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tre. Retournons au Livre de Monfieur le Blanc.

... » Il y a bien encore d'autres monnoyes d'or où fe trouve le » nom de Clovis écrit en quelqu'une des manieres dont on

l'écrivoit fous la premiere ou fous la feconde Race de nos » Rois, & que quelques perfonnes ont cru pouvoir attribuer » au grand Clovis. Il nous refte trois tiers de fol d'or qui por» tent le nom de Clovis; mais comme il y a eur dans la pre»miere Race trois Rois de ce nom, il eft bien difficile de fça» voir à qui les deux monnoyes fuivantes appartiennent. Pour » le troifiéme tiers de fol d'or, il eft inconteftablement de » Clovis II. comme je le ferai voir dans la fuite.

Dès qu'il n'y a point de raifon convainquante pour attribuer ces trois tiers de fols d'or, les trois dernieres médailles dont il vient d'être parlé à Clovis I. on ne doit point les lui attribuer, parce que ce feroit donner le démenti à Procope, qui dit pofitivement que les Rois des Francs ne firent fabriquer des efpeces d'or avec leur nom, & leur tête, qu'après qu'ils furent devenus pleinement Souverains des Gaules par la ceffion que Juftinien feur fit de tous les droits de l'Empire fur cette grande Province. Je conclus donc de tout ce qui vient d'être expofé, que Clovis aura fait fabriquer les feules efpeces d'or qui ayent été frappées fuivant l'apparence par fes ordres, & qui font celles qui fureat battues à Soiffons, & les premieres dont il a été parlé, en se conformant aux ufages de l'Empire dont il fe montroit par ce procedé, l'ami fidele & l'Officier refpectueux.

Reprenons le fil de l'Hiftoire de ce Prince, que nous avons laiffé dans les Etats de Syagrius, dont il s'étoit rendu maître en quatre cens quatre-vingt-fix. Gregoire de Tours renferme en quatre paroles tout ce qu'il juge à propos de dire concernant ce que fit Clovis depuis cette année-là, jufqu'à fon mariage avec Clotilde qu'il époufa vers quatre cens quatre-vingt- treize. » Après la défaite de Syagrius, dit notre Historien, Clovis » eut de grands fuccès, & il fit plufieurs autres guerres, du » nombre defquelles fut la (4) guerre qu'il déclara la dixiéme En 490. » année de fon regne aux Turingiens qu'il fubjugua dès-lors, » & qu'il mit au nombre de fes Sujets. Une narration fi breve ne fçauroit être regardée que comme un titre de Chapitre. Elle eft de même nature que les récits fuccints & tronqués qui, comme on l'a vû, compofent les deux Chapitres du fecond Li

(a) Multa deinde bella, victoriafque fe- bellum intulit, eofdemque fuis ditionibus eit, nam decimo anno regni fui-Toringis fubjugavit. Gregor. Tur. Hift. lib. 2.cap. 27.

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vre de l'Hiftoire de notre Auteur, lefquels renferment la Vie de Childéric. Mais Gregoire de Tours a prétendu feulement rappeller dans la narration fuccinte dont il eft ici question, le fouvenir de tout ce que Clovis avoit fait depuis fon avenement au Thrône jufques à fon mariage avec Sainte Clotilde.

Les fieges, en un mot, tous les exploits que Clovis avoit faits durant les cinq ou fix années écoulées depuis quatre cens quatrevingt-fix & quatre cens quatre-vingt-treize avoient été décrits par des Auteurs dont nous n'avons plus les Ouvrages? Quelle lacune leur perte ne laiffe-t'elle pas dans nos Annales. Tâchons cependant de fuppléer en quelque forte, à la brieveté de Gregoire de Tours en ramaffant dans les autres Ecrivains de quoi éclaircir le peu qu'il dit. Dans la fuite nous tenterons de trouver dans ces mêmes Auteurs quelque lumiere concernant les évenemens, dont il ne fait aucune mention.

Je me contenterai donc ici de remarquer qu'aucune acquifition n'étoit pour lors autant à la bienféance de Clovis, que celle de la Turingie Gauloise, ou de la Cité de Tongres. Nous avons déja montré, & ce que nous allons rapporter, en fera une Liv. 2. ch. nouvelle preuve,que Procope & Gregoire de Tours avoient donné le nom de Turingie à la Cité de Tongres, & nous avons même rendu compte des raifons qui pouvoient les avoir engagés à en ufer ainfi. Or l'acquifition de la Cité de Tongres dont le territoire a confiné avec le territoire ou le Diocèfe de Tournay jufques dans le feiziéme fiecle que fe fit l'érection du Siége Archiépifcopal de Malines, & celle de plufieurs autres Evéchés des Pays-Bas, arondiffoit les Etats de Clovis, & lui ouvroit une communication de plein-pied avec les Ripuaires établis entre le Bas-Rhin & la Baffe-Meufe, & qui avoient pour Roi Sigebert fon Allié. Sur qui Clovis fit-il la conquête de la Cité de Tongres? Fut-ce en obligeant le Sénat de Tongres, qui s'étoit maintenu dans l'indépendance depuis que l'anarchie avoit lieu dans les Gaules, à fe foumettre à lui? Fut-ce en conquérant ce pays-là fur quelqu'effain de Francs qui s'y étoit cantonné précedemment? Y fut-il appellé par les Francs, qui depuis longtems y avoient des quartiers, & qui jufqu'à l'anarchie avoient été Sujets de l'Empire? Les monumens qui nous restent, ne nous l'apprennent pas.

J'obferverai en fecond lieu que le peu que Grégoire de Tours nous dit concernant cette conquête de Clovis, ne laiffe point d'être une nouvelle preuve que cet Auteur & Procope ont parlé

quelquefois du pays de Tongres fous le nom de Turinge. En effet on ne fçauroit entendre des Turingiens d'au-delà du Rhin, ce que dit Gregoire de Tours des Turingiens qui furent foumis Clovis la dixième année de fon regne; c'eft-à-dire, en quatre cens quatre-vingt-dix. La raifon veut qu'on l'entende des habitans anciens ou nouveaux de la Cité de Tongres.

par

Premierement, il eft hors d'apparence que Clovis dans un tems où il ne tenoit encore aucun pofte fur la gauche du Rhin depuis Strasbourg jufqu'à Cologne, puifque ces contrées, comme on le verra, étoient alors fous la domination des Allemands & des Ripuaires, ait été conquérir le pays des Turingiens Germaniques, établis affez loin de la rive droite de ce Fleuve. Les circonftances de la mort de Sigebert Roi des Ripuaires feront foi, que Sigebert tenoit les contrées de la Germanie, qui font vis-à-vis celles qu'il poffedoit dans les Gaules, & qui n'en font féparées que par le cours du Rhin. Comment Clovis auroit-il pú garder cette Turinge Germanique, quand même il l'eût conquife, puifqu'il n'auroit pû communiquer avec elle, qu'en prenant continuellement paffage fur le territoire d'autrui.

chap. 27.

Secondement, les Turingiens dont parle Gregoire de Tours dans le paffage que nous avons rapporté, furent foumis par Clovis, ils devinrent fes Sujets dès la dixième année de fon regne. Suo dominio fubjugavit, dit cet Hiftorien. On ne sçauroit douter de la fignification qu'il donne à ces paroles, puifque pour faire dire aux Francs Saliens dans les termes les plus forts qu'ils étoient Sujets de Clovis, il leur fait dire: Tuo fu- Hift. lib. 2. mus dominio fubjugati; nous fommes fous le joug de votre domination. Or cela ne fçauroit être entendu des Turigiens de la Germanie, puifque nous verrons qu'ils n'obéirent jamais à Clovis, qu'ils eurent toujours leurs Rois particuliers, & même que leur Royaume fut très-floriffant jufqu'à la conquête qu'en firent les enfans de ce Prince vers l'année cinq cens trente & un. Je conclus donc que c'eft des Turingiens des Gaules; que c'est des Tongriens qu'il faut entendre ce qu'a dit Gregoire de Tours dans le vingt-feptiéme Chapitre du fecond Livre de fon Hiftoire: Qu'ils furent domptés & affujettis par Clovis la dixième année du regne de ce Prince.

Cet évenement n'eft qu'un de ceux que Gregoire de Tours dit être arrivé entre la conquête des Etats de Syagrius & la converfion de Clovis. En effet l'Hiftorien après avoir fini fon vingt-feptiéme Chapitre par les paroles que j'ai rapportées,

commence le Chapitre fuivant par la négociation faite pour marier Clovis avec Sainte Clotilde qui, comme on fçait, contribua plus que perfonne à la converfion du Roi fon époux. Ainfi lorfque Gregoire de Tours a dit dans fon vingt-feptiéme Chapitre que Clovis avoit fait plufieurs guerres, & qu'il s'étoit rendu maître de plufieurs pays dont la Cité de Tongres étoit un, & cela dans le tems qui s'étoit écoulé depuis quatre cens quatre-vingt-fix jufqu'à fa converfion: Cet Ecrivain a eu en. vûë des évenemens arrivés avant l'année quatre cens quatrevingt-feize que Clovis fut baptifé. Nous avons déja dit que nous tâcherions de trouver dans les autres Auteurs quelques traces des évenemens dont il fait une fi legere mention. Mais avant que de l'entreprendre & de continuer l'Hiftoire de Clovis où nous placerons fuivant l'ordre chronologique, tout ce qu'il eft poffible de fçavoir concernant les évenemens dont Gregoire de Tours fe contente de faire une mention fi générale & fi fuc-. cinte, je crois qu'il eft à propos de raconter ce qui fe paffa en Italie depuis l'année quatre cens quatre-vingt-neuf jusqu'en quatre cens quatre-vingt-treize. Le changement de fcene qui pour lors arriva dans cette grande Province, aura facilité à Clovis les progrès que nous lui verrons faire dans les Gaules en

ces tems-là.

CHAPITRE II I.

Theodoric Roi des Oftrogots vient de l'aveu de Zenon Empereur des Romains d'Orient, chaffer d'Italie Odoacer, qu'il bat en plufieurs rencontres, & qu'il fait enfin mourir. Réflexions que cet évenement aura fait faire aux Romains des Gaules.

N

Ous avons laiffé Odoacer & les troupes révoltées qu'il commandoit, les maîtres de l'Italie, qu'ils avoient comme fubjuguée en quatre cens foixante & feize, & nous avons dit que Zénon après avoir refufé l'offre des Romains des Gaules qui vouloient fe joindre à lui pour en chaffer nos Barbares, avoit fait quelqu'efpece de convention avec cette armée féditieuse. Soit qu'Odoacer n'eût pas tenu ce qu'il avoit promis par cette convention, foit que Zénon eût honte depuis qu'il fe voyoit raffermi fur le trône d'Orient du parti lâche qu'il avoit pris, il donna en quatre

cens

cens quatre-vingt-neuf à Théodorić l'importante commission d'aller mettre à la raifon les troupes auxiliaires qui s'étoient cantonnées en Italie, & qui compofoient l'armée d'Odoacer.

Théodoric un des Rois des Gots, étoit de la Maison des Amales, la plus illuftre qui fût dans cette Nation. S'il avoit beaucoup de valeur & d'expérience, il avoit encore plus d'ambition. Elevé parmi les Romains il avoit cultivé fon efprit de bonne heure, & avec tant de fruit, qu'il étoit le moins Barbare de tous les Barbares dont parle l'Hiftoire de fon tems. S'il n'eût point été Arien, on l'auroit cru un Romain travefti en Got. La Tribu des Oftrogots, dont il étoit le Chef, & fuivant la maniere de parler du cinquiéme fiècle, le Roi fe trouvoit, lorfqu'il commença de regner, engagée au service de l'Empire d'Orient, qui lui avoit donné des quartiers permanens dans la Thrace. Théodoric qui fe fentoit tous les talens néceffaires pour faire une grande fortune parmi les Romains, s'attacha donc à eux encore plus étroitement que les autres Chefs des troupes auxiliaires, & il mérita que l'Empereur Zénon l'adoptât pour fon fils (4), & qu'il le fift Conful ordinaire en l'année quatre cens quatre-vingt-quatre. C'étoit la plus grande dignité que Zénon lui pût conferer.

Theodoric toujours peu content de la fortune qu'il avoit faite, afpiroit fans ceffe à une plus grande. Ce fut ce qui lui avoit fait tirer l'épée contre fon bienfaiteur. La brouillerie aïant été terminée par un accommodement, il dit à l'Empereur Zénon: Pourquoi laiffer gémir plus longtems fous la tyrannie d'Odoacer l'Empire d'Occident, dont vos prédeceffeurs ont pris toujours tant de foin, & qu'ils ont fi fouvent gouverné? Pourquoi laiffer la ville de Rome, cette Capitale de l'Univers, au pouvoir d'une troupe de Brigands? Envoyez-moi donc en Italie à la tête de ma Nation? Je ne vous

(a) Et poft aliquod tempus ad amplian- | dum honorem ejus in arma, fibi eum filium adoptavit de fuifque ftipendiis triumphum in urbe donavit, factufque eft Conful ordinarius, quod fummum bonum primumque in mundo decus edicitur.... Hefperia, inquit, plaga quæ dudum decefforum prædecefforumve veftrorum regimine gubernata eft, & urbs illa caput orbis & domina ; quare nunc fub Rege Turcilingorum & Rugorum Tyrannide ductuat. Dirige cum Gente mea fi præcipis ut hic expenfarum pondere careas, & ubi fi adjutus à Domino vicero, fama veftræ pietatis irradiet. Expedit namque ut ego qui fum fervus vefter & filius fi Tome II.

vicero, vobis donantibus regnum illud poffideam, haud ille quem non noftis, Tyranni jugo Senatum veftrum partemque Reipublica captivitatis fervitio premat. Ego enim fi vicero, veftro dono, veftroque munere poffidebo, fi victus fuero, veftra pietas nihil amittit, imo, ut diximus, lucratur expenfas. Quo audito, quamvis ægre ferret Imperator difceffum ejus, nolens tamen eum contriftare, annuit quæ pofcebat, magnifque ditatum muneribus dimifit à fe, Senatum, Populumque Romanum ei commendans.

Jornandes de rebus Geticis, cap. quinqua gefimo feptimo.

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