138 EXAMEN DU CID. imagination par mon silence, aussi bien que le lieu précis de ces quatre scenes du premier acte dont je viens de parler; et je m'assure que cet artifice m'a si bien réussi, que peu de personnes ont pris garde à l'un ni à l'autre, et que la plupart des la plupart des spectateurs, laissant emporter leurs esprits à ce qu'ils ont vu et entendu de pathétique en ce poëme, ne se sont point avisés de réfléchir sur ces deux considérations. dit Horace, J'acheve par une remarque sur ce que que ce qu'on expose à la vue touche bien plus que ce qu'on n'apprend que par un récit. C'est sur quoi je me suis fondé pour faire voir le soufflet que reçoit don Diegue, et cacher aux yeux la mort du comte, afin d'acquérir et de conserver à mon premier acteur l'amitié des auditeurs, si nécessaire pour réussir au théâtre. L'indignité d'un affront fait à un vieillard chargé d'années et de victoires les jette aisément dans le parti de l'offensé; et cette mort qu'on vient dire au roi tout simplement, sans aucune narration touchante, n'excite point en eux la commisération qu'y eût fait naître le spectacle de son sang, et ne leur donne aucune aversion pour ce malheureux amant, qu'ils ont vu forcé, par ce qu'il devoit à son honneur, d'en venir à cette extrémité, malgré l'intérêt et la tendresse de son amour. FIN DE L'EXAMEN DU CID. ACTEURS. TULLE, roi de Rome. LE VIEIL HORACE, chevalier romain. HORACE, son fils. CURIACE, gentilhomme d'Albe, amant de Camille. FLAVIAN, soldat de l'armée d'Albe. La scene est à Rome, dans une salle de la ACTE PREMIER. SCENE I. SABINE, JULIE. APPROUVEZ SABINE. PPROUVEZ ma foiblesse, et souffrez ma douleur; Ne sauroit sans désordre exercer sa vertu. Quoique le mien s'étonne à ces rudes alarmes, Si l'on fait moins qu'un homme, on fait plus qu'une femme. C'est montrer pour le sexe assez de fermeté. JULIE. C'en est peut-être assez pour une ame commune Les deux camps sont rangés au pied de nos murailles; SABINE. Je suis Romaine, hélas! puisque Horace est Romain; Mais ce nœud me tiendroit en esclave enchaînée, Quand je vois de tes murs leur armée et la nôtre, Je sais que ton état, encore en sa naissance, Ne sauroit sans la guerre affermir sa puissance; |