Comedie. Il n'y a guère de Pièces connues que des jeunes Perfonnes puisjent jouer fans danger, & elles font prefque toutes au-deffus de leur conception. L'Auteur a évité, avec un foin extrême, d'introduire dans ces petites Comédies, aucun caractère véritablement odieux; on n'a préfenté que des défauts nailfans, toujours accompagnés d'un bon cœur, par confé& quent fufceptibles de correction. Il n'y a que le feul caractère de Dorine dans l'Enfant gâté, qui foit réellement vicieux, mais on a cru devoir prévenir les jeunes Perfonnes fur la flatterie mercenaire qu'elles peuvent rencontrer quelquefois dans les Domestiques qui les entourent, & c'est la feule raison qui a engagé à peindre ce perfonnage fi odieux à voir & fi défagréable à jouer. Enfin ces Effais, fruits des veilles d'un Auteur qui a confacré fa jeunesse & fa vie à ce genre de méditation, ont été diclés par les plus louables motifs. Puiffent tous les Enfans qui liront ce, Pièces, être frappés des exemples qu'elles contiennent! Puiffent-ils, par cette lecture, devenir meilleurs, plus fenfibles, plus vrais, plus tendres pour leurs Parens, & tous les vœux de l'Auteur feront remplis. AGAR DANS LE DESERT, COMÉDIE. Q AGAR, tenant fon Fils par la main. UELS triftes lieux!... quelle affreufe folitude!... Maman, retournons chez mon Pere; nous y étions fi heureux ! AGAR. Hélas! mon Enfant, la haine & la jalousie nous en ont chaffés ; & c'est pour toujours. IS MAEL. La haine! & quel mal ai-je fait pour la mériter? Et vous, Maman, comment peut-on vous hair? AGAR. L'envie, mon Fils, rend injufte & cruel; elle conduit à la haine, la plus odieufe, la plus noire de toutes les paffions. ISMAEL. Un cœur fenfible ne l'éprouvera donc jamais ? AGAR. Un cœur fenfible peut s'égarer. l'orgueil, mon Fils, peut corrompre l'ame la plus tendre, & la livrer à toutes les fureurs de la vengeance. IS MAEL. Ah! Maman, fi j'ai de l'orgueil, mettez tous vos foins à m'en corriger. AGAR. La raifon feule doit nous en garantir. L'Auteur de la nature n'a rien fait que de bon; nous lui devons toutes nos vertus ; & nos vices font notre ouvrage. OISMA E L. Nous naiffons donc fans orgueil? ... AGAR. Dieu imprima dans nos cœurs un defir falutaire qui nous porte à nous distinguer, à rechercher la gloire. |