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provinces auroient été bientôt épuisées, fi les manufactures & le commerce de luxe n'euffent rendu à des sujets induftrieux les richessfes que leur avoient enlevées les armes & la puiffance de Rome. Tant que la circulation ne s'étendit pas au-delà des limites de l'Empire, elle imprima un nouveau degré d'activité à la machine politique, & ses effets, fouvent utiles, ne furent jamais dange

reux.

étranger.

Mais rien n'eft peut-être plus diffi- Commerce cile que de renfermer le luxe dans les bornes d'un Etat. Les contrées les plus éloignées étoient épuifées, pour fournir de nouveaux alimens au fafte & à la pompe de la Capitale. Les forêts de la Scythie donnoient des fourrures précieuses. On tranfportoit l'ambre par terre, depuis les rives de la Baltique jusqu'au Danube ; & les Barbares étoient étonnés du prix qu'ils recevoient en échange pour une production de fi peu

d'utilité (1). Les tapis de Babylone & les autres ouvrages de l'Orient étoient fort recherchés; mais c'étoit avec l'Arabie & avec l'Inde, , que fe faifoit le commerce le plus confidérable & le plus riche. Tous les ans, vers le folftice d'été, une flotte de cent-vingt vaiffeaux partoit de Myos-Hormos, port d'Egypte fitué fur la mer Rouge. A l'aide des mouffons, elle traversoit l'Océan en quarante jours la côte de Malabar & l'ifle de Ceylan (2) étoient le terme ordinaire de cette navigation ; & les marchands des régions de l'Afie les plus éloignées s'y

:

(1) Tacite, Germania, c. 45. Pline, Hift. nat. XXXVIII, II. Celui-ci observe assez plaisamment que la mode n'avoit point encore pu apprendre l'utilité de l'ambre. Néron envoya un Chevalier Romain fur les côtes de la mer Baltique, pour acheter une grande quantité de cette denrée précieuse.

(2) Appellée Taprobane par les Romains, & Serandib par les Arabes. Cette ifle fut découverte fous le règne de Claude, & devint infenfiblement le principal lieu de commerce de l'Orient.

rendoient pour y pour y attendre l'arrivée des fujets de Rome. Le retour de la flotte d'Egypte étoit fixé au mois de décembre ou de Janvier. Auffi-tôt fes riches cargaifons, transportées fur des chameaux depuis la mer Rouge jufqu'au Nil, descendoient ce fleuve & abordoient au port d'Alexandrie; de là elles affluoient dans la Capitale de l'Empire (1).

Les objets du commerce de l'Orient étoient brillans, mais au fond de peu d'utilité. Ils confiftoient en foies qui fe vendoient au poids de l'or (2), en pierres précieuses, parmi lesquelles la perle tenoit le premier rang après le diamant (3), & en différentes espèces d'aro

(1) Pline, Hift. nat. 1. vi. Strabon, 1. XVII.

(2) Hiftoire aug. p. 224. Une robe de foie étoit regardée comme un ornement pour une femme, & comme indigne d'un homme.

(3) Les deux grandes pêches de perles étoient les mêmes qu'à préfent ; Ormuz & le cap Comorin. Autant que nous pouvons comparer la géographie ancienne avec la moderne, Rome tiroit fes diamans de la

Or & argent.

mates que l'on brûloit dans les temples & dans les pompes funèbres. Un profit prefqu'incroyable dédommageoit des peines & des fatigues du voyage. Mais ce commerce ne contribuoit point à la profpérité de l'Etat ; & un très-petit nombre de particuliers s'enrichiffoient aux dépens de leurs concitoyens.

Comme les Arabes & les Indiens fe contentoient des manufactures & des productions de leur pays; les Romains étoient obligés de donner leur argent en échange. Le Sénat fe plaignoit que les richeffes de l'Etat employées à la parure des femmes, paffoient fans retour entre les mains des nations étrangères & ennemies (1). Un Écrivain, connu par fon exactitude, fait monter la

perte à

mine de Jumelpur, dans le Bengale, dont on touve une defcription au tom. II des voyages de Tavernier, p. 281.

(1) Tacite, ann. III, 52, dans un difcours de

Tibère.

plus de feize millions de livres (1) ; mais c'étoit le cri d'un efprit inquiet qui, livré à la mélancolie, croyoit fans ceffe voir approcher la pauvreté ; & fi nous comparons la proportion qui existoit entre l'or & l'argent du temps de Pline, & fous le règne de Constantin, nous trouverons à cette dernière époque le numéraire confidérablement augmenté (2). Rien ne nous porte à croire que l'or fût devenu plur rare; il eft donc évident que l'argent étoit plus commun. Ainfi, quelles qu'ayent été les fommes exportées dans l'Arabie & dans l'Inde, elles furent bien loin d'épuifer les richeffes de l'Empire; & les mines fournirent toujours au commerce des reffources immenfes.

(1) Pline, Hift. nat. xII, 18. Dans un autre endroit il calcule la moitié de cette fomme; quingenties H. S. pour l'Inde, fans comprendre l'Arabie.

(2) La proportion, qui étoit de un à dix, & à douze & demi, s'éleva jufqu'à quatorze fept cinquièmes, par une loi de Conftantin. Voyez les tables d'Arbuthnot, fur les anciennes monnoies, c. v.

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