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mécs, de tenir le premier traité qu'ils avoient fait avec lui, il ne l'attendit pas long-tems. L'année fuivante, c'est-à-dire, en cinq cens trente-neuf, (a) Théodebert defcendit en perfonne en Italie. Il s'y empara de la Ligurie, & pénétra même dans le Plaifantin, où la température de l'air & là mauvaise qualité des eaux firent beaucoup fouffrir fon armée.

On peut voir dans Procope un récit beaucoup plus long de cette premiere expédition de Théodebert, laquelle il ne faut pas confondre avec l'expédition que Buccellinus fit plufieurs années après en Italie, fous les aufpices de ce Prince.

Gregoire de Tours fait mention de ces deux expéditions dif férentes des Francs en Italie, fous le regne de Théodebert, & il dit pofitivement, que dans la premiere ce Prince commandoit en perfonne fon armée, au lieu que dans la feconde, elle étoit commandée fous fes aufpices, par Buccellinus. Notre Historien, après avoir raconté, à fa maniere, la fin tragique d'Amalafonthe, & après avoir parlé de l'accommodement des Francs & des Of trogots, écrit: (b) "Theodebert paffa en Italie, où d'abord » il fit de grands progrès; mais comme le Pays eft mal fain, son » armée y fut attaquée de fiévres de toutes efpeces; ce qui lui fit prendre le parti de s'en revenir dans les Gaules, où lui & »fes troupes ils arriverent gorgés de butin. On prétend que » dans cette expédition, Théodebert fe foit avancé jusques à la » Cité de Pavie. Dans la fuite il renvoya en Italie Buccellinus, » qui après avoir fubjugué plusieurs Contréés en-deçà des Ap» pennins, paffa ces montagnes, & pénétra dans l'Italie pro

prement dite. « Cette feconde expédition, celle dans laquelle Buccellinus commandoit en chef l'armée des Francs, ne fe fit, autant qu'il eft poffible d'en juger par l'endroit de fon Hiftoire, où Procope en place le récit, que vers l'année cinq cens quaDe bello Got. rante-fept, c'eft à-dire, après le fecond traité de Juftinien avec les Francs, qui eft le traité dont nous allons parler, & peu de tems avant la mort de Théodebert arrivée en cinq cens quarante-huit.

1:b. quarto.

(a) Appione Confule Theudibertus Rex Francorum Italiam ingreffus, Liguriam Æmiliamque devaftavit, ejufque exercitus loci infirmitate gravatus, valde contribulatus eft.

· Mar. Avent. Chr. ad ann. $39.

(b) Theodebertus vero in Italiam abiit, & exinde multum adquifivit. Sed quia loca illa ut fertur morbida funt, exercitus ejus in diverfis febribus corruens vexabatur. Multi

enim ex his in illis locis mortui funt. Quod videns Theodebertus ex ea reverfus eft mul- . ta fecum fpolia ipfe vel fui deferentes. Dicitur tamen tunc temporis ufque Ticinum acceffiffe Civitatem. In qua Buccellinum rurfum direxit qui Minori illa Italia capta atque in ditionibus antedici Regis redacta, Majorem petiit.

Gr. Tur. hift. libro 3, cap. 32.

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On ne fçauroit prefque douter, que ce n'ait été entre ces deux expéditions des Francs en Italie, c'eft-à-dire, entre l'année cinq cens trente-neuf & l'année cinq cens quarante-fept, que Justinien fit avec eux ce fecond traité, dont l'explication doit être le dernier Chapitre de la partie hiftorique de mon Ouvrage. Il est probable que ce fut peu de mois après la premiere des deux expéditions de Théodebert, que Juftinien perfuadé qu'il ne pourroit point venir à bout des Oftrogots tant qu'il auroit la guerre contre les Francs, voulut profiter, pour faire un fecond traité avec eux, du dégoût qu'ils devoient avoir en cinq cens quarante pour les entreprifes en Italie, qui venoient d'être le cimétiere des plus braves Soldats de leur Nation. Dans ce deffein Juftinien fe fera adreflé à quelqu'un des Romains qui étoient dans la confiance des Rois Francs, & par leur entremife il aura conclu fon fecond traité avec ces Princes. Peut-être le traité dont il eft question aura-t'il été négocié par un (a) Secundinus, qui, fuivant Gregoire de Tours avoit beaucoup de crédit fur l'efprit de Théodebert, & qui fe glorifioit beaucoup d'avoir été plufieurs fois l'Ambaffadeur de ce Prince auprès de Juftinien.

Si Procope avoit rapporté ce qu'il nous apprend concernant le traité dont il s'agit, dans la narration des évenemens de la guerre dont il écrit l'hiftoire. En un mot, s'il avoit parlé de ce traité en fuivant l'ordre des faits, on pourroit peut-être en trouver la date précise. On pourroit la découvrir, en examinant quand feroient arrivés les évenemens qu'il auroit placés immédiatement avant ce qu'il écrit fur ce traité, ainsi qu'en examinant quand feroient arrivés les évenemens qu'il n'auroit placés qu'après ce récit; mais ce que Procope dit concernant notre traité, il le dit dans des réflexions générales fur les fuites funeftes qu'avoit eues la guerre entreprise contre les Oftrogots. Ainfi on ne fçauroit affeoir aucune conjecture chronologique fur l'endroit de fon Hiftoire, où Procope a placé ce qu'il nous apprend touchant la ceffion abfolue des Gaules faite aux Rois Francs par Juftinien. Tout ce qu'il m'eft poffible de dire de plus précis ou plûtôt de moins vague fur la date de cet évenement, c'est qu'il eft arrivé peu de tems après, ou peu de tems avant que Totila fut pro. temp. lib. 7. clamé Roi des Oftrogots, ce qui fe fit en l'année cinq cens quarante-un. Ma raison, c'eft que Procope dit dans le paffage qu'on

(a) Afteriolus tunc & Secundinus, magni cum Rege habebantur. Erat autem uterque fapiens & Rhetoricis imbutus litteris. Sed

| Secundinus plerumque Legationem Impe-
ratori à Rege miffus intulit, & ob hoc ja-
&tantiam fumpferat. Ibidem, cap. 33.
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Petav. Rat.

cap. quinto.

va lire, que cette ceffion n'empêcha point les Francs, fitôt qu'ils virent que Totila donnoit beaucoup d'affaires à Juftinien, de l'attaquer de nouveau, & de pouffer leurs conquêtes jufques fur les bords de la mer Adriatique. Ainfi comme les progrès de Totila fuivirent de près fon élevation au Trône, comme les Francs attaquerent les Romains d'Orient dès qu'ils les virent mal menés par Totila, & comme la ceffion dont il s'agit, étoit déja faite quand les Francs fous le regne de Totila, attaquerent les Romains, il paroît qu'elle a été faite en l'année cinq cens trenteneuf, ou dans l'une des deux années fuivantes. Ecoutons enfin Procope. » Ce fut à la faveur de la guerre entreprise par Jufti»nien contre les Oftrogots, que les Barbares (4) qui avoient » des quartiers dans les Provinces de l'Empire d'Occident s'en » rendirent les véritables maîtres, & que levant le mafque, ils » s'en firent reconnoître Souverains. Tandis que les Romains qui avoient eu un fi grand air de fupériorité dans les commen» cemens de cette guerre, s'épuifoient fans aucun fruit d'hom»mes & d'argent pour la foutenir & pour ravager l'Italie, les » Francs s'affuroient la poffeffion des Gaules ; & d'un autre côté, » les Barbares qui s'étoient établis fur la frontiere de la Thrace » & de l'Illyrie, dévastoient ces Provinces: Voici comment » tout cela fe fit. Dès la premiere année de la guerre Gothique, l'Oftrogot, comme nous l'avons dit dans le premier Livre

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(4) Hujus belli tempore, totius Occidentis Imperio Barbari potiti funt, ac bellun Gothicum cujus primordia Romani præclaris victoriis infignierant quemadmodum su· pra narravi, eo recidit ut non modo pecunias & corpora plurima abfque ullo impenderint emolumento, fed Italiam quoque vaftaverint & Illyricum Thraciamque fere univerfam à Barbaris utpote jam finitimis, fæde populari viderint, quod ita contigit. Vid. Proc. Belli hujus initio Gothi, ut in libris dixi Hafch. p. 304. fuperioribus, Gallias integras fuæ ditionis

effectas, Germanis cefferant illis ac Roma-
nis refiftere fe fimul non poffe rati. Quod ne
fieret adeo non impedire Romani potuerunt,
ut Juftinianus Auguftus confirmaverit ne ab
his Barbaris fi hoftiles animos induerent tur-
baretur, Nec vero Franci Galliarum poffeffio.
nem nifi illam Imperator fuis litteris com-
probaviffet fibi tutam rati. Ex eo tempore
Germanorum Reges Maffiliam Phocentium
Coloniam ac maritima loca omnia adeoque
maris imperium obtinuerunt. Jamque Are-

late pugnis equeftribus præfident & nummos cudunt auro Gallico non Imperatoris, ur fieri folet, fed fua impreffos effigie. Monetam quidem argenteam Perfarum. Rex arbitratu fuo cudere confuevit, auream vero neque ipfi, neque alio cuipiam Barbarorum Regi quamvis auri Domino, proprio vultu fignare licet, quippe ejufmodi mone ta commercio vel ipforum Barbarorum excluditur. Ibi Francis res vel ita cellerat. Jam maximam agri Veneti partem occuparunt Gothi ac Torila bello fuperioribus Franci nullo negotio, cum nec Romani illos arcere, nec Gothi utrifque arma inferre poffent. Gepades qui olim urbem Sirmium Da. ciamque omuem obtinuerant, ut primum, Juftinianus Auguftus ditioni Gothicæ regionem illam eripuit, agentes ibi Romanos obduxerunt in fervitutem & continen ter progreffi, vim vaftitatemque Imperio

Romano attulerunt.

Procop. de bello Goth. lib. 3. cap. 13.

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» de notre Hiftoire, voyant bien qu'il ne pouvoit point faire » tête à la fois aux Romains d'Orient & aux Francs, céda » les Gaules entieres qui étoient de fa dépendance, à ces der»niers. (Le texte original dit pofitivement les Gaules entieres.) » Non-feulement les Romains ne fe trouverent point alors en » état de traverfer cette ceffion, mais il fallut encore que Juftinien, qui ne vouloit pas donner aux Francs aucun fujet de » lui déclarer la guerre, confirmât par un acte autentique la » ceffion dont je viens de parler. Les Francs exigeoient cette » confirmation, perfuadés qu'ils étoient, que les Gaules ne pouvoient devenir une poffeffion permanente entre les mains » de leur Nation, que par le moyen d'un Diplome de l'Empe»reur expedié en bonne forme. En effet, dès que les Rois Francs » l'eurent obtenu, ils furent reconnus pour Souverains dans » Marseille, qui eft une Colonie de nos Phocéens, ainsi que » dans les Cités adjacentes, & par-là ils devinrent encore les » maîtres de la mer des Gaules. Auffi ces Princes ont-ils donné depuis dans Arles des jeux à la Troyenne, & ont-ils même » fait frapper avec l'or qui fe tire des mines de cette grande Province, des monnoyes où ils ont mis leur effigie, au lieu » d'y mettre, comme il fe pratiquoit, celle de l'Empereur. On » sçait bien que le Roi des Perfes, quoiqu'il puiffe faire fabri»quer des efpeces d'argent à fon coin, ne peut pas non plus » que les autres Rois Barbares, mettre la tête & fon nom fur » les efpeces d'or qu'ils font frapper, quand bien même on au»roit fouillé dans leur Pays les mines dont le métail a été tiré. » Dumoins s'ils en ufoient autrement, leurs efpeces n'auroient » aucun cours, même parmi les Barbares. Voilà les avantages que " tirerent les Francs de la fituation où fe trouvoit Juftinien pour » s'être engagé dans la guerre Gothique. Cependant dès que les Oftrogots eurent fous le regne de Totila, repris quelque fupériorité fur les Romains, les Francs firent de nouveau la » guerre aux Romains, & ils s'emparerent fans beaucoup de peine, d'une partie confidérable du Pays des Vénétes. J'interromprai ici pour un moment la narration de Procope, afin de faire fouvenir le Lecteur de ce qu'il a vû dans le Chapitre précédent: Que Juftinien avoit fait demander par Léontius fon Ambaffadeur auprès de Théodebald fils de Théodebert, la restitution d'un Canton de l'Italie, que Théodebert avoit occupé contre la teneur des traités faits entre les Francs d'une part, & les Romains d'Orient de l'autre. Suivant les apparences, ce Canton

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que Juftinien fit redemander aux Francs fous le regne de Théodebald, étoit le Pays des Vénétes, dont ils s'étoient emparés fous le regne de Théodebert, & à la faveur du défordre où les fuccès de Totila mettoient les affaires des Romains d'Orient. Procope reprend la parole. » Les Romains n'étoient point en fituation de fe défendre contre les Francs quand cette inva» fion fut faite, & les Ostrogots qui partageoient alors l'Italie avec les Romains, ne pouvoient point faire face à la fois à » deux ennemis. Dans le même tems les Gépides à qui Juftinien » avoit donné des quartiers auprès de Sirmich & dans toute la » Dace dès qu'il en avoit eu chaffé les Oftrogots, s'érigerent en Tyrans dans ces Contrées. Ils y réduifirent en fervitude les » Romains qui les habitoient, & ils coururent enfuite & facca» gerent les Provinces voifines.

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On concevra facilement que les fucceffeurs de Clovis avoient un grand interêt à exiger de Juftinien, qu'il ratifiât & qu'il validât, en la confirmant, la ceffion que les Oftrogots leur avoient faite en cinq cens trente-fept; parce qu'elle n'étoit pas un titre valable contre l'Empire, qui ne reconnoiffoit point ces Barbares pour poffeffeurs légitimes des Pays & des droits qu'ils avoient cédés ou tranfportés aux Francs: mais quelque caduque que fût la ceflion faite aux Francs par les Oftrogots, elle devint bonne & valable par le confentement pofitif qu'y donna Juftinien. D'ailleurs, cette confirmation qui étoit une véritable rénonciation aux droits de l'Empire fur les Gaules faite en faveur des Francs, les autorifoit à exiger des Romains de cette grande Province, ce qu'ils n'avoient pas encore pû leur demander, je veux dire un ferment de fidélité abfolu & fans aucune reftriction. Jufques là les Romains des Gaules avoient pû fe regarder comme étant toujours Sujets de l'Empire, & comme n'étant tenus d'obéir aux Rois Francs, qu'à caufe du pouvoir que Clovis avoit reçû de l'Empereur Anaftafe, & qu'il avoit tranfmis à ses enfans. Òr ce pouvoir n'étoit, fi j'ose m'expliquer ainfi, qu'un pouvoir adminiftratif, un pouvoir précaire, un pouvoir emprunté & émané d'un autre Souverain, & fujet par conféquent à infpection dans fon exercice, comme à révocation dans fa durée. Mais après que Juftinien eut cédé pleinement les Gaules aux enfans de Clovis, les habitans de cette vafte Contrée durent reconnoître nos Rois

pour leurs feuls & légitimes maîtres. La pleine Souveraineté des Gaules appartint dès-lors à ces Princes en toute propriété. Il paroît même que Juftinien fe fçut gré en quelque forte d'avoir don

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