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Entret. 12.

être tellement attentif à Dieu, qu'il doit oublier qu'il prie; d'autant que cette réflexion fur fon action vient de fon attention, & eft finon une espece de distraction, au moins une occafion de diftraction, en lui en ouvrant la porte.

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Je répons par la doctrine de notre Bienheureux : Qu'il faut tenir fon ame ferme dans la priere, fans » permettre qu'elle s'applique à faire des retours "pour voir ce qu'elle fait, ou fi elle eft fatisfaite. Hélas! nos fatisfactions & nos confolations ne fatisfont pas les yeux de Dieu, mais contentent seu»lement ce miférable amour & foin que nous avons » de nous-mêmes, hors de Dieu & de fa confidéra» tion. Les enfans, certes, que Notre-Seigneur nous » marque devoir être le modele de notre perfection, » n'ont ordinairement aucun foin, fur-tout en la pré» fence de leurs peres & meres ; ils fe tiennent atta»chés à eux, fans fe retourner pour regarder ni leurs satisfactions, ni leurs confolations, qu'ils prennent à la bonne foi, & dont ils joüiffent en fimplicité, fans curiofité quelconque, pour en confiderer ni les caufes ni les effets; l'amour les occupant affez, fans qu'ils puiffent faire autre chose. Qui eft bien attentif à plaire amoureusement à l'a"mant célefte, n'a ni le cœur, ni le loifir de retour» ner fur soi-même, son esprit tendant continuelle» ment du côté où l'amour le porte.

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Notre Bienheureux étoit fi amoureux de l'unité, que toute multiplicité lui étoit finon défagréable, au moins toujours fufpecte. Il approuvoit extrêmement ce confeil que l'on attribue à S. Thomas, qui eft, pour bien étudier, de n'avoir qu'un Livre.

A ce propos il loüoit ceux qui pour leur conduite fpirituelle s'attachoient à quelque Livre de dévotion, comme le Combat fpirituel, qui étoit fon cher Li

vre; la Méthode de fervir Dieu, qu'avec fa permiffion je choisis pour le mien; l'Imitation de JesusChrift; la Guide de Grenade ou fon Mémorial, & femblables: non qu'il rejettât les autres, mais il vouloit feulement qu'ils tinffent lieu d'acceffoire & comme de commentaire au Livre principal.

Il en étoit de même des exercices fpirituels. Il defiroit que l'on fît choix de l'un de ces exercices pour s'y adonner plus fréquemment, foit la présence de Dieu qu'il recommandoit fur-tout; foit la pureté d'intention, dont il faifoit grand état ; foit la foumiffion à la volonté de Dieu, qu'il eftimoit beaucoup; foit l'abandon entre les bras de Dieu, & le renoncement à foi-même, qu'il relevoit beaucoup, comme embraffant généralement la perfection chrétienne.

Il vouloit de même que l'on choisît quelque vertu particuliere, comme l'humilité, la douceur, la patience, la mortification, l'oraifon, la miféricorde & femblables, pour s'y appliquer plus fréquemment, difant que prefque tous les Saints ont excellé en quelque vertu particuliere, & même que chaque Inftitut en avoit une fpéciale qui faifoit fon efprit, & que l'on y cultivoit plus particulierement, fans néanmoins négliger les autres.

Sur ce principe il n'auguroit pas bien de ceux qu'il voyoit voltiger d'exercice en exercice, de Livre en Livre, de pratique en pratique, les comparant au bourdon, qui picquotte toutes les fleurs fans en tirer aucun miel; toujours apprenant fans arriver à la vraie fcience des Saints; toujours prenant, amaffant & entaffant fans fe faire riches, parce qu'ils mettent tout cela dans un fac percé, & fè creufent des citernes qui ne peuvent retenir l'eau. Efprits inquiets, qui cherchant la paix dans ces richeffes fpirituelles,

dont ils penfent fe meubler, ne l'y trouvent pas, femblables à ces perfonnes bleffées du mal de la jaloufie,à qui tout fert d'entretien, & rien de remede.

Sur le fujet de cette multiplicité, il me difoit qu'il eftimoit davantage une oraifon jaculatoire, ou afpiration répetée cent fois, que cent oraifons jaculatoires dites chacune une fois ; & alléguoit fur cela l'exemple des Saints, comme de S. François, qui palloit quelquefois les jours & les femaines entieres à répeter celle-ci : Mon Dieu m'est toutes choses. Et S. Bruno: O bonté. Et fainte Thérefe: Tout ce qui n'eft point Dieu n'eft rien. Et il ajoutoit, que plus l'abeille s'arrête fur une fleur, plus elle en tire de

miel.

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Je confirmerai ceci par ce que dit notre BienheuEntret. 9. ̈reux dans un de fes Entretiens. » Ceux, dit-il, qui » étant dans un feftin vont piquotant chaque mets, » & en mangent de tous un peu, fe détraquent fort » l'eftomach, dans lequel il fe fait une fi grande indigeftion, que cela les empêche de dormir toute » là nuit, ne pouvant faire autre chofe que cracher. »Ces ames qui veulent goûter de toutes les méthodes & de tous les moyens qui nous conduisent, ou » peuvent conduire à la perfection, en font de même; car l'eftomach de leur volonté n'ayant pas » affez de chaleur pour digérer & mettre en pratique »tant de moyens, il fe fait une certaine crudité & indigeftion, qui leur ôte la paix & tranquillité d'efprit auprès de Notre-Seigneur, qui eft cet uni» que néceffaire, que Marie a choifi, & qui ne lui »fera point ôté.

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DIX-SEPTIEME

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DIX-SEPTIE'ME PARTIE.

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UIeft infirme, difoit le grand Apôtre, à l'infir- 2. Cor. 11. 1. mité duquel je ne prenne part? Notre Bienheureux avoit beaucoup de cet efprit du S. Apôtre, aimant d'une maniere particuliere les infirmes, tant du corps què de l'efprit.

Il difoit, que dans l'année de probation établie dans les Communautés avant la profeffion, on étoit trop exact à confiderer les infirmités corporelles & fpirituelles; comme fi les Couvens n'étoient pas autant d'hôpitaux pour panfer les malades, tant du corps que de l'efprit.

Il eft vrai que comme il y a certaines maladies corporelles contagieufes, qui obligent de féparer de la compagnie des perfonnes faines, celles qui en font atteintes ; il y en a auffi de fpirituelles, comme l'incompatibilité & l'incorrigibilité, pour lesquelles on peut refufer de recevoir à la profeffion.

Je fuis, difoit notre Bienheureux, grand parti- « L. 4. Epift. •. fan des infirmes, & j'ai toujours peur que les in- « commodités que l'on en reçoit, n'excitent un ef- « prit de prudence dans les maifons, par lequel on « tâche de s'en décharger, fans congé de l'efprit de charité. Je favorife donc le parti de votre infirme, « pourvû qu'elle foit humble, & fe reconnoiffe «

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c. 4.

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obligée à la charité. Ce fera un faint exercice con»tinuel pour la vertu des Sœurs.

CHAPITRE II.

De la Cour.

penfent & en difent bien des per

Qfonnes, notre Bienheureux ne regardoit pas la

Cour comme un lieu contraire à la fainteté. Une ame qui a la grace de Dieu, & qui s'y confer ve pure, peut y faire fon falut, & il n'y a point de converfation fi contagieufe que ce préfervatif céleste ne furmonte.

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Abraham parmi les Idolâtres, Loth dans une Ville exécrable, & Job en la terre de Hus, furent faints au milieu des méchans. » David, & après lui faint Theat. l. 12. » Louis, dit notre Bienheureux, parmi tant de ha»zards, de travaux & d'affaires, s'y font fanctifiés. » S. Bernard, continue-t-il, ne perdoit rien du progrès qu'il defiroit faire au faint Amour, quoiqu'il fût dans les Cours & dans les Armées des grands Princes, où il s'employoit à réduire les » affaires d'Etat au fervice de la gloire de Dieu. Il changeoit de lieu, mais il ne changeoit point de » cœur, ni fon cœur d'amour, ni fon amour d'objet ; & pour parler fon propre langage, ces muta» tions fe faifoient en lui, mais non pas de lui, puifque quoique fes occupations fuffent fort différen » tes, il étoit indifférent à toutes occupations, & "différent de toutes occupations, ne recevant pas » la couleur des affaires & des converfations, com» me le cameleon celle des lieux où il fe trouve; » mais demeurant toujours uni à Dieu, toujours » blanc en pureté, toujours vermeil de charité, & toujours plein d'humilité.

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