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EXAMEN D'HORACE.

avoit point de place pour lui au premier acte, et encore moins au second: il falloit qu'il tînt son rang à l'armée pendant le troisieme; et il se montre au quatrieme, sitôt que la mort de son rival fait quelque ouverture à son espérance. Il tâche à gagner les bonnes graces du pere, par la commission qu'il prend du roi de lui apporter les glorieuses nouvelles de l'honneur que ce prince lui veut faire, et, par occasion, il lui apprend la victoire de son fils qu'il ignoroit. Il ne manque pas d'amour durant les trois premiers actes, mais d'un temps propre à le témoigner; et, dès la premiere scene de la piece, il paroît bien qu'il rendoit assez de soins à Camille, puisque Sabine s'en alarme pour son frere. S'il ne prend pas le procédé de France, il faut considérer qu'il est Romain, et dans Rome, où il n'auroit pu entreprendre un duel contre un autre Romain sans faire un crime

d'état, et que j'aurois fait un crime de théâtre si j'avois habillé un Romain à la françoise.

FIN DE L'EXAMEN D'HORACE.

CINNA,

OU

LA CLÉMENCE D'AUGUSTE,

TRAGÉDIE.

Cui lecta potenter erit res,

Nec facundia deseret hunc, nec lucidus ordo.

HORAT.

t

ACTEURS.

OCTAVE CÉSAR AUGUSTE, empereur de Rome.

LIVIE, impératrice.

CINNA, fils d'une fille de Pompée, chef de la con

juration contre Auguste.

MAXIME, autre chef de la conjuration.
ÉMILIE, fille de C. Toranius, tuteur d'Auguste,
et proscrit par lui durant le triumvirat.
FULVIE, confidente d'Émilie.
POLYCLETE, affranchi d'Auguste.
ÉVANDRE, affranchi de Cinna.
EUPHORBE, affranchi de Maxime.

La scene est à Rome.

ACTE PREMIER.

SCENE I.

ÉMILIE.

IMPATIENTS desirs d'une illustre vengeance

Dont la mort de mon pere a formé la naissance,
Enfants impétueux de mon ressentiment,

Que ma douleur séduite embrasse aveuglément,
Vous prenez sur mon ame un trop puissant empire;
Durant quelques moments souffrez que je respire,
Et que je considere, en l'état où je suis,
Et ce que je hasarde, et ce que je poursuis,
Quand je regarde Auguste au milieu de sa gloire,
Et que vous reprochez à ma triste mémoire
Que par sa propre main mon pere massacré
Du trône où je le vois fait le premier degré ;
Quand vous me présentez cette sanglante image,
La cause de ma haine et l'effet de ma rage,

Je m'abandonne toute à vos ardents transports,

Et crois pour une mort lui devoir mille morts.
Au milieu toutefois d'une fureur si juste,
J'aime encor plus Cinna que je ne hais Auguste;
Et je sens refroidir ce bouillant mouvement
Quand il faut pour le suivre exposer mon amant.
Oui, Ginna, contre moi moi-même je m'irrite,
Quand je songe aux dangers où je te précipite.
Quoique pour me servir tu n'appréhendes rien,
Te demander du sang, c'est exposer le tien.
D'une si haute place on n'abat point de têtes
Sans attirer sur soi mille et mille tempêtes;
L'issue en est douteuse, et le péril certain.
Un ami déloyal peut trahir ton dessein;
L'ordre mal concerté, l'occasion mal prise,
Peuvent sur son auteur renverser l'entreprise,
Tourner sur toi les coups dont tu le veux frapper;
Dans sa ruine même il peut t'envelopper;

Et, quoi qu'en ma faveur ton amour exécute,
Il te peut en tombant écraser sous sa chute.
Ah! cesse de courir à ce mortel danger:

Te perdre en me vengeant, ce n'est pas me venger.
Un cœur est trop cruel quand il trouve des charmes
Aux douceurs que corrompt l'amertume des larmes;
Et l'on doit mettre au rang des plus cuisants malheurs
La mort d'un ennemi qui coûte tant de pleurs.

Mais peut-on en verser alors qu'on venge un pere? Est-il perte à ce prix qui ne semble légere?

Et, quand son assassin tombe sous notre effort,

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