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d'Alger que nous avions toujours craint, parcequ'on n'avoit encore pu apprendre la conclufion de la paix, entre cette Republique & la France.

nitienne.

Nous reftames deux jours entiers à cette rade, & ne pumes mettre à la voile, que le fecond de Novembre, que nous paffames à la faveur d'un bont vent, on renles Iles de la Sapience, aprés avoir trou- contre la vé fur la route la Flote Venitienne qui Flotte Ve tiroit du coté de Coron. Aprés avoir paffé le Golfe de Venife, nous decouvrimes fur le foir, la pointe de Sicile. Nous fumes pourtant un peu inquiets toute la nuit fur un feu que nous apperçumes de loin. Quelquesuns crurent que c'etoit un fanal de Vaiffeau, qui conduifoit quelque efcadre ce qui nous obligea à tenir notre artillerie prete en cas de befoin, d'autres au contraire affuroient, que ce feu fortoit du Mont-Gibel qui etoit à notre portée; mais nous reconnumes le lendemain la fauffeté de nos conjectures, lorfque nous fumes visà vis du Cap Paffaro. C'eft là que les Espagnols entretiennent garnifon dans une espece de Fort qu'ils ont bati, pour la fureté des Cotes, & auffi-tot qu'on de couvre quelque Vaiffeau, on eft obligé d'allumer d'efpace en efpace des feux, pour avertir les peuples de la campagne, de fe precautionner contre les Corfaires, qui ne viennent que trop fouvent y faire des defcentes.

Tandis que nous doublions ce Cap,

Mr.

fons vi -àvis de Mal. the.

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M. de Perfin fit mettre le fignal pour avertir la Barque & la Tartane de fe ranger prés du Vaiffeau, pour etre en etat Nous paf- de detenfe, au cas que les Galeres d'Efpagne vinffent à paroitre. Quelque tems aprés, nous decouvrimes l'Ile de Malthe, qui n'eft eloignée du Cap Pafiaro que d'environ vingt lieues. Nous effuyames en cet endroit une petite boraíque, qui fut fuivie de quelques grains, & de quelques gros tonnerres aprés quoi le vent s'etant tourné en notre faveur, nous nous avançames jufqu'à l'Ifle de la Pantelerie, qui nonobstant sa petiteffe, donne de gros revenus aux Efpagnols qui en font les Maitres. Nous pallames prés de deux jours vis-à-vis de cette Ifle, parceque nous y fumes furpris d'un facheux calme caufé par une chaleur extraordinaire, quelque avancez que nous fuffions dans le mois de Novembre; mais un vent de Sud-eft s'étant heureusement elevé, nous continuames notre route & decouvrimes bientot aprés le Cap Bon.

Precautions des Tunetins pour defendre

leurs Cotes.

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C'est une pointe d'Afrique, où il n'y a aucun Fort; mais ou les Tunetins entretiennent feulement, pour la fureté de leurs Vaiffeaux & des Habitans du Païs, un fanal qu'un Maharbou ou Dervich qui y fait penitence, a foin d'allumer, pour avertir par autant de feux qu'il fait, quel eft le nombre des voiles qu'il de

couvre.

A la gauche de ce Cap, on void le

Fort

Fort de Galipe fitué fur une langue de terre fort elevée & prefque inacceffible où les canons qui y font en grand nombre peuvent tres-bien defendre la Place de toutes parts, & meme empecher les approches de l'ennemi. Tandis que nous confiderions tout celà, le vent de Sudeft fe fortifie tellement qu'il nous fait faire prés de trois licues par heure, & fait difparoitre à nos yeux les Ifles du Sem brow que nous doublions en un inftant. S'il eut eté conftant, il nous eut bientot fait reconnoitre la Sardaigne; mais s'etant malheureufement changé vers la minuit en Nord-oueft, il nous tourmenta etrangement le refte de la nuit.

Les Tangues & les Roulis du Vaiffeau La tempe qui nous agitoient fucceffivement l'un te nous oblige de reaprés l'autre nous incommoderent ex- lacher en tremement & le vent contraire qui Barbarie. nous amenoit de tems-en-tems de gros grains nous obligea meme à mettre le Vaiffeau à fec, pour ne pas nous exposer à demater, puis fe fortifiant de plus en plus, il nous ota l'efperance de doubler les ifles de Saint Pierre auffitot que nous avions cru. Il devint enfuite fi furieux, qu'au lieu de fonger à avancer, ou meme à fe foutenir contre fes efforts, on fut obligé de relacher en Barbarie, ce que nous fimes le quatorzieme de Novembre

, que nous allames mouiller vis-àvis de Portefarine, qui eft un aflez bon Port, & ou la petite Ville qui porte le meme nom, eft allez bien fituée pour

de

Les Pecheurs

defendre les Vaiffeaux des gros vents de Nord-Ouest & d'Oueft. Elle est batie au pié d'une haute montagne, fur une langue de terre où les Batimens peuvent venir fe ranger pour fe mettre en affurance. Elle appartient aux Tunetins, dont la Ville Capitale n'en eft eloignée que d'environ fept lieues, & où l'on ne peut arriver qu'en paffant par la Goulette où etoit autrefois la fameuse Ville de Cartage, d'où l'on entre dans un beau Lac, fur lequel Tunis eft bati.

Le vent de Nord-Oueft, que les Provenceaux appellent Mitral, nous obligea de refter à cette rade le quinze & le feize. On n'y fut pas pourtant oifif: les Chaffeurs du Vaiffeau allerent avec les Pecheurs dans une petite Ifle, où tandis que les uns chaffoient aux pigeons qu'on y trouvoit autrefois à foifon, les autres s'occuperent de la peche avez affez de fuccez. La prife la plus confiderable qu'ils firent, fut celle d'un Veau marin qu'ils prennent blefferent avec des armes à feu, & qu'ils acheverent enfuite à coups de pierres. Comme la chair n'en eft pas bonne, ils fe contenterent de la peau pour en faire quelques manchons & quelques gibecieres. Ils nous l'apporterent à bord, avec la tete qui y etoit encore attachée. La premiere etoit de la grandeur de celle d'un petit bœuf: Elle etoit couverte d'un poil lis, extremement epaifle, noirâtre pardeffus, avec deux grandes marques blanchatres au deffous des flancs, elle etoit

un Veau

marin.

fans

fans aucun veftige de queue, terminée aux quatre extremitez par les quatre nageoires, dont cet animal fe fert egalement dans l'eau & fur terre, où il vient quelquefois faire de grands degats dans les vignes. Chacune de ces nageoires etoit armée de cinq ongles noirs affez grands. Ceux de devant fortoient en dehors d'une maniere fort fenfible, au lieu que ceux de derriere etoient prefque entierement enfoncez, couverts de la peau, & beaucoup plus minces que les premieres. La tete reffemble tout-à-fait à celle d'un Lion ou d'un Leopard, à celà prés qu'on n'y voit point d'oreilles. Je fis mon poffible pour y decouvrir le conduit de l'ouie, & je ne pus l'obferver, qu'aprés avoir fait decouvrir, entierement la tete, où j'apperçus à trois ou quatre doigts de l'œil, deux petits canaux velus, qui alloient aboutir à deux trous prefque imperceptibles que je trouvai fur la peau, à la faveur de la fonde. Sa langue eft fort courte & fort epaiffe, les machoires & les nazeaux font femblables à ceux d'un taureau, dont il imite parfaitement le mugiffement, à ce que me rapporterent les pecheurs qui le prirent, &qui lui entendirent faire les derniers efforts, avant que de fe rendre tout-à-fait.

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Tandis qu'on s'occupoit ainfi agreablement dans le Vaiffeau, on vit fortir de derriere la pointe de la Montagne qui couvre la rade où nous avions mouillé, quatre Voiles, qui nous firent d'abord

quel

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