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Il prend pof

perfonne de Julien, n'en crurent pas moins devoir, pour leur sûreté, approuver cette révolution, & affecter même la joie la plus vive (1). Après avoir rempli le Sénat de gens armés, Julien prononça un difcours fort étendu fur la liberté de fon élection, fur fes qualités éminentes, & fur fa confiance dans l'affection de fes concitoyens. Sa harangue fut universellement applaudie; toute l'Affemblée vanta fon bonheur & celui de la Nation, promit au Prince de lui être à jamais fidèle, & le revêtit de toutes les marques de la puiffance impériale (2).

Du Sénat, Julien fe rendit au Palais, feffion du Pa-fuivi du même cortège. Les premiers, objets qui frappèrent fes regards, furent

lait.

(1) Dion Caffius, alors Préteur, étoit ennemi perfonnel de Julien, 1. LXXIII, p. 1235.

(2) Hift. Aug. p. 61. Nous apprenons par-là une circonftance affez curieufe: un Empereur, quelle que fût fa naiffance, étoit reçu, immédiatement après fon élection, au nombre des Patriciens.

le corps fanglant de Pertinax, & le repas frugal préparé pour fon fouper. Il regarda l'un avec indifférence, l'autre avec mépris. On lui donna une fête magnifique ; & il s'amusa jusques bien avant dans la nuit à jouer aux dez & à voir les danses du célèbre Pylades. Cependant, lorsque la foule des Courtifans se fut retirée, l'on obferva que ce Prince, laiffé en proie à de terribles réflexions dans les ténèbres & dans la folitude, ne put goûter les douceurs du fommeil; il repaffoit probablement dans fon efprit fa folle démarche, le fort de fon vertueux prédéceffeur, & ne fe diffimuloit pas combien étoit incertaine la poffeffion d'un fceptre que l'argent, & non le mérite, lui avoit mis entre les mains (1).

Il avoit raifon de trembler. Affis fur Mécontente

(1) Dion, I. LXXIII, p. 1235; Hift. Aug. p. 61. J'ai cherché à concilier les contradictions apparentes de ces Hiftoriens..

ment public

le premier Trône du monde, il fe trouvoit fans amis, & même fans partifans; les Prétoriens rougiffoient eux-mêmes d'un Souverain que l'avarice feule avoit créé; il n'étoit aucun citoyen qui n'envisageât fon élévation avec horreur, & comme la dernière infulte faite à la majesté du Peuple Romain. Les Nobles, à qui des poffeffions immenfes & un état brillant impofoient la plus grande circonfpection, diffimuloient leurs fentimens, & recevoient les égards affectés de l'Empereur avec une fatisfaction apparente & avec des proteftations de fidélité; mais parmi le peuple, les citoyens qui trouvoient un abri fûr dans leur nombre & dans leur obfcurité, donnoient un libre cours à leur reffentiment. Les rues & les places publiques de Rome retentìffoient de clameurs & d'imprécations; la multitude furieufe infultoit la perfonne de Julien, rejetoit fes libéralités ; &, trop foible pour entreprendre une révolution, elle appelloit

à grands cris les légions des frontières, & les invitoit à venir venger la majesté de l'Empire.

de Bretagne

Pannonie

tre Julien.

fe

Le mécontentement public paffa bien- Les armées tôt du centre aux extrémités de l'État. de Syrie de Les armées de Bretagne, de Syrie & de déclarent conPannonie déplorèrent la mort de Pertinax avec lequel elles avoient tant de fois combattu, & qui les avoit fi fouvent menées à la victoire. Elles apprirent avec surprise, avec indignation, peut-être même avec jaloufie, que les Prétoriens avoient vendu publiquement l'Empire; & elles refusèrent unanimement de ratifier cet indigne marché. Cette révolution entraîna la perte de Julien, & troubla la tranquillité de l'Etat. Clodius Albinus, Pefcennius Niger & Septime Sévère, qui commandoient ces différentes armées, furent plus empreffés de fuccéder à Pertinax, que de venger fa mort. Les forces de ces trois rivaux étoient égales; ils se trouvoient chacun à la tête de trois légions & d'un corps

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Clodius AlbiDus en Bre

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nombreux d'auxiliaires (1); & quoique d'un caractère différent, ils joignoient tous à la valeur d'un foldat les talens & l'expérience d'un Général.

Clodius Albinus l'emportoit fur fes deux compétiteurs par la nobleffe de fon extraction. Il comptoit parmi fes ancêtres plufieurs des citoyens les plus illuftres de l'ancienne République (2). Mais la branche dont il étoit defcendu, perfécutée par la fortune, avoit été tranfplantée dans une province éloignée. Il eft difficile de se former une idée juste de fon véritable caractère. On lui reproche d'avoir caché fous le manteau d'un Philofophe austère, la plupart des vices qui dégradent la nature humaine (3);

(1) Dion, l. LXXIII, p. 1235.

(2) Les Pofthumien & les Cejonien. Un citoyen de la famille Pofthumienne fut élevé au Confulat dans la cinquième année après fon inftitution.

(3) Spartien, dans fa compilation, fait un mélange de toutes les vertus & de tous les vices qui compofent Ja nature humaine, & il en charge un feul individu

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