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AN. 1303.

835.

c. 36.

Le lendemain matin il affembla les évêques, le clergé & les principaux d'entre les moines, & leur demanda avec empressement ce qui leur fembloit du moine qui avoit prédit cet accident. Tous convinrent que pour affeoir un jugement certain,il faloit conoître la perfone, afin de difcerner fi c'étoit une revelation, une illufion du demon, ou une conoiffance naturelle: car la plupart des Grecs croïoient à l'aftrologie & aux divinations. Nous favons tous, ajoûtoient-ils, que l'empire eft menacé de grands maux, nous n'avons pas befoin de prophete pour nous l'aprendre: l'important feroit de conoître par quel peché nous les avons merités afin d'y remedier. La journée fe paffa en ces contestations, fans que l'empereur voulût découvrir fon prophete.

Le lendemain dix-neuviéme de Janvier il affembla les citoïens les plus diftinguez & presque tous les moines, & les harangua d'une galerie haute, d'où il leur raconta en détail tout ce qui s'étoit paffé depuis trois jours: témoignant une grande admiration pour 'le prophete & s'éforçant de le leur faire admirer, mais cachant toûjous fon nom. Auffi-tôt qu'il eût fini sa harangue, il descendit & marchant à pied, il se mit en chemin pour aller trouver cet inconu ; & exhorta ceux qui voudroient à le fuivre; mais fans y obliger perfone. Il permit aux vieillards de monter à cheval, d'autant plus que les ruës étoient fales, & il l'ordonna même au patriarche d'Alexandrie. L'empereur fut fuivi d'une multitude inombrable pleine d'empreffement & de curiofité, & il les mena au monaftere de lib. x. e. 1. Cofmidion, où Athanafe s'étoit enfermé neuf ans & Sup. liv. LXXXIX.22.25. trois mois auparavant, favoir le feiziéme d'Octobre

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1293. la porte s'en trouva ouverte & l'empereur s'y étant prefenté avec les évêques & l'élite des moines, Athanafe fortit de fa cellule vêtu d'un manteau, portant un chapeau de paille & appuié fur un bâton. Il s'avança ainfi jufqu'au vestibule, où étoit déja une grande multitude de peuple; & alors tout le monde conut quel étoit ce prophete de l'empereur. Auffi ils fe profternerent devant lui avec empreffement, principalement les évêques, en le nommant patriarche & l'exhortant à reprendre fa dignité, & fe découvrant la tête ils lui demandoient fa benediction.

Athanafe s'en défendoit, s'excusant sur sa vieilleffe & fes infirmités : mais il promit de prier Dieu pour eux, & fans leur donner de benediction en forme, il prefenta fa main qu'ils baiferent. Alors il congedia le peuple en témoignant prendre fort à cœur Les interêts. Je fais, dit-il, l'injuftice qui regne, le mépris des grands pour les petits, l'inclination des puiffans à opprimer les foibles,parce qu'ils n'ont point de protecteur. L'empereur entra dans cette confideration, & jugeant Athanafe plus propre qu'un autre à interceder pour les malheureux, lui ordonna d'ouvrir fa porte & de recevoir ceux qui s'adresseroient à lui. Dés lors il y eût un grand concours tous les jours depuis le matin jufqu'au foir: les uns demandoient la revision des jugemens, les autres des recommandations pour obtenir des graces de l'empereur, qui y avoit toûjours égard. Ainfi Jean Cofme tomboit de plus en plus dans le mépris, & le credit d'Athanafe fe relevoit par l'efperance qu'il donnoit de rétablir les affaires en meilleur état. Alors l'empereur affembla les évêques, le clergé & les moines, non pour déliTome XIX.

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6. 3.

berer fi Athanafe devoit revenir, ce qu'il comptoit pour refolu: mais fur la maniere & le temps de fon retour, fupofé qu'on le lui pût perfuader. Les évêques revenus du premier mouvement qui leur avoit fait traiter Athanafe comme patriarche, fe partagerent en deux avis. Les uns perfiftoient dans la réfolution de le rejeter, alleguant fes renonciations, le repos où il étoit demeuré depuis tant d'années, & l'élection canonique d'un autre patriarche, qui cependant avoit gouverné l'église & fait plusieurs ordinations: d'où ils concluoient qu'il faloit neceffairement condamner l'un des deux, Athanafe ou Jean Cofme. Ils regardoient l'offre de proteger les oprimés comme un artifice d'Athanafe pour rentrer dans le fiége.

Les autres difoient qu'on lui avoit fait injustice, & qu'il étoit en droit d'en demander fatisfaction; & quelques-uns de ceux-là aïant reçu de lui l'ordination, fe reconoiffoient coupables envers lui. Mais ceux qui ne vouloient point le recevoir, objectoient outre fa renonciation, fa dureté inflexible & fa rigueur à punir pour les moindres fautes: foutenant que c'étoit de quoi le dépofer felon les canons. Ce qui forma un tiers parti, de ceux qui vouloient bien recevoir Athanafe, mais à condition qu'il doneroit fûreté de ne plus ufer à l'avenir de rigueurs femblables. L'empereur voïant que ces déliberations ne finiffoient point déclara qu'il vouloit bien s'expofer le premier aux duretés d'Athanafe, & qu'il les prefereroit aux flateries des autres: mais il ne perfuada pas aux prélats de s'accorder à le recevoir. Il prit donc la résolution d'aller trouver Jean Cofme, efperant le faire confentir au retour d'Athanase: d'autant plus que Jean lui

même avoit envoïé prier l'empereur de le venir voir, AN. 1303. & le temps paroiffoit favorable, car c'étoit la femaine de la fexagefime, felon nous, selon les Grecs de la Tyrophagie, qui cette année 1303. commençoit le lundi dix-huitiéme de Fevrier. La Tyrophagie eft la femaine où il eft encore permis de manger des lai

tages.

XXX. Jean Cof

me excom

L'empereur Andronic accompagné de trois évêques, étant arrivé au monaftere où étoit Jean Cofme, lui demanda fa benediction. Jean lui dit: me recon-`munie l'emnoiffez-vous patriarche ? L'empereur foit par par mauvaise pereur. honte ou autrement, avoüa qu'il le reconnoiffoit pour tel. Et moi, reprit Jean, fi Je fuis patriarche, j'excommunie de la part de la fainte Trinité quiconque veut ou voudra établir patriarche le feigneur Athanafe. L'empereur chargé de confufion fe retira fans rien dire, & témoigna fa colere aux évêques qui l'accompagnoient, les foupçonnant d'être complices de l'affront qu'il avoit reçû. Le lendemain il affembla les évêques qu'il avoit coutume de confulter & leur déclara ce qui s'étoit paffé, fe plaignant d'avoir été furpris: mais il fe ralentit de fon empreffement pour Athanafe, & fon application aux affaires ecclesiastiques fut interrompue par la mort de l'imperatrice Theodora fa mere, arrivée la feconde semaine de carême, & par les noces du defpote Jean fon fils, celebrées incontinent aprés pâques, qui cette année fut le septiéme d'Avril.

Andronic delivré de ces foins recommença à assembler les évêques & les confulter fur l'excommunication de Jean. Les uns difoient qu'elle étoit valable, puifqu'on le nommoit encore aux prieres publiques,

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n. S.

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6. 7.

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& que l'empereur lui-même l'avoit reconnu pour pa triarche : les autres déja declarés contre lui, alleguoient fa renonciation & fon ferment, & foutenoient que l'excommunication étoit nulle. L'empereur cependant les follicitoit pour recevoir Athanafe, & envoïoit fouvent vers Jean pour le gagner. Il s'adoucit en effet, & envoïa à l'empereur un écrit par lequel il revoquoit l'excommunication, mais fans confentir au rétablissement d'Athanafe. Dans la foufcription il ne fe nommoit que l'abbé Jean.

L'empereur reçut cet écrit le Vendredi vingt-uniéme de Juin 1303. & ne le montra pas d'abord à tout V. Maur. le monde, mais feulement à quelques évêques : puis David.p.37 il leur ordonna de s'affembler tous les deux jours fui

vans, famedi & dimanche dans l'églife des apôtres, & de faire en forte de convenir enfemble, parce qu'il n'étoit plus tems d'ufer de remises ni de trainer l'affaire en longueur. Ils s'affemblerent, mais ils ne purent s'accorder : ce que l'empereur aïant apris, il monta à cheval en plein midi le dimanche vingt-troifiéme du mois & vint à l'églife des apôtres : où aprés avoir parlé long-tems aux évêques voïant qu'il ne pouvoiť les réunir, il prit ceux qui recevoient Athanafe & marcha au monaftere de Cofmidion où il étoit : on le revêtit pontificalement comme l'on pût, & ils vinrent à l'églife à pied par une chaleur exceffive avec les clercs qui fe rencontrerent & le peuple qui furvint. C'eft ainfi qu'Athanafe fut rétabli dans le fiége de CP. mais la moitié des évêques, quelques-uns des moines les plus eftimés & du clergé, firent une ferme réfolution de demeurer feparés de lui Le patriarche Jean Cofme aïant fait fecretement les préparatifs de

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