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Mais il y a apparence, qu'il l'avoit puifée dans Philoftrate, (1) qui fupofe, que Cyrus avoit paffe le Danube, pour faire la guerre aux Maffagétes. En quoi il est évident, que ces deux Auteurs ont confondu cette expédition avec celle de Darius contre les Scythes. Ainfi je ne m'arrête point à cette opinion.

A l'égard du fentiment d'Hérodote, il ne peut être douteux. Car puifqu'il fupofoit, que l'Araxe avoit pris fa fource en Arménie, & que Cyrus avoit paffe ce fleuve, pour marcher contre les Massagétes, il étoit abfolument néceffaire, qu'il le paffât à l'Occident de la Mer Caspienne.

A la vérité Ptolémée, fuivi par de grands Géographes, (2) a crû que ces Peuples habitoient à l'Orient de la même Mer. Mais outre que nous cherchons particuliérement l'avis d'Hérodote, il est fûr qu'il eft foutenu par le plus grand nombre des anciens Ecrivains.

En effet Solin (3) les place en-deçà de la Mer Cafpienne. Ce que Saumaise fur cet endroit a regardé mal à propos, comme une erreur. Théophane de Byzance (4) affure, qu'ils habitoient à l'Orient du Tanaïs. Ammian Marcellin (5) dit auffi, que Lucullus, & Pompée avoient pénétré jusques à la Mer Cafpienne, en passant par les Maffagétes, qu'on appelloit Alains de fon tems. Ces derniers font aufli confondus avec les Maffagétes dans l'Abregé de Dion Caffius, (6) fait par Xiphilin. Procope (7) étoit perfuadé, que les Huns, & les Mallagétes, n'étoient qu'un même Peuple. Or on n'a jamais dit, que les Huns ayent demeuré au-delà de la Mer Cafpienne. Enfin les deux Tzetzès, (8) dont l'un dit, que fa mere avoit pris naillance chez les Maffagétes, foutiennent que ces Peuples n'étoient point différens de ceux, qui avoient porté depuis le nom d'Ibéres, d'Alains, & d'Abafges. Ce qui nous fervira à corriger en paffant un paffage de Théophile, Patriarche d'Alexandrie, (9) où parlant de la mort du grand Cyrus, il dit qu'il fut tué úò Mugiάdos MeGayyia. Car on voit par les paffages ci-dessus citez, qu'il faut lire : ὑπὸ Τομύριδος ἐν Αβασγία.

Si donc on avoit à dreffer un plan du cours du Volga, suivant les idées d'Hérodote, il faudroit bien fe garder de fe conformer aux

(1) Philoftrate, Heroïc. p. 677.

(2) V. Cellarius, Geogr. antiq. Lib. 3. βαρ. 21.

(3) Solin, Cap. 22. V. auffi le Géographe de Ravenne, Cap. 2. n. 12.

(4) Théophane, dans la Biblioth. de Photius, Pag. 79.

(5) Ammian Marcellin, Hift. XXIII, 14. (6) Xiphilin, Lib. 69.

(7) Procope, Vandalic. Lib. 1.

(8) Jean Tzetzès, Hift. Chil 5. Cap. 17. & Cbil 12, Cap. 451. Ifaac Tzetzès, Schol in Lycophr. v. 174.

(9) Théophile, Ad Autolyc. Lib. 3.

Cartes ordinaires, ni même à celles de Prolémée. Il faudroit au contraire conduire l'Araxe depuis les monts Mantiens jusques audelà du mont Caucase, & enfuite à quelque diftance le partager en deux branches, dont l'une fuivroit à peu près le cours du Volga ; à l'exception qu'au lieu de le faire tourner à l'Occident, on le conduiroit au Nord jufques à la Mer Septentrionale, où on le feroit tomber par trente-neuf embouchures. Et à l'égard de l'autre branche, on la conduiroit dans la Mer Cafpienne, où elle se jetteroit par un feul Canal.

A l'égard des Maffagétes, nous apprenons d'Hérodote, (1) qu'ils habitoient à l'Orient de l'Araxe, c'est-à-dire du Volga, felon lui; & comme cette Nation étoit fort grande, il y a apparence, qu'elle s'étendoit fort loin le long de cette riviére en tirant au Nord. Le même Historien ajoute, que le Pays des Iffedons étoit fitué vis-à-vis du leur. Ce qui fait juger, qu'ils habitoient le long du côté occidental du même fleuve; & il faut qu'ils s'étendiffent auffi fort loin du côté du Septentrion. Car Hérodote (2) en un autre endroit, les place à l'Orient des Argippées, qui fuivant le même (3) sont les plus Septentrionaux des Peuples, dont il avoit connoiffance, & dont il avoit fait l'énumération un peu plus haut. En difpofant une Carte de cette maniére, rien ne fera plus aifé, , que d'entendre ce qu'a dit cet Hiftorien, tant du cours de l'Araxe, que des Nations, qui étoient fituées au-delà de ce Fleuve.

Avant que de finir cet Article, il faut tâcher d'éclaircir quelques autres endroits d'Hérodote, qui regardent les Scythes Aliatiques. Il dit dans l'un, (4) que ceux d'Europe, quand le Bofphore Cimmérien eft glacé, font paffer fur ce bras de Mer leur Armée, & même leurs chariots, & qu'ils les conduisent jufques aux Indes.

Cela eft abfurde, & il eft furprenant, que non-feulement les Traducteurs, mais tous les Editeurs même, fans en excepter Gronovius, qui eft le dernier, n'ayent pas pris garde à une faute, qui étoit ailée à corriger, comme l'a obfervé Holftenius, fur Etienne le Geographe. (5) Car au lieu de, is Tès ivdes, il n'y a qu'à lire, és Tès Zivdes. La même faute de Copifte, fe trouve dans un autre paffage de notre Historien, (6) où au lieu de ix Ts indis, il faut manifeftement corriger, Eds, ainfi que d'autres l'ont pareillement remarqué. (7) Ce qui a encore échapé à Gronovius.

(1) Hérodote, I, 201.

(a) Le même, IV, 25.
(3) Le même, IV, 13, 25.

(4) Hérodote, II, 23,

(5) Holftenius, in Steph. Byz. V. Zivot. (6) Hérodote, IV, 86.

(7) Holftenius, Loc. cit. If. Voffius, in Scylac. Caryand. p. 13. Edit. 1639.

Ces Sindiens en effet habitoient la côte orientale du Bofphore 199 Cimmérien, & font affez connus par les anciens Géographes. Mais les Copiftes ont fouvent confondu leur nom avec celui des Indiens. Voffius le fils (1) en a cité plufieurs exemples ; & l'on peut encore en ajouter un autre tiré de Suidas, (2) auquel n'a pas fait attention le fçavant Kufter, encore que Jufte Lipfe (3) nous en eût avértis. Mais ces fortes de chofes, qui fe trouvent dans des endroits auffi écartez, peuvent échaper à la diligence des plus vigilans Critiques.

Il y a dans Hérodote deux autres endroits, (4) que les Editeurs n'auroient pas dû paffer fous filence. Il y parle d'un lieu, qu'il nomme, пg‡μnia Kiμμégia, lequel, felon quelques Géographes, dit-il, fait avec le Tanaïs la feparation de l'Europe, & de l'Afie. L'Interprète Latin traduit ce mot, tantôt Portoria Cimmeria, & tantôt, Fretum Cimmerium; faisant assez connoître par cette incertitude, qu'il n'entendoit point ces paffages.

Auffi il eft évident, qu'il y a une faute dans le texte, & qu'il y faut corriger, guía. C'étoit le nom d'une Bourgade, qui étoit fituée à l'entrée des Palus-Méotides dans le Bofphore Cimmérien, du côté de l'Europe. Il en eft fait mention, non-feulement dans Etienne le Géographe, (5) mais encore dans plufieurs autres endroits de l'ancien Periple du Pont-Euxin, (6) qu'a fait imprimer Voffius le fils. Cette correction me paroît hors de doute.

Il y a un autre vice dans le fecond de ces paffages d'Hérodote, (7) que je m'étonne, qu'on n'ait point aperçû. Après avoir parlé de l'Europe, il dic tour de fuite : καὶ ὁρίσματα αυτῇ Νειλος τε ὁ Αιγύπλιος ποταμὸς ἐτέθη καὶ Φάσις ὁ κόλχος. Οἱ δέ Τάναϊν ποταμὸν τὸν Μαιήτην, * пędμíα τà Kiμuégia Auquel endroit, pour le dire en passant, Πορθμία τα Κιμμέρια. je crois qu'il faut lire, Τὴν Μαιητιν.

Qui ne voit, que ces mots regardent uniquement l'Afie, & que par confequent, comme ils font tranfpofez, ils doivent être rétablis à la fin de la fection précédente? Outre qu'ils y font néceffaires, ils coupent entiérement le fens de l'endroit, où ils font placez. La chose parle d'elle-même.

(1) Ifaac Voffius, Ibid.

(2) Suidas, V. Ivooà, & V. Xiros. (5) Stephanus Byzant. V. Пoguía.

(6) Le Périple Anonyme du Pont-Euxin,

(3) Lipfe, De Milit. Roman, Lib. 4. Dia- | p. 3, 6, 15. Edit. de 1639.

log. s. p. 110. Edit. 1637.

(4) Hérodere, IV, 13, & 45.

(7) Hérodote, IV, 45.

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CHAPITRE XIX.

Des Sources du Danube, & de la fituation des Celtes, fuivant l'opinion d'Hérodote.

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Es connoiffances, qu'ont acquifes les Géographes modernes, fur les fources du Danube, leur ont fait trouver étrange ce qu'en a dit Hérodote. (1) Ce fleuve, felon lui, prend naissance chez les Celtes, & dans une Ville, qu'il appelle Pyrrhéne ; & les Celtes, ajoute-t-il, qui habitent au-delà des Colomnes d'Hercule, confinent aux Cynéfiens, qui font les plus occidentaux de tous les Peuples de l'Europe.

Ce fentiment, tout extraordinaire qu'il nous paroît, a été cependant auffi celui d'Aristote, (2) & de quelques autres, par raport à la fource du Danube, à l'exception, qu'ils ont pris Pyrrhéne pour une montagne, & non pour une Ville. En quoi ils fe font tous moins écartez de la vérité, que d'autres Anciens, (3) lefquels ont placé la fource de ce fleuve dans le Nord, & dans les Monts Riphées, ou Hyperborées.

Tanneguy le Fèvre (4) s'eft cependant récrié avec raison contre cet étrange paradoxe, de placer les Celtes au-delà des Colonnes d'Hercule; & c'est en vain que Gronovius, en fes Notes fur ce paffage d'Hérodote, a voulu défendre l'expreffion, dont l'Historien s'eft fervi dans cette occafion. Je ne fçais même, fi ce Critique s'eft bien entendu lui-même en cet endroit.

les

Un Auteur Flamand (5) a imaginé un expédient, à la faveur duquel il prétend fauver l'opinion d'Hérodote. Il foupçonne, que Cynéfiens, dont parle l'Hiftorien, étoient un Peuple, non d'Efpagne, mais des Alpes, lequel habitoit les Montagnes, qu'on appelle le Mont-Cenis. Il affure, qu'au haut de cette monagne il y a une affez grande plaine, fur laquelle s'élevent deux très-grands rochers, qui font toûjours couverts de neige. Sur quoi il fe perfuade, qu'on les

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a pris anciennement pour des Colonnes, pofées par Hercule ; & croit que ce font de celles-là, dont Hérodote a voulu parler, en disant que les Celtes étoient fituez au-delà.

Mais, quoique cette idée sur la position des Cynéfiens, foit moins bizarre, que celle d'un Anglois, (1) qui a crû, que c'étoient les Habitans de la Province de Kent, ou peutêtre même ceux de toute l'Ile d'Angleterre, elles font néanmoins toutes deux également fauffes. Car les Cynéfiens étoient un Peuple d'Espagne, fuivant le témoignage, non-feulement d'Etienne de Byzance, (2) mais encore de tous les autres Anciens, (3) qui en ont parlé. Ce qui fait évanoüir les conjectures des deux Auteurs, dont je viens de faire mention.

Cela étant, il nous refte la difficulté de fçavoir, comment Hérodote a pû dire, que les Celtes, & par conféquent les Cynéfiens, étoient fituez au-delà des Colonnes d'Hercule. La chose est si abfurde, que je ne puis me réfoudre à lui imputer cette méprise, où il n'y a aucune apparence, qu'il ait pû tomber; puifqu'il connoiffoit parfaitement (4) la pofition de ces Colonnes. Ainfi je trouve, que M. Le Clerc (5) a penfe fort jufte, quand il a conjecturé, qu'il falloit lire dans les deux paffages, où Hérodote a parlé de la fituation des Celtes, ow нρaxλní v Zтnλéwv, au lieu d'iž. C'est une faute, que les Copiftes ont pû faire très-aifément.

Cela fupofé, je ne trouve plus d'embaras dans le texte de l'Hiftorien; finon à l'égard de ce qu'il dit, que le Danube prend fa fource chez les Celtes, & dans la Ville de Pyrrhéne. Car on ne fçait ce que c'eft, que cette prétendue Ville; & il eft fûr, que la fource du Danube eft dans la Germanie.

Mais ce dernier doute eft aifé à lever. Car d'autres (6) ont déja prouvé pleinement, que l'ancienne Celtique comprenoit non-feulement les Gaules; mais encore l'Illyrie, la Germanie, & même l'Espagne, & les Ifles Britanniques.

A l'égard de la Ville, ou plûtôt montagne de Pyrrhéne, j'écarte d'abord l'idée, qu'ont prife quelques-uns, qu'Hérodote l'avoit confondue avec les Pyrénées. La reffemblance des noms n'y fait rien.

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