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que les Gynécées étoient des Edifices publics, où le Prince nourriffoit un grand nombre de femmes qu'on y faifoit travailler pour fon profit, à des ouvrages convenables à leur fexe. On fçait auffi que le travail de tourner la meule d'un moulin à bras, étoit une des peines afflictives en ufage chez les Romains. Gregoire de Tours dit en parlant d'un évenement arrivé fous Childebert le jeune, & dont il vient d'être parlé, (4) Septimina fut releguée dans une Métairie, pour y être employée à moudre le grain destiné à la nourriture d'un Gynecée. Elle étoit Romaine & convaicue comme on l'a déja vû, d'une conjuration contre ce Prince.

Nous avons dit que des que les Rois Francs furent les Maîtres d'Arles, ils y donnerent au Peuple le fpectacle de cette efpece de Tournois, que les Romains appelloient les Jeux à la Troyenne, & qu'ils affectoient d'y préfider, ainfi que les Préfets du Prétoire des Gaules y préfidoient auparavant. On lit dans Gregoire de Tours, (b) que le Roi Chilpéric fit bâtir ou réparer un Cirque à Paris & un autre à Soiffons, & qu'il y donnoit au Peuple les fpectacles ordinaires du Cirque, c'est-à-dire, des courfes de tout genre & de toute efpece.

Les Romains avoient introduit dans les Gaules l'ufage de construire des bâtimens faits exprès pour s'y baigner commodément durant toutes les faifons. On voit par ceux de ces Edifices qui fubfiftent encore, foit en Italie, foit ailleurs, qu'il y avoit des lieux destinés à faire chauffer l'eau, d'autres à fe reffuyer, enfin que la construction d'un bain devoit couter beaucoup. Gregoire de Tours nous apprend qu'il y avoit de fon tems plufieurs de ces Edifices, & même qu'il s'en trouvoit dans des Couvens de Religieufes, bâtis depuis que les Francs étoient les Maîtres dans les Gaules. Il dit en parlant d'un évenement arrivé de fon tems Andarchius prit le bain dans de l'eau chaude, il s'enyvra, & il » (c) fe mit au lit. Une des caufes qu'alleguoient celles des Religieufes de Sainte Croix de Poitiers, qui s'étoient fauvées du

(4) Septimina vero....... in Marilegium villam deducitur, ut fcilicet trahenst molam his quæ in Gynecæo pofita erant per dies fingulos, farinas ad victus neceffarias præpararet.

Greg. Tur. Hift. Lib. 9. cap. 38.

(b) Apud Sueffiones & Parifios circos dificare præcepit, coque Populis fpectaculum præbens. Ibid. Lib. 5. cap. 18.

(c) Abluitur hic aquis calidis, inebria

tur vino & fe collocat fuper ftratum.

Ibid. Lib. Hift. 4. cap. 41. Adjicientes etiam quod diverfæ earum in balneo lavarentur incongrue.

Ibid. Lib. 10. cap. 16.

Radegundis quoque ad Deum conversa mutata vefte, Monafterium fibi intra Picta venfem Urbem conftruxit.

Ibid. Lib. 3. cap. 7.

Couvent, c'eft qu'on n'y vivoit point affez régulierement, & fur-tout, qu'on ne s'y comportoit pas dans le bain avec affez de modeftie. On fçait que cette Abbaye eft de la fondation de Radegonde fille de Berthier, l'un des Rois des Turingiens, & femme du Roi Clotaire I. Gregoire de Tours lui-même étoit fervi comme les Romains de confidération avoient coutume de fe faire fervir. Tout le monde a entendu dire qu'un de leurs usages particuliers, étoit de tenir toujours auprès de leur personne, des Domestiques qu'ils appelloient Notaires, & dont l'emploi étoit de mettre par écrit les ordres que donnoit leur maître, & généralement tout ce dont il leur enjoignoit de tenir une Note, afin qu'il pût avoir recours dans l'occasion, à cette espece de papier Journal. Or voici ce qu'on trouve dans notre Historien, au fujet d'un miracle fur Bodillon, par que Dieu opera l'interceffion de Saint Martin. (4) Bodillon l'un de mes No»taires, étoit tellement incommodé d'un mal d'estomac, qui » lui affligeoit également l'efprit & le corps, qu'il ne pouvoit » plus rédiger ce qu'il entendoit, ni même écrire qu'à`grande peine ce qu'on lui dictoit mot à mot.

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Il ne paroît point que les guerres qui s'étoient faites dans les Gaules, fous le regne de Clovis & fous celui de fes fils, euffent fort appauvri le Pays. Les amendes portées dans la Loi Salique & dans la Loi Ripuaire de la derniere rédaction, fuppofent que ceux qui pouvoient y être condamnés, fuffent riches. Les peines pécuniaires de deux cens fols d'or n'y font pas rares, & il s'y trouve encore de plus fortes. Plufieurs faits contenus dans nos anciens Auteurs, font encore voir que les Gaules n'étoient gueres moins opulentes fous nos premiers Rois qu'elles l'avoient été fous les Empereurs. Gregoire de Tours en racontant un ac cident arrivé fous le regne des petits-fils de Clovis, au fujet du mariage qu'Andarchius vouloit faire, en époufant la fille d'Urfus, dit qu'Andarchius prétendoit (b) qu'il y eut un engagement entre Urfus & lui pour faire ce mariage, & même que le dédit fut de feize mille fols d'or.

Ces fols d'or me font reffouvenir de rapporter ici ce qu'on trouve dans le Traité Hiftorique des Monnoyes de France, par feu Monfieur le Blanc, concernant les efpeces que nos premiers

(a) Bodillo unus ex Notariis noftris cum ftomachi laffitudine animo turbatus erat, ita ut nec fcribere juxta confuetudinem valeret, nec excipere & quæ ci dictabantur vix poterat recenfere.

De Miracul. S. Martini, Lib. 4. cap. 10. (b) Alioquin mihi liceat res ejus poffidere donec fexdecim millibus folidorum acce ptis, me ab hac caufa removeam.

Greg. Tur. Hift. Lib. 4. cap. 47.

Rois faifoient frapper. Ce fera une nouvelle preuve que ces Princes vouloient changer le moins qu'il leur feroit poffible, l'état où ils avoient trouvé les Gaules, quand elles fe foumirent à leur domination.

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Traité Hift.
France, P.

des Monnoyes

Après avoir montré de quelle matiere étoient les Mon"noyes dont il eft parlé dans la Loi Salique, cherchons quel de » en étoit le titre, le poids, & la valeur. Il nous refte des 2. fols, des demi fols, & des tiers de fols d'or, bien entiers & » bien confervés, qui font du même poids que ceux des Em» pereurs Romains qui regnoient environ le tems que les François vinrent s'établir dans les Gaules. Cette conformité de poids me perfuade que les François imiterent les Romains » dans la fabrication de leurs Monnoyes. Ils purent même fe » fervir de leurs ouvriers & de leurs machines, après qu'ils fe » furent emparés en entrant dans les Gaules de la Ville de Tré» ves, où les Romains avoient une Fabrique de Monnoye de » même qu'à Lyon & à Arles. Agathias qui a écrit fous le com» mencement de cette premiere Race, juftifie cette penfée, lorfqu'il dit que les François emprunterent beaucoup de cho» fes des Romains. Ceux qui ont quelque connoiffance de notre "ancienne Histoire, n'auront pas de peine à être du fentiment » de cet Hiftorien. On voit aufli dans Monfieur le Blanc que l'intention de nos Rois étoit, que le titre de leur Monnoye fût le même que celui auquel les Empereurs vouloient que fuffent leurs efpeces, c'eft-à-dire, que ce titre fût le plus approchant du fin qu'il fe pourroit. S'il fe trouve des fols d'or de nos Rois de bas Aloi, il s'en trouve auffi de tels marqués au coin des Empereurs. Ces fols font l'ouvrage de faux Monnoyeurs ou de Monetaires infideles.

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Enfin la Langue Latine fut toujours une Langue vulgaire, & du moins une des Langues dont fe fervoit l'Etat fous les Rois Mérovingiens; car pour ne point entrer dans la question, s'il eft apparent que Clovis & fes fucceffeurs ayent jamais fait aucun Acte public en Langue Germanique, je me contenterai d'obferver que du moins ils en ont fait un grand nombre en Langue Latine, lefquels nous font demeurés. Tel eft le Traité fait à Andlau, entre le Roi Gontran & le Roi Childebert fon neveu F'année cinq cens quatre-vingt-huit. Gregoire de Tours qui nous a donné cet Inftrument en entier, obferve que Gontran avant que de le figner, le fit réciter à haute voix. D'ailleurs ce Traité eft daté fuivant l'ufage des Romains. Il y eft dit qu'il fut figné un

Mercredi le quatriéme jour avant les Calendes de Décembre (4). La donation faite par Clovis à l'Abbaye du Moustiers Saint Jean, eft encore en Latin: celle qu'il fit à l'Abbaye de Mici, est en cette Langue. Bref, nous avons une infinité de Lettres & d'Edits des Rois de la premiere Race, qui font tous en Latin, & nous ne fçavons pas qu'on en ait jamais vû aucuns en Langue Tudefque ou Germanique. S'il eft vrai que la Loi Salique & les autres Loix Nationales qui ont été en vigueur fous le regne de ces Princes, ont été rédigées par écrit en Langue Germaniil eft certain d'un autre côté que comme nous l'avons dit, elles furent mises en Latin presqu'aussi-tôt.

que,

CHAPITRE X V I.

De l'autorité avec laquelle Clovis & les Rois fes Fils & fes
Petits - Fils ont gouverné.

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OMME les Rois Mérovingiens avoient fur les Romains des Gaules les mêmes droits que l'Empereur avoit précédemment fur ces mêmes Romains, on ne fçauroit douter que nos Princes n'euffent un pouvoir très-étendu fur cette portion de leur Peuple. L'autorité des Empereurs Romains étoit comme defpotique, & nous l'avons remarqué déja plus d'une fois. Quant aux Allemands comme aux Bourguignons Sujets de nos Rois, c'étoient deux Peuples domptés & affujettis par la force des

armes.

Il femble que l'autorité du Roi ne dût pas être auffi grande fur les Francs qui faifoient une autre partie du Peuple de la Monarchie, parce qu'ils étoient Germains d'origine, & fortis par conféquent d'un Pays où, fuivant l'opinion commune, le pouvoir des Souverains étoit très-limité. On voit néanmoins par notre Histoire, que les fucceffeurs de Clovis n'avoient gueres moins de pouvoir fur les Francs que fur les Romains. Il est aifé de concevoir comment ce changement étoit arrivé,

Dès que la Monarchie Françoife eut été établie, nos Rois eurent une infinité de graces à donner. Quel appas pour obliger

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ceux qui les vouloient obtenir, à se soumettre aux volontés du Prince! D'ailleurs, géneralement parlant, les Francs & les autres Barbares répandus dans les Gaules, devoient être dans chaque Cité en plus petit nombre que les Romains, qui étoient armés auffi-bien que ces Barbares, & qui avoient interêt que tout Habitant du Royaume fût auffi foumis qu'eux à une autorité à laquelle ils obéiffoient en tout. La condition du Romain auroit été par trop dure, s'il eût vécu avec des voifins qui n'euffent point été tenus d'obéir auffi promptement que lui aux volontés du Souverain. Il feroit inutile d'expliquer plus au long combien la portion du Peuple fur laquelle un un Prince regne defpotiquement, a interêt que le Prince ait fur tous fes autres Sujets la même autorité qu'il a fur elle. Cet interêt eft fenfible. Les Francs épars dans les Gaules, &qui n'étoient plus raffemblés dans un petit canton, comme ils l'étoient lorfqu'ils habitoient encore la Germanie, auront donc été obligés d'obéir au Souverain avec autant de foumiffion que les Romains au milieu defquels ils vivoient. Une chofe aura encore contribué beaucoup à faciliter aux fucceffeurs de Clovis l'entreprise de se faire obéir exactement par les Francs. C'étoit l'ufage établi dès le tems qu'ils habitoient encore dans la Germanie, & fuivant lequel le Roi jugeoit feul & fans affeffeurs en matiere civile & en matiere criminelle, comme on voit que Clovis jugea, quand il punit le Franc, qui avoit donné un coup de fa hache d'armes fur le vafe d'argent que Saint Remi réclamoit. Qui peut empêcher un Prince d'augmenter fon autorité fur une partie de fes Sujets, quand il eft feul leur Juge, & quand ils attendent leur fortune de fes bienfaits, fur-tout dans les commencemens d'une nouvelle Monarchie, & lorfque ces Sujets tirés de leur ancienne Patrie, fe trouvent être tranfplantés au milieu d'autres Sujets accoutumés depuis long-tems à une entiere foumiffion.

Dans le raifonnement que je viens de faire, j'ai bien voulu fuppofer conformément à l'opinion ordinaire, que l'autorité que tous les Rois des Germains avoient fur leurs Sujets, fût un pouvoir très-limité. On pourroit cependant foutenir le contraire fans témerité. Voici, par exemple, ce que dit Velleius Paterculus en parlant de Maraboduus un des Rois des Germains du tems de l'Empereur Augufte. (a) Maraboduus avoit des Gardes.

.....

(a) Maraboduus occupavit certum Principatum, vimque regiam...... Corpus ejus cuftoditum. Imperium perpetuis exerTome II.

citiis pænè ad Romanæ difciplinæ formam, redactum, Vell. Paterc. Lib. 2.

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