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extraordinaire. Les Juges, avant de rien ftatuer, nommèrent deux Commiffaires pour examiner la fituation des lieux. Ils établirent dans leur rapport, que la partie de rue dont il s'agiffoit étoit néceffaire pour le service du Public. En conféquence il fut décidé par Arrêt que la rue demeureroit dans l'état où elle avoit toujours été. Ce Jugement caufa une joie inexprimable aux Vifitandines, dont la Communauté étoit compofée de quatre-vingts Religieufes, qui ne fachant comment témoigner leur reconnoiffance à Madame de Caumartin & à Meffieurs des Grands Jours, députèrent leurs quatrevingts Anges Gardiens pour les accompagner, lorfqu'ils s'en retourneroient à Paris.

Ce retour n'étoit pas éloigné : la lettre de congé qui rappeloit Meffieurs les Commiffaires à leurs fonctions ordinaires étant arrivée, chacun d'eux fe trouvant fans autorité, & n'étant plus que de fimples Confeillers au Parlement, ils défiroient avec empreffement de fe rendre dans la Capitale ; & ceux que leur préfence incommodoit depuis près de cinq mois, ne fouhaitoient pas moins ardemment de les voir éloignés. Le féjour de Clermont étoit d'autant plus ennuyeux pour les étrangers que la tenue des Grands Jours y avoit attirés, que les amusemens ordinaires du carnaval avoient été défendus, & le Carême avancé de plufieurs jours, par une ordonnance de l'Evêque, à l'occasion d'un scandale public dont tout le monde avoit été confterné. Il y avoit dans la Ville un fou qui paroiffoit affez paifible, fa folie n'étant jamais allée jufqu'à la fureur. Auffi le laissoit-on en liberté d'autant plus qu'on le voyoit fouvent en prières dans les Eglifes, & que ces dehors de piété faifoient dire qu'il étoit plus à plaindre qu'à redouter. Mais on ne confidéroit pas que cette apparence de tranquillité pouvoit changer en un inftant, & que quand un efprit eft bleffé, on doit toujours craindre quelques fuites fâcheufes de fon dérangement. En effet, ce fut la piété même de cet homme qui acheva de lui troubler l'efprit. Il s'imagina que tous les Prêtres qu'il voyoit célébrer étoient indignes de leur miniftère. Il n'affiftoit à aucune Meffe qu'il ne fe fentît pouffé par un zèle furieux de monter à l'Autel pour achever le Şacrifice, & immoler le Prêtre à fes pieds. Enfin cet homme étant un jour dans une Eglife où l'Aumônier de M. l'Evêque difoit la Messe, & avoit déjà confacré, fon accès le prit fi violemment, que

franchiffant tout-à-coup la balustrade, il s'élança vers l'Autel, faifit le calice, & le confuma,en difant qu'il étoit feul digne d'exercer les fonctions redoutables du Sacerdoce. A la nouvelle de cette profanation, l'horreur & la confternation fe répandirent dans toute la Ville. L'Evêque ordonna des prières publiques, on expofa le Saint Sacrement dans toutes les Eglises, on fit des fermons fur cet événement propres à ranimer la foi & la ferveur, en un mot, on n'oublia rien de tout ce qui pouvoit exciter les Catholiques, & furtout les ames pieuses, à réparer par leurs adorations l'injure faite à Jefus-Chrift dans le plus faint & le plus augufte de nos mystères.

Les Commiffaires des Grands Jours, & tous ceux qui les avoient accompagnés, quittèrent enfin Clermont le 4 Février 1666, pour se rendre à Paris. Ils avoient déjà fait cette route lorfqu'ils étoient venus, ainfi elle ne leur offrit rien de nouveau & de remarquable. Cependant ils s'arrêtèrent à Briare, où ils avoient paffé rapidement la première fois, afin d'y confidérer à loifir les travaux & le méchanisme de ce fameux canal commencé fous Henri IV. par l'immortel Sully, pour joindre la Loire avec la Seine, & fini fous Louis XIII. La Relation en donne une defcription détaillée que nous ne transcrirons pas ici, parce que ce canal eft une chofe très-connue aujourd'hui, & qu'on l'a beaucoup perfectionné, depuis l'époque où l'Abbé FLÉCHIER écrivoit fa Relation.

Tandis que les voyageurs examinoient le jeu des éclufes; l'Abbé FLÉCHIER prend un détour affez ingénieux pour fe ménager un moyen de dire fon fentiment fur tout ce qui s'étoit paffé pendant la tenue des Grands Jours. Il feint que s'étant retiré à l'écart, dans le deffein de fe promener feul, il fut abordé par un homme de la compagnie avec lequel il s'étoit lié d'amitié à Clermont. C'étoit un homme d'efprit, qui avoit des connoiffances en littérature, & qui jugeoit trèsfainement des choses. L'Abbé lui demanda ce qu'il penfoit des événemens extraordinaires dont il avoit été témoin. Il répondit qu'on ne pouvoit trop louer la conduite de MM. les Commiffaires, leur zèle pour le rétabliffement du bon ordre, leur application au travail, leurs lumières & leur intégrité; que la fageffe du Roi ne paroiffoit pas moins dans le choix qu'il en avoit fait, que fon amour pour la justice

dans le foin qu'il avoit pris de réprimer les violences de la nobleffe, & de punir ceux de cet ordre qui s'étoient prévalu de leur rang & de leur autorité, pour commettre impunément les crimes les plus atroces; que la févérité des Magiftrats qui compofoient ce Tribunal étoit néceffaire dans l'état où fe trouvoient les chofes en Auvergne, par les funeftes effets de la licence & de l'impunité ; que ce qui diftingueroit à jamais les Grands Jours d'Auvergne, de tous ceux qui avoient été tenus en divers temps, dans d'autres Provinces, étoit l'étendue d'autorité que le Roi avoit accordée à ce petit Sénat, étendue qui confiftoit principalement en ce qu'on avoit ordonné, 1o. la révocation de toutes les lettres de grâce & d'abolition obtenues depuis vingt ans, enforte qu'il a fallu que toutes ces lettres fuffent repréfentées au Procureur Général & foumifes à l'examen des Commiffaires. 2°. La révision de tous les Jugemens rendus antérieurement par contumace avec augmentation d'amendes & autres peines. 39. Le rasement, dans l'efpace de quinze jours, des maisons & châteaux des fugitifs, à qui la Loi accorde ordinairement cinq ans pour fe juftifier; mais que tout cela s'étoit fait par des motifs fi juftes & fi graves, que les gens les moins favorablement prévenus étoient forcés d'y applaudir. A la fuite de ces réflexions, l'Abbé FLÉCHIER met dans la bouche de fon ami l'éloge de M. le Président de Novion, de M. de Caumartin, de M. Taion, & de tous les Magiftrats qui avoient formé le Tribunal des Grands Jours, & c'eft par-là qu'il termine fa Relation.

FIN.

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TABLE

DES LETTRES

Et autres Pièces contenues dans ce Volume.

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Lettre xix. De controverfe, & des moyens de réunir les deux Communions à M. Vigier, Avocat,

32

Lettre xx. De civilité, au même, pour s'excufer de ce qu'une des Lettres qu'il lui avoit écrites, avoit été divulguée, & pour lui rendre compte d'une affaire dont il l'avoit chargé pour un ami qui vouloit fe convertir, 35

Lettre xx1. De civilité, au même, fur la même affaire, 36 Lettre xxII. De civilité, au même pour juftifier fa conduite au sujet d'un procès auquel il prenoit intérêt en faveur de fa partie, 37

Lettre xx111. De civilité au même fur l'affaire de la converfion de fon ami, 38 Lettre XXIV. De civilité à Madame de Richemont,

ibid.

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Lettre xxxvI. Compliment à la même, fur la mort de Madame de Fieubet, ibid. Lettre xxxvII. Compliment à M. l'Abbé Baftide, qui l'avoit félicité fur fa promotion à l'Evêché de Lavaur, & qui lui avoit fait préfent du Panégyrique de faint Jérôme,

50 Lettre XXXVIII. De civilité à M. Benoft, Auditeur de Rote,

Lettre xxxix. Au même, ibid. Lettre XL. A un mari, fur l'heureux accouchement de fon épouse, ibid.

Lettre XLI. Humble & pieuse remonfrance au Roi, pour refufer l'Evêché de Nimes,

52

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Lettre XLIII. Compliment à Monfeigneur le Dauphin fur fes victoires, ibid. Lettre XLIV. De piété, à Madame de Richemont fur la maladie de M. fon Epoux,

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54

55

Lettre xLv. De piété, à M. de Richemont fur fa maladie, Lettre XLVI. Compliment Chrétien à Meffieurs de Nîmes, fur fa translation de Lavaur à Nîmes, 56

Lettre XLVII. Compliment à M. Huet, ancien Evêque d'Avranches, en lui envoyant deux Oraifons Funèbres, 57

Lettre XLVIII. Compliment à M. de Santeul, Chanoine de faint Victor, fur quelques-uns de fes vers qu'il lui avoit envoyés,

58 Lettre XLIX. De civilité à M. de Richemont, 59 Lettre L. A la Reine d'Angleterre, pour répondre à celle que Sa Majesté Britannique lui fit l'honneur de lui écrire le 28 Août 1693,

60 Lettre LI. De civilité à M. l'Abbé Menard. Il le prie de lui envoyer quelques Ouvrages nouvellement imprimés 61 Lettre L11. De civilité & de compliment AM. Benoît, Auditeur de Rote, 62

Lettre LI. De remerciment à M. l'Abbé Menard. Il y eft parlé de quelques Ouvrages dont on porte le jugement, ibid. Lettre LIV. De civilité & de piété à Madame de Richemont,

63

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Lettre LXV. De civilité à M. Fiefchi Archevêque d'Avignon, pour lui demander deux Religieufes pour gouverner la maifon du Refuge à Nîmes,

72

Lettre LXVI. De civilité au Père Vignes, fur fes Prédications,

C....

73 Lettre LXVII. De civilité à Madame de ibid. Lettre LXVIII. Lettre dogmatique fur le mariage d'un Proteftant avec une Catholique, 74 Lettre LXIX. A M. l'Abbé Menard, au fujet de la paix, 77 Lettre Lxx. De civilité à M. de Richeibid.

mont,

Lettre LXXI. De civilité au Père Vignes, pour lui promettre de demander pour lui le Carême à Carpentras, 78

Lettre LXXII. De recommandation à M.

de Carpentras, pour le Père Vignes

ibid.

Lettre LXXII. De civilité au Père Vignes, en lui envoyant la réponse de M. de Carpentras,

79

Lettre LXXIV. A M. le Pelletier, Miniftre d'Etat, fur fa Retraite, 80

Lettre LXXV. De civilité & de remerciment, à M. l'Abbé Menard

Lettre LXXVI. Compliment à Madame de Thayran, Religieufe de Sommières, fur la mort d'une perfonne de la Communauté, & la maladie d'une autre. ibid.

Lettre LXXVII. De confolation aux Religieufes de Sommières, fur la maladie de la Supérieure, 82 Lettre LXXVII1. Compliment aux mêmes, fur la convalefcence de la Supérieure, 83 Lettre LXXIX. De civilité à Madame de 84 Lettre LXXX. De civilité au Père Fulgence de Bellegarde, Barnabite, fur une Oraifon funèbre de la compofition de ce Père, ibid.

C....

Lettre LXXXI. A M. l'Abbé Menard, fur les nouvelles publiques, 85 Lettre LXXXII. De civilité à M. de Ris chemont, 86

Lettre LXXXII. A M. le Marquis de Châteauneuf, fur l'état de la Religion, & les difpofitions des nouveaux Convertis de fon Diocèse, après les Déclarations du Roi, 87

Lettre LXXXIV. De confolation & de piété à M. de Richemont, fur la mort d'une de fes filles, བ་

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