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ÉLOGE

DE CLEMENCE,

PRONONCE,

SUIVANT L'USAGE,'

LE JOUR DE LA DISTRIBUTION

DES PRIX,

Par Monfieur DOUVRIER, un des Académiciens.

C

UM Latina Lingua in univerfum Orbem dominaretur, Gallicaque adhuc agreftis, fines Regni Francorum non ultra fuerat progreffa, fapienter à Majoribus noftris inftitutum fuit, Auditores ornatiffimi, Latino fermone Clementiæ Ifauræ Laudes celebrare, ut latiùs Ipfius gloria fe extenderet , utque ita varie Gentes faciliùs difcerent, quantùm

humanitatis ftudia ipfi debeant ; fed cùm Gallica Lingua ita fuerit perpolità, & emicuerit, ut commune Populorum idioma videatur, non immeritò mos antiquus commutatus eft: hinc tamen evenit ut noviffimus ufus cæteris Oratoribus perutilis, mihi foli fit noxius : meâ enim intereffet Linguâ minus cognitâ munerë meo defungi, ut quantùm argumento Orator detraxiffet, paucioribus innotefceret.

MESSIEUR

ESSIEURS,

Dans le deffein que j'ai formé de faire l'Eloge de Clémence Ifaure, dois - je, pour m'enhardir, rappeller à mon efprit l'idée des Orateurs que l'on a entendus en ce Lieu, & dont j'occupe aujourd'hui la place. L'amour propre, tout ingénieux qu'il eft à nous flater, en détourne ma vûë, m'en fair craindre la comparaifon. Je lens, je l'avoue, qu'il me manque pour réüffir, comme eux, ce génie qui infpire des tours heureux, cette exactitude & cette élégance dans le ftile & dans l'élocution, qui donnent un caractère de nouveauté à ce qui paroîtroit ufé fans ces

fecours.

fecours. Ces Orateurs ont fçù détruire a prévention qui révolte ordinairement contre les Eloges; & par un effet bien merveil leux de leur Art, rendre intéreffans des fujets où tout l'Art femble quelquefois inuti le, pour ménager une attention favorable.

Mais que dis-je, MESSIEURS? le principal avantage qu'ont eu jufqu'à préfent les Panégyriftes de Clémence Ifaure, je puis le partager avec eux : c'eft autant fans doute à votre reconnoiffance qu'à leurs talens, qu'ils ont dû vos applaudiffemens. Senfibles aux bienfaits de cette illuftre Fondatrice des Jeux Floraux, vous écoutez avidement tout ce qui peut en rappeller la mémoire. Reconnoiffance vi ve & féconde, unique fource de ma confiance, préfage favorable de mon fuccès.

Des Peuples entiers célèbrent tous les ans, par des Fêtes folennelles, & par des Sacrifices, le retour de cet Aftre brillant, qui de fes regards bienfaifans réjouit & fertilife toute la Nature: plus éclairez que ces Peuples fuperftitieux, nous décernons auffi tous les ans à Clémence Ifaure, non un culte religieux, mais une Fête magnifique, & un tribut d'hommages, pour les biens dont nous lui fommes redevables: En vain méprisant les louanges, elle s'y 1721.

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dérobe par fa modeftie; en vain elle a tâché de nous laiffer ignorer ce qu'elle-a été dans le tems même qu'elle travailloit fi généreufement à nous faire recueillir les fruits de fon amour pour les Belles Lettres; nous fauverons fon nom & fa gloire d'un éternel oubli, à la faveur de ces Eloges qu'on renouvelle ici tous les ans, plus fûrs garants de fon immortalité,que cette Statuë magnifique, que cette Table d'Airain, où l'on lit, en caractères refpectables, fes dernières difpofitions; enfin, que ces preuves authentiques de la dotation qu'elle a faite des Jeux Floraux, dont les Archives publiques font les dépofitaires.

Clémence Ifaure, dans des fiècles groffiers, forme le noble deffein de rétablir l'Empire des Belles Lettres ; la fageffe & la générofité conduifent fon entreprise 5 un fuccès glorieux que nous admirons, & dont nous reffentons aujourd'hui les effets, couronne fes foins. Quelle fource de gloire pour elle ! quels motifs de recon noiffance pour nous !

La France languiffoit depuis long-tems dans l'ignorance; les Beaux Arts y etỏient négligéz ; les Belles Lettres & les Sciences profcrites ou défigurées; la politeffe des mœurs la douceur & l'agrément de

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Ja societé étoient inconnus ou méprifez telle eft l'idée que nous donnent des François nos meilleurs Hiftoriens.

Dans cette Cité fi chère autrefois aux Mufes & à Minerve, il paroît une Héroïne d'un caractère nouveau gémiffant fur l'état affreux où se trouvoient réduits l'eprit & les mœurs dans fa Patrie, elle forme le noble deffein de les y rétablir: dénuée de ces appuis brillans, dont l'autorité garantit prefque toûjours le fuccès des entreprises les plus téméraires ; au milieu d'une Région, où des jours fereins ne luifoient plus depuis long-tems; intimidée fans doute,& par fa propre foibleffe, & par des obftacles qui paroiffoient difficiles à furmonter, elle tente cependant de tracer une route qui pût ramener fûrement à l'amour des Belles Lettres, fource féconde de la douceur & de la régularité des mœurs.

En effet, la raifon & l'expérience ne nous apprennent-elles pas également que le coeur acquiert fouvent de la droiture, par les fecours que lui prête l'efprit. La connoiffance des Belles Lettres nous fait rentrer en nous-mêmes; nous y puifons des leçons, des exemples qui nous flatent & nous touchent également, en nous inftruifant des préceptes & des

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