ÆäÀÌÁö À̹ÌÁö
PDF
ePub

été déclaré que les Candidats qui donneroient de l'argent pour faire qu'on allât au devant d'eux, ou qui fe feroient fuivre pour de l'argent, qui feroient diftribuer des places aux gladiateurs dans les fpectacles, ou qui donneroient des repas au Peuple, feroient cenfez être contrevenus à la loi Calpurnia. Oui fans doute, le Sénat a jugé que ces chofes-là, quand on les fait, font des contraventions à la loi : & c'eft ce qu'il eft inutile d'alléguer, quand le Candidat n'y contrevient point. Car il ne s'agit pas ici de favoir fi elles font condamnables ou non; il s'agit de favoir fi elles ont été faites par celui que vous en accufez. Que fi elles ont été faites, perfonne ne peut douter qu'elles ne foient condamnables par la loi. C'est donc mal à propos que laiffant à part ce qui eft en doute, vous vous attachez à ce qui n'en peut recevoir aucun. Le Sénatufconfulte que vous alléguez a même été donné à la réquifition de tous les Candidats ; & on ne peut connoître par là contre qui il a été donné. Ainfi montrez-moi que Muréna ait fait les chofes qu'elle condamne, & je conviendrai avec vous qu'il eft contrevenu à la loi.

Quantité de gens, dites-vous, ont été au devant de lui, lorfqu'il eft venu de la Province pour demander le Confulat. Cela eft ordinaire; & au devant de qui ne va-t-on pas dans ces occafions? Mais quelle foule de monde n'y a point été ! Premiérement, quand je n'aurois rien à vous répondre là-deffus, finon qu'il n'eft pas étonnant qu'une grande multitude de gens aient été au devant d'un tel Candidat qui vient demander le Confulat, & qu'il y auroit bien plus à s'étonner fi perfonne n'y avoit été, qu'auriez-vous à dire ? Que fi j'ajoûte à cela, que fuivant l'ufage, plufieurs y ont été en ayant été priez, imputera-ton à crime que dans Rome, où quelquefois, lorfqu'on nous en prie, nous menons avec nous de la ville la plus prochaine les enfans du petit Peuple; des hommes priez par un tèl homme, n'aient pas fait difficulté d'aller au devant de lui jufqu'au champ de Mars ? Que fi toutes les Compagnies, dont je voiici plufieurs Juges affis, y ont été : fi plufieurs Senateurs y ont été pareillement; fi toute la nation des Candidats, qui ne fouffre entrer perfonne dans Rome dont elle n'honore l'entrée, y a été auffi: enfin fi Pofthumius un de nos ac

cufateurs, y a été lui-même avec une grande troupe de gens; pourquoi objecter à Muréna la multitude de inonde qui a été au devant de lui? Je ne parle point de fes clients, de fes voifins, de ceux de fa même Tribu, ni de toute l'armée de Lucullus, accouruë ce jourlà pour le triomphe; je dis feulement qu'en de pareilles rencontres on n'a jamais manqué d'aller en foule nonfeulement au devant d'un homme conftitué en dignité; mais au devant de qui que ce foit qui l'ait desiré.

Mais il avoit un grand nombre de gens à fa fuite faites-moi voir qu'il les eût payez pour cela, & j'avouerai que c'est un crime: que s'il n'y a point eu d'argent donné, que vous refte-t-il à dire ?

Pourquoi, me direz-vous, être accompagné de tant de monde ? Mais vous, pourquoi me demandez-vous raifon d'une chofe qui a toûjous été en ufage parmi nous? Le feul moyen que le menu Peuple ait de mériter quelque chofe de nous, & de reconnoître le plaifir que nous lui faifons, c'eft de nous fuivre & de nous accompagner dans la pourfuite des charges: car ce ne feroit pas une chofe poffible, ni même à demander, que des Senateurs

ou des Chevaliers Romains accompa gnaffent tous les jours les Candidats leurs amis. Pourvû qu'en ces occafions ils viennent fouvent chez nous, que quelquefois ils nous conduifent dans la Place publique, & qu'ils nous accompagnent durant quelque efpace, c'est beaucoup, & nous croyons alors avoir reçû d'eux une affez grande marque d'amitié. L'affiduité continuelle ne convient qu'au petit peuple, & aux gens qui n'ont rien à faire, & jamais elle n'a manqué aux perfonnes de dif tinction & de mérite. N'ôtez donc point au menu peuple, Caton, la feule chofe par où il lui eft permis de nous mar quer quelque forte de reconnoiffance. Souffrez que ceux qui efpérent tout de nous, puiffent faire quelque chofe pour nous. S'ils ne peuvent nous fervir que de leurs fuffrages, c'eft peu de chofe; puifque leurs fuffrages ne font prefque d'aucune confidération. Ils ne peuvent, difent-ils, ni plaider, ni se rendre cau tion pour nous; ils ne peuvent nous régaler chez eux; toutes ces chofes-là ils les attendent de nous; & ce n'est qu'en s'empreffant de nous accompagner dans la pourfuite des charges publiques, qu'ils croient pouvoir nous rendre en

quelque forte ce que nous faifons pour eux. C'est pourquoi ils s'oppoférent autrefois à la Loi Fabia, qui vouloit régler de quel nombre de gens les Candidats pourroient se faire accompagner; & ils s'oppoférent auffi au Sénatufconfulte qui en fut fait fous le Confulat de Lucius Céfar; rien ne pouvant empêcher le menu peuple de rendre ces fortes de marques de déférence.

Mais on a donné des ípectacles aux Tribus, & des repas au peuple. Quoi que cela n'ait point été fait par Muréna, mais feulement par fes amis, fuivant l'usage, & avec modération, cette objection me rappelle dans l'efprit combien ces fortes de queftions agitées dans le Sénat, nous ont ôté de fuffrages; & vous le favez, Servius. Car y at-il jamais eu un temps parmi nous, où cette forte d'ambition ou de libéralité de donner à fes amis, ou à ceux de fa Tribu, des places au Cirque, & dans la place publique, n'ait pas été en ufage. C'eft une chofe ancienne qui commença d'abord par les petites gens; & ceux qui trouvent à redire qu'un ( 2 ) maître des ouvriers ait donné une fois des pla

(2) Il y a ici une lacune dans l'original.

ces

« ÀÌÀü°è¼Ó »