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fans elle, jointe à la charité, toutes les autres feroient pour nous des vertus ftériles. Elles ne peuvent jamais avoir de mérite qu'autant qu'elles font accompagnées de l'amour divin, & du fentiment de notre foibleffe, qui nous fait offrir au Maître de tout, notre néant & notre pauvreté. Que peut avoir de bon, & que peut jamais efpéter un orgueilleux? Dieu nous a déclaré qu'il le hait, & n'aime que les humbles. Quoique notre divin Sauyeur nous ait, dans fes difcours & fes actions, donné l'exemple de toutes les vertus, il a cependant exigé de nous particulièrement, que nous apprif Math. 11. fions de lui à être doux & humbles de cœur, fi nous voulons pofféder une paix intérieure. L'orgueilleux, en effet, & l'ambitieux, pourroient-ils jamais jouir du repos ? Ils font toujours mécontens d'eux & des autres: où l'humble s'attire tous les cœurs, l'orgueil

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leux les aigrit tous. Pour peu que l'hom

me réfléchiffe fur lui-même, il doit fentir la néceffité d'avoir une idée modefte & réfervée de fes talens, de fon mérite & de fes qualités. Si nous nous imaginons avoir plus d'efprit & de connoiffances que ceux qui nous entourent; & dans le fond, nous en avons toujours moins que nous ne penfons) fi nous poffédons les richeffes, les dignités & la fanté, &c. ne font-ce pas autant d'avantages que nous tenons de la libéralité de Dieu, &

qu'il a refufé à tant d'autres qui les méritoient plus que nous; auffi peut il nous en priver dans un inftant. Les dangers, les maladies font fans ceffe à nos côtés, & le chemin eft bien court du bonheur à l'infortune. Qu'on faffe paroître un orgueilleux bien gonflé de fon mérite, de fes richeffes, de fa nobleffe, &c. & qu'il ait la hardiesse de nier qu'il n'a

pas de défauts peut-être plus marqués que ceux des perfonnes qu'il méprife? Qu'il ofe foutenir n'avoir jamais commis de fautes dans le cours de fa vie, & n'être pas dans le cas d'en faire chaque jour de nouvelles? Qu'il ait le front de fe prétendre au-deffus de la colère des Princes, du fléau des guerres & des maladies, enfin de toutes les difgrâces auxquelles on est sans ceffe expofé dans ce monde ? Quelle raifon a-t-il donc de marcher avec une tête fi altière, & de s'imaginer devoir concentrer dans lui tous les biens? Certainement, fi Dieu regarde un pareil homme dans fa miféricorde, il ne manquera pas de lui envoyer quelque difgrâce falutaire, qui le fera rentrer en lui-même; & malheur à lui fi la mort l'inftruit de ce qu'il eft, fans lui laiffer le temps de pro

fiter de l'inftruction.

Un fujet auffi vaste, a été traité dans

le plus grand détail, par les Maîtres de la vie fpirituelle; & je me borne à féliciter ceux qui font affez heureux pour pofféder l'humilité, vertu aufli chère à Dieu qu'eftimée dans les autres, par ceux mêmes que l'orgueil domine le plus. Examinons un inftant les perfonnes humbles; leur état peut changer par les dignités, les biens, les honneurs; mais, avec l'idée juste qu'elles ont d'elles-mêmes, leurs mœurs ne changeront point. On ne les verra jamais fe gonfler, leurs converfations & leurs actions ne se reffentiront jamais de leur pro périté, parce qu'elles regardent tout ce qui leur arrive comme une faveur gratuite de Dieu, qui peut la faire cefer quand il lui plaît; en un mot, que les biens temporels font un prêt, & jamais un don. Que les adverfités viennent enfuite; avec un bon fond d'humilité & de patience, on ne murmure point,

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on ne réfifte point à la volonté & à la permiffion de Dieu; mais convaincu qu'on n'a aucun droit d'être traités avec prédilection, & que Dieu ne nous éprouve que pour nous purifier, on se dispose à fouffrir en paix tous les châtimens d'un auffi bon Père. En fupportant tout pour l'amour de Dieu, on fe répète les paroles de l'Apôtre: Que les châtimens de cette vie ne font Rom.e. s. point à comparer avec l'immensité de la gloire qui nous eft préparée & confervée dans l'autre. Enfin, l'humilité fait s'accommoder à toute espèce de malheurs, aux infirmités, aux contradictions, à la perte des biens; & lorfque la dernière heure fe fera entendre, comme elle nous apprend que nous ne fommes dans ce monde qu'en paffant, & obligés de le quitter lorsque notre Maître l'ordonnera la résignation nous fait accepter tout ce qu'il nous impofe; cet acte même

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