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pravée par la difcipline, elle peut l'être d'elle-même. Au refte, la nature ne porte point d'abord un enfant à la volupté, mais feulement à fa propre confervation: car dès qu'il eft né, il s'aime, & tout ce qui eft de lui; premiérement les deux parties principales dont il eft compofé, l'efprit & le corps, & enfuite leurs différentes parties, car il y en a fans doute de principales dans l'un & dans l'autre : & quand il vient à en avoir quelque légére connoiffance, & qu'il commence à difcerner, alors il fe porte à ce que la nature a mis d'abord en lui, & il tâche d'éviter ce qui y eft contraire. De favoir fi dans ces premiers commencemens de la nature, il y a quelque fentiment de volupté, c'eft une grande queftion: mais de croire que, quand cela feroit, il n'y eût rien au deffus de la volupté, & qu'elle fût préférable aux facultez de l'ame, à celles des fens, à la confervation de tout le corps, & à la fanté, c'eft à mon avis une très-grande folie: & voilà fur quoi roule toute la difpute des vrais biens, & des vrais maux.

Polémon, & avant lui Ariftote, ont crû que les plus grands de tous les biens étoient ceux dont je viens de parler: &

c'eft ce qui a donné lieu à l'ancienne Académie, & aux Péripatéticiens, de mettre le fouverain bien à vivre felon la nature; c'est-à-dire, à pouvoir, par le moyen de la vertu, joüir fagement des premiers dons de la nature. Calliphon a ajoûté la volupté à la vertu; Diodore, la privation de la douleur; & c'eft à tous tes ces chofes-là conjointement que les uns ou les autres ont attaché le fouverain bien. Ariftippe ne l'a attaché qu'à la volupté fenfible: les Stoïciens veulent qu'il confifte à fe conformer à la nature, ce qu'ils difent qui n'appartient: qu'à la vertu & à l'honnêteté, & qu'ils interprétent vivre avec une telle intelligence des chofes qui arrivent naturellement, qu'on puiffe choisir celles qui font conformes à la nature, & rejetter celles qui y font.

contraires.

Ainfi il y a fur le fouverain bien trois opinions,où il n'eft point parlé de l'honnêteté : l'opinion d'Ariftippe ou d'Epicure, celle d'Hiéronyme,& celle de Carnéade. Il y en a trois autres, où à l'hon-nêteté on joint quelque addition: l'opinion de Polémon ou d'Ariftote, celle de Calliphon, & celle de Diodore. Il y en a enfin une feule, où il n'eft parlé que de l'honnêteté ou de la vertu, dont

Zénon eft l'auteur, & qu'il fait entiérement confifter dans ce qui est bien féant; c'est-à-dire, dans ce qui eft honnête. Car depuis long-temps(19) Pyrrhon, Árifton,

(19) My a peu de perfonnes qui ne fachent qui étoit Pyrrbon quant à fa doctrine, qui alloit à fufpendre fon jugement fur chaque chofe, & à croire que tout étoit indifferent; fans qu'il y eut rien qui de foi-même fut ni bien ni mal. Il fut difciple d'Anaxarque, avec lequel il fut dans les Indes du temps d'Alexandre: & qui avait accoûtumé de dire, qu'il ne favoit pas même qu'il ne fçút 'rien. Afon retour les Athéniens lui donnerent le droit de Bourgeoisie & il fut auteur de la fecte de ceux qui ont été appellez Pyrrhoniens, & qu'on appelle auffi Sceptiques. On dit qu'il vêcut jusqu'à quatrevingt-dix ans.

Arifton étoit de l'Ile de Chio. Il fut quelque temps difciple de Zénon le Stoïcien, après quoi il le quitia, ne retenant de fes maximes que celle qui dit Que le Sage eft exempt d'opinion. Il croyoit que tout étoit indifferent, hormis le vice & la vertu. Il fut appellé Syréne à cause de fon éloquence. On prétend qu'il eft le premier qui comparant le Sage à un bon Comedien, a dit qu'il n'importoit pas quel perfonage on fit dans la vie; mais qu'il importoit uniquement de bien faire celui dont on étoit chargé. It comparoit auffi la Dialectique aux toiles d'araignée, qui font très-delicatement faites, mais qui ne font bonnes à rien. Ilretranchoit de laPbilofophie la Phyfique & la Logique, disant que l'une étoit au deffus de nous, & que l'autre ne fervoit de rien Eil ne s'attachoit qu'à la Morale. On dit qu'il mourut dans un age fort avancé, parce qu'étant

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Arifton, & Hérille ont été abandonnez. Ariftippe qui a mis le fouverain bien dans la volupté; Hiéronyme qui l'a mis dans la privation de la douleur ; & Carnéade qui le fait confifter à joüir des premiers biens de la nature, font fermes tous trois dans leurs principes, & ils ne vacillent point. Pour Epicure, qui préfére la volupté à tout; s'il entend parler de celle dont parle Ariftippe, il a dû, comme lui, en faire le plus grand de tous les biens; & s'il entend parler de celle dont parle Hieronyme, c'eft encore la même chofe. Car de dire que les fens mêmes jugent que la voJupté est un bien, & que la douleur eft un mal, c'eft attribuer aux fens plus d'autorité qu'il ne leur appartient.

Quand les loix nous font juger des affaires des particuliers, nous ne pouvons juger que de ce qui eft de notre compétence:

chauve il s'étoit tenu trop long temps la tête nuë au Soleil.

Hérillt, felon quelques uns, étoit de Calcedoines felon quelques autres, de Cartage. Il fut difciple de Zénon, auffi bien qu'Arifton : dans la fuite il le quitta, & écrivit même contre lui. Il mettoit le fouverain bien dans la fcience, à laquelle il rapportoit toutes chofes; & il croyoit indifferent tout ce qui n'étoit ni vice nį vertu,

compétence & c'eft inutilement que le Juge en prononçant une fentence a accoûtumé de dire, s'il m'appartient d'en juger car fi la connoiffance ne lui en appartient pas, il eft inutile de prononcer. Véritablement il appartient aux fens de juger de ce qui eft doux ou amer, poli ou rude, proche ou éloigné; de ce qui ne bouge, ou qui fe meut, & de ce qui eft carré ou rond. Mais de quoi jugera donc la raifon, avec la fcience des chofes divines & humaines qui eft la véritable fageffe, & avec les vertus, que la raifon regarde comme les maîtreffes de tout, & que vous faitesles fuivantes, & les miniftres de la volupté Elle prononcera fans doute, premiérement qu'il n'eft point ici queftion de la volupté, non-feulement pour être mife fur le trône du fouverain bien; mais non pas même pour y avoir aucune place avec l'honnêteté. Elle n'en donnera non plus aucune, ni à l'opinion d'Hiéronyme, ni à celle de Carnéade, & jamais elle n'approuvera qu'on falle confifter le fouverain bien, ni dans la volupté, ni dans la privation de la dou-leur, ni dans quoi que ce foit de contraire à l'honnêteté

Ainfi il ne lui restera plus que deux

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