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CHAPITRE XXII.

De la pauvreté & de l'obéiffance.

'EST grand cas que ceux & celles qui difent tant pauvreté, fainte vertu de pauvreté, vœu de pauvreté, profeffion de pauvreté, n'appréhendent rien tant que l'effet de cette fainte vertu. C'est une ardeur à amaffer, une appréhenfion de perdre, qui ne fe peut exprimer.

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Pour ne point parler de ceci comme de moi-mê L.6.Epift.15. me, écoutons l'avis de notre Bienheureux: » En la réception des filles, difoit-il, je préfére infiniment les douces & humbles, quoiqu'elles foient pauvres, » aux riches moins humbles & moins douces. Mais, ajoutoit-il, nous avons beau dire : Bienheureux » font les pauvres, la prudence humaine ne laiffera » pas de dire, bienheureux font les Monafteres, les Chapitres, & les maifons riches. Il faut en cela "même cultiver la pauvreté que nous estimons, que » nous fouffririons amoureufement qu'elle foir méprisée.

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Une autre chofe qui n'eft pas moins confidérable, eft que je ne vois point dans le Chriftianifme de perfonnes fi amoureufes des difpenfes, exemptions, privileges, immunités, franchifes, c'est-à-dire, moins adonnées à obéir que ceux & celles qui ne rempliffent les oreilles, que de ces beaux mots, d'obéïffance, de vœu d'obéiffance, de foumiffion, d'obéir à l'aveugle.

Je ne vois point que les féculiers, qu'on appelle avec un accent aigu monde ou mondains, cherchent tant d'exemptions & de privileges pour le fouftraire à l'obéïffance de leurs Pasteurs de droit divin, com

me font les Evêques, & mêmes les Curés. Le droit commun leur fuffit, & l'inftitution de Jefus-Chrift & des Apôtres. Ils ne font point fi délicats de ne vouloir obéir qu'à ceux qu'ils ont choisis; ils fe laiffent mener comme brebis par ceux que Dieu leur envoye fans leur élection.

Mais ne vouloir & ne pouvoir obéir qu'à un Supérieur que l'on a élû, encore pour un certain tems, à condition de lui commander à fon tour, n'eft-ce pas en quelque façon obéir à foi-même, ou du moins à fon propre choix ?

Voyez Philothée part. 3. chap. 11. & 14.

CHAPITRE XXIII.
Du gouvernement des Religieufes.

E ne fut jamais le fentiment de notre Bien

Cheureux que les Religieufes fuffent fous la

conduite des Conventuels fur tout du même

Ordre.

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Voici ce qu'il en écrivit une fois : »Je vois, dit-il, L. 6.Epit. 9. des perfonnes de qualité qui panchent grandement «< & qui jugent qu'il faudra que lesMonafteres foyent " fous l'autorité des Ordinaires, comme ancienne- «< ment, ce qui a été rétabli prefque par toute l'Ita- « lie, ou fous l'autorité des Religieux felon l'ufage «< introduit il y a quatre ou cinq cens ans, obfervé « prefque en toute la France. Pour moi je confeffe franchement que je ne puis me ranger pour le pré-« fent à l'opinion de ceux qui veulent que les Monafteres de filles foient foumis aux Religieux, & fur- « tout du même Ordre, fuivant en cela le defir du S. « Siege, lequel,où il peut bonnement le faire, empê- «< che cette foumiffion. Ce n'eft pas que cela ne se «

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» foit fait & ne se faffe encore louablement en plu» fieurs lieux, mais c'eft qu'il feroit encore plus loua→ble, s'il se faifoit autrement; furquoi il y auroit plufieurs chofes à dire. De plus il me femble qu'il » n'y a non plus d'inconvénient que le Pape exemp» te les filles d'un Inftitut, de la jurifdiction des Religieux du même Inftitut, qu'il y en a eu à exempter les Monafteres de la jurifdiction de l'Ordinaire qui avoit une excellente origine, & une fi longue poffeffion. Et enfin il femble que véritablement le Pape a foumis en effet ces bonnes Religieufes de France au gouvernement de ces Mef» fieurs, & je pense, que ces bonnes filles ne fçavent ce qu'elles veulent, fi elles veulent attirer fur elles » la fuperiorité des Religieux, lefquels à la vérité » font d'excellens ferviteurs de Dieu; mais c'est une » chose toujours dure pour les filles que d'être gou❞ vernées par les Ordres, qui ont coûtume de leur » ôter la fainte liberté d'efprit.

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La modeftie de notre Bienheureux lui fait cacher fous le mot de perte de la fainte liberté d'efprit beaucoup de chofes qui font mieux fous le voile du filence que dévoilées par le difcours.

Surquoi vous remarquerez. 1. Que les Religieux & les Religieufes n'ont point eu d'autres Pafteurs & Superieurs pendant plus de mille ans, que les Ordinaires, & que l'exemption de cette autorité n'eft que depuis quatre ou cinq cens ans.

2. Que les Evêques font de droit commun & primitifs les Peres, les Pafteurs, & les véritables Supérieurs des Conventuels.

3. Que dans l'Italie prefque toutes les Religieufes font fous la conduite & jurifdiction des Evêques, dequoi je fuis témoin oculaire ; & j'ai remarqué qu'à Florence, où il y a plus de cinquante Monaf

reres de filles, il n'y en a pas quatre qui ne foient fous la conduite & jurifdiction de l'Archevêque.

4. Que le S. Siege rétablit autant qu'il peut cette ancienne forme de gouverner les Religieufes.

5. Que s'il y a eu autrefois jufte fujer d'exempter les Religieufes de la conduite & jurifdiction des Ordinaires, il y en a maintenant plus de la leur rendre, & de l'ôter aux Conventuels; & qu'en agiffant de la forte, c'eft rappeller les chofes à leur premiere & plus pure fource.

6. Queles Religieufes qui defirent la conduite des Freres, même de leur Ordre, font de vrayes filles

de Zebedée, qui ne fçavent ce qu'elles demandent. Matt. 20, 226

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De la crainte des Efprits.

A crainte eft une paffion naturelle, qui eft com

me les autres tout-à-fait indifférente; mauvaise quand elle va dans l'excès & le trouble, bonne quand elle eft foumise à la raison.

Il y en a qui font naturellement fi timides qu'ils tranfiroient s'il leur falloit parler en public; d'autres qui craignent éperduement le tonnerre, & jufqu'aux éclairs; d'autres font fujets aux terreurs nocturnes, & redoutent les ombres & la folitude; d'autres appréhendent fi fort l'aparition des efprits, qu'ils n'oferoient dormir feuls dans une chambre. Je fçai à ce fujet par témoin très-véritable, qu'un des plus vaillans & des plus fameux Chefs d'armées de notre tems, qui court aux hazards tête baiffée & fans rien craindre, fi fon valet de chambre après l'avoir couché l'eût laiffé feul dans fa chambre il l'auroit tué, n'étant pas en fa puiffance de demeurer feul la nuit.

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Notre Bienheureux console ainfi une personne L.6. Epit. 51. pieufe qui étoit atteinte de cette infirmité. On me dit que vous craignez les efprits. Le fouverain efprit de notre Dieu eft par tout, fans la volonté ou permiffion duquel nul efprit ne fe meût. Qui a la » crainte de ce divin efprit, ne doit craindre aucun » autre efprit ; vous êtes fous fes aîles, que craignez» vous ? Etant jeune j'ai été touché de cette fantaisie; » & pour m'en défaire je me forçois petit à petit » d'aller feul, le cœur armé de la confiance en Dieu, » dans les endroits où mon imagination me menaçoit de la crainte; & enfin je me fuis tellement af» fermi, que les ténébres & la folitude de la nuit me » font à délices ; à caufe de cette toute aimable pré» fence de Dieu, de laquelle on jouit plus à souhait » en cette folitude. Les bons Anges font autour de » vous comme une compagnie de personnes d'arPfal 90. 5. » mes. La vérité de Dieu, dit le Prophete, vous envi»ronne, & vous couvre de fon bouclier : vous ne devez point craindre les craintes nocturnes. Cette affurance s'acquerrera petit à petit à mesure que la grace de Dieu croîtra en vous:car la grace engendre la con» fiance, & la confiance n'eft pas confonduë.

Galat. 6. 2.

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CHAPITRE XXV.

Du fupport du Prochain.

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Ortez les fardeaux les uns des autres, S. Apôtre, & ainfi vous accomplirez la Loi de Jefus-Chrift. Si les pierres ne fe foutenoient les unes les autres, comment pourroit fubfifter un bâtiment? Nous fommes l'édifice de Dieu, conftruit de pierres vivantes; fi elles ne s'entreportent, cer édifice fera comme un monceau de pierres.

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