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relâchés de leur observance. Il est plus mal-aifé qu'il ne semble de trouver de bonnes Superieures. On croit en faire comme des Apôtres, les difperfer parmi les Nations; mais font-elles confirmées en grace comme les Apôtres. Souvent en voulant édifier on démolit, & au lieu de relever la gloire de Dieu, on la ravale; en difperfant on diffipe. Son mot étoit : Multiplicafti gentem, fed non magnificafti lætitiam. Ifai. 9. jà Vous avez multiplié le peuple, mais vous n'avez point augmenté la joye.

Je fçai bien que la plus grande gloire de Dieu, & le défir d'attirer plufieurs ames au fervice de cette gloire, eft le fpécieux prétexte de cette multiplication mais je ne fçai fi c'en eft toujours le vrai motif, l'amour propre s'y fourrant fouvent.

J

CHAPITRE XVIII.

De la prudence & de la fimplicité.

É ne sçai, dit-il, ce que m'a fait cette pauvre vertu de prudence, j'ai de la peine à l'aimer, & fi je l'aime, ce n'eft que par néceffité, d'autant qu'elle eft le fel & le flambeau de la vie. La beauté de la fimplicité me ravit, & je donnerois toujours cent ferpens pour une colombe.

Je fçai que leur mélange eft utile, & que l'Evan- Matt. 10, 16, gile nous le recommande; mais pourtant il me paroît qu'il faut faire comme en la compofition du thériaque, où pour bien peu de ferpent, on met beaucoup d'autres drogues falutaires. Si la doze de la colombe & du ferpent étoit égale, je ne m'y voudrois pas fier; le ferpent pourroit tuer la colombe, non la colombe le ferpent; c'eft la plume d'aigle qui ronge les autres: c'eft la lime qui mange ce

Rom. 8. 6. qu'elle frote: outre qu'il y a une certaine prudence humaine & de la chair, que l'Ecriture appelle mort, d'autant qu'elle ne fert qu'à mal faire, & par voyes obliques.

des

On me dit que dans un fiécle fi rufé que le nôtre il faut de la prudence, au moins pour s'empêcher d'être furpris. Je ne blâme point cette maxime, mais je crois que cette autre eft bien auffi Evangeli2. Cor. 11.19. que, qui nous apprend que c'eft une grande fageffe felon Dieu, de fouffrir que l'on nous dévore, & qu'on nous prenne notre bien, fçachant qu'un bien meilleur & plus affuré nous attend: en un mot un bon Chrétien aimera toûjours mieux être encluvolé me que marteau, que voleur, meurtri que meurtrier, & martyr que tiran. Enrage le monde, creve la prudence du fiécle, que la chair fe défefpere, il vaut mieux être bon & fimple, que fin & malicieux.

NEUVIE ME

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CHAPITRE PREMIER.

Ce que c'est qu'aimer le prochain en Dieu.

'AMOUR furnaturel de la charité que le S. Efprit

Lrépand en nos cururs, nous fait aimer Dicu pour l'amour de lui d'un amour d'amitié, & le prochain auffi d'un amour d'amitié par rapport à Dieu,qui veut que nous l'aimions ainfi, parce que cela lui plaît, & qu'il eft glorifié par cet amour qui lui eft rapporté.

Cela s'appelle proprement aimer le prochain en Dieu & pour Dieu. Alors on ne cherche point fon avantage, mais celui du prochain, & encore par rapport à Dieu.

Cet amour eft fort rare, parce que tous prefque Philip. 2. 14 cherchent leurs interêts, non ceux de Jefus-Chrift, ni de leur prochain.

Les actes de charité que nous exerçons envers le « prochain dans la vûë de Dieu, font,dit notre Bien- «Entret. 8. heureux, les plus parfaits, d'autant que tout tend « purement à Dieu : mais les fervices & autres affif- « tances que nous faifons à ceux que nous aimons par inclination, font beaucoup moindres en mé- « rite, à cause de la grande complaifance & fatisfac- « tion que nous avons à les faire, & que pour l'ordi- « naire nous les faifons plus par ce mouvement, que pour l'amour de Dieu «.

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Entret. 8.

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En aimant le prochain en Dieu & pour Dieu, loin de l'aimer moins, on l'aime beaucoup plus, & bien plus parfaitement; parce que ce rapport à Dieu fait que notre amitié de naturelle devient furnaturelle d'humaine divine, & de temporelle éternelle. C'est » ce qui faifoit dire à notre Bienheureux que les ami» tiés naturelles n'étoient pas de durée, parce que la » cause en étant fragile, dès qu'il arrive quelque tra» verfe,elles fe refroidiffent & s'alterent; ce qui n'arrive pas à celles qui font fondées en Dieu, parce que la caufe en eft folide & permanente. Ce qui lui Philot. part. a fait dire ailleurs, que tous les autres liens qui attachent les cœurs font de verre & de fayence, mais celui de la très-fainte charité d'or & de diamant. Entree. 8. A ce propós fainte Catherine de Sienne fait cette comparaifon : » Si vous prenez, dit-elle, un verre, » & que l'empliffant à une fontaine, vous buviez » dans ce verre fans l'êter de la fontaine, encore que vous buviez tant que vous voudrez, le verre ne se vuidera point; mais fi vous l'ôtez de la fontaine, quand vous aurez bû le verre sera vuide. Il en eft » ainfi des amitiés, quand on ne les retire point de » leur fource, elles ne tariffent point.

3.6.19.

Entret. 12.

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Il faut, difoit notre Bienheureux, voir le pro» chain dansla poitrine du Sauveur : hélas ! qui regarde le prochain hors de-là, court grand rifque de » ne l'aimer ni purement, ni conftamment, ni éga»lement: mais là qui ne l'aimeroit, qui ne le fup»porteroit, qui ne fouffriroit fes imperfections, qui » le trouveroit de mauvaise grace, qui le trouveroit » ennuyeux : or, il eft ce prochain dans la poitrine » du Sauveur, il eft là comme très-aimé, & tant ai»mable, que l'amant meurt pour lui.

» Certes, conclut le Bienheureux, tout autre » amour que celui-là, ou n'est pas amour, ou ne mé

.

rite pas le nom d'amour, ou celui-là eft infiniment

plus qu'amour «.

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CHAPITRE II.

Des témoignages de bienveillance.

N me demande fi les témoignages de bienveillance que nous donnons contre notre propre fentiment à ceux contre qui nous avons des averfions naturelles, ne font point des trahifons & des duplicités, d'autant que nous leur faifons paroître toute autre chofe que ce que nous avons dans le cœur.

La réponse eft aifée, fi nous diftinguons la partie fenfible de l'ame d'avec la partie raisonnable; car l'averfion n'étant que dans celle-là, ce n'eft nullement une duplicité, ni une trahifon de les careffer felon celle-ci, qui eft la principale & la fuperieure ; & ces fignes de bienveillance font d'autant meilleurs & plus excellens, qu'ils font plus forcés, parce qu'ils marquent mieux l'empire de la raison fur les fens ; c'eft-là cette fainte violence qui ravit le Ciel & qui eft fi agréable à Dieu, à qui la duplicité eft fi odieu- Eccl. 2. 14. fe, qu'il prononce malédiction contre ceux qui font doubles de cœur.

Mais, dit-on, fi ceux à qui nous faifons ces careffes fçavoient ce combat des deux parties de notre ame, que penseroient-ils de nous ?

Il ne faut pas tant fe foucier du jugement des hommes que de celui de Dieu. S'ils jugent felon la chair, ils doivent avoir pitié de notre mifere & de cette rébellion de la partie fenfible de notre ame contre la partie raisonnable; mais s'ils jugent felon Dieu, ce jugement ne pourra que nous être favorable, puifqu'il fera conforme à celui de Dieu même, qui eft

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