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AN. 1302.

Diff. p. 53.
Rain n. 29.

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que

dent fa miffion extraordinaire comme prophete, & la commiffion de prédire les révolutions des états, fans lui donner aucun pouvoir pour l'execution. Et quant à l'autre propofition, que le roi eft soumis au chef de la hierarchie ecclefiaftique; il en convenoit volontiers à l'égard des chofes fpirituelles, mais il eft évident par toute la fuite de la lettre que le pape étendoit plus loin cette foumission, puisqu'il vouloit faire rendre compte au roi du gouvernement de fon état, & être le fouverain juge entre lui & fes sujets. La lettre aux Prélats de France pour les apeller en cour de Rome eft du même jour cinqe de Decembre; & par une autre lettre encore du même jour, le pape difpenfa de ce voïage les docteurs en droit qui propoferoient devant l'ordinaire des excufes legitimes: mais pour les évêques, il vouloit qu'ils lui propofaffent leurs excuses à lui-même.

La bulle Aufculta fili, fut presentée au ror Philippe par Jacques des Normans archidiacre de Narbonne, notaire & nonce du pape; & le roi en aïant oüi le contenu en fut extrêmement surpris & troublé, comme furent auffi les feigneurs qui fe trouverent auprés de lui. Par leur confeil il réfolut d'affembler les autres feigneurs qui étoient abfens avec les abbez & les communautez, tant ecclefiaftiques que feculieres; & cependant le dimanche aprés l'octave de la Purification, lorfque l'on comptoit encore en France 1301. c'est-àdire le onzième de Fevrier 1302. le roi fit brûler la bulle du pape au milieu de tous les nobles & les autres qui fe trouverent à Paris ce jour-là, & fit publier à fon de trompe cette execution par toute la ville.

L'affemblée

L'affemblée ou parlement, comme on la nommoit alors, fe tint à N, Dame de Paris le mardi dixiéme jour d'Avril de la même année 1302. en presence du roi, qui y fit proposer publiquement ce qui fuit par Pierre Flotte & quelques autres. L'archidiacre de Narbonne m'a rendu de la part du pape une une lettre où il dit, que je lui fuis foumis pour le temporel de mon roïaume, & que je dois reconnoître le tenir de lui: quoique jufqu'ici ni mes predecesseurs ni moi n'aïons reconu le tenir que de Dieu feul. Le pape non content de ce difcours fi nouveau & fi inoui en ce roïaume, a voulu en venir à l'execution; & a mandé tous les prélats, les docteurs en Theologie & en droit de mon roïaume, pour venir en sa prefence: afin de corriger les abus & les torts que mes officiers & moi faifons,à ce qu'il prétend,aux prélats & aux feigneurs, aux ecclefiaftiques & aux feculiers. Ainfi le pape veut priver la France de fon plus precieux tresor, qui est la fageffe des prélats & des autres par le confeil defquels elle doit être gouvernée; & par le même moïen, il veut l'épuiser de ses richesses & l'exposer à sa

ruine.

Le pape fait bien d'autres vexations au roïaume & à l'églife Gallicane, par les reserves & les collations arbitraires des évêchés & les provisions des benefices qu'il donne à des étrangers & des inconnus, qui ne refident jamais. D'où il arrive que le service divin eft 'diminué, l'intention des fondateurs fruftrée, les pauvres privés de leurs aumônes ordinaires,& le roïaume apauvri.Les prélats ne trouvent plus de fujets pour fervir les églifes, n'aïant point de benefices à donner aux nobles dont les ancêtres les ont fondés, & aux Tome XIX.

C

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VIII. Affemblée de Paris.

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autres hommes de lettres: ce qui fait aufli qu'on net donne plus aux églifes. Elles font encore chargées de penfions, de fubfides & d'exactions nouvelles de diverfes fortes : on ôte aux métropolitains la liberté de donner des coadjuteurs à leurs fuffragans, & on prive tous les évêques de l'exercice de leur miniftere, afin qu'il faille recourir au faint fiége & y porter des prefens. Tous ces abus font augmentés fous ce pontificat & augmentent tous les jours: je ne puis les tolerer plus long-temps.

C'est pourquoi je vous commande comme votre maître, & vous prie comme votre ami, de me donner vos conseils & votre fecours, pour la confervation de notre ancienne liberté & le rétabliffement du roïaume & de l'églife Gallicane: particulierement à l'égard des entreprifes de mes officiers contre lesdroits de l'églife, s'ils en ont fait. J'avois réfolu d'y remedier avant l'arrivée du nonce du pape, & je l'aurois déja fait, fi je n'avois voulu éviter qu'on l'attribuât à la crainte de fes menaces, ou à la foumiffion à fes ordres. Au refte, je vous déclare,que pour cet interêt general, je fuis prêt d'exposer tous mes biens, ma perfone même & mes enfans s'il étoit befoin; &. je vous demande tout prefentement une réponse précife & décifive fur tous ces articles..

Aprés cette propofition du roi les barons avec les findics des communautés laïques fe retirerent, & aïant deliberé ensemble, ils revinrent au roi, lui donnerent de grandes loüanges,& lui firent de grands remerciemens de fa genereufe réfolution : lui déclarant qu'ils étoient prêts d'expofer leurs biens & leurs » perfones, jufqu'à fouffrir la mort & toutes fortes de

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tourmens, plutôt que d'endurer les entreprises du pape, AN. 1302. quand même le roi voudroit les tolerer ou les diffimuler. Le roi voulut enfuite avoir la réponse des prélats, qui demanderent plus de temps pour déliberer, & s'efforcerent d'excufer le pape & de persuader au roi ̧ & aux principaux feigneurs, que fon intention n'étoit pas de combattre la liberté du roïaume ou la dignité roiale: exhortant le roi à conferver l'union qui avoit toûjours été entre léglife Romaine, fes prédecefseurs & lui-même. Mais on les preffa de répondre sur le champ, & on déclara publiquement, que fi quelqu'un paroiffoit être d'un avis contraire, il feroit tenu pour ennemi du roi & du roïaume. Alors les prélats comprirent que s'ils ne contentoient le roi & les barons, ils attireroient des périls & des fcandales fans nombre; & que l'obéiffance des laïques envers l'églife Romaine & la Gallicane, feroit perduë entierement & fans retour. Dans cet extrême embaras, ils répondirent, qu'ils affifteroient le roi de leurs confeils & des fecours convenables pour la confervation de fa perfone, des fiens & de fa dignité, de la liberté & des droits du roïaume, comme quelques-uns d'entre cux qui tenoient des feigneuries & d'autres fiefs y étoient obligez par leur ferment, & les autres par la fidelité qu'ils devoient au roi. Mais en même-temps ils fupplierent le roi de leur permettre d'aller trouver le pape fuivant fon mandement, à caufe de l'obéïffance qu'ils lui devoient. Ce que le roi & les barons déclarerent qu'ils ne foufriroient en aucune forte.

IX.

Lettres des

C'est ce qui fe paffa dans l'assemblée du dixiéme d'Avril, comme nous l'aprenons de la lettre des pré- prélats & des lats au pape dattée du même jour, où ils ajoûtent: feigneurs.

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Confiderant donc cette émotion fi violente du roi,des barons & des autres laïques du roïaume, & voïant la porte ouverte à une rupture entiere avec l'églife Romaine, & même en general entre le clergé & le peuple: car les laïques fuient abfolument notre compagnie, & nous éloignent de leurs conferences & de leurs confeils, comme fi nous étions coupables de trahison contr'eux : ils méprifent les cenfures ecclefiaftiques de quelque autorité qu'elles viennent, ils fe préparent & se précautionnent pour les rendre inutiles. En cette extremité nous avons recours à votre prudence, & nous vous fupplions la larme à l'œil de conferver l'ancienne union entre l'églife & l'état, & pourvoir à notre fureté, en révoquant le mandement par lequel vous nous avez apellés.

Les feigneurs de France écrivirent auffi, non pas au pape, mais aux cardinaux, & en François : apparemment pour montrer qu'on ne les faifoit pas parler autrement qu'ils ne penfoient. La lettre eft du même jour dixième d'Avril,& porte en fubftance : Vous favez mieux que perfone l'union & l'amitié qui a été de tout temps entre l'églife Romaine & le roïaume de France; & vous n'ignorez pas les travaux & les perils que plufieurs de nous ont effuiés pour le maintien & l'accroiffement de la religion. Et comme nous aurions une douleur infuportable de voir cette ancienne union fe rompre maintenant, ou feulement diminuer par la mauvaise volonté de celui qui occupe le faint fiége: Nous vous avertiffons par cette lettre de fes nouvelles entreprises contre le roi notre maître & tout le roïaume de France, qui nous ont été clairement expofées par ordre du roi, & que nous ne pourions

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