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son amant qui, meure au combat, n'est point suffisante pour faire attendre un emportement si extraordinaire, et servir de commencement à cette action.

Le second défaut est que cette mort fait une action double par le second péril où tombe Horace après être sorti du premier. L'unité de péril d'un héros dans la tragédie fait l'unité d'action; et quand il en est garanti la piece est finie, si ce n'est que la sortie même de ce péril l'engage si nécessairement dans un autre, que la liaison et la continuité des deux n'en fasse qu'une action; ce qui n'arrive point ici, où Horace revient triomphant, sans aucun besoin de tuer sa sœur, ni même de parler à elle: et l'action seroit suffisamment terminée à sa victoire. Cette chute d'un péril en l'autre sans nécessité fait ici un effet d'autant plus mauvais, que, d'un péril public où il y va de tout l'état, il tombe en un péril particulier où il n'y va que de sa vie; et, pour dire encore plus, d'un péril illustre où il ne peut succomber que glorieusement, en un péril infame dont il ne peut sortir sans tache. Ajoutez, pour troisieme imperfection, que Camille, qui ne tient que le second rang dans les trois premiers actes, et y laisse le premier à Sabine, prend le premier en ces deux derniers, où cette Sabine n'est plus considérable, et qu'ainsi, s'il y a égalité dans les mœurs, il n'y en a point dans la dignité des personnages, où se doit étendre ce précepte d'Horace :

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Qualis ab incepto processerit, et sibi constet.

Ce défaut en Rodelinde a été une des principales causes du mauvais succès de Pertharite, et je n'ai point encore vu sur nos théâtres cette inégalité de rang en un même acteur qui n'ait produit un très méchant effet. Il seroit bon d'en établir une regle inviolable.

Du côté du temps, l'action n'est point trop pressée, et n'a rien qui ne me semble vraisemblable. Pour le lieu, bien que l'unité y soit exacte, elle n'est pas sans quelque contrainte. Il est constant qu'Horace et Curiace n'ont point de raison de se séparer du reste de la famille pour commencer le second acte; et c'est une adresse de théâtre de n'en donner aucune quand on n'en peut donner de bonnes. L'attachement de l'auditeur à l'action présente souvent ne lui permet pas de descendre à l'examen sévere de cette justesse; et ce n'est pas un crime que de s'en prévaloir pour l'éblouir, quand il est mal-aisé de le satisfaire.

Le personnage de Sabine est assez heureusement inventé, et trouve sa vraisemblance aisée dans le rapport à l'histoire, qui marque assez d'amitié et d'égalité entre les deux familles pour avoir pu faire cette double alliance.

Elle ne sert pas davantage à l'action que l'infante

à celle du Cid, et ne fait que se laisser toucher diversement comme elle à la diversité des événements. Néanmoins on a généralement approuvé celle-ci, et condamné l'autre. J'en ai cherché la raison, et j'en ai trouvé deux. L'une est la liaison des scenes, qui semblent, s'il m'est permis de parler ainsi, incorporer Sabine dans cette piece; au lieu que, dans le Cid, toutes celles de l'infante sont détachées, et paroissent hors œuvre :

Tantum series juncturaque pollet.

L'autre, qu'ayant une fois posé Sabine pour femme d'Horace il est nécessaire que tous les incidents de ce poëme lui donnent les sentiments qu'elle en témoigne avoir, par l'obligation qu'elle a de prendre intérêt à ce qui regarde son mari et ses freres mais l'infante n'est point obligée d'en prendre aucun en ce qui touche le Cid; et, si elle a quelque inclination secrete pour lui, il n'est point besoin qu'elle en fasse rien paroître, puisqu'elle ne produit aucun effet.

L'oracle qui est proposé au premier acte trouve son vrai sens à la conclusion du cinquieme. Il semble clair d'abord, et porte l'imagination à un sens contraire; et je les aimerois mieux de cette sorte sur nos théâtres, que ceux qu'on fait entièrement obscurs, parceque la surprise de leur véritable effet en est plus belle. J'en ai usé ainsi encore dans l'Andromedo et dans l'OEdipe. Je ne dis pas la même chose des

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songes, qui peuvent faire encore un plus grand ornement dans la protase, pourvu qu'on ne s'en serve pas souvent. Je voudrois qu'ils eussent l'idée de la fin véritable de la piece, mais avec quelque confusion qui n'en permît pas l'intelligence entiere. C'est ainsi que je m'en suis servi deux fois, ici et dans Polyeucte; mais avec plus d'éclat et d'artifice dans ce dernier poëme, où il marque toutes les particularités de l'événement, qu'en celui-ci, où il ne fait qu'exprimer une ébauche tout-à-fait informe de ce qui doit arriver de funeste.

II

passe pour constant que le second acte est un des plus pathétiques qui soient sur la scene, et le troisieme un des plus artificieux. Il est soutenu de la seule narration de la moitié du combat des trois freres, qui est coupée très heureusement pour laisser Horace le pere dans la colere et le déplaisir, et lui donner ensuite un beau retour à la joie dans le quatrieme. Il a été à propos, pour le jeter dans cette erreur, de se servir de l'impatience d'une femme qui suit brusquement sa premiere idée, et présume le combat achevé, parcequ'elle a vu deux des Horaces par terre, et le troisieme en fuite. Un homme, qui doit être plus posé et plus. judicieux, n'eût pas été propre à donner cette fausse alarme; il eût dû prendre plus de patience, afin d'avoir plus de certitude de l'événement, et n'eût pas été excusable de se laisser emporter si légèrement par les apparences à pré

sumer le mauvais succès d'un combat dont il n'eût pas vu la fin.

Bien que le roi n'y paroisse qu'au cinquieme, il y est mieux dans sa dignité que dans le Cid, parcequ'il a intérêt pour tout son état dans le reste de la piece; et, bien qu'il n'y parle point, il ne laisse pas d'y agir comme roi. Il vient aussi dans ce cinquieme comme roi qui veut honorer par cette visite un pere dont les fils lui ont conservé sa couronne, et acquis celle d'Albe au prix de leur sang. S'il y fait l'office de juge, ce n'est que par accident, et il le fait dans ce logis même d'Horace, par la seule contrainte qu'impose la regle de l'unité de lieu. Tout ce cinquieme est encore une des causes du peu de satisfaction que laisse cette tragédie : il est tout en plaidoyers, et ce n'est pas là la place des harangues ni des longs discours; ils peuvent être supportés en un commencement de piece, où l'action n'est pas encore échauffée; mais le cinquieme acte doit plus agir que discourir. L'attention de l'auditeur, déja lassée, se rebute de ces conclusions qui traînent, et tirent la fin en longueur.

Quelques uns ne veulent pas que Valere y soit un digne accusateur d'Horace, parceque, dans la piece, il n'a pas fait voir assez de passion pour Camille: à quoi je réponds que ce n'est pas à dire qu'il n'en eût une très forte, mais qu'un amant mal voulu ne pouvoit se montrer de bonne grace à sa maîtresse dans le jour qui la rejoignoit à un amant aimé. Il n'y

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