ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

» fait l'Allié auquel il feroit dû, & il étoit énoncé dans ce » Traité que les Francs & les Oftrogots partageroient entr'eux » les Pays que les Bourguignons tenoient alors.

On peut bien croire que le Traité dont Procope ne nous donne qu'une notion generale, contenoit des articles qui énonçoient diftinctement quelle partie du Pays tenu par les Bourguignons devoit demeurer aux Francs, & quelle partie devoit appartenir aux Oftrogots. Suivant les apparences chacun des deux Peuples ligués devoit avoir la partie de ce Pays-là, qui étoit le plus à fa bienféance. Theodoric devoit avoir pour fa part la Viennoife, la feconde Narbonnoife & la Province des Alpes. Clovis aura eu pour la fienne la premiere Lyonnoise, la Sequanoife & quelques Cités adjacentes.

Gregoire de Tours a jugé à propos en parlant de la guerre des Francs & des Oftrogots contre les Bourguignons, de fe renfermer dans ce qui regardoit particulierement les Francs. Ce qui concerne les Oftrogots dans l'Hiftoire de cette guerre-là lui a paru étranger au fujet qui lui avoit fait mettre la main à la plume. Il va parler.

» (a) Gondebaud & fon frere Godégifile, étoient alors Rois » des Bourguignons qui occupoient les contrées affifes fur le » Rhône & fur la Saone, & même la Province Marseilloife. » L'un & l'autre ils étoient Ariens auffi-bien que les Barbares » leurs Sujets. Il y avoit entre ces deux freres des brouilleries qui » furent caufe que Godégifile rechercha l'alliance de Clovis, » dont les Troupes étoient en grande réputation. Ce Roi des » Bourguignons fit donc propofer au Roi des Francs de con» clure un Traité de Ligue offenfive contre Gondebaud, aux » conditions fuivantes. Que premierement on fe déferoit de » Gondebaud par les voyes les plus convenables. Secondement, » que lui Godégifile, dès qu'il feroit défait de fon frere, paye» roit annuellement au Roi des Francs un tribut tel qu'il plai>> roit à ce Prince de l'arbitrer. « Il faut que Godégifile pour propofer une pareille convention fe crut à la veille d'être traité par Gondebaud d'une maniere auffi cruelle que l'avoient été leurs freres Chilperic & Gondomar. Clovis agréa les conditions qui lui étoient offertes par Godégifile, & bientôt il fe mit en campagne pour fatisfaire aux engagemens qu'il avoit pris.

(a) Tunc Gondobadus & Godegifelus fratres, regnum circa Rhodanum ac Ararim cum Maffilienfi Provincia retinebant. Erant

184

autem tam illi quam Populi illorum Ariana fectæ fubjecti.

Greg. Tur. Hift. lib. 2. cap. 32,

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

» (a) Gondebaud mal informé de tout ce qui s'étoit traité à » fon préjudice, n'eut pas plûtôt eu nouvelle que les Francs » entroient hoftilement dans fon Pays, qu'il manda à son frere » de venir le joindre pour l'aider à les repouffer. Deffendons>> nous de concert, écrivit-il à Godégifile, afin de ne tomber point dans l'inconvénient funefte où nous avons vû tomber » tant de Nations, détruites parce que leurs Chefs n'ayant pas fçu fe réunir à tems pour faire face à leur ennemi commun, » ils ne l'ont combattu que l'un après l'autre. La réponse de Godégifile à l'invitation de fon frere, fut qu'il alloit rassem»bler inceffamment fes Troupes, & qu'à leur tête il marche» roit à fon fecours. Bientôt après l'armée des Francs & celle » des Bourguignons furent en prefence auprès de Dijon, Châ»teau bâti fur la riviere d'Oufche, & là elles en vinrent aux » mains. Dès qu'on eut commencé à fe charger, Godégifile au » lieu de donner fur les troupes de Clovis, attaqua celles de Gondebaud, qui fe voyant ainfi prifes en tête & en queue, » à quoi elles ne s'attendoient point, fe rompirent & furent » défaites. Pour Gondebaud, dès qu'il eût vû la trahison de fon frere, il ne fongea plus qu'à fe fauver, & prenant fa route le long du Rhône, il gagna la Ville d'Avignon où il fe jetta. Il est aifé de remarquer, en lifant la narration de Gregoire de Tours, que la bataille de Dijon se donna peu de jours après que les Francs eurent commencé la guerre contre Gondebaud, & que ce ne fut qu'après cette bataille qu'ils firent des conquê tes fur lui. D'un autre côté il eft certain par le témoignage de Marius Aventicenfis, que cette bataille fe donna en l'année cinq cens. Voici ce qu'il en dit: » (b) Sous le Confulat de

כג

[ocr errors]
[ocr errors]

(a) Et ftatuto tempore exercitum contra Gondobabum commovit Chlodovechus. Quo audito Gondobadus ignorans dolum fratris mifit ad eum dicens: Veni in adjutorium meum quia Franci fe commovent contra nos & regionem noftram adeunt ut eam capiant, ideoque fimus unanimes adverfus gentem inimicam nobis, ne feparati ab invicem, quod aliæ gentes paffe funt, perferamus. At ille, vadam, inquit, cum exercitu meo & tibi auxilium præbebo. Moventefque fimul hi tres exercitum, id eft Chlodovechus contra Gondobadum & Go. degifelum cum omni inftrumento belli, ad caftrum cui Divione nomen eft pervenerunt. Confligentefque fuper Olcaram fluvium, Godegifelus Chlodovecho conjungi

[ocr errors]

tur ac uterque exercitus Gondobadi popu lum atterit. At ille dolum fratris quem non fufpicabatur advertens, terga dedit fugamque iniit, Rhodanitidefque ripas paludefque percurrens, Avenionem urbem ingre ditur.

Gr. Tur. Hift. lib. 2. cap. 32.

(b) Patritio & Hypatio Confulibus, pugna facta eft Divione inter Francos & Bur-. gundiones, Godegefelo hoc dolofe contra fratrem fuum Gondobadum machinante. In co prælio Godegefelus cum fuis adverfus. fratrem fuum cum Francis dimicavit, & poft fugatum fratrem fuum Gondobagaydum, regnum ipfius paulifper obtinuit, & Gondobagaudus Avenione latebram dedit. Mar. Aven. Ch. ad ann. ƒoo.

» Patritius & d'Hypatius, il se donna auprès de Dijon entre les >> Bourguignons & les Francs, une bataille. Godégifile qui avoit » prémedité de trahir fon frere, se joignit lui & les fiens aux » Francs dans le tems que commençoit la mêlée. Après la dé» route de Gondebaud, Godégifile fut maître pour un tems des >> Etats de ce Prince infortuné, qui s'étoit jetté dans Avignon. Ainfi l'on voit combien le Pere Rouyer a eu tort de croire que ce fut dans l'année d'après le Baptême de Clovis, c'est-à-dire en l'anquatre cens quatre-vingt-dix-fept, que ce Prince fit les conquêtes qu'il dit dans fa Chartre octroyée à faint Jean de Reomay, avoir faites la premiere année de fon Chriftianisme. Reprenons la narration de Gregoire de Tours.

née

» Godégifile se mit en poffeffion des Etats de fon frere, & » comptant la guerre finie, il fe fit reconnoître pour Roi dans » la Ville de Vienne, qui en étoit la Capitale. Il promit de » nouveau d'accomplir fincérement (4) fon traité avec Clovis, » & de lui remettre une partie du Pays tenu par les Bourgui>> gnons. Clovis de fon côté pourfuivit Gondebaud dans le def» fein de le faire prifonnier, & d'en difpofer enfuite comme » il le trouveroit à propos. Ainfi la crainte qu'avoit le Roi des Bourguignons de perdre la vie de la même maniere que Sya» grius l'avoit perdue, fi jamais il tomboit entre les mains des » Francs, devint extrême lorfqu'il vit leurs Pavillons tendus » devant la Ville d'Avignon où il s'étoit renfermé. Il s'adressa >> pour être tiré d'embarras à un de fes Miniftres nommé Aré»dius ou Aridius, perfonnage d'une prudence rare & capable »neanmoins des actions les plus hardies. Vous voyez, lui dit

[ocr errors]
[ocr errors]

ב,

ور

[ocr errors]

Gondebaud, à quelle extrêmité me voilà réduit par ces Bar>> bares qui en veulent également à ma Couronne & à ma vie: » Confeillez-moi? Quel parti prendre. Je ne vois, répon» dit Arédius, qu'un moyen de nous fauver du naufrage, c'est » de calmer Clovis. Je vais donc, fi vous approuvez mon projet, feindre d'abandonner votre fervice pour m'attacher au fien, & j'efpere venir à bout de l'amener au point de vous elaiffer la vie & même la Couronne. Il faudra feulement que » vous acceptiez toutes les conditions dont je conviendrai avec lui, & vous les tiendrez jufqu'aux tems où la Providence vous »fera plus favorable qu'aujourd'hui. Gondebaud agréa le pro» jet d'Aridius, qui, bientôt après fe fit prefenter à Clovis (4) Godegefilus vero obtenta victoria Gr. Tur. hift. lib. 2. cap. 32. fui cum pace difceffit, &c. promiffa Chlodovecho aliqua parte regni

[ocr errors]

>> comme

[ocr errors]

» comme un transfuge. Roy débonnaire, lui dit ce fidéle dé» ferteur, je quitte le Prince infortuné que je fervois pour m'at» tacher à vous, & fi vous daignez me recevoir au nombre de vos Sujets, vous & vos enfans vous trouverez toujours en moi » un Serviteur parfaitement dévoué aux interêts de votre Mai» fon. Clovis accueillit Aridius avec bonté & il retint auprès de » lui ce Romain qui étoit auffi aimable dans la focieté, que ca"pable en affaires. Il prit fon tems durant le fiége d'Avignon n pour dire à Clovis, Grand Prince, fi vous daignez entendre » un homme auffi peu important que moi, vous qui avez tant » de Perfonnages éclairés dans votre Confeil, je vous donne»rai avec fincerité un avis, que peut-être ne vous repentirez» vous pas d'avoir écouté, & que tous les Pays cxpofés aujour>>d'hui aux malheurs de la guerre vous loueroient certainement » d'avoir fuivi? Pourquoi ruiner vos Troupes en les faifant cam» per plus long-tems devant la Place imprenable où votre en» nemi fe tient enfermé? Que peuvent faire ici vos Soldats, fi » ce n'est dévaster le plat Pays des environs? Ils ne prendront point Avignon, Faites donc dire à Gondebaud que vous vou» lez bien faire ceffer les hoftilités, & même lui accorder la

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

paix, à condition qu'il s'engage à vous payer un tribut an»nuel. Par-là vous le rendrez votre créature. Supposé que » Gondebaud refufe d'accepter vos propofitions, vous n'en fe»rez pas moins après les avoir faites, le maître d'en user com» me il vous plaira. Clovis prit le parti que lui fuggeroit Ari» dius, & après avoir donné ordre à tous les détachemens qui faifoient le dégât dans le plat-pays de rentrer dans le camp, » il fit proposer la paix à Gondebaud aux conditions qui vien» nent d'être expofées. Le Roy des Bourguignons les accepta, » & promit d'acquitter ponctuellement la redevance annuelle » à laquelle il s'obligeoit. Il en avança même la premiere année. On ne fçauroit douter que Clovis n'ait compris fon Allié Godégifile dans le Traité dont nous parlons, bien que Gregoire de Tours ne le dife pas. Je reprens fa narration.

» Auffi-tôt que Clovis fe fût retiré, Gondebaud se tint dé»gagé du Traité qu'il venoit de figner avec ce Prince. Le Roi » Bourguignon raffembla donc une armée, & marchant préci> pitamment, il vint affieger Vienne, où Godégifile fe tenoit. » Godégifile qui ne s'étoit point préparé à foutenir un fiege, craignoit principalement que la Ville ne fût affamée, ce qui » lui fit avoir recours à l'expédient de mettre dehors les bou

[ocr errors]

Tome II.

S

» ches inutiles. Malheureufement pour lui, il comprit dans leur » nombre un des Fonteniers de la Ville. Cet ouvrier indigné du » peu de cas qu'on avoit fait de lui, vint trouver Gondebaud, » & il lui enfeigna le moyen de furprendre Vienne, en y en»trant par un aquéduc lequel y portoit de l'eau, & qu'il indi» qua. On fit ulage de cet avis. Un corps de troupes à qui le » Fontenier fervoit de guide, défila par le conduit de cet aqué» duc qui entroit fort avant dans la Ville, & lorfqu'il fut pars » venu jufqu'à un regard que cet ouvrier ne connoiffoit que » trop bien, on écarta avec des leviers la pierre qui en fermoit "l'ouverture. Les Soldats déboucherent enfuite par cette iffuë, » & ils fe mirent en bataille dans les derrieres des troupes ennes "mies qui gardoient les remparts. Dès que le corps de troupes

qui étoit entré dans Vienne fe fût formé, il fit connoître à >> fon armée par des fignaux, qu'il avoit pris pofte dans la Ville, » & il s'avança jufqu'aux portes dont il ne lui fut pas bien dif »ficile de fe rendre maître. En même-tems celles des troupes → de Gondebaud qui étoient demeurées dans fon camp, s'ap»procherent de la Place comme pour l'infulter, & les affiégés

qui fe virent attaqués dans le même tems en tête & en queue »ne fongerent plus qu'à fe fauver dans les aziles des Temples. » Godégifile lui-même fe réfugia dans une Eglife Arienne, & » c'est-là qu'il fut tué avec un Evêque de cette Communion. "Quelques Francs qui s'étoient (4) attachés au service de ce » Prince malheureux, prirent leur parti en gens de guerre, & »ils fe jetterent dans une Tour pour s'y défendre le plus long» tems qu'ils le pourroient. Quand ils furent enfin réduits à fe "rendre, Gondebaud ne permit pas qu'on leur fît d'autre dé

plaifir que celui de les défarmer, après quoi il les envoya à "Touloufe, pour y être remis entre les mains d'Alaric Roi des » Vifigots. Il ne traita point avec la même clémence les Sena»teurs des Cités qui l'avoient abandonné, ni ceux des Bourgui »gnons qui s'étoient déclarés pour Godégifile. Gondebaud les » fit mourir, & il remit enfuite fous fon obéiffance tout le pays » connu aujourd'hui fous le nom du Royaume de Bourgogne. » où il publia un nouveau Code, dans lequel il y avoit plufieurs

[merged small][ocr errors][merged small]
« ÀÌÀü°è¼Ó »