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nique l'état de fes affaires à un ami qui s'en eft informé par affection. Il y dit donc (a) qu'après la défaite des Turingiens, la conquête.de leurs Etats, & la mort de leurs Princes, les Francs avoient étendu leur domination des rivages de l'Océan jufqu'aux rives du Danube. » Je rends compre de ces profperités à votre » Augufte Hauteffe avec quelque plaifir, ajoute Théodebert, » parce que je fuis bien informé de fon zélę pour la propagation » de la Foi Catholique qu'elle & moi nous profeffons, & qui » devient la Religion dominante dans tous les Pays dont les » Francs fe rendent maîtres.

Ainfi lorfqu'en l'année cinq cens trente-fix, Bélifaire fit fa defcente dans le continent de l'Italie pour en chaffer les Ostrogots, les Romains d'Orient étoient alliés de notre Nation, & ils devoient même compter fur fon fecours. Comme les divers évenemens de la guerre qui commença cette année-là, ne font point de notre fujet, nous n'en parlerons que fuccinctement, bien qu'ils faffent, grace aux Hiftoriens Grecs, la partie de l'Hiftoire du fixiéme fiecle que nous fçavons avec le plus de détail. Nous avons donc réfolu de n'en faire mention qu'autant qu'il le fera néceffaire pour conduire le Lecteur par des routes connues, jufques à la remife des Provinces que les Ostrogots tenoient en deçà des Alpes, par rapport aux Gaules, faite par eux aux enfans de Clovis & à la ceffion des droits de l'Empire fur toutes les Gaules faite en premier lieu à ces mêmes Princes par les Oftrogots, & validée en fecond lieu par l'Empereur Juftinien.

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CHAPITRE VII.

Premiers fuccès de Bélifaire, Général de Juftinien. Traité entre les Francs & les Oftrogots qui reçoivent des premiers quelque fecours. Juftinien fait enfuite fon fecond Traité avec les Francs, & par ce Traité il leur cede la pleine Souveraineté de toutes les Gaules. Obfervations fur quelques points de te Traité.

A

Juger de la durée de la guerre que Bélifaire commença en Italie contre les Ostrogots en l'année cinq cens trente-fix, par les premiers évenemens, on croiroit qu'elle auroit dû être terminée dès la troifiéme campagne. D'abord les armes de Justinien furent heureuses par tout, mais bientôt la fortune parut fe repentir de la conftance qu'elle avoit eue; & tantôt favorable à un parti, & tantôt favorable à l'autre, elle fit durer vingt ans une guerre qui fembloit devoir être terminée en trois années.

Bélifaire étoit encore (a) en Sicile lorfque Théodat Roi des Oftrogots offrit aux Francs pour les détacher de l'alliance des Romains d'Orient, de leur compter une groffe fomme d'argent & de leur délaiffer tout ce qu'il tenoit au-delà des Alpes par rapport à l'Italie, moyennant qu'ils s'obligeaffent de leur côté à lui donner du fecours: mais le traité n'ayant pas été conclu, & Bélifaire ayant mis le pied dans le continent de l'Italie, Théodat épouvanté en vint jufques à capituler fecrettement avec lui; Théodat offrit donc aux Romains d'Orient de leur livrer fes propres Etats à certaines conditions. Enfin l'accord étoit prêt d'être conclu quand les Oltrogots indignés de la foibleffe de leur Roi, le maffacrerent & mirent Vitigès en fa place au commencement de l'année cinq cens trente-fept. On ne fera point fâché de trouver ici un fragment de la lettre que Caffiodore écrivit au nom de Vitigès à tous les Oftrogots pour leur donner part de fon élection. Rien de ce qui peut donner quelque notion des usages & de la maniere de penfer des Nations barbares qui avoient envahi

(a) Deinde Theodatus Gothorum Rex de Belifarii in Siciliam adventu certior fa&tus, cum Germanis pacifcitur, ut ipfi eorum Reges ad hoc bellum auxilio veniant, ubi Galliæ partem in ditione Gothica fiTome II.

tam ac duo millia auri pondo acceperint. Verum is prius vitæ finem implevit, quam pacta conventa forent.

Procop. de bello Got. lib. 1. cap. 13.

Xx

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les Provinces de l'Empire Romain, n'eft étranger dans un Ou vrage de la nature de celui que je compofe: Voici cette lettre (a) Le Roi Vitigès à tous les Ostrogots, Salut. » Nous vous don» nons, part après en avoir rendu grace à Jefus - Christ Auteur » de tout bien, que l'armée des Oftrogots campée en front de » Bandiere, nous a élevé fuivant la coutume de nos ancêtres » fur un Pavois, & que par l'effet de la Providence, elle nous a proclamé Roi, nous regardant comme une perfonne capable » de faire la guerre avec fuccès, parce que nous y avons acquis déja quelque forte de réputation. Ce n'a donc point été dans » une chambre, mais en rafe campagne que nous avons été » fait Roi. » Voilà une cenfure de la maniere dont Theodat avoit été élevé.

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Vitigès auffi-tôt qu'il eut été élû, tâcha de faire la paix avec Juftinien, mais les démarches qu'il hafarda dans ce deffein ayant été infructueufes, & ce Prince voyant bien d'ailleurs qu'il lui étoit impoffible de faire tête en même tems aux Romains & aux Francs, il prit le parti de rechercher les derniers & de leur offrir de nouveau ce que Théodat leur avoit offert déja. Les Francs écouterent cette fois-là, les propofitions de Vitigès au préjudice de leur traité avec Juftinien. La promptitude des progrès de Bélifaire avoit ouvert les yeux aux fucceffeurs de Clovis. Elle avoit fait comprendre à ces Princes qu'ils étoient perdus, fi loin de mettre des obftacles à la rapidité du torrent, ils continuoient à en hâter le cours. Voyons ce que Procope écrit concernant le traité que les Oftrogots & les Francs firent en cette conjoncture. » Dans le tems que Vitigès fut élû, il y avoit dans la partie des

Gaules qui étoit fous la domination des Oftrogots, un corps » de troupes confidérable, compofé des meilleurs Soldats de >> cette Nation & commandé par Martias, qui avoit charge de » veiller à la confervation de ce Pays-là & de le défendre contre » les Francs. Qu'arriva-t'il? Bélifaire étant entré dans Rome, » à la fin de la premiere année de la guerre, Vitigès réfolut au » commencement de l'année fuivante, de marcher à Rome avec » les plus grandes forces qu'il lui feroit poffible de rassembler, » pour reprendre au plûtôt une Ville dont la perte décréditoit

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» les armes des Oftrogots. En faifant réflexion fur les fuites de » fon expédition, ce Roi comprit aifément que Martias, lorsqu'il » ne pourroit plus être foutenu de proche en proche, ne confer>> veroit pas long-tems le Pays qu'il gardoit. Vitigès craignoit encore avec raifon que les Francs, après avoir conquis en » quelques mois ce Pays-là, ne fe livraffent à leur impétuofité naturelle, & que fe trouvant tout affemblés, ils ne defcen» diffent en Italie pour y attaquer encore les Oftrogots d'un côté, tandis que les Romains les attaqueroient de l'autre. » Dans ces conjonctures, le Roi des Oftrogots affembla les prin»cipaux de fa Nation pour déliberer avec eux fur le parti qu'il » convenoit de prendre, & voici le difcours qu'il leur tint.

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"Je ne vous ai point affemblés ici, vous qui m'êtes tous at» tachés par les liens les plus étroits, pour avoir vos avis fur plufieurs projets de campagne, & choifir avec vous celui qui » feroit le plus avantageux à la gloire de notre Nation: C'est » au contraire pour voir ce que nous pouvons faire de moins » mal dans les triftes conjonctures où nous fommes. Ne nous » laiffons pas éblouir par l'état où se trouvent actuellement nos » troupes campées fous Ravenne. J'en tombe d'accord, nous » voilà en état d'entrer en campagne & de faire tête aux Ro» mains d'Orient : Mais les Francs ne feront-ils pas bientôt une » diversion en faveur de nos ennemis? La Nation des Francs » n'aime point les Ostrogots. Vous feavez combien il nous a » fallu répandre de fang pour arrêter fes progrès, & qu'encore » ce n'a été qu'à grand'peine que nous lui avons résisté en des »tems où nous n'avions point à combattre d'autre ennemi qu'elle. Il est donc néceflaire, fi nous voulons marcher avec » confiance contre les Romains, de terminer auparavant la » guerre que nous avons avec la Nation des Francs, qui fans cette fage précaution uniroit bientôt ses enfeignes à celles de » Bélifaire. La raison naturelle apprend aux hommes qui ont » le même ennemi, qu'il leur faut l'attaquer de concert. Si pour » nous opposer à la jonction des Francs & des Romains, nous féparons nos forces, en les partageant en deux corps, les » Francs battront une de ces armées tandis que les Romains » déferont l'autre. Par-tout nous ferons vaincus. Ne vaut - il » donc pas mieux céder une petite portion de nos domaines » pour nous mettre en état de bien défendre l'autre, que tout perdre en nous efforçant de tout conferver? Ainfi mon » avis eft, que nous cédions aux Francs la partie des Gaules

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de

» que nous tenons, laquelle il nous eft fi difficile de défendre que nous leur donnions les deux mille livres

» contre eux, & ont été déja offertes par Theodat, mais

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pefant qui leur

» à condition qu'ils figneront avec nous un traité de paix & » d'alliance. Il feroit inutile de raisonner à prefent fur ce que » nous pourrons faire un jour, pour recouvrer la Province que nous céderons aujourd'hui. A chaque jour fuffit la peine.

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» Tout le monde fut de l'avis de Vitigès (4) & fur le champ on fit partir des Ambaffadeurs avec commiffion d'offrir aux » Francs la ceffion des Gaules, & de leur promettre encore cent » mille fols d'or en argent comptant, moyennant qu'ils s'en»gageaffent par un traité à fecourir les Oftrogots. Theodebert, Childebert, & Clotaire, qui regnoient alors fur les Francs, » agréerent ces propofitions & ils conclurent le traité. Auffitôt »les Oftrogots en exécuterent les conditions. (comme il eft ju» ftifié par la fuite de l'Histoire.) Ils firent donc une ceffion des » Gaules aux Francs, ils leur remirent les Cités qu'ils y tenoient » encore, & ils leur compterent la fomme promife. Les trois » Princes que je viens de nommer, partagerent également en» tr'eux & l'argent qu'ils avoient reçû, & le pays qui leur avoit » été remis. Cependant dès qu'il fut queftion d'exécuter les con» ditions d'un traité fi avantageux, ils dirent que leurs enga» gemens précédens avec Juftinien, à qui depuis peu » promis de favorifer fes armes, ne leur permettoit pas de fe dé» clarer hautement contre lui, & d'envoyer un corps compofé » de Francs naturels, joindre l'armée des Oftrogots, mais qu'ils » leur alloient envoyer un puiffant fecours compofé de Soldats » des Nations que

·Procope ne de les Francs avoient fubjuguées.

ils avoient

point comment les Ambaffadeurs Ostrogots prirent la reftriction que les Princes Francs voulurent mettre au traité dont ils venoient de recueillir le fruit. Cet Hiftorien finit le récit de ce mémorable événement, en difant: Que les Ambaf

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