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Perfonne n'avoit plus goûté l'éloquence des profanes que l'illuftre M. de Balfac; perfoane n'en a mieux imité la pompe. On pouroit dire même qu'il la furpaffée. Cependant il ne fe fut pas plûtôt donné à la lecture des Livres, qui peuvent nous ap prendre la science des Saints, & nous conduire dans les voyes du ciel; qu'il perdit le goût de tous les autres, qu'il eur du regret de leur avoir donné trop de temps, & de ne s'être pas plûtôt mis à l'étude des Livres faints & des Peres.

Mais tant que nous ne nous repaîtrons que des oignons de l'Egypte, la Manne du ciel fera un met infipide pour nous. Tant que nous ne remplirons nôtre efprit & notre memoire que des fictions des Poëtes, au des opinions des Philofophes qui fe détruifent les unes les autres ; il ne faut pas s'attendre que nous fentions d'attrait pour les folides maximes de la vraye Philofophie, pour les veritez terribles, mais néanmoins confolantes qui ne pafferont jamais, tant que nous ferons éblouis de l'éloquence faftueufe des payens, nous ne devons pas efperer de prendre plaisir à l'éloquence fimple & modefte, mais forte & fublime des Auteurs qui ont puifé dans la fource, où font cachez tous les trefors de la fcience & de la fageffe.

XXIV.

Au refte, quoique je donne une grande étendue au bon goût, & que je pretende que ce foit en effet la même chofe que le jugement & la fageffe, je n'avance pourtant rien qui ne foit renfermé dans la définition de Me. Dacier, comme la Heur l'eft dans fon bouton; rien que cette Da me n'eût dit elle-meme, fi elle eût voulu fe donner la peine de l'aprofondir, & de nous déveloper tout ce qui y eft compris. C'eft ce que je pourois prouver par quelques endroits de fa Preface & de fes Remarques fur Ariftophane. Mais j'allongerois un difcours qui n'eft deja que trop long ; j'aime mieux attendre que cette Dame, ou quelque aurre pour elle défavoüe quelqu'une des confequences que je tire de fa définition. Alors il me fera trés aifé de les foûtenir, & de montrer qu'elle doit ou les recevoir, ou renoncer à fa définition.

Pour achever ce qui pouroit manquer à ce Difcours, & pour former une parfaite conviction fur ce que nous devons entendre par le bon goût; je montrerai dans les Difcours fuivans par quelques exemples, que fi les lumieres de la religion ne rectifient le goût, on l'a toûjours

plus ou moins mauvais, quelque bel efprit que l'on ait, & quelque docte qu'on puiffe être d'ailleurs; & que la définition de Madame Dacier, toute vraye qu'elle eft, ne lui a fervi de rien, ni à elle, ni à tous les autres Sçavans dans les Lettres profanes, parce qu'ils ne l'ont point fuisie, & qu'ils n'en ont pas affez bien connu la verité par les principes.

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DISCOURS III.

On montre par quelques exemples, que la lecture des profanes corrompt le goût en beaucoup de cho.

fes.

N m'avoüera

fi le bon goût fe devoit faire fentir dans quelque ouvrage, c'étoit dans la Preface où j'en ay pris l'idée. Certe Dame qui avoit fi bien rencontré dans la définition qu'elle en avoit donnée, devoit être attentive à la fuivre en tout, & à ne s'en écarter jamais. Cependant il femble qu'elle l'ait oubliée dans tout ce qu'elle dit à l'avantage de la perfonne d'Ariftophane & de fes comedies. Pour le prouver, je me contenterai d'en raporter feulement quelques endroits. Je fatiguerois le Lecteur, fi je voulois relever tout ce qui s'y trouve d'oposé à la raifon, à la juftice & à la verité, & par confequent au bon goûr.

Je tâcheray de le faire fans m'éloigner du refpect qui eft dû à une perfonne d'une fi grande reputation pour fon efprit, fa

fcience & fa politeffe; & fans même que ce que je dirai puiffe donner atteinte à fa pieté, ni aux autres vertus qui font l'honneur de fon fexe. Je pretends feulement faire voir que la lecture trop opiniâtre des payens & l'eftime exceffive qu'on fait de leurs ouvrages, nous enchante tellement qu'elle nous jette infenfiblement dans une efpece d'oubli des maximes de nôtre religion, & qu'elle nous accoûrume à parler de toutes chofes, comme fi nous n'étions pas chrétiens. Ainfi fi l'étude des profanes n'eft pas rectifiée par d'autres études, elle ne fait que nous gârer le goût, au lieu de le perfectionner, comme le pretendent les admirateurs perpetuels des ouvrages des

payens.

En effet, s'il eft certain que les modernes ne furpaffent pas les anciens dans leurs compofitions, quoiqu'ils les furpaffent de beaucoup par l'étendue & la folidité de leurs connoiffances; c'eft que ne fe fouvenant pas des grandes verirez que la religion enfeigne, & que n'étant pas affez touchez des fentimens qu'elle infpire, ou pour mieux dire, n'ayant dans l'efprit & & dans le cœur que les penfées & les fentimens des profanes, ils n'afpirent qu'à devenir leurs imitateurs; & l'efprit d'imi tation tenant le genie en fervitude, il en

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