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l'ont le moins mauvais, parce qu'il n'y en a point en qui l'harmonie de l'efprit & de la raifon ne foit défectueufe en quelque chofe.

Le peché du premier homme fait que nous naillons tous plus ou moins malades, plus ou moins efclaves de la concupifcence. Il met le défordre dans toutes nos facultez; affujettiffant l'efprit à la chair, il le rend ennemi de la raifon, & revolte l'imagination contre l'un & contre l'autre. De forte que dans ce trifte état les hommes n'aiment que les chofes fenfibles, & ne vivent que de la terre comme les ferpens.

A la verité nous qui avons le bonheur d'être chrétiens, nous fommes délivrez du peché par le Sacrement qui nous fait renaître de nouveau, mais nous ne fommes pas parfaitement guéris. Le levain de la maladie demeure toûjours en nous, il eft toûjours prêt à nous caufer de nouveaux maux à moins que nous ne prenions foin. d'ufer des remedes capables d'en reprimer les mauvais effets, & de garder le regime que nous a prefcrit l'Eglife, lorfqu'elle nous a fait enfans de Dieu.

La foi nous enfeigne que les enfans baptifez deviennent le temple du faint Efprit, ai fi nous ne devons pas douter que ce divin Efprie ne repare dans eux par fon on

tion l'accord de l'efprit & de la raifon, quoiqu'il laiffe la concupifcence dans l'ame & des infirmitez dans le corps qui doivent être le fujet de nos combats & la matiere de nos victoires.

Il n'y auroit donc qu'à s'appliquer à conferver cet accord par une éducation fage & vrayment chrétienne, pour faire croître les enfans également en âge & en fagef fe, comme il eft dit de Jefus-Chrift nôtre modele, & pour leur former un goût excellent & un jugement exquis.

!

Maisô malheur que l'on ne fçauroit affez déplorer, & auquel fi peu de perfonnes font reflexion; malheur qui eft peutêtre une des plus veritables caufes, pourquoi Jefus Chrift trouvera fi peu de for fur la terre, quand il y viendra; la chose à laquelle on penfe le-moins dans l'éducation des jeunes gens, c'eft à nourrir & à faire croître en eux ce germe de fainteré & de fageffe, de jugement & de bon goût qu'ils ont reçû dans le Baptême, à mefure que leur raifon fe dévelope, & qu'ils avancent dans les études..

A l'égard de la religion qui eft le fondement de tout l'édifice, puifque fans elle on ne bâtit que fur le fable; on fe contente de quelques inftructions legeres & fuperficielles, qui ne vont point jufqu'au cœur,

& qui demeurent tout au plus dans la memoire, pendant qu'on les applique tout entiers à l'étude des lettres profanes; non feulement on s'efforce de remplir leur efprit des penfées & des expreffions des payens, mais on s'étudie encore à les leur faire goûter comme les vrais modeles de la perfe&tion, à laquelle ils doivent tâcher d'atteindre. En forte que ces enfans tout enfans qu'ils font, fentent bien que le capital de leurs devoirs, eft de fe rendre habiles dans la connoiffance des profanes, & que la science du falut, n'eft qu'un trés- leger aeceffoite de leurs obligations. Ainfi on étouffe entierement en eux les femences de vertu & de pieté qu'ils av cient reçûës du faint Efprit, & qui auroient produit ce bon goût que l'on cherche, fi elles avoient été fortifiées par de bons preceptes.

1706.

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Jene fçaurois m'empêcher de raporter ici une reflexion de l'Auteur du Journal de Trevoux, elle eft parfaitement belle & Fin elle vient merveilleufement à mon fujet. art. Il l'a fait à l'ocafion d'un livre compofé pour établir l'incredulité. La mauvaise éducation des enfans (dit-il) contribue aussi à repandre l'incredulité. On craint ce femble d'aprofondir avec eux les matieres de la religion. On fe contente de leur en donner des idées fuperficielles, & d'exiger d'eux

un attachement à la foi, qu'il faudroit leur perfuader. Comme on n'a pofé aucun fondement folide dans leur efprit, les exhortations à la vertu dont on les fatigue juf qu'à les ennuyer, portent à faux, & ne font impreffion fur eux qu'autant que la crainte & la vigilance les rendent efficaces, Quand ils voudroient s'inftruire de la religion, les études inutiles dont on a charge leur efprit, ne leur en la gent guéres le temps. Ils entrent dans le monde comme dans un champ de bataille, où la religion eft attaquée de toutes parts, & ils y entrent fans armes. Là ce qu'on voit, ce qu'on entend, ce qu'on efpere, ce qu'on redoute, ce qui plaît, ce qui choque, confpire à détourner de la religion de fes maximes. Toujours pouffez, toujours folicitez, comment de jeunes gens pourroient-ils refifter &qu'opoferoient-ils aux coûtumes tyranniques, au langage empefté du monde, fi la conviction de leurs devoirs n'eft dans leur efprit ni auffi pleine, ni auffi lumineuse qu'elle le devroit être ? Ils fe rendront bientôt à la corruption generale; & pour calmer une confcience allarmée, ils prendront volontiers des leçons d'impieté, és manqueront rarement de maitres. Ces paroles toures d'or doivent bien donner à penfer & à craindre aux perfonnes qui font char

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gées de l'éducation de la jeuneffe. Saint Paul nous enfeigne que la pieté eft utile à tout, & pour la vie prefente, & pour celle qui eft à venir. Que les maîtres en faffent donc leur principal objet dans l'éducation des enfans ; qu'ils ne leur mettent jamais en main des livres capables de l'éreindre; qu'au contraire ils ne leur fassent lire que ceux où ils puiffent voir les grandes veritez de la religion, foûtenues par de grands exemples ; & qu'ils attendent que leur jugement foit formé, & que leur pieté foit folidement établie, pour leur permettre la lecture des Auteurs profanes, dont ils peuvent avoir befoin pour la beauté du langage, pour la connoiffance de l'hiftoire & des fciences. Ils verront alors avec étonnement & avec joye le progrés de ces enfans dans les lettres par la benediction que Dieu répandra infailliblement fur une éducation dans laquelle on aura premierement cherché fon royaume & fa juftice.

Qu'une parcille methode dans l'inftruction des enfans, produiroit de grands biens & pour l'Eglife, & pour l'Etat ! Quelle union & quelle paix ne verroir-on point dans la focieté ? Quelle exactitude dans tous les devoirs de la vie civile & de la vie chrétienne? Quelle foûmiffion pour

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