PHANO R. Que ne puis-je deviner ce que vous fouhaitez, Zirphée! vos defirs feroient pré venus. ZIRPHÉ E. . La reconnoiffance la plus vraie m'attache à vous... mais enfin, je ne puis vous promettre de refter à jamais dans ce palais... Phanor, me laifferiez-vous la liberté de le quiter? PHANOR. Je vous entends, & je ne me plains pas de la rigueur du fort que j'envifage. Ce palais ouvert à tous les malheureux, eft un afyle, & non une prifon; non-feulement vous y êtes libre, mais vous y régnez; je n'y fuis rien qu'un infortuné foumis à vos loix, & prêt à m'en exiler pour vous plaire; rendez donc juftice à mes fentiments, & du moins ne me regardez ni comme un tyran, ni comme un raviffeur. ZIRPHÉ E. Vous, un tyran, vous Phanor, ô Ciel ! me croiriez-vous capable d'avoir pu douter un moment de votre générofité? Ah !' je puis n'être pas d'accord avec moi-même, je puis être inconféquente & bizarre; mais injufte pour vous, non Phanor, non je ne le fuis point. PHANO R. Connoiffez donc mon ame toute entiere; je fens trop l'effet que doit produire ma préfence; je fais l'obftacle invincible qu'une affreufe difformité oppofe au bonheur de ma vie. Je n'ai jamais eu l'efpoir infenfé de vous plaire, & de vous engager à unir votre fort au mien; j'ai mérité votre eftime, c'en eft affez; après avoir obtenu le feul bien auquel il me fut permis de prétendre, je dois m'oublier, & ne plus m'occuper que de vous. ZIR PH É E. Vous m'effrayez; où tend ce discours?... Phanor, quél eft votre deffein ? PHANO R. De vous rendre maitreffe abfolue de votre deftinée, & de vous affranchir pour jamais de tout ce qui peut vous contraindre ou vous déplaire. Recevez cette boîte, elle renferme un anneau précieux; en le portant vous vous trouverez transportée dans le lieu où vous defirerez être; & là, pár le pouvoir de ce même annéau, tout ce que vous pourrez fouhaiter fe réalifera, des palais, des jardins qui renfermeront tout ce que l'art & la nature peuvent offrir de plus beau, & dont vous ferez la feule fouveraine. ZIRPHÉ E. Reprenez vos dons, & daignez me fouffrir où vous êtes. PHANOR., Non, ne méprifez point le dernier hommage d'un fentiment fi vrai; adieu Zirphée, penfez quelquefois au malheureux Phanor. I fort. Il ZIRPHÉE, feule. Arrêtez, arrêtez...... il m'échappe ; Phanor, Phanor, en vain je l'appelle... • Ciel ! une terreur fecrete glace mes fens, & & me rend immobile.... fon dernier hommage, que fignifient ces mots mystérieux? Que vouloit-il dire ?... Je frémis... des idées confufes viennent troubler tout-à-coup mon imagination.... Cette boite qu'il m'a laiffée malgré moi, contient peut-être l'explication du preffentiment qui m'accable... je n'ofe l'ouvrir. (Elle la pofe fur une table.) Ah! courons chercher Phanor, lui feul peut me tirer du trouble affreux où je fuis. ZIRPHÉE, OÙ courez-vous ? ZIR. P HỆ E. Ah! Phédime, avez-vous vu Phanor? Je favois le don qu'il devoit vous faire je venois vous demander à quel ufage vous le deftiniez; je rencontre Phanor éperdu, hors de lui. Sa démarche égarée m'effraye; je veux lui parler, il m'évite, me fuit, & fort de ce palais en me difant un douloureux adieu. Tome I. C ZIRPHÉ E. Qu'entends-je, jufte Ciel!.... il a quitté ce palais?.... ou eft-il? PHED IM E. Eh! comment le favoir? ZIR PH É E. Mais il me vient une idée. Avec l'anneau qu'il m'a laiffé, je puis me tranfporter aux lieux qu'il habite. C'eft-là que je veux être. (Elle prend la bolte elle Pouvre.) Voilà l'anneau. Mais que vois-je ? un billet,.... PHED IM E. Ce billet nous inftruira de fa destinée. Ah! Phédime, je tremble.. PHED IM E. Allons, lifez. 将 ZIRPHÉ E. Hélas! que vais-je apprendre? (Elle lit tout haut.),, Je veux vous affranchir d'un ,, objet odieux; je fais que ma préfence ,, ne peut vous être qu'importune, & je ,, ne puis fupporter la vie loin de vous. J'y renonce fans peine. Adieu, Zirphée, recevez l'éternel adieu du fidele & tendre Phanor. (Zirphée, après avoir lu :) Je me meurs. Elle tombe évanouie dans les bras de Phédime.) PHED IM E. Que vois-je, o Ciel! Zirphée, Zirphée! ZIRPHÉ ɛ.09 i Il n'eft plus..laiffez-moi, Phédime, vos foins font fuperflus. La vie m'eft odieufe..... Enfin trop tard je lis dans mon cœur..... O Phanor! j'ai creufé ta tombe & la mienne. La malheureufe Zirphée te fuivra de près. Oui, Phanor! je t'aimois; oui, je ne puis exifter fans toi. (Pendant qu'elle prononce ces derniers mots, on entend un crefcendo derriere le théâtre. Qu'entends-je? (La mufique continue.) (Le théâtre change, Phanor paroît dans le fond fous fa figure naturelle, affis fur un trône. de fleurs.) ZIRPHE E. Où fuis-je ? Quel objet vient frapper mes regards? SCENE V & derniere. ZIRPHÉE, PHÉDIME, PHANOR. PHANOR, accourant fe précipiter aux pieds de Zirphée. AH! Zirphée, ma chere Zirphée, recon noiffez Phanor à l'excès de fa tendreffe. L'oracle eft accompli, je reprends ma premiere forme, & c'eft Zirphée qui me rend à la vie & au bonheur. ZIR PH É E. Ah! Phanor, qu'il eft doux de confacrer fa vie à celui pour lequel on vouloit la quitter! |