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Dieu de verité, & qui connoît nos plus fecrettes pensées.

Une once de cet amour fort & raifonnable vaut mieux que cent livres du tendre & sensible, qui nous eft commun avec les animaux, & qui fouvent trahit notre raison & lui fait prendre le change. Ce que nous faifons pour Dieu avec plus de repugnance de la part de la partie fenfible de l'ame, fait connoître la furabondance de la grace & la plus grande perfection de l'œuvre, d'autant que la fource de fon origine, qui eft la grace, eft plus élevée.

Ce que nous faifons pour Dieu avec plaifir nous doit être fufpect, ou au moins nous doit faire tenir fur nos gardes, de peur que nous ne prenions le change, principalement en l'amour du prochain, où il y a tant d'embuches cachées & tant de fujets qui nous détournent du faint amour de Dieu, la fympatie, la complaifance, l'interêt honorable, utile ou délectable, qui font autant de brigands qui nous dérobent la vue de Dieu & nous enlevent fon Galat. 3. 3. amour, & nous font finir par la chair & le fang, après avoir commencé par l'efprit.

Judic. 16. 19. Le fens eft comme une Dalila qui endort Samfon pour le tondre, & qui furprend la raifon lorsqu'elle. fommeille. Ce n'eft pas mal fait d'aimer en Dieu une perfonne qui nous eft agréable, pourvû qu'en effet nous l'aimions plus à caufe de Dieu, que parce qu'elle nous agrée; mais parce qu'il eft difficile,pour ne pas dire impoffible, de regarder la glace d'un miroir fans s'y voir, & s'y voir fans s'y confiderer, & s'y confiderer fans s'y plaire ; plaifir qui infenfiblement nous fait oublier le miroir pour penfer à notre image & enfuite à nous-mêmes; auffi eft-il bien difficile de ne fe regarder pas & de ne s'arrêter pas à foi dans l'amour que nous portons au prochain, au

lieu

que pour l'aimer purement, il ne faut l'aimer qu'en Dieu & pour Dieu, c'eft-à-dire, parce que Dieu eften lui, ou afin qu'ily foit.

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Aimer d'être haï, & haïr d'être aimé.

L vouloit qu'on aimât d'être haï pour Dieu, feIlon

Matt. 1. 11.

Luc. 6.22.

quand les hommes vous hairont, & diront de vous toute forte de mal à cause de moi; réjouiffez-vous, parce que Torre récompenfe eft grande dans le Ciel. C'eft pourquoi Matt. 5. 200 il difoit fouvent, bienheureux ceux qui souffrent perfécution pour la juftice. Il ne faut pas s'étonner, dit Jefus-Chrift à fes Disciples, fi le monde vous hait, car Joan. 15. 18. il m'a hai le premier, parce que mon Royaume n'eft pas de ce monde ; & vous autres auffi n'êtes de ce pas monde, l'amitié duquel eft ennemie de Dieu; fi Rom. 35. 379. vous étiez de ce monde, il vous aimeroit ; car vous feriez des fiens. C'eft ainfi qu'il faut aimer d'être haï.

1. Il faut auffi haïr d'être aimé autrement qu'en Dieu & pour Dieu, à caufe du grand danger qu'il y a que l'amitié humaine, quelqu'honnête & légitime qu elle foit en fon origine, ne dégénere en quelque chofe de mauvais, principalement quand elle fe contracte entre perfonnes de différent fexe.

18. 36.

Jac. 4. 4.

2. Vouloir être aimé autrement qu'en Dieu, eft une espece de larcin, parcè que c'eft dérober à Dieu quelque portion du coeur de ceux dont nous voulons être aimé, lefquels n'en ont pas à beaucoup près affez pour aimer Dieu, qui eft infiniment plus grand Joan. 3. 20. que nos cœurs.

3. C'est bleffer la jaloufie de Dieu, qui ne veut point avoir de rival ni de compagnon en notre cœur.

Entret. 8.

Il faut que fon amour foit tout, ou nul, Roi ou rien.” 4. C'est une vanité trop groffiere, de penfer avoir quelque mérite par lequel on puiffe avoir droit fur l'amour de quelqu'un.

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O que Bienheureux font ceux, dit notre Bienheureux, qui n'ont rien d'aimable; car ils font » affurés que l'amour qu'on leur porte eft excellent, puifqu'il eft tout en Dieu.

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Aimer quelqu'un avec Dieu fans rapporter cet amour à Dieu, quoiqu'on ne l'aime pas contre la loi de Dieu, c'eft diminuer d'autant l'amour que nous devons à Dieu, lequel veut être aimé de tout

notre cœur.

O Dieu! ou ôtez-nous du monde, ou ôtez le monde de nous. Arrachez notre cœur du monde, ou arrachez le monde de notre cœur. Tout ce qui n'est point Dieu n'eft rien, ou très-peu de chofe. Que Pfal. 72. 25. voulons-nous en la terre & au Ciel, finon Dieu.

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ME plaignant à lui des traverses & des difficul

que je rencontrois en l'exercice de ma

charge Paftorale; il me répondit qu'en entrant au fervice de Dieu, il falloit fe préparer à la tentation; Matt. 16. 24. nul ne pouvant fuivre Jefus Chrift ni être de fes Difciples, qu'en portant fa croix ; ni avoir accès au Ciel que par le chemin des fouffrances. Représentez-vous que notre premier pere, même en l'état d'innocence, fut placé dans le Paradis Terreftre pour y travailler & le garder. Eftimez-vous qu'il en fut banni après fon péché pour ne rien faire. Penfez comme Dieu le condamne lui & toute fa pofterité

à travailler & à labourer une rerre ingrate. Il y a bien plus de peine à défricher les efprits que la teere, quelque rude, pierreufe & stérile qu'elle foit.

L'art des arts eft la conduite des ames. Il ne s'en faut pas mêler fi on ne fe réfour à mille travaux & à mille traverses, Le Fils de Dieu étant un figne de Luc. 20 34contradiction, faut-il s'étonner fifon ouvrage y eft expofé. Il a tant travaillé & tant fouffert pour ga gner des ames: fes Coadjuteurs & les Coopérateurs qui ne font que fes Difciples, auront-ils meilleur marché que

à

leur maître ?

S. Paul difoit au jeune Evêque Timothée, preffez z. Tim. 4 2. tems & à contre-tems, reprenez, exhortez, priez en toure patience & doctrine. Remarquez qu'il met la patience devant la doctrine, d'autant que l'on ne vient à bout des efprits difficiles que par la patience. Par cette vertu nous poffedons,non-fenlement nos ames, Eur. zI. 13. mais encore celles des autres. L'homme patient furpaffe en cela le vaillant, & encore plus le violent. Le même Apôtre apprend au même Evêque à être vi- .Tim. 45gilant & laborieux, & à garder en tout la fobrieté,

& le donne pour exemple dans les travaux & dans. Cor. 35. Jes abftinences, dans la pauvreté, dans le froid, la 27nudité, la faim, la foif, & dans les fouffrances à drone & à gauche, c'est-à dire, de tous côtés.

Mais de peur que tant de difficultés ne m'abbattiffent le courage, il le relevoir auffi-tôt par l'exemple du Prince des Pafteurs, lequel avoit préféré l'op- Hebr. 32. $. probre de la croix à la joie & au contentement, pour operer notre falut. Il y ajoutoir celui des Apôtres & des premiers Pafteurs de l'Eglife. Il faut prendre, S. Angl. de difoit-il, l'héritage avec fes charges. Où il y a de l'amour, il n'y a point de travail, ou s'il y en a, on l'aime. Que ne fouffrit point Jacob pour époufer Ra- Gen. 29. Onl chel. Quand une femme enfante elle eft dans la dou- Joan. 16. **

bono viduit. 6. 20..

300

R

leur, mais ayant mis un homme au monde, elle Rom. 8. 18. perd jufqu'au fouvenir de fes douleurs. Après tout, les fouffrances paffagéres de ce fiécle ne font pas di gnes d'être comparées à la gloire future dont nous jouirons dans le Ciel, où Dieu effuyera nos larmes & où il n'y aura plus ni plaintes, ni travaux, ni douleurs, parce que toutes ces chofes feront paffées.

Entret, 12.

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Des efprits trop réfléchiffans.

Ifans, qui font cent confidérations fur des chofes de
Ln'approuvoit nullement les efprits trop réfléchif-

néant. Ils reffemblent, disoit-il, aux vers à foie, qui
s'emprisonnent & s'embarraffent dans leur travail.

Ces réflexions continuelles fur foi & fur fes actions emportent beaucoup de tems, qui feroit mieux employé à agir qu'à tant regarder ce que l'on fait. Souvent à force de regarder fi l'on fait bien, on fait mal.

On demandoit au grand S. Antoine à quoi l'on pouvoit connoître fi l'on prioit bien; à cela même, répondit-il, de ne le connoître pas; & celui-là prie bien qui eft fi occupé de Dieu, qu'il ne s'apperçoit pas qu'il prie. Celui qui en marchant compteroit fes pas & les confidereroit attentivement, ne feroit pas beaucoup de chemin en un jour.

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"Celui, dit notre Bienheureux, qui eft bien atten»tif à plaire amoureusement à l'amour céleste, n'a » ni le cœur, ni le loifir de retourner fur foi-même; » son esprit tendant continuellement du côté où l'a"mour le porte. Il ne permet pas à fon ame de faire des retours fur elle-même, pour voir ce qu'elle » fait, ou fi elle eft fatisfaite. Hélas, nos fatisfac

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