rovée de Cologne & fit brûler la Ville, de là il paffa à Tongres, pilla Treves la veille de Pâques, & mit le feu à Metz, dont tout le peuple fut égorgé & les Prêtres malfacrés jufqu'aux pieds des autels. Reims eut un pareil traitement nonobftant la composition que fes habitans avoient faite avec luy, & ce fut en cette occafion que S. Nicaife fon Evêque eut la tête tranchée avec fa fœur Eutrope. Il ravagea Cambray, Befançon, Langres & Auxerre; Troyes & Chaalons attendoient la même difgrace; mais il en fut détourné par S. Loup Evêque de Troyes & par S. Alpin Evêque de Chaalons, qui par leur éloquence confervérent leurs Villes de cette ruine. Attila marcha ensuite droit à Orléans qu'il affiégea dans les formes. Il y fit donner des affauts fi continuels, qu'après une réfiftance incroyable que l'efpérance d'être fecourus avoit fait faire aux affiégés, ils perdirent enfin courage, & envoyérent faint Aignan leur Evêque à Attila demander miféricorde, mais il n'en faifoit point; néanmoins pour n'être pas obligé à donner un dernier affaut & être plutôt en état d'aller au-devant d'Aëtius qui commandoit l'armée Romaine, & qui venoit à luy pour le combattre, il accorda que les habitans d'Orléans le fuivroient avec leurs femmes & leurs enfans, il avoit même envoyé dans Orléans &;

plufieurs des principaux de fon armée pour y faire le partage des captifs, & l'on chargeoit les chariots de toutes les dépouilles de la Ville, lorfque les Romains & les Wifigots, qui étoient plus proche qu'Attila ne croyoit, furprirent les troupes qu'il avoit au-de-là de la Loire, ils les mirent en défordre, & les poufférent jufques dans la riviere, où un grand nombre de foldats tombant les uns fur les autres furent noyés, il en périt auffi un grand nombre par le fer, le fer, & tous ceux qui étoient entrés dans la Ville pour en enlever les dépouilles furent maffacrés, à la réferve de quelques-uns à qui le faint Evêque Aignan fauva la vie,

Attila fe retira vers la partie des Gaules qu'il avoit déja conquife, & vint camper dans les plaines de Chaalons, dans le deffein d'y attirer les Romains & les Wifigots, dont les forces étoient encore au-deffous des fiennes, mais Aëtius, à qui le fuccès qu'il avoit eû ne fit pas perdre le jugement,crut qu'il devoit attendre que les François nouveaux conquérans d'une partie des Gaules, qui étoient commandés par leur Roy Mérovée, & les autres troupes auxiliaires fuffent aflemblées Quelques Hiftoriens croyent que Childeric fuivit le Roy Mérovée fon pere en cette occafion. Ce qui eft certain, c'eft que quand Aétius arriva dans les plaines de Chaalons,

Attila l'attendoit pour luy donner bataille, il avoit dans fon armée Mérovée Roy des François, Théodoric Roy des Wifigots, Singiban Roy des Alains, les Riparots, les Bretons, les Liticiens, les Bourguignons conduits par Gondioche & Chilpéric leurs Rois, les Saxons, les Briones & quelques peuples de Sarmație. Attila avoit dans la fienne Valamer Roy des Oftrogots, Ardaric Roy des Gépides, & toutes les autres nations qu'il avoit fubjuguées. Quand Attila fçut qu'Aëtius approchoit, il alla au-devant de luy, & dans la nuit fuivante un gros de Gépides détachés de fon armée pour battre la campagne, rencontra une troupe de François que marchoient devant l'armée d'Aëtius pour le même deffein. Il y eut entr'eux un combat dont le fuccès eft à peine concevable. Ces deux partis fe trouvérent par hazard tellement égaux en nombre auffi-bien qu'en valeur, qu'aucun ne pouvant vaincre ni se réfoudre à reculer, on ne ceffa de tuer de part & d'autre que quand il n'y eut plus perfonne en état de frapper.

Le lendemain les deux armées arrivérent de grand matin à un endroit où il y avoir une hauteur qu'elles regardoient comme un pofte très-avantageux. Attila envoya inconti nent des troupes pour s'en faifir: mais Aëtius avoit déja gagné le fomunet avec tant de dis

ligence, que quand Attila voulut aborder Aetius fondit fur fes troupes & les repouffa avec une grande perte jufqu'au pied de la colline; & il ne jugea pas à propos de les pourfuivre plus loin, afin de donner le temps fes troupes de fe ranger en bataille.

à

Attila ayant fait de fon côté la même chofe, parla à fes foldats comme s'il eût été alluré de la victoire; il confulta fes devins, qui luy dirent que leurs obfervations ne luy promettoient rien d'avantageux, mais que le chef des ennemis feroit tué dans la bataille; ce qui fit croire à Attila que la mort d'Aëtius étoit certaine, & que par fa mort la conquête de l'Empire luy feroit aifée. Tous les ordres qu'Attila donna avant que d'en venir au combat, font connoître qu'il ne fongeoit qu'à conferver fa perfonne: il fit faire une clôture des chariots de fon armée, où fe retirérent les femmes, & il avoit pris la réfolution de s'y retrancher luy-même au befoin; on voit encore aujourd'huy des reftes des terraffes & d'autres travaux entre les villages de Cuperly & la Cheppe, aufquels il paroît par des titres qu'on a de temps immémorial donné le nom de Camp d'Attila, qu'il porte encore aujourd'huy: ce qui femble juftifier que ce fut en cet endroit qu'Attila fit faire ce retranchement. Il observa auffi de n'en venir aux mains que lorfque

le foleil feroit près de fon couchant, afin que files premieres troupes qu'il feroit combattre étoient défaites, la nuit furvenant pût cacher la retraite qu'il méditoit.

Voicy comme Attila rangea fon armée en bataille. Il mit les Oftrogots à l'aile gauche commandée par Valamer leur Roy, les Gépides à la droite conduits par Ardaric, & le corps d'armée où Attila étoit avec les Huns, demeura dans le milieu.

Aëtius donna de fon côté une difpofition toute femblable à fon armée; il étoit au milieu avec les Romains, parmi lesquels il avoit mêlé les troupes de quelques nations. Les François commandés par leur Roy Mérovée fur une des aîles étoient oppofés aux Oftrogots, & les Wifigots commandés par leur Roy Théodoric étoient oppofés aux Gépides.

Attila fit commencer le combat fur la fin de la journée malgré le défavantage du lieu, & dès l'abord les Gépides fe mêlérent tellement avec les Wifigots, que leur Roy Théodoric étant tombé de fon cheval, fur écrafé fous les pieds des chevaux, fans que le Prince Thorifmond fon fils qui l'accompagnoit, ni aucun de fes Officiers ou foldats s'en apperçût. Ainfi la prédiction des devins d'Attila fut accomplie, car un chef de l'armée qui luy étoit ennemie fut tué: mais