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d'Orient, pour terminer la guerre que ces expéditions avoient alkumée : & fuivant l'ufage ordinaire, ces Traités auront remis en vigueur les articles effentiels du Traité précedent, du fecond Traité des enfans de Clovis avec Juftinien, & les Romains de Conftantinople ne fe feront plus portés pour Seigneurs Suzerains des Gaules après cela, & même ils auront ceffé d'y exercer aucun acte de Souveraineté. Du moins s'ils ont tenté d'en exercer, ç'aura été fecretement, & ils auront défavoué eux-mêmes leur entreprise, dès qu'on s'en fera plaint, comme d'une infraction des traités. (a) » Le Roi Gontran fils de Clotaire premier & petit-fils de Clovis, envoya la vingt-feptième année de fon regne, Frédegaire, le Comte Syagrius en Ambaffade à Conftantinople. Syagrius y fut créé Patrice par une prévarication de l'Empereur Maurice. La trame fut bien ourdie, mais ayant » été découverte, elle demeura fans effet. « C'est-à-dire, que Maurice révoqua le Diplome, en vertu duquel Syagrius vouloit fe faire reconnoître dans les Gaules pour un Officier de l'Empire, ou que ce Romain n'ofa le publier ni tenter de s'en prévaloir, Ce Syagrius defcendoit-il d'Egidius Maître de la Milice fous l'Empire de Majorien, & qui regna un tems fur la Tribu des Saliens? Où l'apprendre?

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dit

Je crois pouvoir rapporter comme une fuite du complot dont je viens de parler, une médaille d'or de l'Empereur Maurice qui regnoit en Orient la vingt-feptième année du regne de Gontran. Cette médaille a été gravée plufieurs fois : l'on peut la voir dans Bouteroue & dans l'Edition de Joinville donnée par M. du Cange. On y trouvera d'un côté la tête de Maurice avec la Légende: D. N. MAURITIUS P. P. AUGUSTUS, & de l'autre côté le Labarum, avec la Légende: VIENNA DE OFFICINA LAURENTI? Qu'il me foit permis de conjecturer que dans le tems où fe tramoit le complot de Syagrius, quelques-uns de fes adhérans firent frapper dans Vienne cette monnoye pour marquer que cette Ville fe réputoit encore fous la fuprême puiffance des Empereurs Romains, nonobftant la ceffion faite aux Rois Francs par Juftinien, de tous les droits de l'Empire, dont le droit de faire frapper des efpeces d'or à leur coin, étoit un des principaux. La narration de Frédegaire eft fi tronquée qu'elle ne me femble pas pouvoir donner lieu à des con

(4) Anno vigefimo feptimo Regis Guntchramni, Syagrius Comes Conftantinopo. lim juffu Guutchramni in Legatione pergit, Tome II,

ibique fraude Patricius ordinatur. Cœpta
quidem eft fraus, fed non proceffit.
Fredeg. Chr. ad ann. 587. cap. 6. pag. 597.
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Diff. 23.

pag. 284.

jectures plus fatisfaifantes. On peut encore appuyer la conjecture que je hafarde, fur ce qu'il y a dans la médaille une S, laquelle coupe les lettres qui compofent le nom de Maurice, & que cette lettre eft la premiere du nom de Syagrius.

Il est vrai néanmoins que bien que nos Rois ayent été indépendans à tous égards des Empereurs d'Orient dés l'année cinq cens quarante, ils n'en ont été reconnus comme Empereurs d'Occident, que deux cens cinquante ans aprés. (a) Eghinard après avoir dit que Charlemagne ayant joint à fes titres celui d'Augufte & d'Empereur, ajoute: » Će grand Prince vit fans s'é» mouvoir que les Empereurs de Conftantinople fiffent beau"coup de bruit des nouvelles qualités qu'il fe donnoit. Il vint » même à bout de la répugnance qu'ils avoient à les lui don> ner & il la furmonta en leur envoyant de fréquentes Am» baffades, & en leur écrivant des lettres où il les traitoit toujours de freres. « Nous avons obfervé à l'occafion de l'entrevûe de Clovis & d'Alaric fous Amboife, qu'il étoit déja établi par l'ufage au commencement du fixiéme fiécle, que les Têtes Couronnées qui traitoient d'égal à égal, s'appellaffent freres, quoiqu'ils ne le fuffent point. Jufques à Charlemagne on n'avoit donné à nos Rois d'autre titre, comme nous l'allons dire, que celui de Roi des Francs fimplement, ou tout au plus de Roi des Francs & Prince des Romains.

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Ma feconde obfervation fera, que le Royaume de France, que la Monarchie, dont le Fondateur a placé le Trône dans Paris, a fur les Contrées de fa dépendance non-feulement le droit que les autres Monarchies qui composent aujourd'hui la focieté des Nations, ont fur les Contrées de leur obéiffance, je veux dire le droit acquis par la foumiffion des anciens habitans, & par la prescription; mais que cette Monarchie a encore fur les Contrées de fa dépendance, un droit que les autres Monarchies n'ont pas fur les Contrées de leur domination. Ce droit fur les Provinces de fon obéiffance, qui eft particulier à la Monarchie Françoife, eft la ceffion authentique qui lui a été faite de ces Provinces par l'Empire Romain, qui depuis près de fix fiecles les poffedoit à titre de conquête. Elles ont été cédées à la Monarchie Françoise par un des fucceffeurs de Jules Céfar & d'Au(a) Quo tempore Imperatoris & Augu- | magnanimitate qua eis procul dubio lonfti nomen accepit...... Invidiam fufce- ge præftantior erat, mittendo ad eos crebras pti nominis Conftantinopolitanis Impera- Legationes, & in Epiftolis fratres cos aptoribus fuper hoc indignantibus magna tu- pellans. Egh. de vita Caroli Mag. cap. 241 lit patientia, vicitque corum contumaciam pag. 113. Edit. Schminkii.

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gufte, par un des fucceffeurs de Tibere que Jefus-Chrift lui-même reconnut pour Souverain légitime de la Judée, fur laquelle cependant cet Empereur n'avoit pas d'autres droits que ceux qu'il avoit fur les Gaules & fur une portion de la Germanie. La Monarchie Françoise eft donc de tous les Etats fubfiftans, le feul qui puiffe fe vanter de tenir fes droits immédiatement de l'ancien Empire Romain. Auffi les Auteurs les plus intelligens dans les Droits de nos Rois, & dans nos Annales ont-ils dit que ces Princes étoient les fucceffeurs des Empereurs, (a) & que c'étoit l'autorité Impériale qu'ils exerçoient dans leur Royaume. On trouve cette propofition en termes exprès dans le Difcours que Monfieur Jacques- Augufte de Thou fit à l'Univerfité de Paris, lorfqu'il la réforma en qualité de Commiffaire du Roi Henry Quatre, la premiere année du fiecle dernier.

Perfonne n'ignore que l'Empire moderne ou l'Empire Romano-Germanique, comme le nomment fes Jurifconfultes, n'est point, & même qu'il ne prétend en aucune maniere être la même Monarchie que l'Empire Romain, fondé en premier lieu par Romulus. Les Chefs de l'Empire d'Allemagne ne se donnent point pour fucceffeurs des Céfars, ni pour héritiers des droits d'Augufte & de Théodofe le Grand. L'erreur feroit puérile.

Tous les Sçavans connoiffent le Traité Des limites de l'Empire d'Allemagne, qu'Hermannus Conringius, un de fes plus célebres Jurifconfultes, publia en mil fix cens cinquante-quatre, & qui a depuis été réimprimé plufieurs fois. Conringius dit dans cet Ouvrage, qui eft regardé avec une grande déférence par les Compatriotes de l'Auteur. (b)» Il eft évident par tout ce qui

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vient d'être expofé, que les droits de l'Empire Germanique >> fur les Provinces renfermées dans fes limites, ne lui viennent point de l'Empire Romain, dont les droits font profcrits de» puis long-tems. C'eft d'une autre fource qu'émanent les droits » de l'Empire Germanique, & c'eft à cette fource qu'il faut re» monter pour trouver leur origine. « Monfieur Pufendorf fi connu dans la République des Lettres par fon Traité du droit de La Nature & des Gens, & par fes Hiftoires, écrit la même chofe

(a) Reges Francorum..... Quippe qui Imperatoribus fuccefferunt & Imperatoria poteftate in regno fuo præeffe cenfentur.

Thuan. lib.Hift. 123.

(b) Ex hifce vero fatis ubique apparet originem atque jura omnium Germanici Imperii Provinciarum, non ex illis dudum

exoletis veteris Imperii Romani juribus, fed aliunde profluere, adeoque ex aliis longe fontibus etiam negotii hujus univeri notitiam petendam effe.

Conringius de finibus Imperii, lib. prime §. tertio.

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que fon Compatriote. On lit dans l'Etat de l'Empire d'Allemagne que Monfieur Pufendorf fit imprimer d'abord fous le nom fup pofé de Severinus de Mozambano Veronenfis, & qui depuis a été réimprimé plufieurs fois fous le nom véritable de fon Auteur; » Ce feroit (4) commettre une faute d'écolier, que d'i»maginer que l'Empire d'Allemagne fût aux droits de l'Empire » des Céfars, & que la Monarchie Germanique ne foir qu'une » continuation de la Monarchie Romaine. « Monfieur Vander Muelen d'Utrecht, le même qui nous a donné un long & docte Commentaire fur le Livre du Droit de la guerre & de la Paix par Grotius, prouve fort au long cette vérité dans fon Traité De ortu & interitu Imperii Romani. Elle eft enfin reconnue par les Auteurs fans nombre qui ont écrit fur le Droit Public d'Allemagne. En effet, comme l'obferve Pufendorf, il s'eft écoulé trop de fiecles entre le renversement de l'Empire Romain en Occident, & l'érection de l'Empire Romano-Germanique en forme d'une Monarchie particuliere, pour penfer que la feconde de ces Monarchies foit la continuation de la premiere, & que la premiere ait pû transmettre fes droits à la feconde. C'est Charlemagne que les Empereurs modernes regardent comme le Fondateur de l'Etat dont ils font les Chefs.

(a) Ex quibus apparet puerilem valde errare errorem qui credunt regnum Germanorum in antiqui illius Romani Imperii viccm fubiiffe & hoc in illa continuari, cum

illud Imperium cujus fedes Roma erat, dudum fuerit deftitutum, antequam Germania inftar regni haberi cæpiffet. Sam. Pu fend. de ftatu Imp. Germ. cap. 1. par. 14.

LIVRE SIXIEME

373

CHAPITRE PREMIE R.

Idée générale de l'Etat des Gaules durant le fixiéme fiécle, & les trois fiécles fuivans. Que les differentes Nations qui pour lors habitoient dans les Gaules, n'y étoient pas confondues. Ce qu'il faut entendre par Lex Mundana, ou la Loy du Monde.

A du

VANT que de continuer l'Hiftoire de la Monarchie
Françoife, il eft nécessaire d'expofer aux Lecteurs,

moins autant qu'il eft poffible de le pouvoir faire, quelle fut la forme de fa premiere Conftitution.

Quoique les Monarchies naiffantes prennent ordinairement une forme d'Etat fimple & facile à concevoir, il est arrivé neanmoins que la Monarchie Françoife a eu dès le tems de fon origine, une forme d'Etat très-compofée & même affez bizarre. Sa premiere conformation a été monftrueufe en quelque maniere. La forme de la Conftitution de l'Empire d'Allemagne, & la forme de la Conftitution de la République des ProvincesUnies du Pays-Bas, ne font pas plus difficiles à comprendre, que l'eft celle de la premiere Conftitution de la Monarchie que les Francs fonderent dans les Gaules, au milieu du cinquiéme fiecle.

En fecond lieu, aucun Auteur de ceux qui ont écrit dans les tems où cette premiere forme de Gouvernement fubfiftoit encore, c'est-à-dire, fous nos Rois des deux premieres Races, n'a fongé à nous l'expliquer méthodiquement. Lorfqu'il arrive à ces Auteurs d'en dire quelque chofe, c'eft toujours par occafion. Aucun d'eux n'a entrepris de nous donner dans un écrit fait exprès, le plan de la Constitution de la Monarchie, & de compofer fur ce fujet un Ouvrage de même nature que celui

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