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quement pour le mieux convaincre encore de la verité de ce qu'il doit avoir pensé de lui-même fur ce fujet-là, que je vais rapporter quelques paffages d'Auteurs qui ont vêcu fous le regne fils & des petits-fils de Clovis, & qui ont écrit pofitivement que ce Prince devoit à fa conversion ses plus grandes profpérités.

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(a) Gregoire de Tours commence ainfi le Préambule du troifiéme Livre de fon Hiftoire: » Qu'il me foit permis de rapporter les évenemens heureux arrivés en faveur des Chrétiens qui ont » crû le Mystere de la Trinité, & les malheurs arrivés aux Hérétiques qui l'ont attaqué. Qui ne fçait qu'Arius, l'Auteur de » leur Secte, mourut dans des latrines publiques, où les intef» tins lui fortirent du corps. Ce ne fut qu'après être revenu triomphant du lieu de fon exil, qu'Hilaire, le grand deffen»feur du Dogme Catholique fur la Trinité, paffa de fa patrie » dans la patrie célefte. Ce fut par le moyen de la Religion que prêchoit ce grand Saint, que Clovis après en avoir fait pro» feffion, terraffa les Hérétiques, & qu'il obligea toutes les » Gaules à reconnoître fon pouvoir. Au contraire Alaric II. qui » étoit Arien, perdit le Royaume dont il étoit en poffeffion, & ce qui eft encore plus funefte, le partage des Elus. Les Fidels ont toujours une confolation; c'eft que Dieu leur rend le cen tuple de ce que leurs ennemis peuvent leur ôter. Mais c'eft fans en être récompenfés en aucune maniere, que les Hérétiques perdent des Etats, dont la poffeffion leur fembloit affurée. » Nous en voyons un exemple dans Godégifile, Gondebaud, » & Gondomar Rois des Bourguignons. Deux de ces Princes » font morts malheureusement, & dans la fuite tous les Etats que leur Maifon poffedoit, ont été conquis par une autre Na» tion qui en jouit à prefent. Quand Gregoire de Tours écrivoit, le Royaume des Bourguignons avoit été déja conquis par les Rois Francs.

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Le second témoignage que nous rapporterons concernant les avantages que la converfion de Clovis lui procura dès ce monde,

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(a) Velim, fi placet parumper conferre | Alaricus hanc denegans, à regno & populo, quæ Chriftianis beatam confitentes Trinitatem profpera fuccefferunt, & quæ Hæreticis camdem fcindentibus fuerint in ruinam... Arrius enim qui hujus iniquæ Secteæ primus iniquufque inventor fuit, interioribus in feceffum depofitis, infernalibus ignibus subditur.... Hanc Chlodovechus Rex confeffus, ipfos Hæreticos adjutorio ejus oppreffit, regnunique fuum per totas Gallias dilatavit.

& ab ipfa, quod magis eft, vita, mulctatus
æterna. Dominus autem fe vere credentibus,
etfi, infidiante inimico, aliqua perdunt,
hic centuplicata reftituit. Hæretici vero nec
acquirunt, fed quod videntur habere aufer-
tur ab eis. Probavit hoc Gondegefili, Gon-
dobadi atque Godomaris interitus, qui &
patriam fimul & animas perdiderunt.
Gr. Tur. in prol. lib. 3. Hift.

»

fera celui que Nicetius l'Evêque de Tréves rend à la vérité dans fa lettre à Clodefuinde, fille de Clotaire premier, l'un des fils de Clovis, & que notre Prélat écrivit à cette Princeffe, pour l'engager à travailler férieufement à la converfion d'Alboin Roi des Lombards qu'elle avoit épousé (4). » Vous devez avoir appris, » lui dit Nicetius, de la Reine Sainte Clotilde votre ayeule, > comment s'étoit fait fon mariage avec le Roi des Francs, & » comment elle étoit venue à bout de le convertir à la foi Catholique. Ce Prince qui avoit l'efprit pénétrant, ne voulut point faire une telle démarche, avant que d'avoir bien étudié » notre Religion. Ainfi ce ne fut qu'après en avoir reconnu la » vérité, qu'il s'humilia dans l'Eglife de Notre-Dame de Reims, » & qu'il y reçut le Baptême. Vous devez avoir appris en même » tems quels glorieux fuccès vinrent à la fuite de cette humilia» tion, & quels avantages votre ayeul remporta fur le Roi Gon» debaud & fur le Roi Alaric qui étoient Ariens. Enfin vous »ne fçauriez ignorer que Clovis jouit, dès ce monde d'une grande profpérité, & qu'en mourant il laiffa à fes fils un magnifique établiffement.

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Avant que d'expofer quelle étoit fous le regne de Clovis la condition des Romains, & celle des autres Peuples qui le reconnoiffoient pour Chef, avant que d'expliquer, autant qu'il eft poffible de l'expliquer, quelle étoit alors la conftitution de la Monarchie Françoife; je crois qu'il eft à propos de dire comment elle acquit fous le regne des premiers fucceffeurs de ce Prince, toute la partie des Gaules qui à la mort étoit encore poffedée par les Bourguignons & par les Oftrogots, & la partie de la Germanie tenue dans ce tems-là par les Turingiens. J'ai deux raifons pour en ufer ainfi. En premier lieu, il y a eu dans tous ces évenemens-là plufieurs incidens qui doivent fervir de preuve à ce que j'ai à dire touchant la conftitution de la Monarchie des Francs. Or il vaut beaucoup mieux qu'on les life d'abord dans l'endroit de l'Hiftoire de France dont ils font partie, que de les lire rapportés en forme d'extraits qui laifferoient fouvent fouhaiter de voir ce qui les précéde & ce qui les fuit. En fecond

(a) Audiftis ab avia tua Domina Rothildi bonæ memoriæ, qualiter in Francia venerit, quomodo Dominum Clodovcum ad fidem Catholicam adduxerit, & cum effet homo aftutiffimus, noluit adquiefcere antequam vera agnofceret. Cum ifta quæ fupra dixi probata cognovit, humilis ad diva Marix

limina cecidit, & baptifari fe fine mora permifit. Qui baptifatus quanta in Hæreticos Alaricum vel Gondobaldum Reges fecerit, audifti. Qualia bona ipfe vel filii ejus in fæ culo poffederunt, non ignoratis.

Du Chefne, tom. pr. pag. 85.5.

lieu, ce ne fut que fous le regne des fils de Clovis, & vers l'année cinq cens quarante, que la conftitution de la Monarchie Françoife reçut, s'il eft permis de s'énoncer ainfi, la derniere main, par la pleine & entiere ceffion que l'Empereur Justinien fit à nos Princes de tous les droits & prétentions que les Romains pouvoient encore avoir fur les Gaules. Ainfi c'eft relativement à cette année-là qu'il convient de faire l'expofition de la conftitution de la Monarchie, d'autant plus que cette conftitution n'ayant prefque point changé depuis cinq cens onze jusques cinq cens quarante, on fçaura quelle elle étoit en cinq cens onze, lorfqu'on fçaura bien quelle elle étoit en cinq cens quarante.

CHAPITRE I I.

Thierri, Clodomire, Childebert & Clotaire, tous quatre fils de Clovis, lui fuccedent. En quelle maniere ils partagerent les Etats dont il leur laissa la puissance. Quelques évenemens arrivés dans les Gaules les premieres années du regne de ces

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Princes.

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qua

Lovis étant mort, dit Gregoire de Tours (4), fes tre fils, Thierri, Clodomire, Childebert & Clotaire lui » fuccederent, & ils partagerent fon Royaume entr'eux, par égales portions. Thierri dès-lors avoit un fils nommé Theode»bert, très-aimable de fa perfonne, & qui étoit déja en âge de » fervir l'Etat. « On a vû ci-deffus que Thierri n'étoit pas fils de la Reine Clotilde, mais d'une concubine, & qu'il étoit né avant le mariage de fon pere. Pour les trois autres, ils étoient les fruits du mariage que Clovis avoit contracté avec cette Princeffe vers l'année quatre cens quatre-vingt-douze. Quant à l'âge de nos trois Princes, tout ce qu'on en fçait, c'est que Clodomire l'aîné d'entr'eux, & qui étoit venu au monde, comme on l'a vû, avant la bataille de Tolbiac donnée en quatre cens quatre-vingt-feize, devoit avoir environ dix-fept ans en cinq cens onze, quand Clovis mourut.

(a) Defuncto igitur Clodoveoo Rege, quatuor filii ejus, id eft, Theodericus, Clodemeris, Childebertus atque Clotacharius, regnum ejus accipiunt, ac inter fe æqua lance

dividunt. Habebat jam tunc Theodericus filium nomine Theodebertum elegantem atque utilem.

Greg. Tur. Hift. lib. 3. cap. Io

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Agathias le Scholaftique, Auteur du fixiéme fiécle, & qui a laiffe une continuation de l'Hiftoire de la guerre Gothique de Procope, nous donne dans l'endroit de fon Ouvrage où il fait une difgreffion concernant s Francs, une jufte idée du partage que les enfans de Clovis firent de fon Royaume, & il n'y a rien dans Gregoire de Tours qui la contredise. » (4) Thierri, dit l'E»crivain Grec, Clodomire, Childebert & Clotaire étoient fre»res. Après la mort de leur pere Clovis, ils partagerent fes Etats » entr'eux. Ce partage, ajoute Agathias, fe fit en attribuant à >> chacun de ces Princes un certain nombre de Cités, & un cer»tain nombre de Sujets de chacune des Nations établies dans » la partie des Gaules, qui reconnoiffoit l'autorité de Clovis. A ce que j'ai oui dire, les partages furent fi bien faits, que les lots >> fe trouverent égaux : C'eft-à-dire, que chacun des quatre freres eut dans fon lot autant de territoire & autant de Francs, que fes compartageans. « En effet, comme les Francs étoient, pour ainfi dire, le bras droit de la Monarchie, il feroit arrivé, fi quelqu'un de nos quatre Princes avoit eu dans fon partage un plus grand nombre de Francs que fes freres, qu'il auroit été en état de leur faire la loi, & même de les dépouiller. Ce fut donc pour éviter cet inconvénient, fans donner atteinte néanmoins à l'égalité des parts & portions, qu'on aura commencé par mettre d'abord dans chaque Partage une certaine quantité de celles des cités des Gaules où les Francs étoient habitués en plus grandnombre. Dans le premier lot on n'aura mis, par exemple, que quatre de ces Cités-là, parce qu'il y avoit dix mille Francs de domiciliés dans leurs diftricts. Il aura fallu au contraire mettre huit de nos Cités dans le fecond lot, parce qu'il n'y avoit dans toutes ces Cités que le même nombre de Francs de domiciliés. On en aura ufé de même en compofant le troifiéme lot & le quatrième. Qu'il y ait eu des Cités où les Francs étoient domiciliés en plus grand nombre que dans d'autres, on n'en fçauroit douter. L'Hiftoire de l'établiffement des Francs dans les Gaules porte à croire que cela foit arrivé ainfi. D'ailleurs, comme nous le dirons un jour : Pourquoi une partie des Gaules également foumises à nos Rois, s'appelloit-elle à la fin de la premiere Race Francia, ou le Pays des Francs par excellence? Si ce n'eft parce que les

(a) Childebertus quidem & Lotharius, præterea vero Theodericus & Clotomerus germani fratres fuerunt. Hi, mortuo patre Clotovao, in quatuor partes regnum partiti

fecundum urbes & populos, ita ut æquas finguli partes, ut arbitror, acciperent. Agathias de rebus Justiniani, lib. pr.

Francs s'y étoient établis en plus grand nombre que dans toutes les autres contrées des Gaules.

Il n'y avoit pas d'autre moyen que celui-là pour répartir également les Francs entre les fils de Clovis, & pour donner à chacun d'eux le même nombre de combattans de cette Nation - là. Les Francs ne compofoient pas plufieurs corps de Troupes reglées, dont les Soldats & les Officiers fuffent toujours au drapeau. Ils ne s'affembloient que lorfqu'il étoit queftion de marcher en campagne, & le refte du tems ils demeuroient dans leurs domiciles ordinaires. Ainfi l'on ne pouvoit partager également cette efpece de Milice, qu'en partageant les Pays où ceux qui la compofoient le trouverent domiciliés, & cela en faifant cette divifion par rapport au nombre des Francs domiciliés en chaque Pays. Qu'aura-t'il réfulté de ce partage des Cités où les Francs étoient habitués, lorfqu'il eut été fait uniquement avec égard au nombre des Francs qui fe trouvoient dans chaque Cité ? C'est que les quatre lots fe feront trouvés fort inégaux par raport à l'étendue du territoire, & par raport au revenu. Il aura donc fallu pour compenfer cette inégalité, attribuer, quand on en fera vcnu à la divifion des Cités où géneralement parlant il n'y avoit point de Francs domiciliés, un plus grand nombre de ces dernieres Cités au Partage qui avoit eu moins de Cités que les autres, lorfqu'on avoit divifé d'abord les Cités par raport au Peuple, par raport aux quartiers des Francs qui s'y pouvoient trouver.

Voilà probablement ce qu'a voulu dire Agathias, lorfqu'il a écrit qu'après la mort de Clovis fes enfans partagerent fon Royaume entr'eux par rapport aux Nations & par rapport aux Cités. Ce que nous trouvons concernant ce partage, foit dans Grégoire de Tours, foit dans les autres Ecrivains qui ont vêcu dans les Gaules, confirme encore l'idée que nous venons d'en donner. En effet on y voit que le Partage dont il s'agit, fut fait d'une maniere très-finguliere, & qui marque fenfiblement qu'en le reglant, on avoit eu en vûe quelque deffein particulier. Entrons en preuve.

Dès qu'il s'agiffoit de partager en quatre lots égaux le Royaume de Clovis, le bon fens & la raifon d'Etat vouloient qu'on compofât chaque lot des Cités contigues, afin de faire de chaque lot un Corps d'Etat arrondi & dont tous les membres fuffent unis & tinffent enfemble. Cependant voilà ce qui ne se fit point. Au contraire, & c'eft ce qui paroît extrêmement bizarre, quand on ne fait point de reflexion au motif qui, fuivant mon opinion, détermina les Compartageans à prendre le parti qu'ils

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