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dire qu'ils ne lui veulent point de mal, fans fe fou venir que par la Loi de Jefus-Chrift ce n'eft pas affez de ne vouloir point de mal à notre ennemi ( car cela c'est n'avoir plus de haine,) mais qu'il faut encore avoir de l'amour & de la dilection, c'està-dire, lui vouloir du bien. "

Il y en a qui difent preffés de ces raisons, non-feulement je lui pardonne l'offenfe qu'il m'a faite, & ne lui veut point de mal, mais encore lui fouhaite les mêmes biens de nature, de fortune, de grace & de gloire qu'à moi-même : mais je ne puis me réfoudre à le voir, ni à converfer avec lui, parce que fa préfence émeut mes puiffances, & que je crains que mes playes ne fe r'ouvrent, en me rappellant le fouvenir du tort qu'il m'a fait.

Cette excufe femble avoir quelque couleur, quand on confidere la fragilité humaine plus foible qu'un rofeau qui fe plie à tous vents; mais quoique cette défiance femble louable, elle ne l'eft pas néanmoins devant Dieu, qui veut, & que l'on fe réjouiffe en lui avec crainte, & que l'on fe confie en lui à mefure que l'on fe défie de foi-mê-' me; que l'on s'humilie fans découragement, & que l'on s'appuie totalement fur fa grace, & nullement fur foi-même : c'eft ce que nous enfeigne la fainte parole quand elle nous dit que nous ne 1. Cor. 3. Sp pouvons rien de nous comme de nous, que toute notre fuffifance vient de Dieu, que fans lui nous ne pouvons rien faire, mais auffi qu'avec lui nous pouvons tout, & même traverfer les murailles de toute forte d'obstacles, de forte que nous ayant donné le vouloir & le commencer, nous devons efperer qu'il nous donnera d'achever fa bonne volonté; & ainfi s'il nous a donné la grace de pardonner de bon cœur, de ne vouloir point de mal,

par

& même de défirer toute forte de biens, nous devons auffi nous confier qu'il nous donnera la force de résister aux tentations que l'ennemi de notre falut pouroit exciter en la partie inférieure de notre ame, à la vûë de celui à qui nous avons pardonné, pourvû que nous l'ayons fait de bon cœur.

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Il y en a même, qui convaincus de ces raisons diront je veux bien le voir & n'eviterai point de me trouver en fa compagnie: mais de lui parler c'eft ce que je ne puis faire parce que je craindrois de m'échaper en quelques reproches, & d'en venir enfuite à quelques injures qui ralumeroient le feu Matt. 27.64 de la haine au lieu de l'éteindre, & rendroient la derniere pire que la premiere.

Certes quand celui que la fièvre a quitté boit encore avec quelque forte d'empreffement, c'est figne qu'il y a encore quelque refte d'émotion & de chaleur dans fes veines. Quelques mines que faffent telles fortes de perfonnes qui fortent à regret de l'égypte de la haine, & qui regardent en arriere, il y a encore fans doute quelque aigreur fecrette cachée dans leurs cœurs.

C'est à eux de prendre leur cœur à deux mains, & d'en ôter par un généreux effort cette fecrette averfion, & de dire à Dieu qu'il aide leur infirmité, afin qu'ils puiffent pratiquer cet enfeignement de Matt. 5. 44. l'Evangile, de faire du bien à ceux qui les haïffent Rom. 12. 21. & de furmonter le mal par le bien.

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Nous fcellerons ce que nous venons de dire

par

» une belle fentence de notre Bienheureux. Les Payens aiment ceux qui les aiment, mais les Chré"tiens doivent exciter leur amitié à l'endroit de ceux qui ne les aiment pas, & envers ceux aufquels ils » ont beaucoup de repugnance & d'averfion.

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TREIZIE MÊ

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CHAPITRE PREMIER.

De la préfence de Dieu.

'EXERCICE de la présence de Dieu lui étoit en fi finguliere recommandation, qu'il le confeilloit comme un pain quotidien. Je dis pain quotidien ; car comme en la nourriture du corps on mêle le pain avec toute forte de viandes, auffi n'y a-t-il point d'exercice fpirituel qui fe mêle plus commodément, & plus utilement dans toutes nos actions, que la présence de Dieu.

Ah! difoit-il, c'eft le cher exercice des bienheureux, ou plûtôt le continuel exercice de leur béatitude, felon ces paroles de Notre-Seigneur: Leurs Matt. 18. 10 Anges voyent fans interruption la face de mon Pere qui eft dans le Ciel.

3. Reg. 10.81

Que fi la Reine de Saba eftimoit Bienheureux les ferviteurs & les courtisans de Salomon, qui étoient toujours en fa préfence, & qui écoutoient les paroles de fageffe qui fortoient de fa bouche; combien font plus heureux ceux qui font continuellement attentifs à la fainte préfence de celui que les Anges 1. Pet. 1. 123 defirent de voir, quoiqu'ils le voyent fans ceffe ; défir qui les tient en une perpetuelle faim, de voir toujours de plus en plus celui qu'ils contemplent; car plus ils voyent celui qu'ils défirent, plus ils défirent

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de le voit ; n'étant jamais rassasiés dans leur continuel raffafiement.

Vous fçavez, mes Sœurs, que lorsque vous êtes af femblées, foir pour le travail, foit pour les récréations, ou pour quelques autres exercices, il y en a toujours une de prépofée, pour faire fouvenir de cette aimable & falutaire prefence. Se fouviennent, dit-elle par intervalle, de la fainte préfence de Dieu toutes nos fœurs, & de la très fainte Communion d'aujourd'hui, ajoute-t-elle, fi c'eft un jour de Communion pour toute la communauté; tels que font les jours de Dimanches & de Fêtes, & les Jeudis.

» La plus grande part, disoit notre Bienheureux, » des manquemens, que commettent en leur de»voir les perfonnes pieuses, vient de ce qu'elles ne » se tiennent pas assez en la présence de Dieu.

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CHAPITRE II.

De la crainte & de l'espérance.

OUR marcher fûrement en cette vie, il faut marcher toujours entre la crainte & l'espérance, Pfal. 35. 7. entre la crainte des jugemens de Dieu, qui font des abîmes impénétrables; & entre l'efpérance de fa mifericorde, qui eft fans nombre & fans mesure, & qui furpaffe toutes les œuvres.

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»Il faut, difoit le Bienheureux, craindre les di» vins jugemens, mais fans découragement; & il fe faut encourager à la vûë de fa mifericorde, mais fans préfomption. Et ailleurs: Ceux, dit-il, qui sont une extrême & défordonnée crainte d'être » damnés, témoignent avoir plus de befoin d'humilité & de foumiffion, que de raison. Il fe faut . » bien abaisser & anéantir & perdre fon ame,

mais

il faut que ce foit pour la gagner, garder, & fau-« ver. Toute humilité qui préjudicie à la charité,« eft fans doute une fauffe humilité.

Or, celle qui porte au découragement, au défefpoir, au trouble, eft contraire à la charité qui veut que nous faffions tous nos efforts, quoiqu'avec Philip, 2. Yâ. crainte & tremblement, & que jamais nous n'entrions en défiance de la bonté de Dieu, qui veut que tous foient fauvés, & viennent à pénitence.

I

CHAPITRE

III.

De l'amour propre & de l'amour de

nous-mêmes.

L y a une grande difference entre ces deux amours, puifque tout amour propre étant un amour de nous-mêmes, tout amour de nous-mêmes n'eft point amour propre.

2. Petr. 3.90

L'amour propre eft toujours mauvais; & il n'y a point de péché, grand ou petit, fans amour propre ; c'eft-à-dire, fans un arrêt volontaire en la créature, ou en foi contre la volonté du Créateur. C'est cet amour, dit S. Auguftin, qui a bâti la cité malheu-n Pfal. 6. reuse de Babylone, dont l'enceinte s'étend jusqu'au in Pfalm. 64. mépris, & à la haine de Dieu.

L'amour de nous-mêmes n'eft pas de cette nature; car étant commandé, il ne peut être que bon. Nous fommes donc obligés de nous aimer en Dieu & felon Dieu en nous fouhaitant & procurant, autant que nous pouvons, les biens naturels, & ceux de la grace & ceux de la gloire.

Cet amour de nous-mêmes peut donc être naturel ou furnaturel. Naturel, lorfqu'il regarde les biens naturels: :c'est à raifon de cet amour que l'Apôtre

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