-vingt-fix, il s'enfuit que Saint Martin ne fçauroit être mort plûtôt qu'en l'année quatre cens-un.

Il fe trouve encore dans Sévere Sulpice, & même dans Gregoire de Tours quelques autres dates de faits particuliers, lefquelles ne quadrent pas avec la date de la mort de notre Saint,

cet,

in nocte quæ Dominicam excapit. Pet. Rat. tem. lib. 6. cap. 12. & de Doctr. Temp. T. fecundo, pag. 374. 751.

(a) Verum anno trecentefimo nonagefi- | qua Dominicam anteceffit. Si pofterius plamo feptimo, littera Dominicalis fuit D, proinde Novembris undecimus erat Feria quarta non Dominica... ... Aut ergo anno quadragentefimo obiit Martinus quo littera Dominicalis erat A G Novembris undecima, Feria prima, aut anno quadragentefimo primo, quo fuit fecunda Feria. Si prius amplectimur, mortuus eft ea nocte

(b) Sexdecim poftea Martinus vixit annos. Nullam Synodum adiir & ab omnibus Conventibus Epifcoporum fe removit.

Sulp. Sev. Dial. tertio.

telle qu'elle fe trouve dans les deux paffages de ce dernier Auteur qui ont été rapportés. Ces contradictions ont été recueillies (4) par les Sçavans qui ont difcuté le plus exactement la matiere dont il s'agit.

Je dirai en répondant à la premiere objection, qu'elle n'est point auffi folide qu'elle le paroît d'abord, & cela, parce qu'elle eft fondée fur la fauffe fuppofition, que l'Eglife célebre le jour de la mort de Saint Martin l'onziéme de Novembre. Cela n'est point. La fête que l'Eglife celebre ce jour-là, n'eft point la fête anniverfaire du paffage de Saint Martin à une meilleure vie, mais bien la fête anniverfaire de fon inhumation. Elle eft in depofitione, & non pas in tranfitu Beati Martini. Entrons en preuve.

Il est dit dans le Préambule des actes du premier (b) Concile de Tours qui commença fes féances le dix-huitiéme Novembre de l'année quatre cens foixante & un. » Plufieurs Evêques s'é» tant affemblés à Tours pour y affifter à la fête qui s'y céle»bre en mémoire de la réception du corps de Saint Martin. Ce Saint étant mort à Candes le Dimanche huitiéme Novembre de l'année trois cens quatre-vingt-dix-fept; & il est très-vraifemblable que fon corps n'ait été apporté à Tours que trois ou quatre jours après fon décès, & qu'il ait été inhumé le même jour qu'il y arriva, dans la crainte des inconvéniens qui feroient arrivés, fi l'on eût tardé à l'inhumer. Cette crainte aura été d'autant mieux fondée, que les Poitevins prétendoient que les reliques de l'Apôtre des Gaules leur duffent appartenir, qu'on ne les avoit enlevées que par furprife, & que dans ce tems-là on inhumoit encore en France les morts à vifage découvert & hors des Villes.

D'ailleurs, ce qui fuffiroit feul à prouver ce que nous avons avancé, Gregoire de Tours lui-même dit pofitivement que la fête anniverfaire que l'Eglife fait l'onziéme Novembre en l'honneur de S. Martin, fe célebre en mémoire de la dépofition ou de l'inhumation de notre Saint. On va lire les propres paroles dont fe fert cet Auteur dans l'endroit de fon Hiftoire, où il fait mention de l'Eglife bâtie fur le tombeau de l'Apôtre des Gaules par Saint Perpéte l'un de fes Succeffeurs. C'eft le même Evêque

(a) De ætate fancti Martini Turonenfis, & anno ejus emortuali. Jofephi Anthelmi ad Antonium Pagi, Epiftola pag. 28.

(b) Cum ad fanctiffimam feftivitatem quæ Domini Martini receptio celebratur in

Civitate Turonica beatiffimi Sacerdotes. quorum fubfcriptio fubter adjecta eft, veniffent, &c.

Conci. T. pr. pag. 949.

« ÀÌÀü°è¼Ó »