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chofes importantes que les Ambaffadeurs de Théodoric étoient chargés de communiquer de bouche à Clovis. Autant qu'on peut le deviner, c'étoit des av fur quelque Traité d'alliance que les Bourguignons négocioient alors avec l'Empereur Anaftafe, & dont les conditions intereffoient les autres Puiffances de la Gaule. Comme Theodoric étoit alors brouillé avec cet Empereur ainfi nous le dirons bientôt, il lui convenoit de faire que une contre-ligue avec Clovis, & peut-être lui fit-il propofer dèslors l'alliance offenfive contre les Bourguignons, laquelle nous leur verrons conclure dans trois ans. Je reviens aux Allemands pour qui Theodoric intercédoit.

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Il paroît qu'il obtint ce qu'il demandoit en leur faveur, & que Clovis ceffa de pourfuivre les vaincus. La fuite de l'Hiftoire apprend, que Theodoric en tranfplanta une partie en Italie & qu'il laiffa l'autre dans les Provinces qu'il tenoit entre les Atpes & le Danube ou dans les gorges Septentrionales de ces montagnes. Ennodius parle des premiers, lorfqu'il dit dans fon Panegyrique de Theodoric. (4) » Vous avez, fans rien aliéner » du territoire de l'Empire établi un corps d'Allemands en Italie. Vous nous faites garder aujourd'hui par ceux mêmes qui nous pilloient auparavant. D'un autre côté ces Alle»mands ne fe trouvent pas moins bien que nous de cette tranfmigration, puifqu'après avoir perdu leur Roi, & après » avoir vu leur Nation prête d'être diffipée par leur faute, ils >> font devenus les Sujets d'un Prince auffi débonnaire que vous, » & qui même a bien voulu les conferver en corps de Nation. » Il leur tourne à bonheur d'avoir été réduits à fe bannir de » leur Patrie, puifqu'ils ont trouvé dans vos Etats un meilleur » pays que celui qu'ils ont été forcés d'abandonner. » Il faut que le Roi des Allemands tué à Tolbiac fe fût oppofé autant qu'il lui avoit été poffible, à leur derniere invafion dans les Gaules.

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Cependant, comme nous l'avons déja dit, tous les Allemand's qui fe retirerent dans les Etats de Theodoric après la bataille de Tolbiac, ne pafferent point les Alpes pour aller s'établir en Italie. Il en refta quelques effains dans les Provinces que ce Prince tenoit au de-là des Monts par rapport à l'Italie, & même

(a) Quid quod à te Alamanniæ Generalitas intra Italiæ terminos fine detrimento Romanæ poffeffionis inclufa eft, cui evenit habere Regem, poftquam meruit perdidiffe. Facta eft Latiaris cuftos Imperii femper no

ftrorum populatione graffata. Cui feliciter ceffit fugiffe patriam fuam. Nam fic adepta eft foli noftri opulentiam.

Ennodius,in Paneg. Theod.

Vers l'année. 470.

ces effains furent toujours foumis aux Rois d'Italie, & ils ne pafferent fous la domination des Francs, que lorfque les Oftrogots cederent tout ce qu'ils poffe loient hors de l'Italie aux enfans de Clovis. C'eft de quoi nous parlerons un peu plus au long, lorsqu'il en fera tems.

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Quant aux Suéves, que l'Auteur des Geftes & la Vie de faint Remy donnent aux Allemands pour Alliés dans la guerre dont il eft ici question, je vais dire ce que j'en penfe. On lit dans Jornandés, que le pere de Theodoric Roi d'Italie, Theodémir qui vivoit long-tems avant la bataille de Tolbiac, & fous le regne de l'Empereur Leon, fit durant l'hyver une expedition contre les Barbares qui habitoient fur le haut du Danube. (a) » Il prit fon tems, dit l'Hiftorien des Gots, que le Danube étoit gelé, & paffant à l'imprévû ce Fleuve fur la glace, il entra » dans le pays des Suéves par l'endroit où ils ne l'attendoient pas. Cette peuplade de Suéves a prefentement du côté de l'Orient » le pays des Boïens, du côté de l'Occident celui des Francs » au Midi le pays des Bourguignons, & au Septentrion celui » des Turingiens. Les Allemands étoient alors joints avec les » Suéves. Cela n'empêcha point Theodémir de les défaire; il » les battit eux & leurs Alliés, il ravagea leur pays, & peu » falut qu'il ne les fubjuguât. Après cette victoire, il revint dans » la Pannonie où étoient fes quartiers. En effet, comme Theodémir venoit de la Pannonie, c'est-à-dire, du côté de l'Orient par rapport au pays des Suéves, il fembloit aux Suéves qu'il ne pût point tomber fur eux qu'en traverfant la contrée ou habitoit le Boïen, laquelle les couvroit du côté du Levant, mais Theodémir ayant remonté le Danube jufqu'au deffus de la hauteur du pays des Suéves, & puis ayant paffé le Fleuve fur la glace, il entra dans ce pays du côté du Couchant, & il attaqua ainfi fes ennemis par où ils ne s'attendoient point d'être attaqués. Venons à l'ufage que je prétends faire de l'endroit de Jornandès que j'ai rapporté, & dans lequel on trouve les confins du pays des Suéves marqués tels qu'ils étoient quand cet Hifftorien avoit la plume à la main vers le milieu du fixième siècle.

(a) Sic ergo cernens cum gelatum Theodemir Gothorum Rex, pedeftrem ducens exercitum, emenfoque Danubio, Suevis improvifus à tergo apparuit. Nam regio illa Sucvorum ab oriente Baïobaros habet, ab occidente Francos, à meridie Burgundiones, à feptentrione Turingos. Quibus Suevis

s'en

tunc juncti Alemanni etiam aderant..... & tam Suevorum gentem quam etiam Alemannorum utrafque ad invicem fœderatas, devicit, vastavit ac penè fubegit. Inde quoque ad proprias fedes id eft ad Pannonias revertens, &c.

Jornandes de rebus Get. cap. $5.

Je crois donc qu'une partie des Suéves dont on vient de parler, s'étoient joints quelque tems après l'avantage que Theodémir avoit remporté fur eux, avec les Allemands pour venir se cantonner dans le Pays connu aujourd'hui fous le nom d'Alface. Nous avons vû que Procope y plaçoit dès l'année quatre cens foixante & feize, une Peuplade de Suéves & d'Allemands, laquelle ne reconnoiffoit en aucune maniere l'autorité de l'Empire. Cette Colonie fortifiée des fecours que lui auront envoyés

Allemands & les Suéves qui étoient demeurés dans leur ancienne patrie, aura voulu s'étendre du côté du Bas-Rhin, & c'est ce qui aura donné lieu à la bataille de Tolbiac. Comme les Suéves étoient déja les Alliés des Allemands fous le regne de l'Empereur Leon, c'eft-à-dire, vers l'année quatre cens foixante & dix; rien n'est plus probable que de fuppofer qu'ils l'étoient encore en quatre cens quatre-vingt-feize. Voilà donc quels étoient les Suéves qui combattirent dans l'armée que Clovis défit à Tolbiac, & même il eft apparent qu'ils avoient amené les Boïens ou les Bavarois avec lefquels ils confinoient du côté du Levant. Je crois encore que Clovis qui, comme il eft fenfible en lifant la lettre de Theodoric, paffa le Rhin après cette journée, fera entré hoftilement dans le Pays que ces Nations poffédoient depuis long-tems dans la Germanie, quand ce n'auroit été que pour fuivre les Allemands qui gagnoient les Contrées d'en deçà les Monts à notre égard, lefquelles étoient de l'obéiffance de Theodoric. Ces Contrées étoient, comme nous l'avons déja obfervé, les Provinces que les Romains poffedoient entre les Alpes & le Danube, ou du moins la partie de ces Provinces que les Barbares établis il y avoit long-tems, fur la rive gauche de ce Fleuve, ne leur avoient point encore enlevées.

En effet je trouve dans les Annales (4) des Boïens ou Bavarois, qu'après la Bataille de Tolbiac ils fe foumirent à Clovis par un Traité qui les obligeoit à fervir ce Roi dans toutes les guer

(4) Boii cum Francis fœdus focietatem | que perpetuam faciunt hifce conditionibus. Boii de corpore fuo ubi opus fuerit, Principem legant ac Ducem, non Regem apellent. Reges Francorum authores fiant. In bello, auxilio Francis fint Boii, cofdem pro amicis & hoftibus habeant: Cæterum, fuis inftitutis ac moribus liberi vivant. Hoc fœdus perfancte à Boiis obfervatum eft, & amicitia Boïorum bona atque honefta Francis permanfit adeo ut poft hæc Francorum

Reges nihil penitus quidquam præclare fine ope Boiorum neque in rebus bellicis & domefticis, neque in divinis atque humanis unquam gefferint : Quemadmodum res ipfa indicabit, & Hatto Archiflamen Moguntinus ad Joannem nonum Pontificem Maxi-, mum fcribit, quæ Epiftola adhuc extat in Bibliothecis noftris & actis Pontificum Boïarix.

Joann. Aventin. Annal. Boïor. lib. 3. cap.

prim.

res, & à ne donner que le titre de Prince & de Duc à leur Chef, pour marquer qu'il étoit dépendant du Roi des Francs, mais qui d'ailleurs les laiffoit à tous autres égards un peuple libre & en droit de fe gouverner fuivant ses anciennes Loix & ses anciens ufages. Il eft vrai que l'Auteur de ces Annales, Jean Thurmeir, fi connu fous le nom d'Aventinus, ne fçauroit avoir écrit avant le quinzième siècle. Ce qu'il dit cependant ne laiffe point de mériter quelque croyance, principalement, s'il eft vrai qu'il ait tiré tout ce qu'il avance concernant l'alliance des Francs & des Boïens, d'une Lettre de Hatto Archevêque de Mayence au Pape Jean neuvième, élû en neuf cens un,& de laquelle on gardoit encore du tems de cet Hiftorien, dans differentes Archives d'Allemagne, des copies autentiques. D'ailleurs il eft certain que les Bavarois ont été Sujets des Rois de la premiere Race.

que

Clovis bien qu'il ne fût entré que comme auxiliaire dans la guerre que les Allemands faifoient à Sigebert, n'aura donc faiffé d'y gagner beaucoup. Comme il avoit plus de forces Sigebert, c'aura été lui, qui aura fait fur l'ennemi commun les conquêtes les plus grandes. En obligeant les Bavarois, & par conféquent les Suéves plus voifins de les Etats que les premiers, à lui fournir des Soldats lorfqu'il auroit la guerre, il aura fort augmenté le nombre des combattans, qu'il pouvoit avoir fous Les Enfeignes. Ce Prince en fecond lieu fe fera rendu le maître du pays occupé dans les Gaules depuis quatre-vingt années, par ceux des Allemands, qui s'y étoient établis & ce pays s'étendoit du Lac Leman jufqucs au Rhin. Il aura encore foumis à fon pouvoir la partie de la Germanie que les Allemands tenoient encore pour lors, c'est-à-dire, celle qui eft entre la rive droite du Rhin & la Montagne noire.

Comment, dira-t-on, Clovis pouvoit-il communiquer avec ce pays-là, puifque nous ne lui avons point vû étendre son Royaume du côté de l'Orient,au de-là de la Cité de Troyes? Je réponds que Clovis avoit pû avant l'année quatre cens quatre-vingtfeize, fe rendre le maître de la Cité de Toul, dont on fçait la grande étendue. Il avoit pû l'occuper lorfque les Provinces Obéïffantes fe foumirent à lui en quatre cens quatre-vingt-treize. Toul devoit être une des Cités de ces Provinces-là. D'ailleurs Clovis durant le cours de la guerre avoit repris fur les Allemands qu'il referra, fuivant Gregoire de Tours, dans leurs anciennes habitations, une grande partie du pays qui fe nomme aujourd'hui l'Alface & très-certainement la Cité de Bâle. Ainfi par cette Cité

il communiquoit avec le Pays des Allemands qui l'avoient reconnu pour Roi, & cette même Cité donnoit encore à Clovis fur le Rhin un paffage capable de faire refpecter l'alliance des Francs Saliens par les Suéves & par les Boiens. Que Clovis ait été maître de Bâle c'est ce qui eft certain par les foufcriptions des Evêques qui affifterent au premier Concile d'Orleans tenu en cinq cens onze, fous la protection & par les foins de ce Prince; On trouve parmi ces foufcriptions la fignature d'Adelphius Evêque de Bâle, & il paffe pour certain entre les Sçavans, que les Evêques n'alloient point alors aux Conciles convoqués dans un lieu qui n'étoit pas de l'obéïffance de leur Souverain. Or je ne vois pas où placer mieux l'acquifition de la Cité de Bâle, & celle des pays qui étoient entre cette Cité & les Cités qui s'étoient foumifes à Clovis dès l'année quatre cens quatre vingt-treize, qu'en la plaçant dans le cours de la guerre que ce Prince fit aux Allemands en quatre cens quatre-vingt-feize. Clovis depuis ce tems jufqu'à la mort arrivée cette année-là, ne porta plus la guer re qu'une fois dans ces contrées. Ce fut lorsqu'il attaqua en l'année cinq cens les Bourguignons qui tenoient veritablement la plus grande partie de la Province Sequanoife dont Bâle étoit une Cité. Mais on né fçauroit prétendre que ce foit dans le cours de cette guerre-là que Clovis ait pris la Cité de Bâle. En voici la raison. Clovis poffédoit encore cette Cité en cinq cens onze, & Gregoire de Tours dit positivement, comme on le verra, que le Roi des Bourguignons recouvra avant la fin de la guerre tout ce qu'il avoit perdu depuis qu'elle avoit été déclarée. Ainfi je crois que la Cité de Bâle aura été soumise par Clovis dès l'année quatre cens quatre-vingt-feize, & que de ce côté-là, Vindifch étoit alors la frontiére de la Bourgogne. On fçait bien que cette Ville, qui eft ruinée aujourd'hui, étoit auprès de celle de Baden en Suiffe. Que Vindifch appartint encore aux Bourguignons en cinq cens dix-fept, on n'en fçauroit douter, puifque fon Evêque foufcrivit au Concile tenu à Epaone cette année-là, fous le bon plaifir de Sigifmond leur Roi.

Nous n'avons vû jufqu'ici que les moindres avantages que Clovis tira du gain de la bataille de Tolbiac. Voici donc l'Hif toire du Baptême de ce Prince, qui lui en procura de bien plus grands, telle qu'elle fe lit dans Gregoire de Tours. » La Reine » fit prier faint Remy de fe rendre auprès du Roi pour l'instrui»re en fecret. Il apprit de cet Evêque dans plufieurs conferen» ces qu'ils eurent à l'infçu de la Cour, qu'il falloit

Tome II.

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