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Le fecours qui leur plaît d'une main étrangere, Leur feroit un outrage, accepté de leur Frere! Pourroient-ils fupporter dans cet illuftre Sort, Ce Joseph dont leur haine avoit juré la mort? Si pour des biens fongez, une gloire en idée, J'ai vu d'un tel couroux leur ame poffedée, Quelle horrible fureur en eux doit exciter Ce comble de grandeurs où l'on me voit monter! Je vois avec tranfport Benjamin ce cher frere, Dont ma mere Rachel étoit auffi la mere; Des mêmes fentimens nous fommes animez, Tous deux de nôtre Pere également aimez. Eh! de quel doux plaifir j'aurois l'ame comblée, voyant ma Famille en ces lieux raffemblée, M'aimer, me reconnoître, & cherir mes bienfaits! Mais il faut dans mon cœur renfermer ces fouhaits! Je vais me taire encor; Dieu daignera m'inftruire, Agiffons en filence, & nous laiffons conduire. Mes Freres vont paroître.

En

HELY.

Oui, Seigneur, les voicì.

JOSEPH.

Toi, ne t'éloigne pas; & qu'on nous laisse ici.
Que la fainte amitié, s'il fe peut, les anime;
J'attens leur repentir, je pardonne leur crime;

Avec plaifir fur eux je répandrai mes biens.
Leurs devoirs violez ne changent pas les miens.

SCENE V.

JOSEPH, RUBEN, SIMEON, JUDA, BENJAMIN, THIAMIS.

RUBEN

Comblez de vos bontez, témoins de vôtre gloires
Permettez qu'à Jacob nous en tracions l'histoire.
Nôtre Pere, Seigneur, fur ces Evenemens,
Sera rempli de joye & de raviffemens.

Et pour nous, qui peut mieux lui témoigner le zele
Dont nous obéiffons à la Loi paternelle,

Que nôtre empreffement à quitter ces beaux lieux; Où près de vous tout charme & nos cœurs & nos yeux ? Les momens lui font chers; Et nous ofons vous dire Qu'à peine, loin de nous, ce bon Vieillard refpire. Il nous a défendu de faire aucun féjour,

Son ordre & le befoin preffent nôtre retour.

Pour achever, Seigneur, une grace si grande,
fi
Ordonnez, s'il vous plaît, le départ qu'il demande;
Faites-lui reffentir vos heureufes faveurs ;

Et que nôtre prefence aille fecher fes pleurs.

JOSEPH.

Tout étoit préparé. Marchez en diligence.
J'approuve vos defirs & votre impatience;
N'ayez point de repos qu'auprès de lui rendus,
Il n'ait avec fes Fils ces fecours attendus.
Ramenez Simeon dont j'ai brife la chaîne.
Que Benjamin demeure.

JUDA.

Ah! quelle eft nôtre peine!

De ne pouvoir, Seigneur, obéir à vos Loix !
Jacob ne laiffe pas l'échange à nôtre choix.
On peut vous avoir dit fa premiere difgrace.
Déja privé d'un Fils qu'en fon cœur rien n'efface,
Il en voit dans cet autre & l'efprit & les traits;
Le jeune Benjamin calme fes longs regrets,
Il croit revoir Jofeph; & fon ame éperduë,
Compte tous les momens qu'il eft loin de fa vûë,

JOSEPH.

Laiffez-le moi, vous dis-je, allez partez fans lui. Jacob verra bien-tôt diffiper fon ennui,

Quand il fçaura les biens & le bonheur extrême.
Dont je veux en ces lieux combler ce Fils qu'il aime.
JUDA.

J'ai promis fon retour, & fans le remener,
Aux rives du Jourdain je ne puis retourner.

BENJAMIN.

Si ma timide voix ofe fe faire entendre,
Je vous dirai, Seigneur, que d'un Pere fi tendre,
Je dois aller encor fuivre les faintes Loix;
Je dois aller encor m'inftruire par fá voix.
Heureux fi je pouvois apprendre de mon Pere
Ces divines Leçons que pratiquoit mon Frere.
Tout ce que de Jofeph j'entendois raconter,
M'emflâme du defir de pouvoir l'imiter;
C'est l'exemple éternel que Jacob me prefente.

JOSEPH.

Si vous en confervez la memoire touchante,
Demeurez, Benjamin, & recevez ma foi,
Que vous retrouverez vôtre cher Frere en moi.
Je ne vous offre point une amitié commune;
Auprès de Pharaon, partagez ma Fortune;
Pour vous mieux établir, croyez, cher Benjamin,
Que vous ferez conduit & formé de ma main.

BENJAMIN.

Je ne puis de Jacob délaiffer la vieilleffe ;
Je dois par mon retour répondre à fa tendreffe.
Sans voir tout cet éclat que vous me promettez,
Quel charme plus puiffant je trouve en vos bontez!
Seigneur, il s'en faut peu que je ne les préfere
A tous les nœuds du fang, à l'amour de mon Pere!

Sans

Sans ce premier devoir, qu'il m'auroit été doux D'apprendre les Vertus, Seigneur, auprès de vous.

JOSEPH.

Qù fuis-je !

JUD A.

Par fes pleurs un Pere le rapelle.

Aprouvez pour Jacob nôtre devoir fidelle.
Nous vous l'avons dépeint, Seigneur, de fes vieux ans
Traînant feul, affligé, les reftes languiffans.

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Il vit du feul efpoir que nous allons lui rendre
Ce Fils, le dernier fruit de l'amour le plus tendre.
Lorfque pour obéir à vôtre ordre abfolu,

A nous le confier Jacob s'eft réfolu;

» Mes Fils, nous a-t'il dit, en nous donnant ce gage, » Vous me voyez panchant à la fin de mon âge; » Si mon cher Benjamin ne revient dans mes bras, »Vous allez par fa perte avancer mon trépas; » En perdant cet objet dont mon ame eft ravie, "Je vais dans la douleur finir ma trifte vie. Jamais à l'envoyer il n'eût pû confentir

Si nos fermens......

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JOSEPH.

Hé bien, qu'on les faffe partir 3

D

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