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qui nous le tenons; "Certes, dit-il, fi je connoiffois un feul filet d'affection en mon ame qui ne fût » de Dieu, en Dieu ou pour Dieu, je m'en déferois » auffi-tôt ; & j'aimerois mieux n'être point du tout, » que de n'être point tout à Dieu & fans réserve. Si je fçavois la moindre partie en moi qui ne fût » point marquée de la marque de Jefus-Chrift, je » m'en défaifirois incontinent, & la rejetterois en la » maniere que l'Ecriture nous enfeigne, qu'il faut » arracher l'œil, & couper la main ou le pied qui "nous fcandalifent.

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Tout ce qui n'étoit point Dieu, à Dieu, en Dieu, pour Dieu & felon Dieu, non-feulement n'étoit rien à notre Bienheureux, mais lui étoit en horreur; car il avoit toujours devant les yeux ce mot de no11. 23. tre grand Maître: Qui n'eft point pour moi eft contre moi. De-là cette maxime qu'il avoit affez ordinairement en la bouche, que pour augmenter l'amour de Dieu, il falloit en accroître le defir ; & que pour en accroître ce defir, il falloit diminuer les autres defirs.

Voyez ce qu'il enseigne fur ce sujet en fon Traité de l'amour de Dieu, liv. 12. chap. 2 & 3.

N

CHAPITRE X.

De l'Humilité.

OTRE Bienheureux vouloit que l'humilité, foit celle de l'entendement, foit celle de la volonté, fût animée de la charité, difant qu'autrement c'étoit pratiquer les vertus à la payenne. Il defiroit que l'on aimât l'abjection pour plaire par des humiliations, où il y auroit moins

à Dieu

de notre choix; difant que les croix que nous taillons, font toujours plus délicates que les autres; & il prifoit plus une once de fouffrance, que plufieurs livres d'action, quoique bonne, procédante de notre propre volonté.

Le fupport des opprobres, abaiffemens, abjections, étoit à fon jugement la vraie pierre de touche de l'humilité, parce que l'on étoit en cela plus conforme à Jefus-Christ, modéle de toute folide vertu, lequel s'étoit anéanti & humilié foi-même, se rendant Philip. 2.74 obéissant jusqu'à la mort, & la mort ignominicufe de

la Croix.

Il mettoit enfuite la recherche volontaire des humiliations & abjections, quand elles ne nous venoient pas de dehors, mais il vouloit en cela beaucoup de difcrétion, parce que l'amour propre peut fubtilement & imperceptiblement gliffer

fe

dans cette recherche.

Il regardoit comme un profond degré d'humilité de fe plaire & délecter dans les humiliations & abjections, comme dans les plus grands honneurs, & de fe déplaire dans les honneurs, comme les efprits vains ont coutume de s'y plaire, & de fe fâcher dans les mépris & les affronts. Il alléguoit fur ce fujetles Exemples de Moïfe, qui avoit préféré l'op- Hebr. 11. 16% probre d'Ifraël à la gloire de la Cour de Pharaon: d'Efther,qui avoit en abomination la pompe des or- c. 14. v. 41. nemens, dont on la paroit pour plaire aux yeux de

Roi Affuerus, dont elle étoit l'époufe: des Apôtres 48. 5. 41. qui tenoient à grande joye de fouffrir des opprobres pour le nom de Jefus: & de David, qui danfa de-2, Reg. 6. Vn vant l'Arche, fe réjouiffant de paroître vil aux yeux de fa femme Michol, fille du Roi Saül.

Il défiroit encore que l'humilité fût accompagnée de l'obéiffance, fe fondant fur ce mot de

Thilip. 7. S. Paul, que Notre-Seigneur s'étoit humilié, fe rendant obéiffant. Voyez-vous, difoit-il, à quoi il faut mefurer l'humilité, c'eft à l'obéiffance. Si vous obéiffez promptement, franchement, fans murmure, avec joye, fans retour, fans réplique, vous êtes vraiment humble, & fans humilité il eft mal-aifé d'être vraiment obéiffant; car l'obéiffance veut de la foumiffion, & le vrai humble fe regarde comme inférieur & fujet à toute créature pour l'amour de Jefus-Chrift, & regarde toutes perfonnes pour fes Y.Cor. 4. 13. Supérieurs, fe tenant pour l'opprobre des hommes, le rebut & la baleyeure du monde.

Il recommandoit de détremper toutes les actions dans l'efprit d'humilité, & de cacher aux yeux des hommes, autant qu'il fe peut, fes bonnes œuvres, & de fouhaiter qu'elles ne fuffent vûës que de Dieu. Il ne vouloit pourtant pas que l'on fe gênât, & contraignît jusqu'à ce point de ne rien faire de bien aux yeux d'autrui. Il aimoit une humilité noble, illuftre, remplie de courage, non lâche & timide. Il ne vouloit pas que l'on fit rien pour une fi vaine fin que la louange; mais auffi ne vouloit-il pas que l'on cefsât de faire le bien, de peur d'en recevoir de l'eftime & de l'applaudiffement. C'est à faire, difoitil, à de foibles têtes, de prendre la migraine à la fenteur des rofes.

Sur tout, il recommandoit que l'on ne parlât jamais de foi ni en bien ni en mal que par pure néceffité, encore avec grande fobrieté; & c'étoit fon avis que fe louer & blâmer foi-même, procédoit de mê me racine de vanité. Pour la vanterie elle eft fi ridicule, qu'elle eft fifflée même des plus groffiers. Et quant aux paroles de mépris de foi, fi elles ne fortent d'une grande cordialité, & d'un efprit extrêmement perfuadé de la verité de fa propre mifere

elles font la fleur de la plus fine de toutes les vanités; car il arrive rarement que celui qui les profere, ou les croyelui-même, ou défire effectivement que ceux à qui il les dit les croyent ; il fouhaite plûtôt être tenu pour humble, & par là reffemble aux rameurs, qui tournent le dos au lieu où ils tendent de toute La force de leurs bras..

CHAPITRE

XI,

Du foin des Evêques pour le temporel.

Ja

E m'accufois un jour à lui du peu d'attention que j'avois au temporel de mon Evêché, duquel je me remettois entierement à la fidélité de mes œconômes, & je craignois que cette négligence ne me tournâr à péché, parce que c'eft un bien dont il me faudra rendre compte à Dieu, & cependant je n'y connoiffois, & n'y entendois rien du tout.

Et moi me, répondit-il, je vous affure que je ne fis jamais rendre de compte à celui qui manie mon revenu, & j'ai bien raifon de m'en fier mieux à lui qu'à moi; car outre que fa fidélité m'eft affez connuë, il entend bien mieux l'economie que moi, qui gâterois tout mon ménage fi je m'en mêlois.

Mais, lui dis-je, il n'en eft pas de ce bien comme des patrimoines dont on fait ce que l'on veut, on le laiffe perdre, on le donne, on taille & on coupe à fon gré. Mais laiffer dépérir celui-ci, quoi? Certes, s'il falloit plaider, cela me donneroit bien de la peine, pour le temporel j'entends, car pour le fpirituel, qui regarde plus purement le fervice de Dieu, je n'en rabattrois pas un point.

Il fe prit à fourire fort gracieufement. A votre avis, le bien patrimonial eft-il moins le bien de

Dieu que celui de votre Bénéfice? Avez-vous ouPfal. 23. 1. blié le Pfeaume Domini eft terra? & pensez-vous qu'il foit permis de diffiper fon patrimoine, & qu'on n'ait point à en rendre compte à Dieu.

Certes, vous me faites fouvenir d'un grand Seigneur, lequel quoique fort riche, étoit fi attaché à fes biens, que chacun l'accufoit d'avarice, & le blâmoit d'autant plus qu'il n'avoit point d'enfans, ni apparence d'en avoir. Il avoit un frere Archevêqne

qui

étoit d'humeur toute contraire, car il étoit dans la prodigalité & dans la dépense fi avant, qu'il étoit affez endetté, & quelquefois fa marmitte renverfée. Un jour un Cavalier représentant à ce grand Seigneur, que l'Archevêque fon frere tenoit un train de Prince, & jettoit tout par les fenêtres : Je le penfe bien, repartit-il, il n'a fes bénéfices que pour fa vie. Le Cavalier lui repliqua brufquement, & vous, Monfieur, pour combien de vies avezvous vos Marquifats & vos Comtés?

Ce bon Seigneur n'étoit pas de votre humeur, qui penfoit que le bien d'Eglife fe dût manier à la fourche, & le patrimoine être confervé comme une chofe facrée. Il faut avoir l'efprit égal, & regarder l'un & l'autre bien comme étant à Dieu, qui nous en a rendu difpenfateurs, & non diffipateurs. L'important eft de lui être fidele en l'un & en l'autre.

Laiffons-là le patrimoine, lui dis-je, parlons de celui de l'Eglife, c'eft celui qui me pefe le plus. Plaideriez-vous, fi l'on vous troubloit dans le revenu de votre Evêché ?

N'en doutez-pas, me dit-il, je vendrois la patene pour défendre le calice.

Mais quoi, vous folliciteriez vous-même ?

Oui, dit-il, fi c'étoit une pure néceffité: mais comme j'en touche le revenu par procureur, je

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