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»tre un Peuple héretique, il mérita qu'il lui apparut fur la Bafilique de Saint Hilaire, une colomne de feu laquelle en s'a» vançant vers ce Prince, l'avertiffoit quil n'y avoit pas de tems à perdre, & qu'il lui falloit mettre fa principale confiance dans » l'interceffion de ce Saint. Ce fut dans ces fentimens que Clo» vis marcha avec tant de diligence aux ennemis qui fe reti roient, qu'il les atteignit fur les neuf heures du matin, & qu'il remporta fur eux par la benediction du Dicu des Armées, une victoire plus entiere qu'il ne l'eût ofé cfperer, une victoire.fi complette que la colline qui fervit de champ de » bataille fut jonchée de morts en fi grand nombre, que fon » terrain en parut hauffé. C'étoit ainfi que la colomne de feu avoit autrefois fervi de guide aux Enfans d'Ifraël.

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Ce fut, comme nous l'apprend encore Fortunat ( 4 ) dans l'abrégé de la vie de Saint Remy, à dix mille de Poitiers & dans la campagne qui eft auprès de Vouglé (b) ou Vouillé, non loin des bords du Clain, que Clovis défit Alaric. Je comprens donc fur ce qui a déja été emprunté, fur ce qui va l'être encore de la narration de Gregoire de Tours, comme fur ce qu'en dit Fortunat qui devoit connoître les lieux ; Que Clovis après avoir guayé la Vienne à l'endroit qui s'eft appellé depuis cet évenement le Pas de la Biche, avoit deffein de paffer la nuit dans le camp qu'il avoit pris en vûe de Poitiers, lorfqu'il fut averti par les fignaux qu'il vit fur l'Eglife de Saint Hilaire, qu'Alaric fe retiroit, & que les Vifigots après avoir paffé le Clain à Poitiers, marchoient fur la gauche de cette riviere. Clovis aura décampé fur le champ, quoiqu'il fut encore nuit, & paffant auffi le Clain qui n'eft pas une groffe riviere, aux gués que les gens du Pays lui auront enfeignés, il aura atteint après une mar che forcée de neuf ou dix heures, les Vifigots qui faifoient diligence pour prendre le nouveau pofte qu'ils avoient deffein d'oc

adverfus hoftes conflictaturus defcenderet. Quod ille diligenter obfervans & orationi occurrens tanta profperitate altero pro fe pugnaturo proceffit að beHum, ut intra horam diei tertiam, ultra humana vota fortiretur à Domino victoriam, ubi multitudo occiforum cadaverum tanta jacuit in loco ut collis ille vifus fit ob hoc fe erexiffe in altum. Simile quoddam incidit Ifraëliticæ gentis tempore hujus causa virtutis. Nam ibi columna ignis populum præcefferat, &c. Fortun. lib. 2. de Mir. Hilarii Surii, tom. prim. pag. 276.

(a) Cum Alarico Rege Gothorum in campo Voglotinfe fuper Fluvium Cliano milliario decimo ab urbe Pictavorum bellum conferuit.

Vita Remigii Surii, tom. I. pag. 302. (b) Voglades, vel Voclade quibufdam Boglodoreta, Voglavum aliis. Caftellum in Pitonibus Cliano flumini appofitum Vouglé nomen fuum campis circumjacentibus dedit, in quibus Alaricus Rex Vefegothorum à Chlodovco Francorum Rege victus eft & interemptus.

Valef. Notitia Gall. pag. 617

cuper. Cependant (4) Procope femble dire qu'Alaric pouvoit bien encore gagner Pays, mais que les Vifigots indignés de la manoeuvre qu'il leur faifoit faire, l'obligerent à tourner tête, & à livrer bataille à Clovis qu'ils fe vantoient de défaire eux feuls, & fans le fecours des Oftrogots.

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Le récit que Gregoire de Tours nous fait de la journée de Vouglé contient plus de détails que celui de Fortunat. L'Evêque de Tours après avoir fini le récit du miracle arrivé à l'occasion de l'Abbé Maixant, dit: » Cependant l'armée d'Alaric & celle » de Clovis en vinrent aux mains dans les champs de Vouglé & » à la distance d'environ dix milles (b) de la Ville de Poitiers. » Les Vifigots auroient bien voulu ne point engager une action décifive, mais l'ennemi les joignit & il les chargea fi vive»ment, que fuivant leur coutume, ils ne tinrent pas. Clovis protegé visiblement par le Ciel, demeura donc maître du champ de bataille. Cloderic eut part à la gloire de cette four» née. Il étoit fils du Roi Sigebert furnommé le Boiteux, par» ce qu'il étoit demeuré eftropié de la bleffure qu'il avoit reçue à un genouil en combattant contre les Allemands à la journée de Tolbiac. » Clovis après avoir mis les Vifigots en fuite, & après avoir tué leur Roi Alaric, tous les Auteurs femblent dire qu'il ait tué de fa propre main ce Prince, ne laissa point de courir encore un très-grand danger. Il fut assailli dans le même tems par deux Vifigots qui lui porterent chacun un coup d'efpieu d'armes au milieu du corps. Heureusement la trempe de fa cuiraffe étoit fi bonne qu'elle résista, & l'agilité de fon cheval le tira d'entre ces affaillans..

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Comme Gregoire de Tours & Fortunat ont vêcu dans le fiécle même où cette bataille mémorable s'eft donnée, & comme Fortunat étoit lui-même Evêque de Poitiers, & l'autre Evêque d'un Diocèse limitrophe de celui de Poitiers, ce qu'ils difent foit concernant la distance où les campagnes de Voglade étoient du

(a) Sed cum plurimum temporis contriviffent, tædere cos cœpit inertia & ægre ferre per hoftes fua loca vexari. Unde & Alaricum contumelia & probris inceffere & quod hoftes reformidaret odiffe fuique Ducis fegnitiem criminari & identidem affirmare poffe fe quidem & folos Germanos bello pervincere. Unde fuorum importunitate victus Alaricus, &c.

Procop. de Bell. Goth. lib. 1.

(b) Igitur Chlodovechus Rex cum Alari

co Rege Gothorum in campo Vogladiense decimo ab urbe Pictava milliari convenit, & confligentibus his eminus, confiftunt cominus illi. Cumque fecundum confuetudinem Gothi terga vertiffent, ipfe Rex Chlodovechus victoriam Domino adjuvante obtinuit. Habebat autem in adjutorium fuum filium Sigeberti Claudi nomine Chloderi

cum,

&c.

Gr. Tur. hift. libro fecundo, cap. 37.

Clain, foit fur la marche des deux armées ennemies, & l'heure du combat, a fait penfer à nos meilleurs Ecrivains, que les champs du lieu qui s'appelle aujourd'hui Vonglé ou Vouillé, avoient été le theatre du grand évenement dont il eft ici queftion. En effet, Vouglé eft à trois lieuës de Poitiers. Il n'est qu'à trois lieues du lit du Clain. D'ailleurs le nom François de Vouglé ou Vouillé, c'est ainsi que plufieurs Auteurs l'écrivent, paroît dérivé du nom Latin Voglade, ou Vogladum, ou Vlloiacum. Le lieu dont il s'agit a porté ces trois noms-là.

Un Critique éclairé vient neanmoins d'attaquer ce fentiment, & il fe fonde principalement fur deux raifons. La premiere est, que dans les anciennes Chartres, Vouglé eft nommé Villiacum, & non pas Vogladum, & que par confequent, Campus Vogladenfis, ou les Champs Vogladiens, ne fçauroient être les campagnes des environs de Vouglé. La feconde eft, que Vogladum étoit affis fur le Clain, au rapport de Gregoire de Tours, & que Vouglé eft à trois lieues du Clain qui n'en approche qu'à cette distance.

Je réponds à la premiere de ces deux raifons: Que rien n'étoit plus commun dans le fixième siècle que d'ortographier differemment le même nom propre. C'eft de quoi nous rapportons plufieurs exemples dans cet Ouvrage. Nous y avons fait voir qu'on écrivoit de cinq ou fix manieres differentes, le nom de Clovis & le nom de Clotilde.

Le Critique nous fournit lui-même un exemple en nous aprenant que Vouglé eft appellé dans les anciennes Chartres, Villiacum & Volliacum. Gregoire de Tours a bien pû en ortographiant le même nom, écrire Voglade ou Vogladum; en mouillant la prononciation dug, Vogladum fonne affez comme Volliacum, dont les veu on peut fuppofer que les deux étoient auffi mouillées. Il n'y au- 264. ra pas eu entre ces deux noms Latins une difference plus grande que celle qui eft en François entre Vouglé & Vouillé.

Quant à la feconde des raifons que je réfute, je dirai que Gregoire de Tours n'a point écrit que la bataille dont il s'agit, ait été donnée fous les murs de Vouglé, mais bien dans les champs de Vouglé, in campo Vogladenfi. Qui empêche de croire que ces champs ne s'étendiffent pas jufques au bord du Clain qui n'eft éloigné que de dix mille de Vouglé. C'aura été fur le terrein qui eft entre Vouglé & le Clain que les deux armées fe feront mifes en bataille. Combien y a-t-il de batailles, qui portent le nom d'une Ville ou d'un Bourg à deux lieues duquel elles fe font données ? Sans fortir du Poitou, n'appelle-t-on point la bataille don

Recher. fur Tombeaux de Civaut, P.

née à Maupertuis l'an mil trois cens cinquante-fix entre le Roi Jean & le Prince de Galles, la journée de Poitiers, quoique Maupertuis foit à deux lieues de Poitiers? Dans la fuppofition que l'armée de Clovis cut une lieue de front, la pointe de fa droite n'aura été qu'à une lieue du Clain, & la pointe de fa gauche à une lieue de Vouglé. N'eft-ce point affez pour dire que la bataille fe fera donnée dans les champs de Vouglé & fur les bords du Clain, quand même les champs de Vougle ne fe feroient pas étendus jufques fur le bord de cette riviere?

Les détails de la bataille de Vouglé qu'on lit dans Gregoire de Tours ne vont point jufqu'à nous apprendre le nombre des morts & des bleffés. Il fe contente de nous dire à ce fujet : ( a ) Que les citoyens de l'Auvergne qu'Apollinaris avoit amenés au fecours d'Alaric, demeurerent la plûpart fur le champ de bataille, & qu'il y cut parmi les morts un grand nombre de Sénateurs. Quoique Gregoire de Tours ne femble faire ici mention, que des Auvergnats fes compatriotes, on peut croire cependant qu'il y avoit bien d'autres Romains qu'eux dans l'armée des Vifigots. (b) Un article de la Loi Nationale de ce Peuple ordonnoit à tous les Ducs, Comtes & autres Officiers obligés par leurs emplois d'aller à la guerre, foit qu'ils fuffent Vifigots, foit qu'ils fuffent Romains, de fe trouver le jour marqué au lieu du rendez-vous donné aux Milices qui devoient composer l'armée, à la tête de laquelle le Roi alloit fe mettre. Cette Loi enjoignoit même à toutes les perfonnes défignées ci-deffus, d'amener avec elles la dixiéme partie de leurs efclaves, & de les armer convenablement. D'ailleurs les Gaulois n'ont jamais été de ces Peuples pacifiques qui ont la patience de voir cinq ou fix ans durant, des Armées étrangeres s'entrebattre dans le Pays qu'ils habitent, sans se mêler de la querelle.

Quant à l'Apollinaris qui commandoit les Auvergnats à la journée de Vouglé, il étoit fils du celebre Sidonius Apollinaris, dont nous avons parlé tant de fois, & de Papianilla fille de l'Empereur Avitus. Apollinaris n'avoit point pour les Visigots la mê

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me averfion que fon pere Sidonius avoit eûe, & nous voyons que dès le regne d'Euric, (4) il s'étoit lié d'amitié avec Victorius; que ce Roi, comme nous l'avons dit en fon lieu, avoit fait Préfident de la premiere Aquitaine. Il avoit même été avec ce Victorius à Rome, & quand Victorius y eut été affommé, Apollinaris fut retenu comme captif, mis à une groffe rançon, & envoyé à Milan pour y être gardé jufqu'à ce qu'il l'eût payée. Mais, & c'eft ce qui peut fervir à donner une idée plus complette de la maniere dont les hommes penfoient fur les Augures, dans les tems dont nous écrivons l'Hiftoire : Apollinaris ayant entendu dire par hazard à un Mendiant la veille de la fête de faint Victor Martyr, Tous les Captifs qui fe fauvent cette nuit ne font jamais ratrapez, il réputa ce difcours un préfage heureux, & partant fur le foir avec un valet de confiance, il prit hardiment le chemin de l'Auvergne, où il arriva fain & fauf. Il paroît cependant que les facilités qu'il avoit trouvées à s'évader, l'euffent rendu fuf- Avit. Vien. Ep. 44. 45. &c pect à Alaric, mais on voit par deux lettres d'Avitus qu'Apollinaris avoit regagné la confiance de ce Prince.

Gregoire de Tours ne dit point que notre Apollinaris ait été du nombre des Auvergnats morts à Vouglé. Auffi n'y fut-il point tué. Il fut même quelques années après élû Evêque de l'Auvergne, mais il ne vêcut que trois mois après fon exaltation, ainsi que nous l'avons déja dit dans le Chapitre précedent en parlant de faint Quintianus.

Le peu que Procope dit concernant la bataille de Vouglé, fert à rendre encore plus vraisemblable l'idée que nous avons donnée de cette action de guerre. Après avoir rapporté qu'Alaric s'étoit pofté fous Poitiers pour n'être point obligé à combattre avant que d'avoir été joint par les Oftrogots, il ajoûte que cette manoeuvre déplaifoit fort aux Vifigots qui fe croyoient capables de battre feuls les Francs, & que ce fut par complaifance pour fa Nation que ce Prince donna la bataille de Vouglé. » Ala

»ric (b), écrit notre Hiftorien, fut donc forcé à livrer bataille » aux ennemis, avant qu'il eût été joint par les Oftrogots. Tout

(4) Igitur Apollinaris cum Victorio Duce Italiam petiit, quem aiunt apud Romam interfectum, Apollinarem incolæ loci quafi captivum retinebant dicentes: Non videbis patriam tuam fed dignas ut fatelles tuus pœnas exfolves. Hæc autem comminati miferunt eum in exilium apud urbem Mediolanenfem..... Et afcendentes ita Alpium juga pertranfierunt atque Arvernum perlati funt. Tome II.

Greg. Tur. de glor. Martyr. cap. quadra-
dragefimo quinto.

(b) Quare Oftrogothis abfentibus coa-
ctus eft Alaricus cum hofte confligere. Quo
in prælio fuperiores Germani Alaricum Re-
gem cum plerifque Vifigothorum, occidunt,
magnam Gallix partem occupant, & summa
contentione Carcaffonem obfident.
Procop. de Bell. Goth. cap. 12.
Bb

46.

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