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dent fe fervoient pour exprimer la nature de la liaison qui étoit entre eux & les Empereurs d'Orient: ainfi Amalafonthe traitoit d'égal à égal avec Juftinien, quand elle lui demandoit Punanimité.

Théodat écrivit auffi de fon côté à Juftinien une lettre qui fe trouve parmi les Ouvrages de Caffiodore, qui l'avoit compofée. Ce Prince y dit à l'Empereur: (a) » Dès qu'un Roi est monté » fur le Trône, l'usage veut qu'il faffe part de fon avenement à » la Couronne aux autres Souverains, afin qu'ils lui accordent l'amitié qu'ils doivent avoir pour les perfonnes revêtuës de la » même dignité qu'eux.

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Une Hiftoire Critique permet d'interrompre la narration toutes les fois qu'il fe préfente une occafion de faire des remarques propres à prouver quelque chofe de ce qu'on y peut avoir avancé. J'obferverai donc, en ufant de cette liberté, que les nouveaux Souverains avoient coutume dès-lors, comme je l'ai fuppofé en plufieurs endroits, de donner part de leur avenement au Trône aux autres Princes. Caffiodore le dit expreffément; & nous pouvons encore appuyer fon autorité de celle de Menander Protector. (b) Cet Auteur écrit que Juftin fecond, qui fucceda en cinq cens foixante & cinq à fon oncle Juftinien, envoya Johannes en Perfe. » Quel que fut le véritable fujet de fa miffion, ajoute notre Auteur, elle avoit pour prétexte, la néceffité de » donner part au Roi des Perfes de l'avenement de Juftin à l'Em» pire, & de remplir le devoir dont ces Rois & les Empereurs » Romains s'acquittent réciproquement en pareilles occafions.

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Théodat fut ou plus ambitieux, ou moins reconnoiffant, qu'Amalafonthe ne fe l'étoit promis. Quelques mois après fon élevation, il dépouilla fa bienfaitrice de l'autorité fouveraine, & les foupçons qu'il conçut en voyant l'impatience avec laquelle cette Princeffe portoit fa dégradation, l'engagerent à la confiner dans une Ifle du Lac de Bolféne. Amalafonthe de fon côté eut recours à Juftinien, qu'elle promettoit d'aider de fon crédit & de fes amis, pour le rendre maître de l'Italie, fans exiger d'autempore Imperium fufcepit, mifit Johannem Domantioli filium, in Perfiam ut Legatione fungeretur. Legatio vero hæc erat, fic enim accepi & vulgo ferebatur, ut pro more inter Romanos & Perfas recepto nuntiaret Juftino Imperium delatum. Menander Protect. in excerptis Legat. Can toclar. pag. 309.

(a) Juftiniano Imperatori Theodatus Rex. Significat fe ab Amalasontha in focium regni affumptum & petit ut judicio fuo faveat. Novis Regibus mos eft per diverfas Gentes provectus fui gaudia nuntiare, ut adquirant effectum Principis externi de ipfa communione regnandi.

Caffiod. Var. lib. 10. Ep. 2.

(b) Juftinus Juftiniani nepos quo fere

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tre récompenfe de fes fervices, qu'un établiffement & une retraite convenables à une Reine, fille de Roi, & mere de Roi. Juftinien promit plus qu'on ne vouloit; mais les menées d'Amalafonthe furent découvertes, & Theodat la fit mourir. Je me conforme dans ce récit aux Hiftoires de Procope, quoique GreHift. Fr. Lib. goire de Tours raconte bien différemment la catastrophe d"Amalafonthe. Mais tous les Sçavans font convenus d'abandonner ici l'Hiftorien Latin, pour fuivre l'Hiftorien Grec, qui avoit plus de capacité que l'autre, & qui avoit déja part aux affaires dans le tems que les évenemens dont il eft question, arriverent.

3. Cap. 31.

Le meurtre d'Amalafonthe rendit Théodat fi odieux aux Oftrogots, qui refpectoient en elle le fang du Fondateur de leur Monarchie, & aux Romains, à qui elle étoit chere, parce qu'elle avoit reçu une éducation femblable à la leur, que Justinien crut qu'il étoit tems de recouvrer l'Italie. Il entreprit d'autant plus volontiers ce projet, qu'il avoit déja dans la Province d'Afrique une armée victorieufe, celle qui venoit de fubjuguer les Vanda les: Bélifaire qui la commandoit eut donc ordre de paffer en Sicile: c'étoit par la conquête de cette Ifle qu'il falloit commencer l'entreprise. (a) Il y paffa, & il la conquit en l'année cinq cens trente-cinq.

Ce fut alors que Juftinien voulut négocier avec les Rois des Francs, un Traité qui obligeât ces Princes à ne le point traverfer dans le recouvrement de l'Italie fur les Oftrogots. Il n'étoit pas de leur interêt de fouffrir que l'Empereur des Romains d'Orient fe rendît maître de cette Province; mais il fe flattoit que le parti qu'il leur offriroit, & le reffentiment qu'ils devoient avoir contre le meurtrier d'une niece de Clovis, les engageroient à laiffer détrôner Théodat fans tirer l'épée en fa faveur. Voici ce qu'on trouve dans Procope concernant la premiere négociation de l'Empereur Juftinien avec nos Rois.

(b) Cet Historien, avant que de faire la digreffion fur l'origine & fur les premiers progrès des Francs, de laquelle nous nous fommes fervis tant de fois, dit: » Juftinien envoya auffi pour

(a) Belifario Confule, co anno quo
Confulatum dedit Siciliam ingreffus, cam
Imperatori Romano reftituit.

Mar. Avent. Chron. ad ann. 535.
(b) Tunc quoque legationem ad Franco-
rum Principes cum his litteris mifit. Quo-
niam Gothi non modo Italiam quam habent
ditioni noftræ ereptam vi, reftituere nolunt,

fed injurias etiam nobis nec mediocres nee tolerabiles impofuerunt non laceffiti, ipfis bellum inferre coacti fumus. Nobifcum vos id fufcipere convenit quod commune facit, cum germana religio erroris Ariani expultrix, tum odium quo æque ut nos diffidetis à Gothis.

Procop. de bello Gos. lib. x, cap. 5

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» lors des Ambaffadeurs prefenter aux Rois Francs une lettre dont la teneur étoit: Les Oftrogots non contens de s'être emparés par force de l'Italie qui nous appartient, & de refuser » de l'évacuer, nous ont fait encore, fans que nous y euffions » donné lieu, plufieurs injures des plus graves, & telles que l'honneur ne nous permet pas de les diflimuler. Voilà ce qui nous oblige à faire marcher une armée contr'eux; il eft juste >> que vous nous donniez du fecours dans la guerre où nous nous » engageons contre un ennemi qui doit être auffi le vôtre, principalement, parce qu'étant vous & moi de la même Commu»nion, vous déteftez les erreurs d'Arius qu'il fait profeffion de » fuivre.

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Il n'y a point d'apparence qu'une lettre, dans laquelle l'Empereur d'Orient explique fi clairement fes projets, foit la preiniere qu'il ait écrite à Théodebert, qui étoit regardé comme le Chef de la Maifon de France, parce qu'il étoit fils de Thierri l'aîné des enfans de Clovis. Je crois donc que la lettre qui vient d'être rapportée, n'aura été écrite que plufieurs mois après celle où Juftinien félicitoit Théodebert fur fon avenement à la Couronne, & dont nous avons parlé à l'occafion du Consulat de Clovis. La réponse que Théodebert fit à cette premiere lettre de Juftinien, & dont nous avons donné un affez long extrait, dans l'endroit de notre Ouvrage que nous venons de citer, aura noué une correfpondance entre les Princes Francs, & la Cour de Conftantinople, & dans la fuite Juftinien aura écrit la lettre que Procope nous a confervée, celle qu'on vient de lire, & dans laquelle notre Empereur, pour me fervir de l'expreffion ordinaire, s'avance en homme qui a déja fondé le gué.

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La négociation réuffit. (a) » L'Empereur, dit Procope, joignit à fa lettre aux Princes Francs, un préfent en argent > comptant, & la promeffe d'un fubfide confiderable qui leur » feroit payé dès qu'ils auroient commencé la guerre. Les Francs » furent fi fatisfaits de ce qui leur étoit donné & de ce qui leur » étoit promis, qu'ils s'engagerent à faire la guerre conjointement avec les Romains d'Orient.

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Cette alliance des Rois Francs avec Justinien faite avant que la guerre eût commencé, eft encore prouvée & rendue plus certaine, par ce que dit Procope dans le quatrième Livre de

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l'Histoire de la guerre Gothique. Pour mettre mieux le Lecteur au fait de ce que contient l'endroit de cet Ecrivain dont faire usage, il faut anticipant fur l'avenir, parler de ce qui arriva long-tems après l'année cinq cens trente-cinq, où nous fommes encore, & quand on étoit déja dans le fort de la guerre, du prélude de laquelle nous rendons compte ici. Theodebert fe déclara à deux reprises contre les Romains d'Orient durant cette guerre, & dans plufieurs rencontres il les attaqua comme leur ennemi. C'eft ce dont il s'agit dans le paffage de Procope, que nous allons rapporter comme une nouvelle preuve qu'il y eut une alliance faite entre Juftinien & les Francs dès l'année cinq cens trente-cinq, ou du moins l'année fuivante.

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» Auffitôt que Theodebald eut fuccedé à Theodebert (4) »fon pere, mort en cinq cens quarante-huit, l'Empereur Jufti"nien envoya au nouveau Roi le Senateur Léontius, pour lui perfuader de joindre de nouveau fes armes à celles des Ro» mains contre les Oftrogots, & d'évacuer les contrées de l'Italie, dont les Francs, au mépris des Traités, s'étoient emparés fous le regne précedent, & dont ils étoient encore en poffeffion. Leontius dit donc à Theodebald dans l'audience qu'il eut de ce Prince. Il n'y a gueres de Souverain à qui plus » d'une fois il ne foit arrivé des difgraces aufquelles il ne s'at» tendoit point; mais il n'est jamais arrivé à aucun d'eux rien qui ait dû le furprendre autant que Justinien mon Souverain » a dû l'être de la conduite que les Francs ont tenue à fon égard. Tout le monde fçait que ce Prince n'eut pas fi-tôt conçu le deffein de faire la guerre aux Oftrogots, qu'il vou

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(4) Paulo antea Theodebertus Francofum Rex, morbo obierat cum fibi nullo negotio tributaria feciffet nonnulla Ligurica loca, Alpes Cottias agrique Veneti partem maximam. Etenim Franci arrepta belli quo Romani Gothi quæ erant impliciti opportunitate, fine difcrimine ditionem fuam his locis auxerunt de quibus illi pugnabant. Venetorum pauca oppida Gothis fupererant, nam Komani maritima, Franci cætera occuparant...... Poftquam vero in regnum Theodeberti fucceffit Theodebaldus fi ius, ad eum Juftinianus Legatum mifit Leontium Athanafii generum ac Senatorem, poftulans ut arma fecum adverfum Totilam & Gorhos jungeret, cederetque locis qua Theodebertus in Italia contra jus foleris occupaviffet. Ubi ad Theodebaldum venit Leontius, ita differuit.

Sunt forte quibus contra expectationem aliquid acciderit; qualia vero à vobis in Romanos admiffa funt, nemini præterea contigiffe unquam crediderim. Etenim Juftinianus Auguftus non ante ad bellum iftud adjecit animum, nec fe arma in Gothos movere prius oftendit, quam Franci auxilia promififfent amicitia & focietatis nomine , accepta ingenti pecunia. At illi adeo non promiffi partem implevere aliquam ut Romanis injuriam tantam intulerint, quantam vel fufpicari nemo facile poffit. Neque enim dubitavit pater tuus Theodebertus in Provincias contra jus falque involare quas Imperator labore multo, bellicifque periculis, idque fine Francorum ope, in ditionem fuam fubjunxerat.

Procop. de bello Got. lib. 4. cap. 24,

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"lut avant toutes chofes s'affurer de l'alliance de votre Na» tion, & qu'il n'attaqua fon ennemi qu'après qu'elle fe fut obligée, moyennant une groffe fomme d'argent, qu'elle toucha, d'agir de concert avec lui; cependant non-feule» ment les Francs ne tinrent pas compte alors d'accomplir les » engagemens où ils étoient entrés, mais il n'y a forte d'outra»ge que votre pere, n'ait fait effuyer aux Romains d'Orient. » Il a envahi plufieurs contrées du territoire de l'Empire fur lefquelles il n'avoit pas la moindre ombre de droit. Je ne » viens pas ici, ajouta Leontius, pour vous faire des reproches » fur le paffé, mais pour faire en forte que vous foyez vérita»blement de nos amis à l'avenir. « Le refte du difcours de l'Ambaffadeur ne regarde pas le fujet dont il eft ici question, je veux dire, l'alliance conclue entre Juftinien & les enfans de Clovis, avant que Bélifaire fît fa defcente en Italie, & qui fait ici notre principal objet.

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On peut regarder deux autres lettres de Theodebert à Justinien, qui font échappées aux injures du tems, & dont je n'ai point encore parlé, comme deux réponses que ce Prince aura faites à deux dépêches que l'Empereur lui avoit écrites quelque tems après la conclufion du Traité dont il s'agit. Le LeAteur quand il aura vû le contenu de ces réponfes, jugera, si je me trompe. (4) Dans la premiere, Theodebert dit qu'il a bien reçu la dépêche par laquelle Juftinien le prioit d'envoyer inceffamment trois mille hommes au fecours du Patrice Brigantinus, mais que par des raifons dont Andreas, qui la lui avoit rendue, eft bien informé, il n'avoit pas pû être affez heureux pour rendre le fervice qu'on lui demandoit. Ce Prince finit par des proteftations d'attachement, fa lettre, dont la fufcription eft Le Roi Theodebert au très excellent & très-illuftre Seigneur notre pere l'Empereur Juftinien.

La feconde de celles des lettres de Théodebert à Juftinien, defquelles il s'agit ici, contient la réponse à des questions que cet Empereur avoit faites au petit-fils de Clovis, touchant l'éten-. duë de la domination des Francs dans la Germanie, & touchant les différens Peuples de ces Contrées qui reconnoiffoient cette domination. Théodebert y parle comme un homme qui commu

(a) Domino illuftri & pracellentiffimo Domino Patri Juftiniano Imperatori Theodebertus Rex. Litteras gloriæ veftræ Andrea Comite veniente fufcepimus, quibus indi

care dignamini tria millia virorum in folatium Brigantini Patricii dirigere deberemus, &c. Du Chefne, tom. pr. pag. 862.

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