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DE

1

L'UTILITE

DES

VOYAGES,

POUR LA RECHERCHE

DES TALISMANS.

E n'ai point parlé des Talifmans en parlant des Pierres gravées, quoiqu'il s'en trouve un plus grand nombre dans cette efpece d'Antiquité, que parmi les métaux ; j'ai donc crû qu'il étoit plus à propos d'en faire un Article à part pour éviter la confufion. En effet, non-feulement le principe, le deffein, le choix des Pierres & l'ufage en font particuliers; mais A même

Tom. II.

même on en peut faire, difent les Auteurs, avec toutes fortes de matieres, comme métaux, pierres communes, arbres, plantes & racines.

Je n'ai pas deffein néanmoins de donner ici dans les vifions indifcretęs du vulgaire ignorant, ou de foufcrire à tout ce qu'on en debite fans l'entendre, ou d'anathemariser tout ce ce qu'on en a écrit fans l'examiner. Je me fuis plus attaché d'ailleurs à rapporter ce que les Anciens en ont penfé, & à éclaircir quelques paffages qui m'ont paru difficiles, qu'à compofer un Traité qui en enfeignât la fabrique. Comme le fecret & l'u fage d'en faire font très-anciens, il eft impoffible qu'en les ramaffant on n'y découvre beaucoup de chofes propres à déveloper les myfteres de l'Antiquité. Voilà enfin la feule utilité que je veux décrire & que je prétens en tirer.

Je ne fçai où Reichelt a pris qu'Apollonius de Tyanes eft le premier Auteur de la fcience des Talifmans, ni qui font ces Auteurs Arabes & Chrétiens qui avancent cette vifion. Je fçai bien que Selden a dit quelquepart, qu'un Manufcrit Arabe parle d'un Polonus fapiens, Inventeur des

Ta

Talismans, & qu'il croit que c'est Apollonius; ce qui fans doute a auffi trompé Licetus: mais une conjecture fi mal fondée ne prouve rien. Gaffarel avant lui, n'a que trop bien refuté fon fentiment. En effet, il eft aifé de montrer non-feulement que les Caldéens, les anciens Perfes, & avant eux les Egyptiens, en ont connu les fecrets: mais encore que les premiers Patriarches les ont cultivez. Sans cela comment pourroit-on expliquer ces Theraphins de l'Hiftoire Sainte, & Judic. e. des Prophetes* ?

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* Sedebunt filii Ifraël fine Principe, & fine facri ficio, & fine altari, & fine Ephod & fine Theraphim Ofée c. 3 4.

En prenant le mot de Talifmán dans fa veritable fignification, pour l'Image de quelque conftellation ou d'une Planette gravée fur une pierre fympathique ou fur un metal, correspondant à l'aftre pour en recevoir l'influence, on ne peut pas dire que les Theraphims de l'Hiftoire fainte & des Prophetes, fuffent des Talismans. C'étoient des Idoles qui avoient la figure d'homme, femblables à-peuprès aux Lares & aux Penates. Les Idolatres croyoient que les Dieux demeuroient dans ces Idoles, & qu'étant confultez, ils rendoient des réponses. Les Theraphins n'ont rendu que des » réponses vaines," dit le Proph. Zacharie c. 10. v. 2. Voyez Ezechiel 21. 21. On a encore donné le nom de Thera hims à ce qui s'appelle dans l'Hifoire fainte Vrim & Tumm:m, c'est-à-dire, auxmots doctrine & verité qui étoient gravez fur le Rational du Grand Prêtre. Ces deux mots étoient des Symboles de la prefence de Dieu, qui étoit cenfé répondre par eux, toutes les fois qu'il répondoit par le Grand Prêtre revêtu du Rational, fur lequel ces deux móts étoient écrits.

3 & 17.

Je trouve, Monfieur, pour confir mer ce que j'avance, que le Pere Kirker eft de ce fentiment dans fon Tom. I. Oedipe Egyptien; fur quoi il cite Abenezra, qui tient que les Theraphims étoient des Figures conftellées & propres pour la divination. Ces fortes de Figures étoient communes en Egypte, s'il eft vrai que Theraphim ait été tiré par corruption de Serapes; les Caldéens ne pouvant

pas prononcer ce mot autrement, comme le veut encore le Pere Kirker. Les Egyptiens font apparemment les premiers Inventeurs des Talifmans, comme Herodote, ce me femble l'infinue au fecond livre de fon Hiftoire, après avoir dit que ces peuples donnerent les premiers le nom à douze Dieux, & qu'ils leur dédierent des Autels, des Statues & des Temples. Cet Auteur ajoûte, qu'ils furent auffi les premiers à graver des animaux fur des pierres : ce qui convient fort aux Talifmans. D'où vient que ceux de pierreries feroient fans doute les plus anciens.

Le Pere Kirker prétend au- refte que les Egyptiens appelloient chez eux Serapes tout ce qui avoit le pou

* ν ζῶα ἐν λιθοῖσι ἐγγλύψαι

voir

voir & la vertu de conferver, de défendre ou de procurer quelque bien; & que les Ifraëlites apprirent en Egypte, le fecret de les fabriquer. En effet, cela eft fi fort connu des plus Sçavans, que le P. Simon dans fon Hiftoire critique de la Bible qui pa- Pag. 55 roît depuis peu, affûre qu'on ne fçaurpit expliquer une bonne partie des Livres de Moife: fil'on ne connoît la Religion des anciens Sabaïtes, dont cette fcience, felon lui, faifoit une partie des mysteres. Et n'eft-il pas encore très-probable que ces Figures par lesquelles Laban augura que Jacob attireroit la benediction de Dieu fur fa famille, étoient des Images talifmaniques ou conftellées *; telle qu'étoit apparemment cette petite Figure qu'un inconnu, au rapport de SueLone, § donna à Neron, & à qui feule cet Empereur faifoit des Sacrifices trois

A 3

* Non feulement cela n'eft pas probable, mais cela eft faux. Laban dit expreffément à Jacob Gen. 30. 27. J'ai reconnu par experience, que Dieu m'a beni à caufe de vous." Il eft vrai que Laban avoit chez lui des Idoles, mais c'étoient des Dieux qu'il adoroit. Gen. 31. v. 19. & 30.

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§ Si quidem icumculam puellarem, cum quafi remedium infidiarum à Plebeio quodam & ignoto muneri accepiffet, detecta confeftim conjuratione pro fummo numine, trinifque in die facrificiis colere perfeveravit: volebatque credi monitione cjus futura prænofcere. Suet. c. 56.

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