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autre parti que le vôtre? Peu s'en faudrait qu'il ne vous devint suspect, parce que d'autres rendent justice aux qualités qui l'ont placé si haut parmi vous! Il y aurait dans cette manière de sentir et de penser trop d'ingratitude et d'inintelligence. Quelques conservateurs verraient-ils avec chagrin que ceux qui jusqu'à présent ont été leurs adversaires semblent vouloir attirer à eux M. de Lamartine en lui donnant leurs suffrages? Nous ignorons si ce calcul, fort naturel au reste, dans les mouvemens et les évolutions des partis, a été fait par quelque fraction de la chambre; mais dans tous les cas, c'est une raison de plus pour le parti conservateur de réunir ses suffrages sur l'honorable député de Mâcon. Ne serait-ce pas un étrange spectacle de voir M. de Lamartine l'objet des témoignages de sympathie et d'estime de ceux qu'il a pu rencontrer comme adversaires dans l'arène politique, tandis que ceux dont il a soutenu la cause, et à la tête desquels il a si souvent combattu, n'auraient pour lui ni zèle, ni reconnaissance, ni suffrages? Dans les mouvemens politiques, la voie la plus droite est la plus sûre. La candidature de M. de Lamartine au fauteuil de la présidence est pour le parti conservateur un fait normal, légitime, nécessaire; elle réunit toutes les convenances et tous les avantages Hors de là il n'y aurait qu'inconséquence dans les idées, graves inconvéniens pour l'avenir, et nous sommes convaincus que le parti conservateur ne tombera pas dans une pareille faute.

Nous disons qu'il serait fâcheux pour la chambre qu'elle perdît l'occasion qui s'offre si heureusement à elle de faire un acte d'individualité politique qui n'a rien de menaçant pour personne. Élever un symbole conciliateur n'est pas déclarer la guerre, apparemment. La chambre qui aurait nommé président M. de Lamartine aurait-elle abdiqué son impartialité? Ne saurait-elle plus être juge équitable dans les grands débats qui vont s'ouvrir entre le ministère et l'opposition? Elle n'aurait engagé en rien son opinion sur les choses et les hommes, elle n'aurait en rien aliéné sa liberté; seulement elle aurait, par un acte éclatant, témoigné qu'elle entend travailler à réunir les esprits, qu'elle se préoccupe non-seulement des six mois qui lui restent, mais de l'avenir du pays, et de la place que lui assignera l'opinion dans l'histoire contemporaine.

Cette histoire se fait tous les jours; chaque heure vient lui apporter des matériaux et des documens; chaque heure l'éclaire et la rectifie. C'est au moins un des avantages de la mobilité de notre époque et de la rapidité avec laquelle se succèdent les évènemens et les idées, que l'injustice dure peu. La calomnie peut éclater à l'improviste et se déchaîner avec fureur, mais elle ne tient pas, elle est bientôt confondue par les faits que la publicité met en lumière. Il y a un an, à pareille époque, et pendant le cours de la dernière session, que ne disaient pas les adversaires du 1er mars sur la politique de ce cabinet! A les entendre, M. Thiers avait tout compromis, soit avant, soit après le traité du 15 juillet. Avant, il avait provoqué la coalition européenne en montrant l'intention du fameux arrangement direct; après, il avait failli allumer une conflagration universelle. Aujourd'hui, sur tous les points, la justification de

l'honorable président du 1er mars est complète. Il est démontré, par les faits, qu'avant son avènement au pouvoir les quatre puissances avaient arrêté la résolution d'évincer la France de l'arbitrage européen dans la question orientale, et il n'est pas moins avéré que, si M. Thiers eût gardé la direction des affaires, il eût amené sans collision un dénouement honorable pour tous. L'impression profonde produite par la signification de la note du 8 octobre aux cabinets européens en fait foi.

C'est le parlement anglais qui s'est chargé de la justification de M. Thiers; ce sont les papiers et les documens publiés par l'ordre des deux chambres siégeant à Westminster, qui forment en faveur de l'administration du 1er mars l'apologie la moins suspecte et la moins récusable. Déjà un habile dépouillement de ces pièces intéressantes avait initié le public français aux manœuvres et aux artifices de la politique anglaise. Aujourd'hui une nouvelle publication rend la démonstration complète; elle la rend accablante pour ceux qui n'avaient pas craint de se faire les auxiliaires de lord Palmerston contre un ministre français. Nous voulons parler de l'écrit que vient de publier M. Duvergier de Hauranne. Sous le titre De la Politique extérieure et intérieure de la France, M. Duvergier a réuni les morceaux si remarquables qu'il avait publiés cet été, en les faisant précéder d'une préface qui, formant à elle seule un nouveau travail, répond à toutes les objections par lesquelles on avait cherché à combattre la redoutable polémique de l'honorable député du Cher. Il est impossible de lire cette argumentation si chaleureuse et si vive, sans reconnaître qu'une conviction profonde, intime, invincible, animait M. Duvergier quand il a tracé cette éloquente défense d'un cabinet où il ne siégeait pas, mais dont il a vengé l'honneur, comme s'il s'agissait du sien propre. M. Duvergier était bien placé pour savoir le vrai dans ces grandes affaires : ami commun de M. Thiers, de M. Guizot et de M. le duc de Broglie, il a connu exactement les phases par lesquelles a passé la pensée politique du ministre, de l'ambassadeur et de l'homme d'état qui prêta constamment son appui moral au cabinet du 1er mars. M. de Hauranne a su faire connaître la vérité sans manquer à aucune convenance; il a rempli avec énergie le devoir qu'a tout homme public d'éclairer son pays et de confondre les calomnies dirigées contre tous ceux qui se vouent à le servir. La publication de M. de Hauranne honore la presse politique en l'associant d'une manière éclatante à l'influence de la tribune.

Pour nous, qui n'avons jamais cessé de combattre les calomnieuses attaques dont la politique du 1er mars a été l'objet, nous remercions hautement M. Duvergier d'avoir mis, du côté de la cause que nous avons soutenue, l'autorité de sa plume. C'est un bel exemple que cette défense d'un ministère qui n'est plus, dans l'unique intérêt de la vérité et de la dignité du pays. M. Thiers peut y trouver un ample dédommagement aux agressions iniques dont il a été si indignement poursuivi. Au surplus, les deux ministres que le traité du 15 juillet a surtout mis en présence, lord Palmerston et M. Thiers, sont maintenant hors du pouvoir, et les faits permettent déjà de rendre à TOME XXXVI. DÉCEMBRE.

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autre parti que le vôtre? Peu s'en faudrait qu'il ne vous devint suspect, parce que d'autres rendent justice aux qualités qui l'ont placé si haut parmi vous! Il y aurait dans cette manière de sentir et de penser trop d'ingratitude et d'inintelligence. Quelques conservateurs verraient-ils avec chagrin que ceux qui jusqu'à présent ont été leurs adversaires semblent vouloir attirer à eux M. de Lamartine en lui donnant leurs suffrages? Nous ignorons si ce calcul, fort naturel au reste, dans les mouvemens et les évolutions des partis, a été fait par quelque fraction de la chambre; mais dans tous les cas, c'est une raison de plus pour le parti conservateur de réunir ses suffrages sur l'honorable député de Mâcon. Ne serait-ce pas un étrange spectacle de voir M. de Lamartine l'objet des témoignages de sympathie et d'estime de ceux qu'il a pu rencontrer comme adversaires dans l'arène politique, tandis que ceux dont il a soutenu la cause, et à la tête desquels il a si souvent combattu, n'auraient pour lui ni zèle, ni reconnaissance, ni suffrages? Dans les mouvemens politiques, la voie la plus droite est la plus sûre. La candidature de M. de Lamartine au fauteuil de la présidence est pour le parti conservateur un fait normal, légitime, nécessaire; elle réunit toutes les convenances et tous les avantages Hors de là il n'y aurait qu'inconséquence dans les idées, graves inconvéniens pour l'avenir, et nous sommes convaincus que le parti conservateur ne tombera pas dans une pareille faute.

Nous disons qu'il serait fâcheux pour la chambre qu'elle perdît l'occasion qui s'offre si heureusement à elle de faire un acte d'individualité politique qui n'a rien de menaçant pour personne. Élever un symbole conciliateur n'est pas déclarer la guerre, apparemment. La chambre qui aurait nommé président M. de Lamartine aurait-elle abdiqué son impartialité? Ne saurait-elle plus être juge équitable dans les grands débats qui vont s'ouvrir entre le ministère et l'opposition? Elle n'aurait engagé en rien son opinion sur les choses et les hommes, elle n'aurait en rien aliéné sa liberté; seulement elle aurait, par un acte éclatant, témoigné qu'elle entend travailler à réunir les esprits, qu'elle se préoccupe non-seulement des six mois qui lui restent, mais de l'avenir du pays, et de la place que lui assignera l'opinion dans l'histoire contemporaine.

Cette histoire se fait tous les jours; chaque heure vient lui apporter des matériaux et des documens; chaque heure l'éclaire et la rectifie. C'est au moins un des avantages de la mobilité de notre époque et de la rapidité avec laquelle se succèdent les évènemens et les idées, que l'injustice dure peu. La calomnie peut éclater à l'improviste et se déchaîner avec fureur, mais elle ne tient pas, elle est bientôt confondue par les faits que la publicité met en lumière. Il y a un an, à pareille époque, et pendant le cours de la dernière session, que ne disaient pas les adversaires du 1er mars sur la politique de ce cabinet! A les entendre, M. Thiers avait tout compromis, soit avant, soit après le traité du 15 juillet. Avant, il avait provoqué la coalition européenne en montrant l'intention du fameux arrangement direct; après, il avait failli allumer une conflagration universelle. Aujourd'hui, sur tous les points, la justification de

l'honorable président du 1er mars est complète. Il est démontré, par les faits, qu'avant son avènement au pouvoir les quatre puissances avaient arrêté la résolution d'évincer la France de l'arbitrage européen dans la question orientale, et il n'est pas moins avéré que, si M. Thiers eût gardé la direction des affaires, il eût amené sans collision un dénouement honorable pour tous. L'impression profonde produite par la signification de la note du 8 octobre aux cabinets européens en fait foi.

C'est le parlement anglais qui s'est chargé de la justification de M. Thiers; ce sont les papiers et les documens publiés par l'ordre des deux chambres siégeant à Westminster, qui forment en faveur de l'administration du 1er mars l'apologie la moins suspecte et la moins récusable. Déjà un habile dépouillement de ces pièces intéressantes avait initié le public français aux manœuvres et aux artifices de la politique anglaise. Aujourd'hui une nouvelle publication rend la démonstration complète; elle la rend accablante pour ceux qui n'avaient pas craint de se faire les auxiliaires de lord Palmerston contre un ministre français. Nous voulons parler de l'écrit que vient de publier M. Duvergier de Hauranne. Sous le titre : De la Politique extérieure et intérieure de la France, M. Duvergier a réuni les morceaux si remarquables qu'il avait publiés cet été, en les faisant précéder d'une préface qui, formant à elle seule un nouveau travail, répond à toutes les objections par lesquelles on avait cherché à combattre la redoutable polémique de l'honorable député du Cher. Il est impossible de lire cette argumentation si chaleureuse et si vive, sans reconnaître qu'une conviction profonde, intime, invincible, animait M. Duvergier quand il a tracé cette éloquente défense d'un cabinet où il ne siégeait pas, mais dont il a vengé l'honneur, comme s'il s'agissait du sien propre. M. Duvergier était bien placé pour savoir le vrai dans ces grandes affaires : ami commun de M. Thiers, de M. Guizot et de M. le duc de Broglie, il a connu exactement les phases par lesquelles a passé la pensée politique du ministre, de l'ambassadeur et de l'homme d'état qui prêta constamment son appui moral au cabinet du 1er mars. M. de Hauranne a su faire connaître la vérité sans manquer à aucune convenance; il a rempli avec énergie le devoir qu'a tout homme public d'éclairer son pays et de confondre les calomnies dirigées contre tous ceux qui se vouent à le servir. La publication de M. de Hauranne honore la presse politique en l'associant d'une manière éclatante à l'influence de la tribune.

Pour nous, qui n'avons jamais cessé de combattre les calomnieuses attaques dont la politique du 1er mars a été l'objet, nous remercions hautement M. Duvergier d'avoir mis, du côté de la cause que nous avons soutenue, l'autorité de sa plume. C'est un bel exemple que cette défense d'un ministère qui n'est plus, dans l'unique intérêt de la vérité et de la dignité du pays. M. Thiers peut y trouver un ample dédommagement aux agressions iniques dont il a été si indignement poursuivi. Au surplus, les deux ministres que le traité du 15 juillet a surtout mis en présence, lord Palmerston et M. Thiers, sont maintenant hors du pouvoir, et les faits permettent déjà de rendre à TOME XXXVI. DÉCEMBRE.

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chacun ce qui lui est dû. Lord Palmerston a trompé, non M. Thiers, mais ceux qui l'avaient précédé aux affaires; il a éconduit la France, brisé l'alliance qui unissait le peuple anglais à la nation française depuis dix ans, mis l'Angleterre au service des intérêts russes. Pourquoi ? Pour mettre le comble à l'anarchie qui désole l'Orient, et rendre presque impraticable pour l'avenir la pacification qu'un instant les quatre puissances se sont flattées d'accomplir. Cependant les évènemens ont justifié toutes les prévisions de la France et de M. Thiers. Le président du 1er mars avait dit, dans son remarquable memorandum, que ce qu'on ôterait au vice-roi d'Égypte, on ne le donnerait pas au sultan, mais à l'anarchie; il avait rappelé que jamais la Porte n'avait pu trouver la force de gouverner la Syrie, et voilà que l'impuissance du sultan éclate de toutes parts: ses lieutenans ne peuvent faire respecter ni son autorité, ni la propriété, ni la liberté, ni la vie des chrétiens. Le désordre est si grand, que dans ces contrées le commerce devient stérile, même pour l'Angleterre, et qu'on s'accorde à regretter l'autorité qu'on s'est acharné à détruire avec un si fol aveuglement. Ainsi, dans la question orientale, nonseulement la France a été loyale, mais elle a été clairvoyante; à la bonne foi elle a uni l'intelligence, et le monde a pu voir avec stupeur ce résultat, que la puissance qui avait porté sur cette grande affaire le jugement le plus désintéressé et le plus vrai, est précisément celle qui n'a pu y exercer aucune influence.

Cependant l'équilibre de l'Europe est rompu, et il n'est pas difficile de sentir un malaise général. L'isolement de la France, auquel la convention du 13 juillet n'a pas mis un terme, tient tout en échec, en défiance. Il y a deux ans, l'Europe était convaincue que, si, dans une circonstance donnée, les principes constitutionnels ou l'équilibre européen étaient en jeu, la France et l'Angleterre agiraient de concert. Maintenant qui oserait proposer à la France de s'unir à l'Angleterre pour atteindre tel ou tel but? Lord Palmerston a bien mal jugé le caractère national, s'il a cru que nous oublierions les violations de la foi jurée avec la légèreté qu'il avait mise à les commettre. Les peuples ont des rancunes plus vivaces. Il peut convenir à un cabinet de s'élever à un héroïque pardon des injures, mais il ne faut pas demander à un pays ces miracles d'abnégation chrétienne. Nous n'ignorons pas que sir Robert Peel attache une haute importance au maintien du cabinet dont M. Guizot est la pensée et le chef, parce qu'il trouve dans les sympathies bien connues de M. le ministre des affaires étrangères pour la Grande-Bretagne une garantie contre les souvenirs amers qu'ont dû nous laisser les évènemens de l'an passé. L'appui moral que le chef des tories s'efforce de prêter à M. Guizot s'explique tout-à-fait par la situation et les antécédens de ces deux hommes d'état; mais ces convenances réciproques peuvent tout au plus masquer pour un moment la situation, elles ne la changent pas. Or, cette situation, c'est l'isolement de la France et le malaise de l'Europe.

Il faut tout l'aveuglement d'une politique qui semble n'avoir pour règle que les élans de la passion, pour que la cour de Russie n'ait pas cherché à

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