Prétendre que les préparations en gés néral alterent tous les médicamens, qu'il faut les prendre tels que la nature, toujours fage dans fes productions, nous les offre, c'eft une erreur; mille remedes ufuels, mille & mille chofes qui nous fervent de nourriture, feroient rebutées comme inutiles & nuifibles fans une préparation artificielle.

On prepare les remedes pour en augmenter la force & en développer les principes, ou pour leur ôter quelques qualités dangereufes. Je n'examine point quels font les moyens qu'on peut employer pour enlever aux mixtes les principes corrofifs

a pu occafionner des pefanteurs à l'eftomac plutôt par fa quantité que par fa qualité nuifible. Le mercure dont on fe plaint encore, & qui fur d'abord adminiftré en friction n'en eft pas moins demeuré le remede le plus certain de la maladie contre laquelle on l'employe ordinairement, & les fâcheux effets qui ont fuivi quelquefois fon ufage, font prefque tous dûs au défaut d'attention & peut-être à la routine de tant de gens qui emploient ce fluide métallique fans en connoître la nature & les propriétés. Il eft donc conftant que c'eft moins à l'efpece de médicament dont on fe fert, qu'à la forme fous laquelle il a été mis en usage, qu'il faut attribuer des inconvéniens qu'on auroit tort de reprocher au médicament lui-même.

qu'ils contiennent; tout le monde fçait, qu'il eft impoffible d'y réuffir fans corriger la nature & former un être nouveau (t).

(t) Tous les jours on fépare la fubftance d'un végétal quelconque, fans que pour cela cette fubftance puiffe & doive être regardée com me un être nouveau; l'opération employée à cet effet n'étant nullement capable de la créer, ni même de déranger l'ordre des parties conftituantes. En divifant, à l'aide d'une rape, de la racine de brionne, par exemple, & délayant enfuite la rapure dans une grande quantité d'eau, il fe précipite au fond du vaiffeau une matiere pulvérulente & blanche, que l'on confidéroit autrefois comme une terre à cause de fa fineffe, de fon infipidité & de fon infolubilité; mais des obfervations & des expériences nouvelles ont démontré de nos jours que cette matiere, connue ordinairement dans les pharmacies fous le nom de fécule, n'étoit autre chofe qu'un véritable amidon femblable à celui du bled, & dont l'exiftence étoit fi fenfible, fi manifefte dans les végétaux d'où on le retiroit, que fans faire fubir à ces derniers le mouvement de fermentation Ou procéder à l'extraction de leurs fucs, il fuffiroit, pour en être convaincu, de les expofer à la loupe ou au microfcope pour appercevoir cet amidon fous la forme de points brillans. Quoique le manioc, pris dans fon entier, foit un poifon; l'opération par laquelle les Américains parviennent à en retirer la caffave, ne fait pas du manioc un nouveau corps, mais

Je n'entreprends pas non plus de décrire une infinité de préparations que les Artiftes ont coutume de faire par l'union & le mélange de plufieurs remedes, ce n'est pas qu'on puiffe les défapprouver; elles ont leurs vertus particulieres & on s'en fert avec fuccès, mais je me propofe dans cette Chymie, uniquement de développer les principes des corps, de les représenter, pour ainfi dire, d'après nature, de diminuer la dofe des remedes, fans détruire l'efficacité. Pour exécuter ce deffein, je ne vois qu'un moyen, qui eft de féparer les parties terreftres & celles qui font nuifibles, les aqueufes, des principes actifs. La Chymie ordinaire fait fes efforts pour

une féparation de l'aliment qui, comme le difoient des anciens Obfervateurs, fe trouvoit à côté du poifon. J'entrerois dans trop de dérails s'il falloit expofer ici toutes les circonftances où l'on ne fait, même après des travaux chymiques, que féparer des produits fans rien changer à leur nature refpective; combien de fois la prétendue rectification des huiles empyreumatiques, par laquelle on croit atténuer les parties groffieres, n'eft, comme l'a fi clairement démontré M. Model, que la fimple féparation de l'huile la plus fluide, la plus tenue & la plus volatile qui fe trouvoit confondue dans une huile extraordinairement épaiffe & fétide.

le mettre en exécution (u); tantôt elle fait fermenter le mixte, enfuite le diftille, quelquefois elle le diftille fans fermentation, le met dans la cornue, elle le calcine, fouvent elle en tire des teintures & en fait des extraits; heureux fi ces différentes opérations rempliffoient en entier l'idée que nous nous propofons, & fi elles n'a

(u) La Chymie ne fait jamais beaucoup d'ef forts, elle ne fait qu'employer à propos tous les inftrumens qui lui conviennent; & dans les différens moyens dont elle fe fert, elle n'a pas toujours pour but la préparation de quelque médicament : la plupart d'entr'eux ont aidé Tes Chymiftes à découvrir la nature des corps. Heureux fi ne fe méprenant plus fur les réfultats que ces moyens leur ont procuré, ils fongent à les concilier ou à en imaginer de nouveaux & de plus fûrs, & fi, fçachant très-bien que les corps n'ont pas une feule maniere d'être, ils ne fe contentent pas d'un feul moyen pour les décompofer; en effet on conviendra que la trituration, par exemple, qu'employe M. de la Garaye lui a pu procurer du régne végétal quelques remedes plus commodes & plus efficaces qui pour cela n'ont pas plus découvert la nature des corps d'où ils font extraits. Mais fi l'on avoit propofé à M. de la Garaye d'extraire de l'antimoine par la voie de la trituration, les fudorifiques & les vomitifs que ce minéral nous fournit, on lui auroit démontré fans doute l'infuffifance de fon moyen comme moyen univerfel.

voient leurs inconvéniens, qui ne se trouvent pas dans notre méthode, laquelle tend uniquement à féparer les parties les plus groffieres d'avec les plus fubtiles & les plus efficaces.

Inconvéniens de la Chymie ordinaire pour retirer les principes efficaces des médicamens,

LE Chymifte recherche différens moyens

de dépouiller les remedes en fubftance des parties terreftres, dont ils font remplis, toujours fur le principe que nous avons établi dans les articles précédens, fçavoir, que leur efficacité ne dépend nullement de l'union naturelle du phlegme & de la terre. Pour ne pas entrer dans un détail qui nous meneroit trop loin; il fuffira de réduire les différentes préparations qu'on fait en Chymie à quelques chefs particuliers, auxquels les autres fe rapportent.

Quelquefois l'Artiste convertit le mixte en une terre fubtile, quelquefois c'est une décoction ou une infufion; tantôt c'eft un extrait; fouvent il tache de perfectionner ce mixte par la fermentation, Ici ce font