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d'une paffion violente, fa beauté telle qu'elle puiffe être, ne ferà aucune impreffion fur tes fens'; je puis cependant t'affurer qu'elle eft prefque comparable à ces belles filles aux fourcils noirs, que tu as vûes dans ton voyage mystérieux.

Et bien, Seigneur, dis-je alors, puifque vous le fouhaitez, je verrai donc cette Sultane; mais je vous jure par la pierre (a) blanche qu'Adam apporta du Paradis, & qui tomba en héritage à Ibrahim, Ifmael & fes defcendans, que fa beauté, quelque touchante qu'elle puiffe être, n'alterera pas dans mon cœur l'amour violent que je reffens pour Zarát-Alriadh. Et moi, me dit alors le Sultan

(a) C'est la pierre noire que l'on voit à la Mecque,& laquelle de blanche qu'elle étoit,à ce que difent les Secateurs de Mahomet, devint noire par l'attouchement d'une femme qui étoit dans l'état de la fouillure légale."

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j'ai tant de vénération pour un
komme, tel qu'eft Abderaïm
que quelque chere que me foit
la Sultane, s'il fe trouvoit touché
de fes attraits, je lui
lui promets fur
ma tête, que je la lui cederai dans
le moment même.

A ces mots, le Sultan m'ayant pris par la main, & m'ayant conduit dans l'intérieur de fon Palais, nous entrâmes dans un falon fuperbe, où le premier objet qui me frappa la vûe, fut la Princeffe de Carizme, dont j'étois féparé depuis fi long-tems. Je fus en ce moment fi émû à cette vûe inefperée, & fi affligé en mêmetems de penfer que cette Princeffe étoit l'époufe du Sultan que pénétré de la douleur la plus vive, je me laiffai aller fans connoiffance fur un fopha, qui se trouva proche de moi.

LXXX. SOIREE.

Fin de l'Hiftoire d'Abderaïm

C

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E ne fut qu'après plus d'une demie heure, que je revins à moi; je me trouvai alors avec furprise entre les bras de ZaratAlriadh, & comme j'avois les yeux noyés de larmes, & qu'une pâleur mortelle paroiffoit fur mon vifage, le Sultan de Tangut, qui vit bien que fes difcours m'avoient réduit en cet état, m'embraffa tendrement: raffurez-vous me dit-il, mon cher Abderaïm, da Princeffe de Carizme n'est pas du nombre de mes femmes; la Sultane à qui elle doit le jour étoit ma foeur, & ce n'eft point fans myftere qu'elle fe trouve aujourd'hui dans mon Sérail.

A une nouvelle fi peu atten

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due, je paffai de la mort à la vie, & le Sultan m'ayant laiffé feul avec elle, je lui racontai les avantures qui m'étoient arrivées depuis le moment de notre cruelle féparation; elle en fut très-étonnée, & l'ayant à mon tour priée de me faire le récit de ce qu'elle étoit devenue depuis ce trifte moment, voici de quelle manie re elle me parla.

HISTOIRE

De la Princeffe Zarat- Alriadh; racontée par Abderaïm,

V

Ous pouvez croire, mon cher Abderaïm, me dit la Princeffe, quelle douleur je reffentis quand je ne vous vis point revenir avec Mouïad le foir que vous fûtes vendus l'un & l'autre par le perfide Capitaine; il feignit

Coup

de vous faire chercher avec beaude foin, & n'ayant point de vos nouvelles, il me dit qu'il falloit que vous vous fuffiez écartés du bord de la mer, & que vous eussiez été dévorés par les tigres, qui étoient affez communs dans ces quartiers. Comme cela ne me paroiffoit que trop vraisemblable, mon défefpoir redoubla à un point que je réfolus de me laiffer mourir.

Je fus trois jours fans boire ni manger, quelque priere que me fît ce fcélerat; & comme il fouhaitoit que je rentraffe dans le vaiffeau, il ufa d'une rufe qui lui réuffit: Madame, me dit-il, votre époux ni votre fils ne font pas morts, je viens d'apprendre d'un habitant de cette Ifle, que le dernier vaiffeau qui eft parti de ce Port les a enlevé, le Capitaine qui y commande eft fujet à faire de pareils tours; je fçais qu'il ne

fe

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