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tions des Grands Hommes nous ap prenons à rougir de ne pas vivre comme eux. C'eft une lumière falutaire, dont 'éclat brille à nos efprits, & les éclaire, & dont la chaleur bienfaifante échauffe & pénètre nos coeurs: mais c'eft fur tout de la Poëfie que nous devons attendre ces fecours. Les leçons qu'elle enveloppe fous l'appât féduifant de la cadence & de l'harmonie, trouvent le cœur, que cette amorce attire, difpofé à les goûter. L'amour propre, ennemi de toute contrainte, fe révolte contre des inftructions arides, propofées fans ménagement: il embraffe avec joye celles qui fe préfentent à lui, déguifées fous l'apparence flareufe du plaifir.

Auffi Clémence Ifaure s'arrêta - t- elle à cette partie des Belles Lettres, fi propre à en rappeller le goût. Elle trace des règles proportionées aux lumières de fes Elèves encore groffiers: elle s'affûre de l'ap plication de leur efprit, en flatant leur coeur par la plus intéreffante de fes paffions. L'Eloge de l'Amour & de fes divers caractères devient l'objet de leur travail & de leurs exercices: bien - tôt il fe for me une Société, où la délicateffe dans les fentimens & dans la manière de les exprimer, commence à fe faire fentir: déja

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l'on éprouve les douceurs d'un commerce tendre, où le cœur & l'efprit trouvent également ce qui leur convient.

Appuyées de ce secours les Belle s'affûrent les cœurs par un nouveau titre elles joignent à leurs autres charmes ceux de l'efprit. Inftruites de leurs véritables intérêts, elles fentent que la beauté feule eft peu capable de leur ménager des conquêtes, ou du moins de les leur conferver. Fineffe, agrément, politeffe dans l'efprit ; connoiffances exquifes, choifies & mifes en œuvre par le bon goût, vous êtes fans doute la fource la plus féconde des triomphes du Beau Sexe vous faites qu'on eft encore aimable dans une faifon de la vie, où le mérite acquis devient effentiel pour conferver cet avantage 5 vous formez enfin un commerce délicat entre les deux Sexes, dont l'efprit eft fouvent le feul principe l'agrément & les charmes de la fociété, les feuls liens & le feul objet.

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Tels furent les fruits naiffans des prémières démarches que fit Clémence Ifaure, pour rétablir l'Empire des Belles Lettres. En vain cependant auroit - elle envifagé les précieux avantages que leur règne devoit procurer à fa Patrie, fi elle n'avoir perféveré avec constance à les soû,

enir, & fi la générofité & la fageffe n'avoient conduit un deffein qu'avoit formé antour de la véritable gloire.

En effet, MESSIEUR s, iln'en coû e fouvent qu'à notre imagination pour former de grands deffeins. L'ambition de fe faire un grand Nom, des vûës d'intérêt ou de plaifir peuvent lui préfenter de grandes idées; elle les embraffe avidement, & s'y arrête : mais peut-on, fans fe flater, compter fur un fuccès heureux, que par la jufteffe de fes mesures?

Clémence connoiffoit que pour protéger utilement les Belles Lettres, l'autori té, attachée à un grand Nom, étoit d'un puiffant fecours : dénuée de cet avantage, fa générofité lui montre une route, moins brillante peut-être aux yeux du vulgaire; mais, j'oferai le dire, plus glorieufe," & garante, à plus jufte titre, du fuccès.

Car enfin les Sciences & les Beaux Arts, qui devoient leur éclat à la faveur de Mécène, l'auroient perdu fans doute, après la mort de ce Grand Homme, fi de nouveaux Protecteurs ne les avoient foûtenus. D'ailleurs tous les Hommes fe laiffant en

traîner par un intérêt plus ou moins délicat, felon leur différent caractère doit ménager cet intérêt dans les Hom

on

mes de Lettres, en paroiffant le confen dre avec l'honneur. Auffi Clémence Ifaure entreprend-elle de réveiller leur émulation. Elle propofe des Prix pour les meilleurs Ouvrages: elle en affûre la diftribution à la Poftérité, aux dépens de fa fortune, qu'elle facrifie généreusement à la gloire des Beaux Arts. Ne craignons pas de comparer notre illuftre Fondatrice avec ce Favori d'Augufte. Je fçal que Mécène fe faifoit un honneur diftingué de protéger les Hommes de Lettres qui fleuriffoient fous le règne de fon Maître s qu'il partagea fa faveur avec eux; qu'il leur ménagea des reffources contre les caprices de la Fortune: auffi lui prodiguèrentils leur encens. Ils relevèrent avec art l'éclat de fes vertus:ils portèrent plus loin leur reconnoiffance: ils parurent perfuadez que c'étoit feulement en marchant fur fes traces qu'on pouvoit afpirer à l'immortalité:

Cependant, MESSIEURS, (qu'il me foit permis de le dire) fes vûës, renfermées dans fon fiècle, ne fe portent point fur l'avenir: fenfible aux louanges, il ne parut rechercher que celles qu'il pouvoit goûter par lui-même. Quelle fource intariffable d'Eloges, fi ceffant de tourner vers lui feul le fruit de fon attention pour

des Sçavans, il s'étoit attaché quelquefois aux intérêts de la Poftérité! Il étoit aifé àce Favori des Mufes, Maître en quel que manière de l'Empire du Monde par les graces dont Augufte lui laiffoit la difpenfation, d'affûrer les Belles Lettres con tre le mauvais goût & la barbarie qui pouvoient fe répandre dans les fiècles à venir. Son crédit lui auroit aifément ménagé la destination d'une légère partie de ces thré fors dont regorgeoit l'Empire Romain : thréfors confacrez au luxe, aux plaisirs, à l'ambition, qui ne produifirent que la molleffe,la corruption des mœurs; enfin la chû te funefte de cette République floriffante. Clémence Ifaure au contraire, négli geant fa propre gloire, s'arrête uniquement à celle de fa Patrie. Plus attentive à mériter les Eloges qu'à fe les attirer elle porte fes vûës fur la Postérité la plus reculée; elle lui confacre généreufement des biens périffables en eux-mêmes, eft vrais mais qui deviennent immortels par l'ufage glorieux auquel elle les destine: elle fonde des Prix capables de réveiller, & dignes de récompenfer à l'avenir l'émulation des Gens de Lettres : elle en affure la diftribution à jamais, en en confiant les fonds à des Dépofitaires honorables

il

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