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Matt. 13.

2.7. Bp. 60.

lorfque nous l'en prions au fort de nos attaques. Quant au tentateur rien ne le chasse si efficacement que le mépris, d'autant que fon orgueil montant toujours, ne peut fouffrir d'être méprifé; & comme il pourfuit ceux qui le redoutent, il fuit ceux qui d'un généreux courage, non feulement lui tiennent tête, mais qui méprifent fes efforts.

C'eft un grand avantage que nous avons sur lui, en ce qu'il ne nous peut vaincre que par nous-mêmes, & quand par une lâcheté blâmable, nous lui donnons les mains, en prêtant notre confentement à fes illufions.

CHAPITRE XVI.

Efficace de la parole de Dieu.

'OFFICE de la Prédication eft fort bien com

L paré au Semeut dans la Parabole Evangelique,

car il jette fon grain à l'avanture fans fçavoir quelle en fera la recolte.

Un jour notre Bienheureux faifoit à Paris un fernon du Jugement, auquel Dieu donna tant de vertu & d'énergie, que quelques perfonnes de la Religion Proteftante qui étoient venues l'entendre par curiofité, s'en retournerent fi touchées, que de là leur vint le défir de conferer avec lui fur quelques points de créance, dont elles furent fi fatisfaites, qu'une famille entiere & fort notable en fut convertie, & mife dans le fein de l'Eglise Catholique,

Voici comme le Bienheureux rapporte ce fait. » Etant à Paris, & prêchant en la Chapelle de la Rei»ne, du jour du Jugement, (ce n'étoit pas un fer"mon de difpute,) il s'y trouva Madame de Perdreauville

dreauville, qui y étoit venuë par curiofité : elle de- « meura dans les filets, & fur ce fermon, prit réfolu- « tion de s'inftruire, & trois femaines après amena « toute fa famille à confeffe à moi, & fus leur Parain de tous en la Confirmation. Voyez-vous ce « fermon-là qui ne fut point fait contre l'héréfie, « refpiroit néanmoins contre l'héréfie : car Dieu me « donna alors cet efprit en faveur de ces ames. De- « puis j'ai toujours dit que qui prêche avec amour, « prêche affez contre l'hérétique, quoiqu'il ne dise « un feul mot de difpute contre lui «.

Certes, depuis trente-trois ans que Dieu m'a appellé à cette fonction facrée qui rompt le pain de fa parole au peuple, j'ai remarqué que les fermons de morale traités avec piété & zele, font autant de charbons ardens que l'on jette au vifage desProteftans qui y affiftent, qu'ils les prennent en fort bonne part, en demeurent édifiés, & en deviennent plus dociles & traitables quand on vient à éclaircir en conference les points débattus. Ce n'eft pas mon fenItiment feul, mais celui des plus célebres Prédicateurs que j'aie connus, & tout le monde convient que la chaire n'eft point le champ de bataille de la controverfe, & que l'on y démolit plus que l'on n'é-difie, fi on l'y veut traiter autrement qu'en passant.

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CHAPITRE XVII.
De fon portrait.

'Ai connu de grands ferviteurs de Dieu, qui pour aucune raison n'euffent permis à perfonne de tirer leur portrait, s'imaginant que cela ne fe peut fouffrir, fans quelque forte de vanité ou de Complaifance dangereuse,

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2. 7. Ep. 63.

Notre Bienheureux fe faifant tout à tous, n'en faifoit point de difficulté. Sa raifon étoit, que puifque nous fommes obligés par la loi de la charité de communiquer au prochain l'image de notre efprit, lui faifant part franchement & fans jaloufie de ce que nous avons appris touchant la science du falut, nous ne devions pas être plus difficiles à accorder à nos amis la confolation qu'ils defirent, d'avoir devant leurs yeux par le moyen de la peinture l'image de notre homme terreftre.

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Si nous voyons, non-feulement fans chagrin, mais avec plaifir nos livres, qui font les portraits de nos efprits entre les mains du prochain, pourquoi leur envier les traits de notre vifage, fi cela peut contribuer quelque chofe à leur contentement.

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Voici comme il s'explique fur ce fujet à un de fes amis." Au refte, voilà donc l'image de cet hom» me terreftre, tant je fuis hors de tout pouvoir de refuser chofe quelconque à votre defir. On me dit » que jamais je n'ai été bien peint, & je crois qu'il Pfal. 38. 7. importe peu. In imagine pertranfit homo, fed & fruftra conturbatur. Je l'ai empruntée pour vous la don »ner; car je n'en ai point à moi. Hélas! fi celle de >>mon Créateur étoit en fon luftre dans mon efprit, » que vous la verriez de bon cœur. O Jefu, tuo lumine, tuo redemptos fanguine, fana, refove, perfice, tibi conformes effice. Amen.

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Sur quoi vous remarquerez combien il étoit ingénieux à tourner en ufage de vertu, & à rapporter à la gloire de Dieu toutes les occafions qui fe préfentoient à lui: prenant occafion de ce portrait pour faire une fi belle leçon d'humilité & de modestie, & à celui à qui il écrivoit, & à foi-même, après lui avoir témoigné la facilité de fa condefcendance.

Un efprit contraint & timide se feroit fait tenir

à quatre,& eût plûtôt choifi quelque grande mortification que d'avoir permis qu'on tirat fon portrait) & pourquoi ? Pour conferver l'humilité, ou de peur de la bleffer; & voici un Saint qui de cela même tire fujet de s'humilier, & de fi bonne grace, qu'il eft mal-aifé de juger lequel eft le plus loüable en cette action, ou de la générofité dans cette humilité, ou de l'humilité dans cette générosité.

CHAPITRE XVIII.

Ce qu'il répondit à M. de Belley, qui le preffoit de l'appeller fon fils.

A PRES avoir reçû par l'impofition de fes mains facrées le caractere que je porte, je ne pris pas feulement la confiance de l'appeller mon père, mais je crus que j'avois droit de le nommer ainfi. Mais parce que je le voyois toujours avec un respect fi modefte envers moi, fans pouvoir obtenir qu'il m'appellât fon fils; je le preffai un jour fi fort par lettre de me donner ce nom, que pour condescendre à ma priere, fon affection lui fuggera une invention trèsingénieufe & digne d'être remarquée.

Il m'écrivit donc qu'encore que le respect ne fe féparât jamais du vrai amour, il falloit néanmoins prendre garde qu'il ne le fuffoquât, d'autant que le refpect exceffif engendre une crainte qui ne convient pas à l'amour qui doit être franc & ingénu; mais auffi que l'amour fans refpect dégéneroit en une familiarité malféante. Que pour me contenter & fe contenter auffi lui-même, & fans violer la réverence dûë à mon caractere, il me confidéreroit déformais en trois manieres, comme le Pa

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triarche Jacob confidera autrefois fon fils Jofeph.

Car il le confidera felon les trois qualités de pere, de frere & de fils: de pere, à raifon de fa condition de Viceroi d'Egypte, & comme celui qui l'avoit nourri lui & fa famille durant les années de famine qui affligerent les Egyptiens & les pays circonvoifins: de frere, parce qu'il étoit Patriarche comme lui: de fils, parce qu'en effet il l'étoit, Dieu s'étant fervi de lui pour mettre un fi digne enfant au monde. De même, difoit-il, je vous veux regarder comme pere, à raifon des avantages de nature & de grace que Dieu vous a donnés au-deffus de moi :comme frere, puifque Dieu nous a mis en même rang de Paftorat en fon Eglife: & puifque vous le voulez ainfi, comme fils, & fils unique, puifque vous êtes le feul Evêque que j'aie confacré, & à cause de la 2. Tim. 1. 6. grace que Dieu a répandue en votre ame par l'impoition de mes mains; grace que je ne vous conjure de reffufciter en vous, car je fuppofe que vous pas ne l'avez jamais perdue, mais de ne laiffer point vuide, c'est-à-dire inutile, mais de l'employer avantageusement au service de notre grand Maître, felon les talens qu'il a plû à fa bonté de vous communiquer.

C'eft ainfi que fa charité étoit industrieuse à trouver des fecrets obligeans avec tant de fincerité & de cordialité, qu'il fe lioit tous les cœurs avec les liens d'une charité incomparable.

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