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Tout-chargez de fes dons, voyez qu'il nous renvoye
SIMEON.

Il goûte en nôtre peine une fecrete joye.
Préfens vains & trompeurs. Ah! defabufez-vous,
Si nous partións encore, on courroit après nous.
Sur un fujet fi faux fa colere allumée,

D'un prétexte nouveau feroit bientôt armée.

RUBEN...

Non, je ne conçois point ces rudes traitemens!
J'ai cru voir dans fes yeux de plus doux fentimens.
SIMEON.

Quoi! Ne devions-nous pas dès le premier voyage,
Avoir prévû l'embuche où nôtre erreur s'engage?
Nous vimes ce Tyran contre nous irrité;
Et s'il mit quelque frein à fa malignité,
Cette pitié forcée étoit un artifice;

Il méditoit dés-lors fa perfide injuftice.
C'étoit un piege, helas! nôtre œil fut étonné
De retrouver tout l'or que nous avions donné;
Mais l'on nous préparoit cette mortelle injure,
Et notre propre fang en va payer l'ufure..

JUDA.

Malheureux! Connoiffons la main qui nous pourfuit, De nos cruels Complots nous recueillons le fruit. Dieu nous trouve partout ; tôt ou tard fa Juftice Atteint les Criminels qu'il faut qu'elle puniffe;

Et les crimes, cachez dans le fonds des Deferts,
Ne peuvent éviter fes yeux toujours ouverts.

RUBEN.

Moi, qui de vos forfaits ne me fens point coupable : Avec les Criminels fa vangeance m'accable;

est

Ou plûtôt, il eft vrai je l'ai trop merité,
Puifqu'à vos attentats j'ai fi mal réfifté.

Je vous exhortois bien d'épargner l'innocence;
Mais, Ciel ! je fus trop foible à prendre fa défense.
SIMEON.

D'une fureur jaloufe, un foudain mouvement,
Devoit-il recevoir un fi long châtiment ?

JUDA.

Que devient Benjamin ? Que deviendra mon Pere
Nous avons dans les fers amené nôtre frere!
Oui, fi Jacob le perd, il va mourir, hélas !
Et Jacob meurt auffi, fi nous ne partons pas.
Quand nous l'avons quitté, nos Familles mourantes
Eprouvoient de la Faim les cruautez preffantes?
Nos Femmes, nos Enfans, Jacob' tout va périr,
Si le Ciel appaife ne veut les fecourir!

SIMEON.

Il faut braver ici le coup qui nous menace,
Mourons.

RUBEN

Dieu d'Ifraël, qui vois nôtre difgrace

Bien que ces châtimens, grand Dieu ! foient meritez, Que nôtre repentir rappelle tes Bontez..

JUDA.

Cherchons Sophoneas; que nôtre voix l'implare.
S'il nous étoit permis de l'approcher encore;
Hélas ! fi nous pouvions à fes pieds nous jetter,
S'il daignoit un moment encor nous écouter?
Après avoir paru pour nous fi favorable,
A-t'il pris pour jamais un cœur inexorable?
Allons, pour le fléchir, faire un dernier effort,
Qu'il nous accorde, enfin, Benjamin ou la mort.

Fin du quatriéme Acte.

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M

S CE NE I.

RUBEN, SIMEON, JUDA.

RUBEN.

ALHEUREUX Benjamin! Sophoneas s'abuse,
S'il croit que nous partions lorfqu'il nous le
refufe:

Sans ceffe par nos cris nous le demanderons;
Jufqu'au dernier foupir ici nous nous plaindrons,
Il ne veut rien entendre. Il eft inacceffible
Ce Tyran! il ordonne un départ impoffible!
SIMEON.

C'en eft fait, au retour il ne faut plus penfer.
RUBEN.

Mes Freres, nôtre cœur n'a point à balancer.

JUDA.

Quoi! nous verrions encore un Pere inconfolable, Rappeller de Jofeph la perte lamentable.

» Rachel, nous diroit-il, au declin de mes ans, » Mon aimable Rachel m'a donné deux Enfans, » Vous m'avez rapporté de fanglans témoignages Qu'un d'eux fut dévoré par les Beftes fauvages;

» Et l'autre qu'en vos mains j'ai remis malgré moi,

» Ce gage précieux commis à vôtre foi,

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Périt.... J'éviterai fes plaintes douloureuses;

Les plus cruelles morts pour moi font moins affreuses.
En pleurant Benjamin, qu'il nous regrete auffi.
Nous fuivrons tous Jofeph qui vint mourir ici.
Egypte, ton feul nom me confond & m'étonne!
Ce fouvenir me glace, & l'horreur m'environne!
C'eft-là que dans les fers Jofeph est expiré :
Pour venir en Egypte, helas! il fut livré;
C'eft auffi le licu même, ô Ciel où ta Juftice
Réfout que nous venions chercher nôtre fupplice,
Nous irritons ici les yeux de l'Eternel..

Par nous Jofeph eft mort, ainfi qu'un autre Abel;
Il éprouva des fiens la jaloufe furie,

Et de fon fang, helas ! j'entens la voix qui crie!"

SIMEON.

Que Jofeph eft heureux! s'il a fini fes jours:
Des plus cruels ennuis la mort tranche le cours;
S'il vit, s'il voit encor. l'Aftre qui nous éclaire,
Lorfque du Ciel fur nous il arme la colere,
Et que tant de malheurs le vangent aujourd'hui,
En quelque état qu'il foit quelle gloire pour lui!
Mais le voilà, celui qui punit nôtre crime.
Quelle feverité dans fes regards s'exprime !

SCENE

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