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Profitant à fon gré de l'ombre & du filence, Me donna de fes feux la prémière affûrance. Sur ces mêmes gazons, arrofez de mes pleurs, Il m'a cent fois juré d'éternelles ardeurs.

L'Amour, les Jeux, le Sort fembloient toûjours s'entendre,

Pour l'offrir à mes yeux, beau, galant, doux & tendre';

Et toûjours je fençois des mouvemens fecrets, Que les autres Bergers n'excitèrent jamais.

Oui, de fon abord feul mon ame étoit émûë; Et mon trouble jamais n'échappoit à sa vûë. Que fes empreffemens avoient pour moi d'ap

pas !

Il ne perdit jamais, ni fes vœux, ni fes pas. Pour un air qu'il chantoit pour moi für sa mufete,

Des plus brillantes fleurs je parois fa houlete. S'il difputoit du chant, aux Fêtes de nos Bois, Vaincu, comme Vainqueur, je lui donnois ma voix :

Et confultant mon cœur, plûtôt que la Juf

tice,

Je la lui donnois même avant qu'il fût en lice.
Devoit-il en douter? à toute heure, en tous
Licux,

Il voyoit mon fuffrage affûré dans mes yeux :
Ils lui parloient par tout de ma fecrete flâme;
Mais pouvoient-ils fuffire au trouble de mon

ame.

Non, & malgré l'effort que faifoit ma pudeur, Je l'ouvris toute entière à ce charmant Vainqueur.

Quels mouvemens flateurs, quel excès de tendreffe

Excita dans fon cœur l'aveu de ma foibleffe!
Que de fois en ce jour, de plaifir transporté,
Il paya cet aveu qui m'avoit tant coûté !

Et que
fouvent depuis, fon ardeur renaiffante
A prévenu mes vœux, & rempli mon attente!

Mon cœur foible, innocent, charmé de fes
liens,

Se Alatoit chaque jour de refferrer les fiens:

Et loin de lui cacher mes feux par ma retraite,

Je lui montrois par tout fa gloire & ma dé

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Şes regards, fes foûpirs tendres & languissans, Ses difcours, fes tranfports raviffoient tous mes fens :

Tout fervoit à mon gré nos amours mutuelles;

Tout fembloit concourir à les rendre éternelles.

Pan même les chantoit fur fes doux chalu meaux;

Et pour nous il daignoit veiller à nos Troupeaux.

On les vit fous fa garde, aux Champs, au Pâturage,

Par l'Amour affemblez paître le même herbage.

On lifoit dans nos Bois, en cent chiffres tra

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Sur l'écorce des Pins nos noms entrelaffez.

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Pouvois je craindre, ô Ciel ! que ces Lieux pleins de charmes,

Fuffent un jour témoins de mes triftes alar

mes?

Mais trop puiffant Amour, fous tes traits féduifans,

Que tu caches de maux pour les cœurs innocens!

Qui le fçait mieux que moi dans ce féjour champêtre?

Atis n'eft plus Amant, ni ne veut le paroître. Sur ces bords par lui feul tant de fois em bellis,

Tout dic qu'il a trahi la tendre Amarillis.

Dans fon air, dans fes yeux je ne vois plus que glace;

Sans ceffe à mon efprit fa froideur fe retrace. Lui, dont cent fois l'ardeur me ravit en ces Lieux,

Hélas! n'a plus pour moi qu'un abord férieux.

Si je vois fes Moutons paître encor dans la Plaine;

Ah! ce n'eft pas pour moi que l'ingrat les y mène.

Si j'entends de fa voix retentir les Vallons,

Le nom d'Amarillis n'eft plus dans fes chanfons.

S'il daigne ne parler; quels difcours j'en effuye!

Toujours quelque nuage a devancé la pluye:
Il craint pour nos Vergers; il m'invite à des

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Pour fauver nos Moiffons des Aquilons fou gueux.

Il m'apprend, effrayé, que des Loups en furie, Ont d'un Pasteur voifin forcé la Bergerie.

Atis, les Aquilons & les Loups en fureur,

Qu'ont-ils de plus fatal pour moi

deur?

que ta froi

Après tant de fermens d'une flâme fincère, N'as-tu rien de plus doux à dire à ca Bergère.' Eh! que font devenus ces tranfports fi flas

teurs,

Tous ces foins empreffez, ces difcours enchan

teurs ;

Ces airs que tu chantois pour moi d'un ton fi tendre,

Que j'eus tant de plaifir d'écouter & d'appren

dre;

Qui fufpendoient fouvent le doux chant des Oifeaux,

Qui me firent cent fois oublier mes Troupeaux ?

Ingrat, pour me charmer tu mis tout en ufage: Aujourd'hui voudrois tu détruire ton ou

vrage?

Dieux,

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